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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 4
ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2022
(n° 154 , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/14161 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEE5H
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Mai 2021 – Président du TC de PARIS – RG n° 2016064315
APPELANTES
Société MERCH & PARTNERS WLL agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
immatriculée au QATAR sous le numéro 13610
[Adresse 5]
[Localité 6], QATAR
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque L0050, avocat postulant
Assistée de Me Sébastien PROUST, du Cabinet HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS, toque J025
Société MERCH TRADING CO W.L.L agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 6], QATAR
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque L0050, avocat postulant
Assistée de Me Sébastien PROUST, du Cabinet HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocat au barreau de PARIS, toque J025
INTIMEES
SOCIETE PARFUMS CHRISTIAN DIOR agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 552 065 187
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque L0034, avocat postulant
Assistée de Me Alban CURRAL de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque P298, avocat plaidant
SOCIETE PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT FZCO agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3],
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1] EMIRATS ARABES UNIS
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque L0034, avocat postulant
Assistée de Me Alban CURRAL de la SELARL CARBONNIER LAMAZE RASLE, avocat au barreau de PARIS, toque P 298, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 01 Juin 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre
Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère
Madame Camille LIGNIERES, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Camille LIGNIERES dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile
Greffière, lors des débats : Madame Mianta ANDRIANASOLONIARY
ARRÊT :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Sophie DEPELLEY, Conseillère pour la Présidente empêchée, et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
*******
La société Merch & Partners est une société de droit qatari, dont le siège social est sis [Adresse 5].
La société Merch Trading Co W.L.L (ci après dénommée «’Merch Trading’») est une société de droit qatari, dont le siège social est à [Adresse 5].
La société Parfums Christian Dior (ci après dénommée «’PCD») est une société de droit français, dont le siège social est sis [Adresse 2], qui crée et fabrique les produits de parfumerie de la marque DIOR.
La société Parfums Christian Dior Orient (ci-après dénommée «PCDO») est une société de droit des Émirats Arabes Unis dont le siège social est sis [Adresse 3], E.A.U. Elle est spécialisée dans la distribution de produits de luxe au Moyen-Orient.
Le 23 octobre 1982, la société Merch Trading Establishment (nouvellement dénommée depuis 1994 «’Merch Trading Co W.L.L’») a signé avec la société PCD un contrat de distribution exclusive pour la commercialisation au Qatar des produits de la marque DIOR.
En date du 20 octobre 1994, la société Merch Trading a signé un nouveau contrat de distribution exclusive avec la société PCD, avec un avenant signé le 10 septembre 2003par la même société MT Company et la société PCD.
Par acte du 28 décembre 2005 à effet du 1er janvier 2006, la société PCD a cédé ce contrat de distribution exclusive à la société Parfums Christian Dior Orient (PCDO). Cette cession a fait l’objet d’une notification au cocontractant par courrier RAR en date du 15 décembre 2005.
Par courrier RAR en date du 10 juin 2015, la société PCDO a adressé à la société Merch & Partners une lettre annonçant la fin du contrat à effet du 31 décembre 2015. Le directeur de la société PCDO a, par la suite, consenti à reporter la fin effective des relations contractuelles au 30 juin 2016.
Les sociétés Merch & Partners et Merch Trading ont saisi le tribunal de commerce de Paris en date du 9 août 2016, aux fins d’obtenir réparation du préjudice allégué, en invoquant des conditions abusives et déséquilibrées imposées par Dior dans l’exécution du contrat, une rupture brutale de la relation commerciale établie au vu de l’insuffisance du préavis, une rupture abusive sans faute du contrat au vu de la loi qatarienne, et une violation de certaines clauses du contrat.
Devant le tribunal de commerce, les sociétés PCD et PCDO ont soulevé in limine litis une exception d’incompétence des juridictions françaises et invoqué l’irrecevabilité des demandes de la société Merch & Partners pour défaut d’intérêt à agir. Elles ont demandé également la mise hors de cause de la société PCD.
