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Clause de non-concurrence : 14 septembre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/01356

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Clause de non-concurrence : 14 septembre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/01356

Arrêt n° 23/00403

14 Septembre 2023

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N° RG 21/01356 –

N° Portalis DBVS-V-B7F-FQHG

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Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire

de METZ

28 Avril 2021

19/00693

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Quatorze Septembre deux mille vingt trois

APPELANTE :

Mme [D] [M] [IT]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent LOQUET, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉE :

S.A.R.L. SOUS MON TOIT prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Maud GIORIA, avocat au barreau de METZ, avocat postulant et par Me Judith GUEDJ, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé des faits

Mme [D] [M] [IT] a été embauchée par la société Sous Mon Toit à compter du 13 avril 2015 en qualité de responsable de l’agence de [Localité 5], en exécution d’un contrat de travail à durée indéterminée.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle des entreprises de services à la personne.

Par courrier du 14 février 2019 Mme [M] [IT] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 26 février 2019 avec mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée datée du 15 mars 2019, Mme [M] [IT] a été licenciée pour faute grave.

Par requête enregistrée au greffe du 12 septembre 2019, Mme [M] [IT] a saisi le conseil de prud’hommes de Metz en contestant le bien-fondé de son licenciement afin notamment d’obtenir des montants au titre de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement contradictoire en date du 28 avril 2021, le conseil de prud’hommes de Metz a statué comme suit :

‘Déclare les demandes de Mme [M] [IT] recevables mais mal fondées ;

Déboute Mme [M] [IT] de l’intégralité de ses demandes ;

Déboute la SARL Sous Mon Toit de ses demandes reconventionnelles ;

Met les frais et dépens à la charge de Mme [M] [IT]’.

Par déclaration transmise par voie électronique le 27 mai 2021, Mme [M] [IT] a régulièrement interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 3 mai 2021.

Par ses dernières conclusions datées du 3 février 2022, Mme [M] [IT] demande à la cour de statuer comme suit :

‘Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Metz le 28 avril 2021 (RG n° 19/000693) en ce qu’il a :

déclaré les demandes de Mme [M] [IT] mal fondées ;

débouté Mme [M] [IT] de l’intégralité de ses demandes, et notamment ;

débouté Mme [M] [IT] de sa demande tendant à voir dire et jugé sans cause réelle et sérieuse son licenciement pour faute grave en date du 15 mars 2017 ;

débouté Mme [M] [IT] de ses demandes tendant à voir condamner la société SARL Sous Mon Toit à lui verser les sommes suivantes :

5 139,33 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

513,93 € brut à titre de congés payés sur préavis ;

2 569,66 € à titre d’indemnité de licenciement ;

2 200 € brut de rappel de mise à pied conservatoire ;

220 € brut à titre de congés payés sur mise à pied conservatoire ;

25 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

4 976 € brut à titre de rappels d’heures supplémentaires ;

497,68 € brut à titre de congés payés sur heures supplémentaires ;

30 000 € à titre de contrepartie pécuniaire à la clause de non concurrence ;

3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

mis à la charge de Mme [M] [IT] les frais et dépens de l’instance ;

Statuant à nouveau :

Fixer la moyenne des salaires à la somme de 2 837,74 € brut ;

Condamner la société Sous Mon Toit à payer à Mme [M] [IT] les sommes suivantes :

11 350,96 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

5 675,48 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

567,55 € brut à titre de congés payés sur préavis ;

2 778,61 € à titre d’indemnité de licenciement ;

2 411,35 € brut de rappel de mise à pied conservatoire ;

241,13 € brut à titre de congés payés sur mise à pied conservatoire ;

3 072,44 € brut à titre de rappels d’heures supplémentaires ;

307,24 € brut à titre de congés payés sur heures supplémentaires ;

3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance ;

Y ajoutant :

Condamner la société Sous Mon Toit à payer à Mme [M] [IT] la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamner la société Sous Mon Toit aux entiers dépens ;

En tout état de cause :

Confirmer le jugement du 28 avril 2021 en ce qu’il a débouté la société Sous Mon Toit de ses demandes reconventionnelles ;

Débouter la société Sous Mon Toit de son appel incident et de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.’

Mme [M] [IT] expose à titre préliminaire qu’elle a dû gérer pendant quelques mois une nouvelle agence intégrée dans le groupe ‘ l’agence Fs Services ‘, ce qui a eu pour effet d’épuiser les équipes locales en place. Elle précise qu’elle a demandé à deux reprises la rupture conventionnelle de son contrat de travail au début de l’année 2018 en raison de ses conditions de travail qui l’ont épuisée, et que ces demandes lui ont été refusées par l’employeur.

