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République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 1
ARRÊT DU 09/11/2023
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N° de MINUTE :
N° RG 21/06458 – N° Portalis DBVT-V-B7F-UAZB
Jugement (N° 18/000633)
rendu le 03 mai 2019 par le tribunal d’instance d’Arras
APPELANTE
La SA Bnp paribas personal finance
prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [I] [F]
né le 11 février 1974 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Marie Cuisinier, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assisté de Me Grégory Rouland, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
Maître [L] [C] [J]
en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Ec Log
[Adresse 6]
[Localité 5]
défaillant, assigné en reprise d’instance le 3 décembre 2021, à domicile
DÉBATS à l’audience publique du 13 février 2023 tenue par Camille Colonna magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Bruno Poupet, président de chambre
Céline Miller, conseiller
Camille Colonna, conseiller
ARRÊT PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 novembre 2023 après prorogation du délibéré en date du 25 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Bruno Poupet, président et Delphine Verhaeghe, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 janvier 2023
****
Suivant bon de commande n° 9178 du 6 septembre 2017, dans le cadre d’un démarchage à domicile, M. [I] [F] a conclu avec la société Ec Log exerçant sous le nom Air Eco Logis un contrat de fourniture et de pose d’un système aérovoltaïque, mentionnant la prise en charge par la venderesse des démarches administratives de raccordement ERDF et du coût du raccordement à 100 %, moyennant un coût de 31’000 euros, financé par un crédit affecté du même montant et souscrit le même jour auprès de la société BNP Paribas Personal Finance contractant sous l’enseigne Cetelem.
Reprochant à la société Ec Log de ne pas avoir procédé au raccordement de l’installation photovoltaïque, M. [F] a fait assigner les sociétés Ec Log et BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal d’instance d’Arras, lequel a, par jugement du 3 mai 2019, annulé le contrat de vente et de prestations de service, annulé le contrat de crédit affecté, dit que la société BNP Paribas Personal Finance avait commis des fautes dans le cadre des relations contractuelles, condamné la société Ec Log à reprendre l’intégralité des matériels posés à son domicile dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement avec remise en état de la toiture, des combles et des murs du domicile, dit n’y avoir lieu à restitution du capital emprunté à la société BNP Paribas Personal Finance, condamné la société BNP Paribas Personal Finance à restituer à M. [F] les échéances du prêt prélevées sur son compte bancaire, débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l’ensemble de ses demandes, condamné in solidum la société Ec Log et la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de l’instance, et prononcé l’exécution provisoire.
La SA BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel de ce jugement.
La société Ec Log a été placée en liquidation judiciaire par jugement en date du 24 juin 2020.
Suivant assignation en reprise d’instance délivrée le 3 décembre 2021 à Me [C] [J], mandataire judiciaire, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Ec Log, et dernières conclusions remises via le RPVA le 15 mars 2022 et également été signifiées à ce dernier, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour, abstraction faite de demandes de « dire et juger » qui ne sont pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau :
– à titre principal, de débouter M. [F] de l’intégralité de ses demandes formulées à son encontre, de lui ordonner de poursuivre le règlement des échéances du prêt conformément aux stipulations du contrat de crédit affecté accepté le 6 septembre 2017 et ce, jusqu’au plus parfait paiement,
– à titre subsidiaire, de le condamner à lui rembourser le montant du capital prêté, de fixer sa créance à la procédure collective de la Société Eclog à la somme de 31 000 euros à titre chirographaire correspondant à sa créance en garantie de remboursement du capital prêté,
– à titre infiniment subsidiaire, de dire qu’il conservera l’installation de panneaux photovoltaïques livrée et posée, de le condamner à lui rembourser le montant du capital prêté, à défaut, de réduire à de bien plus justes proportions le préjudice subi par M. [F] et de le condamner à lui restituer une fraction du capital prêté, qui ne saurait être inférieure aux deux tiers du capital prêté,
– en tout état de cause, de le condamner à lui payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, de le condamner aux entiers frais et dépens, y compris ceux d’appel dont distraction au profit de Maître Francis Deffrennes, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.
Aux termes de ses dernières conclusions, en date du 6 janvier 2022, M. [F] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, pour le surplus, de déclarer qu’il devra tenir à la disposition de Me [C] [J] ès qualités les matériels vendus, dans le délai de deux mois à compter de la signification de l’arrêt et que, passé ce délai, il pourra démonter les matériels et les porter dans un centre de tri, de condamner la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il est renvoyé aux conclusions de ces parties pour le détail de leur argumentation.
Le liquidateur de la société Ec Log n’a pas constitué avocat.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, il y a lieu de préciser qu’il sera fait application des dispositions du code de la consommation dans leur version issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.
En l’espèce, le bon de commande ne respecte pas les dispositions des articles du code de la consommation prescrites à peine de nullité en ce qu’il ne mentionne pas, ainsi que l’a justement été relevé par le jugement entrepris :
– la possibilité de recourir au médiateur de la consommation,
– la durée ou la date durant laquelle les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus sont disponibles sur le marché,
– les coordonnées de l’assureur responsabilité professionnelle du vendeur,
– le numéro de TVA du vendeur.