Par jugement rendu le 31 mai 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
Dit recevable et bien fondée l’exception d’incompétence territoriale soulevée par les sociétés Parfums Christian Dior et Parfums Christian Dior Orient à l’encontre de la société Merch & Partners WLL,
Se déclare incompétent pour traiter des demandes de la société Merch & Partners WLL, laquelle est en tout état de cause irrecevable en son action, et renvoie cette dernière à mieux se pourvoir,
Dit que le greffe procédera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties,
Dit qu’en application de l’article 84 du code de procédure civile, la voie de l’appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification,
Dit que la société Merch Trading Co Wll, partie au contrat de distribution conclu avec Parfums Christian Dior le 20 octobre 1994, est partie à la procédure en lieu et place de la société Merch Trading Est qui n’a plus qualité et intérêt pour agir,
Dit que la société Merch Trading Co Wll est recevable en son action,
Prononcé la mise hors de cause la société Parfums Christian Dior dans le cadre de l’instance,
Débouté la société Parfums Christian Dior de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de la somme de 100 000 euros,
Ordonné à la société Merch Trading Co Wll d’avoir à produire aux débats, les documents suivants :
-‘Les états financiers de Merch Trading Co Wll de 2011 à 2016, certifiés par un cabinet d`audit de renom international,
-Les contrats passés avec l’ensemble des magasins de vente au détail au Qatar distribuant des produits revêtus de la marque Christian Dior, dont les contrats passés avec l’ensemble des magasins qualifiés de ” franchisés ” ou de ” partenaires ” pratiquant le dépôt-vente,
-Les pièces commerciales et comptables, incluant l’ensemble des factures et des justificatifs des commissions et autres sommes réglées de 2011 à 2016 aux magasins dits “partenaires” ou ” franchisés “,
-Les chiffres d’affaires correspondant aux ventes de produits Dior réalisées au détail de 2011 à 2016, certifiés conformes par un cabinet d’audit de renom international,
-Les comptes d’exploitation des boutiques exploitées en propre par la société Merch Trading Co Wll, certifiés conformes aux écritures comptables par un cabinet d’audit de renom international,
-et déboute pour le surplus de la demande de documents,
Réservé toutes les autres demandes des parties et les dépens.
Renvoyé les parties pour conclure au fond à la première audience utile de la 13ème chambre du tribunal de commerce de Paris, soit le 02/07/2021, à 12h.
Par déclaration reçue au greffe en date du 11 août 2021, la société Merch & Partners a interjeté appel de ce jugement devant la Cour d’appel de Paris,
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 28 mars 2022, les sociétés Merch & Partners et Merch Trading Co W.L.L (‘MT Compagny) demandent à la cour de :
Vu les articles 83 et 84 et 917 du Code de procédure civile,
PRONONCER la nullité du jugement du 31 mai 2021 en ce qu’il :
-s’est déclaré incompétent pour traiter des demandes de la société MERCH & PARNERS WLL;
-a déclaré irrecevable la société MERCH & PARTNERS WLL en son action, et l’a invité à mieux se pourvoir;
-a mis hors de cause la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ;
À défaut de prononcer la nullité, INFIRMER le jugement du 31 mai 2021 en ce qu’il :
-a dit recevable et bien fondée l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT à l’encontre de la société MERCH & PARTNERS WLL;
-s’est déclaré incompétent pour traiter des demandes de la société MERCH & PARNERS WLL;
-a déclaré irrecevable la société MERCH & PARTNERS WLL en son action, et l’a invité à mieux se pourvoir ;
Statuant à nouveau;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS WLL a été en relation contractuelle avec la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR (jusqu’en 2005) puis avec la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS WLL a été un partenaire commercial de la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR (jusqu’en 2005) puis de la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT;
-DÉCLARER le Tribunal compétent pour connaître des demandes de la société MERCH & PARTNERS WLL à l’encontre des sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ;
-JUGER que les demandes de la société MERCH & PARTNERS WLL fondées sur le contrat de distribution de 1982, amendé en 1994 puis en 2003, sont recevables ;
-JUGER que les demandes de la société MERCH & PARTNERS WLL fondées sur l’article L442-6, sous I du Code de commerce (dans sa version applicable entre 2013 et 2016), sont recevables ;
-DIRE que l’instance continue tant à l’encontre de la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT que de la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ;
Sur l’appel incident
-DÉBOUTER les sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT de toutes leurs demandes ;
En tout état de cause
-CONDAMNER solidairement les sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT aux dépens,
-Les condamner à payer à la société MERCH & PARTNERS WLL la somme de 40000 € au titre de l’article 700 du CPC.