Mme [M] [IT] conteste la pertinence des griefs retenus pour justifier son licenciement disciplinaire. Elle considère qu’ils concernent des défaillances de Mme [XY], assistante de service ressources humaines.

Mme [M] [IT] explique que la gestion du temps de travail des salariées était un problème bien connu de l’entreprise, à tel point que pendant une période importante les services ressources humaines ont eu pour pratique de faire signer à leurs salariés des avenants « blancs » à leur contrat de travail et ce le jour de la signature de leur contrat de travail initial.

S’agissant du premier grief, elle remarque que la société Sous Mon Toit ne justifie pas que des rappels de salaires ont été versés, et ajoute que l’employeur a payé ses salariés en fonction des heures réalisées et non des heures contractuellement prévues au contrat. Elle rappelle qu’elle transmettait seulement l’ensemble des éléments pour la paie, notamment les tableaux de régularisation de décompte des temps. Elle retient que ce sujet ne relève pas de ses missions et responsabilités.

Sur le grief relatif à la prise de congés de Mme [OI], Mme [M] [IT] note que la société Sous Mon Toit n’apporte aucun élément justifiant que Mme [OI] n’a pas pu prendre tous ses congés avant le 31 mai 2018, et que les justificatifs d’heures planifiées qui sont communiqués par l’employeur ont été édités le 12 octobre 2020, soit plus d’un an après le licenciement.

S’agissant du grief relatif aux salariés non planifiés pour les mois de décembre 2018, janvier et février 2019, Mme [M] [IT] rappelle qu’elle était en charge de trois agences, qu’il lui était matériellement impossible de tout traiter personnellement, et que cette situation a nécessité qu’un collaborateur lui soit dédié pour l’aider. Elle souligne que l’employeur n’a pas justifié des heures de travail effectivement réalisées par les salariés ou les bulletins de paie correspondants, alors que ces salariés sont concernés par la possibilité d’un prêt de main d”uvre entre les sociétés du groupe.

S’agissant du grief relatif à un licenciement promis à Mme [IH], Mme [M] [IT] retient qu’il n’est pas prouvé, et concernant la transmission des arrêts maladies tardive des salariés elle observe que l’assistante d’agence était en charge directe du traitement de ces arrêts maladie.

Concernant l’envoi tardif des soldes de tout compte et des arrêts maladie non traités, Mme [M] [IT] retient que ces tâches devaient être réalisées par ses assistantes, et qu’elle-même ne pouvait en tout état de cause que traiter les arrêts de travail qui lui étaient transmis par les salariés et qui étaient donc en sa possession. Pour ce qui est des soldes de tout compte, Mme [M] [IT] explique qu’elle n’a pu effectivement y faire face, compte tenu de sa charge de travail très importante.

L’appelante ajoute que le temps écoulé entre l’entretien préalable et la notification du licenciement rend illégitime le licenciement pour faute grave.

Concernant ses prétentions au titre des heures supplémentaires, Mme [M] [IT] rappelle que la prescription en matière de rappel de salaire démarre à compter de la rupture du contrat, et non à compter de la saisine du conseil.

Elle rappelle que le contrat de travail a été rompu à la date d’envoi de la lettre de licenciement, à savoir le 15 mars 2019, et retient qu’elle est donc fondée à réclamer des rappels d’heures supplémentaires à compter du 15 mars 2019.

Elle évoque qu’elle était responsable de plusieurs agences géographiquement éloignées, qu’elle avait une charge de travail ainsi que des responsabilités importantes, et que la société Sous Mon Toit n’a jamais fait évoluer sa durée de travail contractuelle en maintenant une durée de 35 heures hebdomadaires.

Elle observe le non-respect de ses obligations par l’employeur, qui reconnaît ne pas avoir tenu de décompte de son temps de travail au motif que Mme [M] [IT] était salariée administrative sédentaire.

Elle fait valoir qu’à l’occasion du dernier avenant, elle a été promue responsable de trois agences, évolution qui démontre qu’elle avait donné entière satisfaction jusqu’alors.

Elle souligne qu’elle n’a jamais reçu la moindre remarque, courrier ou sanction disciplinaire.

En réplique à l’appel incident de la société intimée, Mme [M] [IT] observe que le fait de contester son licenciement, même notifié pour faute grave, ne caractérise pas un abus du droit d’agir en justice, de même que présenter des demandes en lien avec l’exécution du contrat de travail.

