Clause d’Approvisionnement exclusif : 8 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-10.709

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Clause d’Approvisionnement exclusif : 8 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-10.709

SOC.

ZB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juin 2022

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller
doyen faisant fonction de président

Décision n° 10509 F

Pourvoi n° Z 21-10.709

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUIN 2022

1°/ M. [T] [V], domicilié [Adresse 2],

2°/ M. [C] [V], domicilié [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° Z 21-10.709 contre l’arrêt rendu le 26 novembre 2020 par la cour d’appel d’Amiens (5e chambre prud’homale), dans le litige les opposant à la société Textiles manufactures de Picardie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

La société Textiles manufactures de Picardie a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations écrites de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. [V], de Me Bouthors, avocat de la société Textiles manufactures de Picardie, après débats en l’audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé au pourvoi principal et celui annexé au pourvoi incident, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces pourvois.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu’incident ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour MM. [V], demandeurs au pourvoi principal

Messieurs [T] et [C] [V] font grief à l’arrêt attaqué de les AVOIR déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et de leurs demandes d’indemnité de rupture et de dommages et intérêts pour rupture abusive de leur contrat de travail ;

ALORS QUE pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L.1152-1 du code du travail ; que, dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le recours illégitime à un contrat inapproprié ne constitue pas la justification objective d’un comportement de harcèlement moral résultant des contraintes cumulativement imposées par l’employeur au salarié pour l’exécution, de fait dans un lien de subordination, d’un contrat de travail contractuellement qualifié de contrat de gérance ; qu’en retenant, pour débouter Messieurs [T] et [C] [V] de leur demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral, que parmi les comportements établis à l’encontre de l’employeur certains étaient « justifiés par les contraintes inhérentes au statut de gérant de succursale, fût-il inadéquat » tandis que « d’autres sont la traduction du pouvoir de direction de l’employeur », quand il était précisément reproché à la société TMP d’avoir illégitimement imposé aux salariés les contraintes cumulées de ces statuts incompatibles, et d’avoir, par ces conditions de travail délétères, porté atteinte à leur santé, et que le recours à un statut inapproprié ne constituait pas la justification objective de ce comportement la cour d’appel, qui s’est déterminée par un motif erroné en droit, a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail

Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils pour la société Textiles manufactures de Picardie, demanderesse au pourvoi incident

la société TMP fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir requalifié la relation la liant respectivement à M. [T] [V] et à M. [C] [V] en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun et de l’avoir déboutée de sa demande de condamnation formée contre messieurs [V] au titre du remboursement du déficit d’inventaire constaté ;