‘
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 25 avril 2022, les sociétés Parfums Christian Dior (PCD) et Parfums Christian Dior Orient (PCDO) demandent à la Cour de :
Vu le jugement susvisé,
Vu les dispositions des articles 68, 31, 32, 74, 122, 455, 544, 550, 551 et 700 du Code de procédure civile,
Vu les dispositions des articles 1216 et suivants et 1240 du Code civil,
Vu les dispositions de l’article L442-6, I du Code de commerce,
– INFIRMER le jugement rendu le 31 mai 2021 par le Tribunal de commerce de Paris en ce qu’il :
– a jugé MERCH TRADING CO W.L.L. recevable en son action ;
– a débouté PARFUMS CHRISTIAN DIOR de sa demande de paiement de la somme de 100.000 euros en réparation du préjudice subi pour avoir été attraite abusivement devant le Tribunal de commerce de Paris par MERCH TRADING CO W.L.L. ;
– n’a pas fait droit aux demandes Des Sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR Et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Confirmer le jugement rendu le 31 mai 2021 par le Tribunal de commerce de Paris pour le surplus.
Et statuant à nouveau :
Sur l’appel incident formé par les sociétés parfums Christian Dior et parfums Christian Dior Orient
– Juger recevable et bien-fondé l’appel incident formé par les sociétés Parfums Christian Dior Et Parfums Christian Dior Orient.
Sur La Société Parfums Christian Dior
– Juger que la société Parfums Christian Dior a été valablement libérée de toute obligation par suite de la cession à effet du 1er janvier 2006 du Contrat de distribution à Parfums Christian Dior Orient qui l’unissait à la société MERCH TRADING CO W.L.L. ;
-Juger que la société Parfums Christian Dior a été abusivement attraite devant les juridictions de Paris par la société Merch Trading Co W.L.L. ;
En conséquence :
– Prononcer purement et simplement la mise hors de cause de la société Parfums Christian Dior;
-Juger abusive la procédure intentée par Merch Trading Co W.L.L. à l’encontre de la société Parfums Christian Dior ;
-Condamner la société MERCH TRADING CO W.L.L. au paiement de la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR pour avoir été abusivement attraite devant les juridictions de Paris.
SUR LA SOCIÉTÉ MERCH TRADING CO W.L.L.
-JUGER que la société MERCH TRADING CO W.L.L. a violé le Contrat de distribution exclusive et notamment l’interdiction de céder ou de transférer, en tout ou partie, les droits du Contrat ;
-JUGER que la société MERCH TRADING CO W.L.L. n’a ni qualité ni intérêt légitime à agir;
En conséquence :
-JUGER que la société MERCH TRADING CO W.L.L. n’est pas dans la cause et est irrecevable en toutes ses demandes, fins et prétentions ;
-DÉBOUTER la société MERCH TRADING CO W.L.L. de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
SUR LA SOCIÉTÉ MERCH & PARTNERS W.L.L.
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS W.L.L. n’est pas partie au Contrat de distribution conclu le 20 octobre 1994 ;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS W.L.L. n’a jamais été en relation contractuelle ou commerciale avec la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ou avec PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT ;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS W.L.L. s’est fait tierce complice de la violation par la société MERCH TRADING CO W.L.L. de son interdiction de céder ou de transférer, en tout ou partie, les droits du Contrat de distribution exclusive ;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS W.L.L. a mis en place avec la société MERCH TRADING CO W.L.L. une organisation illicite au regard de la loi qatarie ;
-JUGER que la société MERCH & PARTNERS W.L.L. n’a ni qualité ni intérêt légitime pour agir ;
En conséquence :
– JUGER la société MERCH & PARTNERS W.L.L. irrecevable en toutes ses demandes, fins et prétentions ;
– DÉBOUTER la société MERCH & PARTNERS W.L.L. de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
SUR LA COMPÉTENCE
-JUGER que l’action de la société MERCH & PARTNERS W.L.L., de droit qatarien, contre la société PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT, de droit des Émirats Arabes Unis, à propos d’un différend concernant la distribution de produits Dior au Qatar, ne présente un lien ni avec la loi française ni avec les juridictions françaises ;
-JUGER que les sociétés MERCH TRADING CO W.L.L. et MERCH & PARTNERS W.L.L. ne peuvent revendiquer l’application de la loi française ;
-JUGER que les sociétés MERCH TRADING CO W.L.L. et MERCH & PARTNERS W.L.L. ne peuvent se prévaloir de la clause du Contrat attribuant compétence exclusive au Tribunal de commerce de Paris ;
-JUGER que les sociétés MERCH & PARTNERS W.L.L. et MERCH TRADING CO W.L.L. ne peuvent s’adresser à un Tribunal français pour réclamer des compensations que leur droit national leur refuserait en raison de l’illicéité du montage occulte qu’elles ont mis en place avec la société MERCH TRADING EST ;
-JUGER les sociétés MERCH & PARTNERS W.L.L. et MERCH TRADING CO W.L.L. irrecevables en leur exception tirée de la prétendue tardiveté de l’exception d’incompétence internationale, celle-ci ayant la nature d’une fin de non-recevoir pouvant être soulevée en tout état de la procédure par application de l’article 122 du Code de procédure civile ; les en DEBOUTER.