Par ses dernières conclusions transmises le 29 mars 2022, la société Sous Mon Toit demande à la cour de statuer comme suit :

‘Confirmer le jugement rendu le 28 avril 2021 en ce qu’il a :

débouté Mme [M] [IT] de sa demande de requalification du licenciement pour faute grave en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

débouté Mme [M] [IT] de l’intégralité de ses demandes ;

mis les frais et dépens à la charge de Mme [M] [IT] ;

Infirmer le jugement rendu le 28 avril 2021 en ce qu’il a débouté la société Sous Mon Toit de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Infirmer le jugement rendu le 28 avril 2021 en ce qu’il a débouté la société Sous Mon Toit de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau,

Condamner Mme [M] [IT] à payer à la société Sous Mon Toit une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [M] [IT] à payer à la société Sous Mon Toit la somme de 3 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant :

Dire et juger que le salaire de références de Mme [M] [IT] est de 2 498,12 € ;

Condamner Mme [M] [IT] à payer à la société Sous Mon Toit la somme de 3 500 € en cause d’appel, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens’.

La société Sous Mon Toit fait état de ce que la lettre de licenciement reproche à Mme [M] [IT] des anomalies et dysfonctionnements sur le plan de la réglementation sociale, notamment :

– l’établissement de plannings des salariés inférieurs à leur temps de travail contractuel, d’où des rappels de salaire à leur verser ;

– le refus d’accorder des congés payés à une salariée ;

– l’établissement de plannings vides pour des dizaines de salaries sans motif ;

– la transmission tardive des arrêts maladie pour traitement au siège ;

– les demandes tardives d’établissement des documents de fin de contrat.

La société explique qu’elle a été destinataire de plusieurs plaintes et mécontentements d’intervenants qui ont réclamé des rappels de salaires sur les trois dernières années. Elle précise que les courriers de réclamations versés aux débats font expressément référence à une demande d’intervention de Mme [XY], car Mme [M] [IT] n’a pas répondu à leur demande.

Elle fait valoir que Mme [M] [IT] était tenue de planifier le temps de travail des salariés conformément aux heures contractuelles garanties, et elle conteste la valeur probante des avenants vierges produits par la salariée. Elle soutient que de nombreux salariés n’ont en décembre 2018, janvier et février 2019, pas reçu de plannings, et qu’ils n’ont été affectés à aucune mission pendant de nombreux mois alors qu’ils avaient un contrat de travail prévoyant la réalisation d’un temps de travail mensuel.

Elle rappelle que l’article 1 du contrat de travail mentionne que Mme [M] [IT] doit assurer personnellement le suivi commercial, social et administratif de l’agence.

Elle évoque un nombre important de plaintes des salariés, notamment Mme [H] qui rapporte l’accumulation des négligences et autres manquements de Mme [M] [IT].

Elle expose que la transmission et la gestion très tardive des arrêts maladie et des sorties des effectifs par la responsable d’agence a causé du tort aux salariés. Elle observe que Mme [M] [IT] reconnaît n’avoir pu faire face aux soldes de tout compte dans ses conclusions, et fait valoir qu’elle bénéficiait de l’aide d’une assistante ainsi que d’une coordonnatrice d’agence à ses côtés.

S’agissant du délai du prononcé du licenciement, la société intimée fait valoir que l’entretien préalable a eu lieu le 26 février 2019, et que le licenciement a été notifié à Mme [M] [IT] le 15 mars 2019, soit dans le délai légal.

Elle considère que la gravité des manquements commis par Mme [M] [IT] rendait impossible son maintien dans l’entreprise, de sorte qu’elle a été contrainte de prononcer une mise à pied conservatoire à son encontre aux termes de son courrier de convocation à l’entretien préalable.

Concernant les heures supplémentaires pour l’année 2015, la société Sous Mon Toit retient que les demandes de rappels de salaires sont pour partie prescrites, et observe que le surplus est injustifié.

Elle conteste le décompte d’heures supplémentaires de la salariée, observe qu’il a été établi informatiquement et en un seul temps par Mme [M] [IT], et ajoute qu’il ne lui a jamais été demandé d’accomplir des heures supplémentaires.

Elle remarque que Mme [M] [IT] n’a pas été transparente quant à sa situation professionnelle car elle avait retrouvé une activité. Elle ajoute que la salariée a saisi le conseil plus de sept mois après la rupture de son contrat de travail.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

La cour observe à titre liminaire que Mme [M] [IT] ne maintient pas en cause d’appel ses prétentions au titre d’une contrepartie financière de la clause de non concurrence, qui ont été rejetées par les premiers juges.

Sur le licenciement pour faute grave

Mme [M] [IT] a été embauchée par la société Sous Mon Toit à compter du 13 avril 2015 en qualité de responsable de [Localité 5], avec un statut agent de maîtrise, et moyennant une durée de travail de 35 heures par semaine et une rémunération mensuelle de 1 800 € brut, en exécution d’un contrat de travail à durée indéterminée en date du 7 mai 2015.

