Clause de mobilité du journaliste : les conditions de validité

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Clause de mobilité du journaliste : les conditions de validité
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Pour être valide, la clause de mobilité du contrat de travail du journaliste doit répondre au critère d’un « accord précis » exigé par l’article 20 de la convention collective nationale des journalistes. A défaut de clause contractuelle claire et précise stipulant que le salarié exécutera son travail exclusivement dans un lieu, le changement de lieu de travail intervenu dans le même secteur géographique constitue un simple changement des conditions de travail qui ressort du pouvoir de direction de l’employeur et que le salarié ne peut refuser.

Notion de secteur géographique différent

La mutation d’un salarié non soumis à une obligation conventionnelle de mobilité ou dont le contrat ne prévoit pas de manière précise un lieu de travail déterminé, n’emporte modification du contrat que si le nouveau lieu de travail se situe dans un secteur géographique différent.

Le changement de secteur géographique doit être apprécié objectivement, de manière identique pour tous les salariés sans tenir compte de la situation personnelle de chacun d’entre eux en termes de trajets. Il peut être pris en considération notamment l’accessibilité de chacun des sites de travail et leur desserte par les transports publics.

Changement de secteur géographique

En l’espèce, 44 kilomètres séparaient le nouveau site du salarié de l’ancien et les deux villes, bénéficiaient d’une desserte par voies rapides et par différents transports en commun (trains, cars). Il apparaissait toutefois que la mutation proposée au journaliste constituait un changement de secteur géographique. Dès lors, le déplacement du salarié dans un autre secteur géographique constituait une modification du contrat de travail, et non un simple aménagement de ses conditions de travail, qui ne relevait pas du seul pouvoir de direction de l’employeur et appelait l’accord du salarié, sauf clause de mobilité.

En effet, lorsqu’une clause de mobilité figure au contrat de travail, l’employeur peut user de son pouvoir de direction pour muter le salarié en tout lieu spécifiquement prévu par la clause. Celle-ci doit donc, à peine de nullité, définir précisément son champ géographique et ne pas conférer à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée.

Une clause de mobilité est précise lorsqu’elle indique la zone géographique dans laquelle elle vient s’appliquer. La mise en oeuvre de la clause par l’employeur ne doit pas être abusive, c’est à dire qu’elle doit être i) justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché ; ii) nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ; iii) respectueuse des obligations familiales impérieuses du salarié.

Preuve à la charge du salarié

Concernant la charge de la preuve, la bonne foi contractuelle étant présumée simplement, il appartient au salarié de démontrer que la décision de mutation géographique a été, en réalité, prise pour des raisons étrangères à l’intérêt de l’entreprise ou qu’elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Toutefois lorsque la mise en oeuvre d’une clause de mobilité est susceptible de porter atteinte à la vie personnelle et familiale du salarié, il appartient à l’employeur dans ce cas, de prouver que l’atteinte est justifiée par la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.

Validité de la clause de mobilité géographique

En l’espèce, la clause de mobilité du contrat de travail signé par les parties était ainsi rédigée: « Selon les nécessités du service, le journaliste peut être muté en application des dispositions de la convention collective des journalistes, dans n’importe quel service et/ou établissement, agence, etc, situé(e)sur la zone de diffusion des titres du ‘PROGRES’, pour exercer n’importe quelles fonctions du barème des journalistes correspondant à sa classification ou à la classification à laquelle il est promu ».

L’article 20 a) de la convention collective précitée dispose que « les conditions de mutation dans le territoire national feront l’objet d’un accord précis dans la lettre d’engagement ».

La clause de mobilité précisait suffisamment les fonctions susceptibles d’être confiées au salarié dès lors qu’il ne pouvait s’agir que de « fonctions du barème des journalistes correspondant à sa classification ou à la classification à laquelle il est promu ».

Par ailleurs, la définition du secteur géographique par les termes « la zone de diffusion des titres du « Progrès » se rapporte nécessairement aux cinq départements où le journal est diffusé (Ain, Haute-Loire, Jura, Loire, Rhône), outre la Métropole de Lyon, s’agissant d’un quotidien de presse régionale. Cette zone était connue du salarié lors de la conclusion du contrat de travail et ce dernier n’établissait pas qu’elle avait évolué depuis cette date. Dès lors, la portée géographique de la clause de mobilité était suffisamment précise pour que celle-ci soit valide.

A noter que la juridiction a considéré comme suffisant le délai de prévenance de trois mois qui était de nature à permettre au salarié de se préparer à sa mutation.


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