En conséquence :
-JUGER incompétentes les juridictions de Paris pour statuer sur les demandes de la société MERCH & PARTNERS W.L.L. ;
-JUGER la société MERCH & PARTNERS W.L.L. irrecevable en son action et la renvoyer à mieux se pourvoir en saisissant, si bon lui semble, les tribunaux compétents des Émirats-Arabes-Unis ;
-JUGER en tout état de cause la société MERCH & PARTNERS W.L.L. irrecevable en son action délictuelle en tant qu’elle est fondée sur des inexécutions prétendues du Contrat de distribution exclusive consenti à la société MERCH TRADING EST, le tiers à un contrat ne pouvant invoquer, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, des manquements contractuels au prétexte qu’il en aurait subi un dommage ; l’en DEBOUTER;
-JUGER encore la société MERCH & PARTNERS W.L.L. irrecevable en son action délictuelle en tant qu’elle est fondée sur les dispositions de l’article L442-6, I, 2°, 4° et 5° du Code de commerce, faute de partenariat commercial au sens de l’article L442-6, I, 2° du Code de commerce et à défaut de relations commerciales directes et établies au sens de l’article L442-6, I, 4° et 5° du Code de commerce ; l’en DEBOUTER.
En toute hypothèse :
-DÉBOUTER les sociétés MERCH & PARTNERS W.L.L. et MERCH TRADING CO W.L.L. de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;
-CONDAMNER les sociétés MERCH TRADING CO W.L.L. et MERCH & PARTNERS W.L.L. à payer chacune à chacune des sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT la somme de 75.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure devant le Tribunal de commerce de Paris ;
-CONDAMNER les sociétés MERCH TRADING CO W.L.L. et MERCH & PARTNERS W.L.L. à payer chacune à chacune des sociétés PARFUMS CHRISTIAN DIOR et PARFUMS CHRISTIAN DIOR ORIENT la somme de 25.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour la procédure devant la Cour d’appel de Paris ;
-CONDAMNER les sociétés MERCH TRADING CO W.L.L. et MERCH & PARTNERS W.L.L. aux entiers dépens.
La clôture a été prononcée en date du 1er juin 2022.
MOTIVATION
Sur la compétence
Les appelantes critiquent le jugement entrepris qui a dit bien fondée l’exception d’incompétence territoriale soulevée par les sociétés Dior à l’encontre de la société Merch & Partners.
A cet effet, elles se prévalent’:
-d’une clause attributive de juridiction prévue à l’article XXXVIII du contrat de distribution de 1994 désignant les juridictions françaises et soutiennent que cette clause serait applicable à tous les litiges relatifs à l’exécution du contrat et peut donc être invoquée par toute partie ayant participé à cette exécution, cette clause serait applicable aussi aux demandes fondées sur la rupture brutale,
-du fait que le tribunal de commerce de Paris serait compétent au titre du lieu siège de la société PCD, défenderesse au litige,
-du lien étroit avec l’exécution et la résiliation du contrat de distribution qui désigne la compétence du tribunal de commerce de Paris, et du risque de solutions inconciliables rendues par des juridictions différentes sur les demandes de chacun des demandeurs,
-de l’irrecevabilité de l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés Dior qui ne l’avait pas soulevée dans leurs premières conclusions devant le tribunal à l’audience du 17 février 2017.’
En réplique, les sociétés Dior soutiennent que la société Merch & Partners n’est pas partie au contrat de distribution et, par conséquent, ne peut pas se prévaloir de la clause attributive de juridiction prévue par ce contrat et donnant compétence exclusive aux juridictions françaises. Elles soutiennent également que la société française PCD, ne serait en rien concernée par la présente affaire, celle-ci ayant cédé le contrat de distribution à PCDO, et que les sociétés Merch ne chercheraient qu’un ancrage en France, en mettant en cause la société de droit français PCD.
Réponse de la Cour
La question de la compétence doit être examinée in limine litis.
Il apparaît à la lecture du jugement déféré que les sociétés Dior ont, à l’audience de plaidoiries, soulevé l’exception d’incompétence avant toute défense au fond, la procédure devant le tribunal de commerce étant orale, l’exception est donc recevable.
Pour s’opposer à l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés Dior, les sociétés Merch font en premier lieu valoir que la clause attributive de compétence mentionnée dans le contrat de distribution de 1994 est opposable non seulement à la société Merch Trading mais également à la société Merch&Partners.