Mme [M] [IT] a été rattachée hiérarchiquement à la Direction Régionale Alsace Lorraine.

Au cours des relations contractuelles d’autres responsabilités d’agences lui ont été confiées, soit :

– la responsabilité du secteur de [Localité 6] à compter du 1er novembre 2016, qui a donné lieu à la signature d’un avenant une année plus tard – le 2 novembre 2017 -, qui a prévu une période probatoire de six mois expirant le 30 avril 2017 au cours de laquelle une prime mensuelle de 200 euros a été consentie à Mme [M] [IT] qui a ensuite été intégrée à la rémunération après l’expiration de cette période, « les autres conditions » du contrat de travail demeurant inchangées ;

– la responsabilité de l’agence Sous Mon Toit de [Localité 7] ‘Ameva [Localité 7]’ à compter du 1er décembre 2018, qui a donné lieu à la signature d’un avenant le 14 décembre 2018 qui a prévu une période probatoire de six mois à compter du 15 décembre 2018 au cours de laquelle une prime mensuelle de 792,42 euros brut a été consentie à Mme [M] [IT], et qui devait être intégrée à la rémunération après l’expiration de cette période, « les autres conditions » du contrat de travail demeurant inchangées hormis la clause de non concurrence étendue au département des Vosges outre celui de la Moselle.

Les parties ont également signé des avenants temporaires pour chaque année civile à compter de 2016, qui ont défini les objectifs commerciaux et la rémunération variable de Mme [M] [IT].

Mme [M] [IT] a été licenciée pour faute grave, par un courrier en date du 15 mars 2019 établi au nom de M. [LT] [SI], directeur des ressources humaines, dans les termes suivants :

«’en votre qualité de responsable de l’agence, nous faisons le constat ces dernières semaines d’un trop grand nombreux dysfonctionnements fautifs, d’une dégradation significative de l’image de la société à l’égard des salariés et des bénéficiaires.

En effet, nous faisons le constat ces dernières semaines d’un trop grand nombre de dysfonctionnements et de situations tout à fait anormales sur le plan du respect de la réglementation sociale notamment.

De façon incontestable, il apparait que nous avons dû effectuer des rappels de salaires pour des salariés en sous-activité, afin de les payer sur leur base contractuelle sur les 3 dernières années (depuis 2016) suite à des plaintes reçues au mois de janvier 2019. Il s’agit notamment de Mme [FH] à qui nous avons régularisé 451,01 euros bruts de salaire, de Mme [X] à qui nous avons régularisé 2 188,18 euros bruts de salaire, de Mme [DO] à qui nous avons régularisé 405.63 euros de salaire, de Mme [ME] à qui nous avons régularisé 2 381,50 euros bruts de salaire, de Mme [RX] à qui nous avons régularisé 1 078,90 euros bruts de salaire et enfin de Mme [IH] à qui nous devons régulariser le salaire du mois de janvier 2019 ainsi qu’une bonne part du salaire de février 2019.

Ces demandes ne sont que les premières d’une longue liste de salariés exaspérées par vos mensonges et l’absence de réactivité et de prise en compte de leurs demandes antérieures.

Il convient également de citer le cas de Mme [OI], qui, n’ayant pu prendre tous ses congés avant le 31 mai 2018 à votre demande, n’avait toujours pas début février 2019, et ce malgré plusieurs relances de sa part auprès de vous, pu se voir régulariser les 5 jours de congés payés qu’elle avait perdu et que vous étiez engagée à lui créditer à nouveau.

S’ajoute à cette liste de situations individuelles rendues complexes et inutilement tendues du fait de vos manquements, la liste des salariés ayant de nombreux planning vide en décembre 2018, janvier 2019 et février 2019. Ainsi au 26 décembre 2018, nous faisions le constat de plannings mensuels vides pour Mesdames [E] [N] [NX], [F] [V], [UM] [Y], [UB] [G], [J] [C], [PE] [S], [AE] [T], [ZR] [W] pour ne citer qu’eux.

Nous faisions le même constat, pour le mois de janvier 2019, pour les salariés suivants : [E] [N] [NX], [F] [V], [UB] [G], [J] [C], [PE] [S], [AE] [T], [VU] [A], [KA] [U], [ZR] [W], [KL] [K], [Z] [EW], [P] [AV] et [XB] [IH].