Aux motifs propres que: «(…) L’article L. 7321-2 du Code du travail dispose :« Est gérant de succursale toute personne : 1° Chargée, par le chef d’entreprise ou avec son accord, de se mettre à la disposition des clients durant le séjour de ceux-ci dans les locaux ou dépendances de l’entreprise, en vue de recevoir d’eux des dépôts de vêtements ou d’autres objets ou de leur rendre des services de toute nature ; 2° Dont la profession consiste essentiellement : a) Soit à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ; b) Soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d’une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ». Conformément à l’article L.7321-2, les gérants de succursale ainsi définis bénéficient des dispositions du code du travail «dans la mesure, de ce qui est prévu au présent titre». La relation de travail salariée se caractérise, quant à elle, par l’état de subordination, l’existence d’une rémunération et d’une prestation de travail. Le lien de subordination est défini par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. La qualification d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs. En l’espèce, il résulte des pièces produites par les consorts [V] qu’ils étaient destinataires de consignes écrites en matière d’opérations d’encaissement lors des opérations commerciales, d’implantation des articles à l’occasion des promotions, d’apposition des affiches ainsi que d’instructions impératives relatives à l’établissement et aux dates d’envoi des commandes et des fiches de vente (qui devaient être adressées chaque semaine), mais également de marches à suivre détaillées concernant l’encaissement des chèques, de consignes strictes relatives aux chèques impayés régulièrement rappelées. Il apparaît également que leur activité était supervisée par les «responsables de secteur »qui pour le compte de la société Textiles Manufactures de Picardie vérifiaient non seulement le respect des prix et des procédures d’approvisionnement mais également, ainsi qu’il ressort de leurs fonctions contractuelles, la bonne application des règles et des procédures, la réalisation des vitrines et étaient chargés d’assurer le suivi des équipes de ventes, la dynamisation du front de vente, de définir et suivre les objectifs, monsieur [N] ancien responsable du secteur des intimés confirmant à cet égard en procédure, sans être utilement contesté, qu’il contrôlait ainsi le magasin géré par messieurs [V] entre 8 et 10 fois par an à la demande des dirigeants de la société Textiles Manufactures de Picardie. Ce contrôle, par sa nature et sa fréquence, ainsi que la teneur des consignes et instructions témoignent de l’absence, pour messieurs [V], d’une quelconque marge de manoeuvre dans la gestion du magasin ci contredisent l’existence d’une autonomie dans l’organisation du travail nonobstant la lettre du contrat de gérance, En outre, messieurs [V] produisent aux débats des écrits émanant de la société Textiles Manufactures de Picardie dont il ressort que cette dernière sanctionnait le non-respect des directives qu’elle donnait. Ainsi à titre d’illustration de ce pouvoir de direction sont notamment versées les consignes relatives à la « promotion sweat 2004 » qui intiment le respect de la procédure d’encaissement «à la lettre» (sic) faute de quoi les avoirs correspondant aux remises ne seront pas établis ou encore une lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 22 avril 2016 adressés à messieurs [V] leur reprochant d’avoir accepté des règlements par chèque de la part d’une cliente qui ont été retournés impayés et leur demandant de prendre des dispositions pour dédommager la société. Il apparaît également que les intimés étaient tenus de maintenir le magasin ouvert conformément aux usages locaux ce qui en l’occurrence imposait d’ouvrir le lundi de 14 heures à 19 heures et du mardi au samedi de 10 heures à 19 heures, et ce en dépit de la maladie des gérants qui devaient, aux termes du contrat, se faire remplacer en cas d’absence de plus de 48 heures. Le contrat stipule aussi que le magasin ne peut être fermé qu’après information préalable de la société Textiles Manufactures de Picardie, la fermeture sans information préalable caractérisant un manquement aux obligations contractuelles justifiant la résiliation du contrat, Dans les faits, il est justifié que messieurs [V] n’ont eu sous leur autorité que des apprentis, personnels qu’ils ne pouvaient se substituer en cas d’absence et dont l’encadrement et la formation supposent une présence physique, Cette contrainte ainsi que la variété des tâches qui leur étaient assignées (vente, suivi de la caisse, rangement, nettoyage, inventaire, établissement des commandes, suivi des stocks,..) leur imposaient donc une présence continue et simultanée a minima durant les horaires d’ouverture du magasin les privant encore de toute marge de manoeuvre dans la répartition et l’organisation de leurs horaires ce que ne démentent pas les circonstances particulières de la rupture dont se prévaut de manière inopérante la société Textiles Manufactures de Picardie. Enfin, si le contrat stipule que les gérants ont toute liberté pour embaucher du personnel, l’avenant du 29 mai 2001 prévoit le remboursement par la société Textiles Manufactures de Picardie de 60 % du coût du salaire et des charges de personnel de vente que les cogérants pourraient engager ainsi que le reversement de 60 % des aides perçues de l’état ou autres organismes de formation suite à l’embauche de personnel ; l’avenant précise que le remboursement de cette quote-part est suspendu pour l’ensemble du personnel si certaines pièces relatives aux apprentis ne sont pas adressées à la société et interdit aux gérants de garder en magasin les apprentis les jours de cours (les cogérants s’engageant à communiquer à la société le calendrier des jours de formation au centre d’apprentissage et le relevé détaillé des absences au CFA); enfin l’avenant indique «toute embauche de personnel, même en cas de remplacement d’un membre partant, sera soumis à l’agrément de la société ; en cas de refus de celle-ci, les cogérants pourront bien entendu embaucher le personnel qu’ils souhaiteront mais sans pouvoir prétendre à une quelconque participation de la part de la société ». Bien que non prohibé par les dispositions applicables aux gérants de succursale, il apparaît en l’état du dossier soumis à la cour que c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu qu’en l’espèce ce mécanisme contractuel do remboursement discrétionnaire par la société d’une quote-part significative du montant du salaire du personnel ainsi que les différentes prérogatives conférées à la société Textiles Manufactures de Picardie par ces stipulations en matière de contrôle de la formation des apprentis instauraient un contrôle de la société Textiles Manufactures de Picardie sur le recrutement et les conditions de travail du personnel étant relevé en outre que les dites stipulations lui permettaient de percevoir les aides de l’état prévues au bénéfice des employeurs. La cour ajoute que ce contrôle était d’autant plus prégnant que dans les faits le montant des revenus que percevaient messieurs [V] leur rendait financièrement impossible l’embauche d’un salarié, même à temps partiel, ou d’un apprenti sans bénéficier du remboursement de la quote-part de 60 % sauf à voir leur propre rémunération ramenée à un montant inférieur au revenu minimum garanti. Il ressort de l’ensemble de ces éléments d’une part que la société Textiles Manufactures de Picardie donnait des instructions outrepassant ce qui est inhérent à la stricte application d’un contrat de gérance de succursale, dont elle contrôlait l’exécution et sanctionnait le non-respect et d’autre part qu’elle contrôlait le recrutement du personnel et la formation des apprentis, La cour considère que se trouve ainsi caractérisé, au-delà d’une situation de dépendance économique, un lien de subordination de sorte que l’existence d’un contrat de travail de droit commun liant la société Textiles Manufactures de Picardie à chacun des deux intimés est établie. (…) Sur la demande reconventionnelle de la société Textiles Manufactures de Picardie: La société sollicite la condamnation solidaire de messieurs [T] et [C] [V] à lui payer la somme de 229,114,50 € à titre de remboursement du déficit d’inventaire arrêté au 18 avril 2018. Elle expose que selon le contrat de gérance, ils sont tenus de rembourser le déficit constaté et qu’il y a lieu le cas échéant d’ordonner la compensation entre cette somme exigible et toute somme au paiement de laquelle elle serait condamnée. La cour rappelle qu’il a été précédemment jugé que le contrat de gérance devait être requalifié, au regard des conditions de fait dans lesquelles s’est exercée l’activité de messieurs [V], en contrat de travail de droit commun, Dès lors la société est mal fondée à se prévaloir d’une clause de responsabilité financière qui est illicite étant retenu que la faute motivant la rupture du contrai de travail n’a pas été qualifiée de lourde par l’employeur. La demande doit donc être rejetée. » (arrêt attaqué p. 7, § 3 au dernier § et p. 8 à 9, § 1 et 2 et p. 16, § 6 à 9).