Or, il ne peut être considéré que ces motifs de nullité relative aient été couverts par l’exécution volontaire du contrat par M. [F] traduite par l’attestation de fin de travaux portant demande de remise des fonds ou par l’attestation de livraison qu’il a souscrites le 27 octobre 2017, dès lors que, d’une part, les articles L221-5, L111-1, L111-2 et R111-2, L111-4 du code de la consommation relatifs à ces causes de nullité n’apparaissent pas reproduits sur les copies du bon de commande et des conditions générales de vente produites aux débats, d’autre part, la première de ces attestations ne visant expressément que l’exécution des travaux (livraison et pose des panneaux), la seconde comportant la seule mention ‘aérovoltaïque 6 Kwc’ au titre de la ‘description du bien ou de la prestation de services’ et s’agissant pour ces deux attestations d’imprimés type pré-rédigés simplement complétées par le client, ne laissant pas libre son expression sur l’étendue de ce dont il atteste, excessivement vagues concernant la prestation exécutée eu égard à la complexité et au coût de la prestation commandée et dépourvues de toute allusion au raccordement au réseau ERDF, il ne peut s’en déduire que M.'[F] ait attesté la réalisation de l’ensemble de la commande passée, en ce compris l’exécution de la prestation souscrite relative au raccordement au réseau ERDF, soit l’exécution de la totalité de la prestation contractuellement prévue.
Ainsi, c’est à bon droit que le contrat de vente a été déclaré nul, que le premier juge a retenu que cette nullité n’avait pas été couverte par l’exécution volontaire de la prestation par le consommateur et qu’en conséquence, en application des dispositions de l’article L312-55 du code de la consommation, il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté à cette vente.
Par ailleurs, il ressort du mail du 11 juillet 2018 de la société Ec Log et du procès-verbal de constat du huissier de justice dressé le 3 juillet 2020 que le raccordement à ERDF n’a pas été réalisé, de sorte que l’installation ne fonctionne pas au sens où elle ne produit pas d’électricité à revendre à ERDF, alors qu’il s’agissait de l’objectif du contrat expressément stipulé, étant précisé que la déconfiture de la société Ec Log interdit la finalisation de l’exécution du contrat.
Dans ces conditions, le comportement de l’appelante est fautif non seulement pour avoir accepté, suivant contrat de crédit affecté du 6 septembre 2017, le financement d’un contrat manifestement nul au regard des causes de nullités ci-dessus énumérées qu’elle ne pouvait, en tant que banque rompue au contentieux né de l’exécution de ce type de contrat, ignorer, mais aussi pour avoir débloqué les fonds sur la foi d’attestations sommaires et lacunaires, n’ayant pu, au regard de ces seuls documents, aucune facture détaillée n’étant jointe par ailleurs, contrôler la conformité de la prestation réalisée à la prestation commandée, alors même que le raccordement prévu (démarches et coût), prestation déterminante au regard de l’objet de la prestation globale, à savoir, une installation livrée prête à fonctionner au client, n’avait pas été réalisé.
Enfin, le préjudice de M. [F] est caractérisé en ce que depuis l’origine, l’installation n’a pas pu être utilisée et qu’il ne peut se prévaloir d’aucune garantie sur les matériaux installés, alors qu’il rembourse les mensualités du crédit, doit être estimé à la totalité du coût de l’opération contractuelle privée d’objet et ne peut être indemnisé, considérant la déconfiture de la société Ec’Log, que par la privation de la banque fautive de sa créance de restitution.
Le jugement entrepris doit donc être confirmé sur ces points.
En revanche, compte tenu de ce que la société Ec Log est en liquidation judiciaire, il appert que la reprise de l’installation est désormais impossible. Il y a donc lieu d’infirmer la décision dont appel en ce qu’elle l’a condamnée à reprendre l’intégralité des matériels et à remettre en état la toiture, les combles et les murs et de prévoir que M. [F] devra tenir les matériels vendus à la disposition de son liquidateur judiciaire selon les modalités précisées au dispositif.
Enfin, concernant la demande de fixation de sa créance à la procédure collective de la Société Ec Log à la somme de 31 000 euros à titre chirographaire sur le fondement de la garantie de remboursement du capital prêté formulée par l’appelante, elle ne peut qu’en être déboutée, dès lors que la privation de cette créance sanctionne ses propres fautes.
En application des dispositions des article 696 et 700 du code de procédure civile, la société BNP Paribas Personal Finance, partie perdante, est tenue aux dépens et il est équitable qu’elle verse à M.'[F] la somme de 1 500 euros en indemnisation des frais irrépétibles qu’il a exposés, les chefs du jugement entrepris adoptés sur ces dispositions devant être confirmés.
PAR CES MOTIFS
La cour
confirme la décision entreprise, sauf en ses dispositions relatives à la reprise du matériel consécutivement à l’annulation de la vente,
statuant à nouveau sur ce dernier point, ordonne à M. [F] de tenir à la disposition de Me'[C] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS Ec Log, les matériels livrés et installés en exécution du bon de commande n° 9178 du 6 septembre 2017, dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, aux frais de la procédure collective et à charge de remettre les lieux en leur état antérieur au contrat, délai à l’expiration duquel l’acquéreur pourra disposer du bien,
déboute la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande de fixation de créance au passif de la procédure collective de la société Ec Log,
la condamne à payer à M. [I] [F] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
la déboute de sa demande sur le même fondement,
la condamne aux dépens.
Le greffier
Delphine Verhaeghe
Le président
Bruno Poupet