Comme je vous l’ai d’ailleurs précisé, lors de l’entretien, cette dernière réclame la mise en ‘uvre du licenciement que vous lui aviez « promis » et bien entendu le paiement de son salaire de janvier 2019 sur la base contractuelle. Le nombre considérable de salariés sans activité, ou pour lesquels aucun motif d’absence n’est indiqué dans l’outil de gestion est totalement inacceptable et expose l’entreprise à des demandes multiples de rappel de salaire qui, au regard de votre manque de réactivité et d’anticipation, créé de surplus des tensions préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.

Par ailleurs, comme je vous l’ai fait part, vous transmettez en retard voire pas du tout, les justificatifs d’arrêt maladie au service paie. Ce fut le cas pour Mme [L], dont les arrêts des 3 septembre 2018 et 4 octobre 2018 ont été transmis par saturne le 5 décembre 2018, pour Mme [DO] également dont l’arrêt du 27 décembre 2018 n’a été transmis au service paie que le 22 janvier 2019. C’est également le cas pour M. [R], dont l’arrêt du 8 janvier 2019 a été transmis le 31 janvier 2019, concernant Mme [X] son arrêt du 18 décembre 2018 n’a été transmis que le 23 janvier 2019, c’est le cas aussi pour Mme [RX] dont l’arrêt maladie du 4 décembre 2018 n’a été transmis au service paie, que le 31 décembre 2018.

Sur un autre sujet, pour lequel votre réactivité fait une nouvelle fois défaut, relatif à l’envoi tardif des demandes d’établissement des soldes de tout compte et des documents afférents à la rupture au service paie, je vous ai cité le cas de [FH] qui a quitté l’entreprise le 11 décembre 2018 et dont le solde de tout compte a été demandé le 14 janvier 2019. C’est le cas également pour Mme [O], sortie le 10 janvier 2019 et dont le solde de tout compte a été demandé le 30 janvier 2019, comme pour M. [GO] sorti le 2 janvier 2019 et dont la demande de solde de tout compte a été transmise le 30 janvier 2019. Je vous ai également rappelé le cas de Mme [SU] qui a quitté l’entreprise le 22 décembre 2018 et dont les documents liés à la rupture ont été demandé(s) le 31 janvier 2019. Il s’agissait également du cas de Mme [PP] qui a quitté l’entreprise le 18 décembre 2018 et le solde de tout compte a été transmis le 30 janvier 2019 et enfin, le cas de Mme [DO] démissionnaire en janvier 2019 et dont le solde de tout n’était toujours pas demandé, comme vous me l’avez confirmé, au jour de notre entretien.

Ces situations inacceptables exposent l’entreprise à un risque réel et inutile de demandes de dommages et intérêts pour transmission tardive des documents obligatoires liés à la rupture.

Vous démontrez, par cette multitude de non respects des obligations légales, le peu de cas que vous faites de la situation de vos collaborateurs, de l’absence d’anticipation qui exposent juridiquement et inutilement l’entreprise.

Ces situations sont d’autant plus inexcusables et fautives au regard de votre ancienneté dans la fonction et dans l’entreprise, que vous avez, pour vous accompagner sur ces différents points, l’appui et le conseil d’un service ressources humaines avec lequel vous avez toujours eu contact et qui a toujours su se rendre disponible pour vous aider sur ces sujets. Encore eut-t-il fallu en parler et traiter, comme il se doit, les situations dont vous ne pouviez ignorer l’existence que vous les ayez traitées seule ou avec votre équipe.

Ces situations fautives, notamment sur les exemples de non respects multiples des dispositions de la législation sociale, sont d’une gravité telle, au regard de leurs conséquences sur l’image de l’entreprise et en terme de contentieux sociaux, que cela me conduit à vous notifier votre licenciement pour faute grave’. ».

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

En cas de faute grave, la charge de la preuve repose sur l’employeur, qui doit établir à la fois la réalité et la gravité des manquements du salarié.

La faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, la mise en ‘uvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués.

Il est constant qu’au cours de son embauche qui a débuté le 13 avril 2015 par un emploi de responsable de l’agence de [Localité 5], Mme [M] [IT] a donné pleine satisfaction à son employeur, au point que, comme cela a été évoqué ci-avant, elle a évolué dans ses fonctions au fil des années et que son employeur lui a également confié le poste de responsable du secteur de [Localité 6] à compter du 1er novembre 2016 avec une augmentation de sa rémunération mensuelle à hauteur de 200 euros brut, puis le poste de l’agence de [Localité 7] à partir du 1er décembre 2018 avec l’octroi d’une prime mensuelle de 792,42 euros brut pendant une période probatoire de six mois.

Mme [M] [IT] précise, sans être contredite par l’employeur, que, malgré l’évolution de ses responsabilités, ses conditions d’embauche, – notamment en termes de missions et de niveau hiérarchique – n’ont pas évolué, hormis les deux augmentations de rémunération ponctuelles mentionnées ci-dessus.