Et aux motifs adoptés des premiers juges que: «(…) Sur la demande de requalification de la relation contractuelle : « (…) MM [T] et [C] [V] sollicite du conseil de dire et juger que la relation qui les liaient à la SAS Textiles Manufactures de Picardie était un contrat à durée indéterminée de droit commun ; (…) qu’ils font valoir qu’ils ont été recrutés dans le cadre d’un contrat de gérant de succursale ; (…) qu’ils expliquent au Conseil qu’en fin de compte ledit contrat de gérant de succursale était un contrat de droit commun et qu’il y a lieu de le requalifier avec tous les effets qui y sont liés ; (…) que le gérant de succursale est un commerçant indépendant, qui peut, sous les conditions légales définies à l’article L. 7321-2 du code du travail, bénéficier du statut collectif du droit du travail ; (…) que tout commerçant, tel qu’un franchisé, répondant aux conditions de l’article L. 7321-1 du code du travail, peut bénéficier des dispositions du droit du travail, sans que le contrat de franchise n’ait pout autant à être requalifié en contrat de travail, c’est-à-dire sans qu’un lien de subordination ait à être prouvé ; « (…) que selon les dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail : « Est gérant de succursale toute personne : 1° Chargée, par le chef d’entreprise ou avec son accord, de se mettre à la disposition des clients durant le séjour de ceux-ci dans les locaux ou dépendances de l’entreprise, en vue de recevoir d’eux des dépôts de vêtements ou d’autres objets ou de leur rendre des services de toute nature ; 2° Dont la profession consiste essentiellement : a) Soit à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ; b) Soit à recueillir les commandes ou à recevoir des marchandises à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d’une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise » ; (…) que trois conditions culumatives doivent être réunies, en droit ou en fait pour qu’un franchisé soit qualifié de gérant de succursale : – la fourniture exclusive ou quasi-exclusive des marchandises par le franchiseur – la fourniture ou l’agrément du local par le franchiseur (auquel est assimilée l’obligation pour le franchisé d’agencer son local aux normes architecturales du franchiseur) – l’imposition par le franchiseur des conditions de travail et de prix au franchisé (…) qu’en ce qui concerne la fourniture exclusive ou quasi-exclusive des marchandises par le franchiseur, le Conseil constate que tel est le cas ; qu’en ce qui concerne la fourniture ou l’agrément du local par le franchiseur (auquel est assimilée l’obligation pour le franchisé d’agencer son local aux normes architecturales du franchiseur), le conseil constate que tel est le cas ; Que ceci est également le cas en ce qui concerne l’imposition par le franchiseur des conditions de travail et de prix au franchisé ; (…) que de ce fait, les conditions requises par les dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail sont établies et que de ce fait, messieurs [T] et [C] [V] correspondent bien aux dispositions de l’article précité ; (…) que messieurs [T] et [C] [V] font valoir qu’ils n’étaient pas libres de gérer les personnels comme bon leur semblaient et que ceci était sous l’égide et le contrôle de la SAS Textiles Manufactures de Picardie ; (…) que les dispositions de l’article L. 7321-4 stipulent que : « Les gérants de succursales sont responsables à l’égard des salariés placés sous leur autorité, au lieu et place du chef d’entreprise avec lequel ils ont contracté, de l’application des dispositions mentionnées aux 1° à 5° de l’article L. 7321-3 à condition d’avoir toute liberté en matière d’embauche, de licenciement et de fixation des conditions de travail de ces salariés » ; (…) que la liberté en matière d’embauche, de licenciement et de fixation des conditions de travail est du ressort exclusif du gérant de succursale et ne peut donc selon ce principe subir une intervention de quiconque et qui plus est du franchiseur ; (…) que MM. [T] et [C] [V] expliquent que tel n’était pas le cas et plus précisément en matière de recrutement d’apprentis ; que la SAS Textiles Manufactures de Picardie exigeait un droit de contrôle en matière de recrutement, mais également de suivi de la formation en apprentissage ; (…) que le conseil constate que les dispositions de l’avenant du contrat de cogérance du 29 mai 2001 et plus précisément le 4° « Personnel embauché par les co-gérants » en son 3ème alinéa stipulent que : « La société remboursera aux co-gérants 60 % du coût du salaire et des charges du personnel de vente que les co-gérants pourraient engager les co-gérants devront justifier leurs dépenses en communicant à la société une fois par trimestre le carnet des salaires et les organismes sociaux. Les co-gérants s’engagent à communiquer à la société le montant de toutes indemnités qu’ils percevraient de l’Etat ou autres organismes de formations suite à l’embauche de salariés ou apprentis. 60 % de ces indemnités seront reversés à la société » ;
(…)
