Clause compromissoire : 6 novembre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-10.395

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Clause compromissoire : 6 novembre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-10.395

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2019

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 918 F-D

Pourvoi n° W 18-10.395

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Trans World Finances, société anonyme, dont le siège est […] ,

2°/ la société STB H2O industrie, société en nom collectif, dont le siège est […] ,

3°/ la société SM2G, société en nom collectif, dont le siège est […],

4°/ la société Polowanie, dont le siège est […],

5°/ M. E… I…, domicilié […],

6°/ M. L… I…, domicilié […] ,

contre l’arrêt rendu le 17 octobre 2017 par la cour d’appel de Paris (pôle 1, chambre 1), dans le litige les opposant à la société Nov Brandt Europe France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 1er octobre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Berthomier, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat des sociétés Trans World Finances, STB H2O Industrie, SM2G, Polowanie et de MM. I…, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Nov Brandt Europe France, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 17 octobre 2017), que, par un contrat du 11 mars 2008 dénommé « Master share and business transfer agreement » (le contrat), la société Nov Brandt Europe France (Nov) a acquis deux fonds de commerce de sociétés française et gabonaise, ainsi que les parts sociales de la société tunisienne STB H20 Tunisie, laquelle exploitait en Tunisie un centre de traitement de déchets ; qu’aux termes de ce contrat, qui stipulait le recours, en cas de différend, à un arbitrage sous l’égide du Centre d’arbitrage et de médiation de Paris (CAMP), les sociétés françaises Trans World Finances (TWF), STB H20 Industrie et, SM2G, la société luxembourgeoise Polowanie ainsi que MM. L… et E… I… (les garants) se sont engagés à indemniser Nov en cas de violation des garanties prévues à l’annexe 1 du contrat, sous réserve de plusieurs restrictions ; qu’en 2010, Nov a notifié aux garants quatre réclamations relatives à des violations des garanties contractuelles ; que, le 12 août 2010, les parties ont signé un protocole transactionnel aux termes duquel les garants s’engageaient à retirer à leurs frais un certain volume de boues en contrepartie de quoi il était mis un terme définitif à tous les litiges existants, ledit protocole contenant une clause attributive de juridiction au tribunal de commerce de Paris ; qu’après avoir, en 2012 et 2014, notifié de nouvelles réclamations, Nov a mis en oeuvre la clause compromissoire ; que, par une sentence partielle rendue le 1er juin 2015, le tribunal arbitral s’est déclaré compétent ; que les garants ont formé un recours en annulation ;

Attendu que les garants font grief à l’arrêt de rejeter leur recours, alors, selon le moyen :

1°/ que l’obligation pour l’arbitre de statuer prioritairement sur sa propre compétence ne fait pas échec à la liberté des parties de convenir, par une convention postérieure à celle comportant la clause compromissoire, d’une clause attributive de juridiction par laquelle elles décident d’exclure du champ de la clause compromissoire certaines contestations, fussent-elles nécessaires à la détermination de la compétence de l’arbitre ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a admis qu’il était nécessaire d’interpréter le protocole transactionnel du 12 août 2010 et d’apprécier la portée de la clause attributive de juridiction qu’il comportait, afin d’en déduire l’étendue du champ d’application de la clause compromissoire stipulée dans le « master share and business transfer agreement » du 11 mars 2008 ; qu’en déclarant la juridiction arbitrale compétente pour interpréter le protocole transactionnel, sans rechercher, comme elle y était invitée, s’il ne résultait pas de cet acte que les parties avaient, par une manifestation de volonté contraire à la clause compromissoire précitée, entendu soumettre à la compétence des juridictions étatiques, non seulement les litiges nés du protocole mais encore ceux en relation avec ce dernier, telle qu’une contestation sur son interprétation, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1520, 1° du code de procédure civile, de l’article 1134 devenu 1103 du code civil, et du principe compétence-compétence ;

2°/ que les parties ayant stipulé une clause compromissoire peuvent, par une nouvelle expression de volontés, remettre en cause ou limiter le champ d’application de cette clause ; qu’en s’abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, s’il ne résultait pas du protocole transactionnel que les parties avaient, par une manifestation de volonté contraire à la clause compromissoire, entendu soumettre à la compétence des juridictions étatiques, non seulement les litiges nés du protocole mais encore ceux en relation avec ce dernier, telle que les demandes litigieuses dont l’objet, concernant des déchets de forage et des amendes, était en relation avec les litiges réglés par le protocole transactionnel, et qui impliquaient d’interpréter celui-ci, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1520, 1° du code de procédure civile et de l’article 1134 devenu 1103 du code civil ;

3°/ que, subsidiairement, en retenant que le protocole transactionnel concernait clairement, sans nécessité d’interprétation, les déchets de forage traités, sans rechercher, comme elle y était invitée, s’il ne résultait pas de la confrontation entre les paragraphes introductifs du protocole transactionnel du 12 août 2010 évoquant des déchets traités (« processed cuttings »), et l’article 2 de ce protocole évoquant des déchets en général (« cuttings ») sans spécification et donc sans limitation à une catégorie particulière, une contradiction ou, à tout le moins, une ambiguïté, nécessitant une interprétation, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 devenu 1103 du code civil ;

4°/ que, subsidiairement, il résulte de la confrontation entre les paragraphes introductifs du protocole transactionnel du 12 août 2010 évoquant des déchets transformés (« processed cuttings »), et l’article 2 de ce protocole évoquant des déchets en général (« cuttings ») sans spécification et donc sans limitation à une catégorie particulière, une contradiction ou, à tout le moins, une ambiguïté sur l’objet exact du litige objet de la transaction ; qu’en retenant que le protocole transactionnel était, sur ce point, clair et ne nécessitait aucune interprétation, la cour d’appel a violé l’article 1134 devenu 1103 du code civil ;

Mais attendu que l’arrêt relève, d’abord que, selon les termes du protocole, les parties ont reconnu qu’en contrepartie des concessions et engagements réciproques souscrits, tous les comptes, réclamations, litiges et responsabilités existants, quels qu’ils soient, en relation avec le contrat, étaient soldés définitivement et de façon irrévocable ; qu’il retient, ensuite, que, par sa référence aux seuls différends existants, cet accord réservait nécessairement tous les litiges découlant du contrat initial qui porteraient sur des objets distincts de ceux visés par les réclamations de 2010 ; qu’il constate, enfin, que celles-ci portaient sur des déblais de forage transformés et des pénalités non déclarées lors de la cession ou émises postérieurement pour des faits antérieurs, alors que les nouvelles réclamations concernaient des déchets de forage non traités et des amendes prétendument déclarées par les cédants mais mensongèrement présentées comme relatives à une pollution par des eaux usées domestiques et non par des hydrocarbures ; que, par ces énonciations et constatations, la cour d’appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a fait ressortir que la clause d’arbitrage stipulée par les parties dans le contrat et la clause d’élection de for, qui avaient des objets différents, n’étaient pas inconciliables, et que l’insertion de la seconde dans le protocole transactionnel n’emportait pas renonciation des parties à la première ; qu’elle en a exactement déduit que le tribunal arbitral était compétent pour connaître de demandes qui, ne relevant pas du périmètre de la transaction, entraient dans le champ de la convention d’arbitrage ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur la troisième branche du moyen, ci-après annexé :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

 


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