Il résulte des données constantes du débat, et notamment des 18 pièces produites par la société Sous Mon Toit, qu’à aucun moment au cours de la relation contractuelle, notamment entre le mois de décembre 2018 ‘ date de la dernière évolution des responsabilités de Mme [M] [IT] – jusqu’à la procédure de licenciement initiée quelques semaines plus tard, alors que la salariée était encore en période probatoire concernant sa promotion au poste de responsable de l’agence de [Localité 7], la salariée n’a été destinataire d’aucune remarque ou observations sur ses compétences et prestations professionnelles.

Au contraire, Mme [M] [IT] fait état de deux démarches de sa part, au début de l’année 2018, auprès de son employeur afin de convenir d’une rupture conventionnelle de son contrat en raison de ses conditions de travail et de son épuisement professionnel, demandes que l’employeur a refusées en confiant même quelques mois plus à la salariée de nouvelles responsabilités au sein de l’agence de [Localité 7].

La cour observe à titre préliminaire que le courrier de licenciement adressé à Mme [M] [IT] n’évoque que des dysfonctionnements liés à l’agence de [Localité 5], et qui pour certains concernent les trois dernières années soit « depuis 2016 ».

Au titre des griefs tenant aux négligences de Mme [M] [IT] dans la gestion des plannings des salariés, la société Sous Mon toit soutient qu’un certain nombre de salariés n’avaient pas été planifiés par la responsable d’agence pour un temps de travail conforme à la durée du travail contractuelle, et que des salariées n’ont pas été planifiées au cours des mois de décembre 2018 ‘ janvier 2019 ‘ février 2019. Elle ajoute dans ses écritures qu’en sa qualité de responsable d’agence, Mme [M] [IT] devait « planifier ces salariés pour un temps de travail conforme à leur durée contractuellement garantie » (sic).

La société Sous Mon Toit produit au soutien de la réalité de ces griefs :

– des courriers de réclamation de quatre salariées (ses pièces n° 5 à 8) établis du 15 janvier 2019 au 22 janvier 2019 et adressés pour trois d’entre eux à ‘Mme [XY]’ sous couvert du directeur général M. [CB] ;

– des plannings mensuels concernant 10 salariés de l’agence de [Localité 5] pour les mois de décembre et janvier 2019 qui ne mentionnent aucune heure de travail (sa pièce n° 9).

Mme [M] [IT] rétorque avec pertinence :

– qu’en l’état des documents produits aux débats, la société Sous Mon Toit ne justifie pas des rappels de salaires dont elle fait pourtant état dans le courrier de licenciement ;

– que la société payait les salariés à temps partiel en fonction des heures de travail réalisées et non du temps de travail contractuel ;

– que les contrats de travail des salariés prévoient la possibilité d’un prêt de main d”uvre entre les sociétés du groupe pour pallier à d’éventuelles baisses des besoins des bénéficiaires.

La cour relève en effet l’exactitude des observations de Mme [M] [IT] concernant l’élaboration des bulletins de paie ‘ aucune mention n’est relative au temps de travail contractuel – et concernant la possibilité d’une ‘mise à disposition’ des salariés qui est mentionnée dans les avenants contractuels concernant Mme [FH] ‘ seuls documents contractuels des salariés désignés par l’employeur communiqués aux débats -, justifiée par l’aléa des heures de travail tenant au fait que « l’activité de services à la personne implique que le travail des salariés est fonction des besoins des bénéficiaires’ »’.et que « le prêt de main d”uvre au sein du groupe est donc essentiel afin de répondre aux besoins des bénéficiaires par nature fragiles qu’on se doit d’assurer ».

La cour note que les seuls avenants contractuels de l’une des salariées cités dans le courrier de licenciement et produits par l’employeur (pièce n° 6 de l’intimée) – qui modifient le partiel de Mme [FH] embauchée le 2 juillet 2018 en qualité d’assistante de vie en portant sa durée de travail à compter du 16 juillet 2018 à 48 heures mensuelles, puis à 62 heures à compter du 1er septembre 2018, puis à 90 heures à compter du 1er octobre 2018 (alors que les bulletins de paie produits mentionnent 59 ‘heures travaillées’ en novembre 2018, puis 44,50 heures travaillées en décembre 2018) – ont été signés au nom de l’employeur par M. [CB], gérant.

Au vu de ces constats, desquels il ressort notamment que le nombre d’heures contractuelles des salariés n’a pas été fixé par la responsable d’agence, la société Sous Mon Toit ne peut valablement soutenir que les plannings établis par cette dernière « auraient dû être conformes aux heures contractuellement garanties », et que Mme [M] [IT] a ainsi gravement manqué à ses obligations contractuelles.