le conseil constate également que le 3ème alinéa comporte la rédaction suivante « Pour les apprentis, les co-gérants s’engagent à faire parvenir à la société une copie du contrat d’apprentissage, le calendrier des jours de cours au centre d’apprentissage et en fin d’année scolaire, le relevé détaillé des absences aux cours » ; que le 4ème alinéa comporte les clauses suivantes : « Si une de ces pièces ne parvenaient pas à la société, le versement de la quote-part de 60 % serait suspendu pour l’ensemble du personnel et des apprentis » ; qu’il est précisé au 5ème alinéa que : « par ailleurs, les co-gérants s’engagent à faire suivre par leurs apprentis les cours dispensés par le centre d’apprentissage et s’interdisent de les garder au magasin les jours de cours » ; que le 6ème alinéa stipule que : « Toute embauche du personnel, même en cas de remplacement d’un membre partant sera soumis à l’agrément de la société ; en cas de refus de celle-ci, les co-gérants pourront bien entendu (embaucher) le personnel qu’ils souhaiteront mais sans prétendre à une quelconque participation financière de la société » : (…) que le conseil constate que la SAS Textiles Manufactures de Picardie, en insérant ces clauses dans l’avenant du 29 mai 2001, a mis en place des dispositions venant lui accorder un droit de contrôle en ce qui concerne la formation des apprentis, leur suivi au cours et interdisant à MM. [T] et [C] [V] certaines pratiques en la matière ; qu’en s’accordant de telles prérogatives, la SAS Textiles Manufactures de Picardie s’est accordé un droit de contrôle des apprentis ; Que ce droit de contrôle a été assorti d’une obligation de communication de pièces telles que copie du contrat d’apprentissage, le calendrier, le calendrier des jours de cours au centre d’apprentissage et en fin d’année scolaire, le relevé détaillé des absences aux cours ; Qu’en agissant de la sorte, elle est venue s’accorder des droits qui sont ceux des employeurs en matière de gestion des apprentis qui sont de la seule prérogative des employeurs et non du franchiseur ; que la non-communication desdites pièces entraînerait de surcroît une sanction financière ; Que de plus, le Conseil constate qur tout embauche devait être soumis à l’agrément de la société SAS Textiles Manufactures de Picardie ; Que ceci vient confirmer l’ingérence en matière de recrutement de la SAS Textiles Manufactures de Picardie ; Qu’en fixant une demande d’agrément et en fixant une non-participation de la SAS Textiles Manufactures de Picardie en cas de refus de cette dernière, elle s’accordait un droit de véto en matière de recrutement ; Que ceci est contraire aux dispositions de l’article L. 7321-4 du code du travail. Qu’agissant ainsi et en privant MM [T] et [C] [V] de toute latitude et prérogative en matière de gestion des apprentis, mais plus encore en matière de recrutement, la SAS Textiles Manufactures de Picardie les a privés de toute liberté en matière d’embauche, de licenciement et de fixation des conditions de travail de ces salariés ; (…) que l’autonomie du gérant de succursale quant au management et aux conditions de travail est impérative ; Qu’en vertu des articles du code de travail précités, le gérant dispose de toute latitude en matière d’embauche, de licenciement ou de fixation des conditions de travail à l’égard des salariés de la succursale ; Que c’est lui et lui seul qui doit assumer les obligations de l’employeur vis-à-vis de ces salariés ; Que de ce fait, le gérant non salarié doit disposer de toute latitude pour embaucher du personnel ou se substituer à des remplacements à ses frais et sous son entière responsabilité ; Que ce critère est déterminant de la qualification de gérant non salarié (Cass. soc. 29 oct. 1980 : Bull. civ. 1980 V, n° 789 – Cass. soc 3 mars 1993 : juris-data n° 1993-00247 – Cass. soc. 19 février 1997: jurisdata n° 1997-000809-Cass. soc. 2 février 2001, pourvoi n° 99-11653) ; Que tel n’est pas le cas en l’espèce ; (…) que l’article L. 7321-5 du code de travail stipule : « Est nulle toute convention contraire aux dispositions du présent chapitre » ; (…) que de ce fait, le Conseil dit et juge qu’en privant Messieurs [T] et [C] [V] des dispositions prévues à l’article 7321-4 du code du travail, elle a enlevé un élément essentiel prévu par les textes en matière de statut des gérants de succursale ; Que ceci entraîne, en vertu de l’article L. 7321-5 du code du travail, la nullité de la convention et de facto la requalification de la relation qui liait Messieurs [T] et [C] [V] vis-à-vis de la SAS Textiles Manufactures de Picardie Distribution en un contrat à durée indéterminée à temps complet » (jugement p. 4, § 8 à p. 7, § 9).
1) Alors d’une part, que le statut de gérant de succursale s’applique dès lors que les conditions tenant à l’existence d’un approvisionnement exclusif ou quasi-exclusif, à la fourniture ou à l’agrément du local et à la fixation des conditions d’exploitation et des prix sont remplies ; la caractérisation de l’état de subordination du gérant à l’égard du fournisseur étant indifférente ; que la liberté dont dispose le gérant pour embaucher son personnel et le licencier sous sa responsabilité, n’est pas susceptible d’être remise en cause par un dispositif supplémentaire de prise en charge partielle du coût salarial de son personnel par le fournisseur ; qu’en requalifiant le contrat de co-gérance en contrat de travail de droit commun au motif que l’existence de cet avantage financier additionnel dont elle a reconnu la conformité au statut de gérant de succursale, instaurait un contrôle de la société TMP sur le recrutement du personnel des co-gérants de succursale, au-delà d’une situation de dépendance économique, quand leur contrat prévoyait expressément qu’en cas de refus d’agrément, « les co-gérants pourront bien entendu embaucher le personnel le personnel qu’ils souhaiteront… », la cour d’appel a violé les articles L. 7322-2 et 1221-1 du code du travail ;