En conséquence la cour retient que ces deux griefs ne sont pas établis.

S’agissant des griefs relatifs aux graves négligences dans la transmission des arrêts maladie et la gestion des documents de fin de contrat, la société Sous Mon toit se rapporte à des captures d’écran (ses pièces n° 10 et 12) qui concernent cinq salariés.

Mme [M] [IT] rétorque que c’est l’assistante d’agence qui était chargée des transmissions des documents administratifs, et explique sans être efficacement contredite par l’employeur qu’une collaboratrice, Mme [B] [I] a été recrutée au mois d’octobre 2018 pour l’assister compte-tenu de sa maîtrise des outils de gestion interne.

Si la société Sous Mon Toit se rapporte, à l’appui de la réalité de ce manquement qu’elle impute à la responsable d’agence, aux missions listées dans le contrat de travail initial de Mme [M] [IT], elle mentionne par ailleurs elle-même que cette dernière était « épaulée par une assistante et une collaboratrice d’agence », puisqu’il est avéré que Mme [M] [IT] a été amenée à répartir son temps de travail sur plusieurs sites géographiques au vu de l’évolution de son emploi.

La pertinence de ces griefs n’est pas donc démontrée, de sorte qu’ils sont également écartés.

S’agissant du grief tenant à la situation d’une salariée (Mme [IH]) à laquelle la promesse d’un licenciement aurait été faite par Mme [M] [IT], l’employeur ne se prévaut d’aucun élément et n’aborde pas ces faits dans ses écritures.

En revanche l’employeur produit un courriel rédigé le 10 février 2019 par une salariée, Mme [H] (sa pièce n° 17), qui énumère des carences de la responsable de l’agence de [Localité 5] dans le suivi de dossiers, mais ces faits ne sont pas mentionnés dans le courrier de licenciement.

En conséquence faute pour la société Sous Mon Toit de justifier de la réalité de griefs imputables à la salariée, le licenciement pour faute grave de Mme [M] [IT] est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré est infirmé en ce sens.

Sur les montants sollicités par Mme [M] [IT] au titre de la rupture

Mme [M] [IT] se prévaut au titre de ses prétentions chiffrées d’un salaire de référence intégrant la période de mise à pied conservatoire qui lui est effectivement due, soit un montant mensuel brut de 2 837,74 euros. La contestation de l’employeur quant à ce montant retenu pour le calcul de l’indemnité de licenciement est donc inopérante.

Il est ainsi alloué à Mme [M] [IT] une somme de 2 778,61 euros au titre de l’indemnité de licenciement.

Conformément aux dispositions de l’article L. 1234-5 du code du travail, en vertu desquelles l’indemnité de préavis est égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait travaillé jusqu’à son expiration ‘ en l’espèce deux mois -, il est alloué à Mme [M] [IT] 1a somme de 5 675,48 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ainsi que la somme de 567,55 euros brut au titre des congés payés afférents.

Il est fait droit à la demande de Mme [M] [IT] à hauteur de 2 411,35 euros brut au titre du rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, outre 241,13 euros brut au titre des congés payés afférents.

Au regard de son ancienneté de 3 ans et 11 mois au moment de la rupture, Mme [M] [IT] peut prétendre à une indemnité comprise entre 3 et 4 mois de rémunération. Elle avait 49 ans au moment de son licenciement, et justifie des difficultés qu’elle a rencontrées pour retrouver une situation professionnelle stable.

Au vu de ces données, la cour évalue la réparation du préjudice de Mme [M] [IT] à hauteur la somme de 11 000 euros à titre de dommages pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de rappel de rémunération au titre des heures supplémentaires

Conformément à l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Le salarié doit présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant au nombre d’heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune de parties : le juge ne peut pas se fonder sur l’insuffisance des preuves apportées par le salarié pour rejeter sa demande, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés et que l’employeur est tenu de lui fournir.

En l’espèce, Mme [M] [IT] soutient qu’elle a effectué un total d’heures supplémentaires impayées de 149,5 heures sur une période courant du 15 mars 2016 à février 2018, et verse aux débats :

– un décompte des heures accomplies du mois de mai 2015 au mois de février 2018, en précisant les jours et les motifs des dépassements (sa pièce n° 14) ;

– les plannings de travail mensuels du mois de novembre 2015 au mois de février 2018 (sa pièce n° 15).

Mme [M] [IT] réclame le paiement des heures supplémentaires à compter du mois de mars 2016, au regard de la date de la rupture de son contrat de travail.