2) Alors d’autre part, que la cassation entraîne, sans qu’il y ait lieu à une nouvelle décision, l’annulation par voie de conséquence de toute décision qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire; que si seule une faute lourde permet à l’employeur d’engager la responsabilité pécuniaire du salarié, le gérant de succursale peut être tenu contractuellement responsable de l’existence d’un déficit d’inventaire ; qu’après avoir elle-même retenu que le « refus, voire l’obstruction de messieurs [V] à l’accomplissement de l’inventaire caractéris(ait) une faute grave justifiant leur éviction immédiate de l’entreprise (arrêt attaqué p. 14, avant-dernier §), la cour d’appel a débouté la société TMP de sa demande de remboursement au titre du déficit constaté, auquel les co-gérants étaient contractuellement tenus, en considérant qu’en l’état de la requalification du contrat de gérance en contrat de travail de droit commun, la société TMP ne pouvait se prévaloir d’une clause de responsabilité financière en l’absence de faute lourde imputée aux prétendus salariés (arrêt attaqué p. 16, § antépénultième) ; que dès lors la cassation à venir de l’arrêt en ce qu’il a requalifié le contrat de co-gérance en contrat de travail de droit commun entraînera celle de l’arrêt en ce qu’il a débouté la société TMP de sa demande de remboursement du déficit d’inventaire, en application de l’article 625 du code de procédure civile

 


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