L’employeur réplique qu’une partie des prétentions concernant l’année 2016 est prescrite, la salariée ayant saisi le conseil de prud’hommes au mois de septembre 2016, et qu’il n’a jamais été demandé à Mme [M] [IT] d’accomplir des heures supplémentaires.

L’article L. 3245-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi du 14 juin 2013, dispose que l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

La prescription commence en principe à courir à compter de la date d’exigibilité du salaire, c’est-à-dire, pour les salariés payés au mois, la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise.

En cas de rupture du contrat de travail, la distinction opérée par l’article précité entre le délai pour agir (trois ans) et la période couverte par la demande (salaire des trois années avant la rupture) est susceptible de permettre au salarié qui agit dans la troisième année de la prescription de réclamer un rappel de salaire au titre des trois dernières années de la relation de travail.

Les prétentions chiffrées de Mme [M] [IT], qui tiennent compte de la date de rupture du contrat de travail et par là-même retiennent une période courant à compter du mois de mars 2016, ne sont donc pas prescrites.

En réplique aux éléments produits par Mme [M] [IT], la société Sous Mon Toit soutient qu’il n’y avait pas lieu de mettre en place un décompte individualisé du temps de travail de Mme [M] [IT], et que les dispositions contractuelles ont fixé le temps de travail mensuel de 35 heures hebdomadaires en retenant que « compte tenu de la grande autonomie dont elle dispose, Mme [D] [M] ne pourra être soumise à l’horaire collectif » (article 5 du contrat de travail ‘pièce n° 1 de la partie intimée).

Or, non seulement l’employeur ne justifie pas d’un suivi des horaires de travail effectivement réalisés par la salariée, dont les fonctions ont évolué au cours de l’embauche, mais il a également été avisé par Mme [M] [IT] du dépassement de ses heures de travail au cours de la relation contractuelle.

Mme [M] [IT] a en effet dans un courrier adressé à son employeur le 15 mars 2018 expliqué sa deuxième sollicitation d’une rupture conventionnelle par ses conditions de travail difficiles et son épuisement professionnel en évoquant « les heures supplémentaires effectuées et pour lesquelles il n’y a jamais eu de rémunération, les pauses déjeuner durant lesquelles il nous faut prendre les appels téléphoniques » (sa pièce n° 28).

Au vu de ces données, la cour a la conviction que Mme [M] [IT] a effectué des heures supplémentaires non rémunérées.

A l’appui de ses prétentions, Mme [M] [IT] se prévaut d’un chiffrage qui ne fait l’objet d’aucune contestation de la part de l’employeur.

En conséquence, la société Sous Mon Toit est condamnée à payer à Mme [M] [IT] au titre des heures supplémentaires réalisées à compter du mois de septembre 2016 jusqu’au mois de février 2018 la somme de 3 072,44 euros brut, outre un montant de 307,24 euros brut au titre des congés payés y afférents.

Sur la demande de la société Sous Mon Toit au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile

Mme [M] [IT] étant fondée en son recours, la société intimée ne peut valablement soutenir que l’appelante a exercé ses droits de façon abusive.

Cette demande est également rejetée à hauteur de cour.

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens

Les dispositions de la décision déférée relatives aux dépens sont infirmées.

Il est contraire à l’équité de laisser à la charge de Mme [M] [IT] ses frais irrépétibles exposés en premier ressort et à hauteur d’appel. Il lui est alloué la somme de 2 000 euros au titre de ses frais de première instance, et la somme de 2 000 euros au titre de ses frais d’appel.

La société Sous Mon Toit est condamnée aux dépens de première instance et d’appel, et sa demande au titre de ses frais irrépétibles est rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu le 28 avril 2021 par le conseil de prud’hommes de Metz dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société Sous Mon Toit de ses demandes ;

Statuant à nouveau, et y ajoutant :

Déclare le licenciement pour faute grave de Mme [D] [M] [IT] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Sous Mon Toit à payer à Mme [D] [M] [IT] les sommes suivantes :

– 11 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 5 675,48 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 567,54 euros brut à titre de congés payés sur préavis ;

– 2 778,61 euros à titre d’indemnité de licenciement ;

– 2 411,35 euros brut à titre de rappel de mise à pied conservatoire ;

– 241,13 euros brut à titre de congés payés sur mise à pied conservatoire ;

– 3 072,44 euros brut à titre de rappels d’heures supplémentaires ;

– 307,24 euros brut à titre de congés payés sur heures supplémentaires ;

– 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la première instance ;

– 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

Rejette les prétentions de la société Sous Mon Toit au titre de ses frais irrépétibles exposés à hauteur d’appel ;

Condamne la société Sous Mon Toit aux dépens de première instance et d’appel.

La Greffière La Présidente

 


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