Cependant, contrairement à ce que prétendent les appelantes, la société Merch & Partners n’a pas signé le contrat de 1994 ni son avenant de 2003 au vu de des instrumentums produits au dossier (pièces 2 et 3 de Merch). Elle ne s’est pas non plus comportée vis à vis des sociétés Dior comme un partenaire commercial en ce que les produits Dior ont toujours été achetés et facturés à la société Merch Trading (pièces 26 à 49 Dior et 36 de Merch), le seul fait que sur certaines correspondances entre les parties le nom «’Merch & Partners’» figure parfois ne suffit pas à démontrer que les sociétés Dior avaient connaissance du fait que c’était cette dernière qui assurait la distribution de ces produits au Qatar. Il ne peut en outre pas être opposé aux sociétés Dior un accord interne entre les deux sociétés Merch, comme l’accord de vente et renonciation de 1992 conclu entre elles (pièce 65 de Merch). D’ailleurs, la société PCDO a adressé sa lettre de rupture en juin 2015 seulement à la société MT Trading et non pas à la société Merch& Partners et les échanges à propos de la rupture avant l’assignation n’ont eu lieu qu’entre les sociétés PCDO et Merch Trading. Par conséquent, la société Merch & Partners ne peut légitimement invoquer la clause conventionnelle attributive de compétence mentionnée au contrat de distribution pour soutenir que les juridictions françaises sont compétentes sur ses demandes envers les sociétés Dior.
En second lieu, les appelantes invoquent la compétence des juridictions françaises du fait de la présence au litige d’un défendeur domicilié en France.
Il est vrai que, dans le présent litige, un des défendeurs, la société PCD, a son siège social en France. Or, la présence au litige d’un des défendeurs domicilié dans un Etat membre de l’UE conduit à appliquer le règlement de Bruxelles I bis (Règlement) dans sa version applicable à la date de l’assignation (9 août 2016) sur la compétence territoriale, et ce en vertu de l’article 6-1 du Règlement a contrario.
Conformément à l’article 4 du Règlement, la compétence des juridictions de l’État membre du domicile du défendeur constitue le «’principe général’».
En l’espèce, seules les sociétés Dior, défenderesses au litige, contestent l’application du critère de compétence du domicile du défendeur prévu à l’article 4 du Règlement, or, ce principe général s’impose au défendeur.
Il s’ensuit qu’en vertu de l’article 4 du Règlement concernant les demandes de la société Merch &Partners, et en vertu de la clause de compétence attributive de compétence du contrat de distribution de 1994 concernant les demandes de la société Merch Trading, le tribunal de commerce de Paris est compétent pour statuer sur l’entier litige opposant toutes les parties, et non pas seulement sur le litige entre les sociétés PDCO et Merch Trading comme l’a jugé le tribunal de commerce.
Par conséquent, le jugement entrepris sera infirmé quant à la compétence.
Sur les autres chefs de jugement dont il est demandé la nullité pour excès de pouvoir et, à défaut, l’infirmation
Les appelantes sollicitent que le jugement déféré soit déclaré nul pour excès de pouvoir ou, à défaut, soit infirmé dans toutes ses dispositions.
Comme le soutiennent les appelantes, la Cour relève qu’en mettant hors de cause la société PCD et en déclarant recevable la société Merch Trading, les premiers juges ont statué à tort sur la recevabilité de ces dernières.
En effet, concernant la recevabilité de la société PCD, il a été statué sur la fin de non-recevoir avant même de statuer sur la question de la compétence qui était soulevée et qui devait être examinée in limine litis.
Et concernant la recevabilité de la société Merch & Partners, alors que le tribunal s’était déclaré incompétent à statuer sur les demandes à l’encontre de cette dernière, il ne pouvait ensuite statuer sur la recevabilité de ses demandes.
Cependant, ces chefs de jugement ne peuvent relever d’un d’excès de pouvoir en ce que le tribunal n’a pas statué sur le fond de l’affaire. La demande d’annulation est rejetée. En revanche, le jugement doit être infirmé en ce qu’il a mis hors de cause la société PCD et déclaré recevable la société Merch Trading. De manière subséquente, il convient aussi de l’infirmer de ses autres chefs, c’est à dire l’injonction de communiquer des pièces et le débouté sur le fondement de la procédure abusive.
Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions qui sont soumises à la Cour, sauf en ce qu’il a réservé les frais et dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions qui lui sont soumises, sauf en ce qu’il a réservé les frais et dépens,
Dit le tribunal de commerce de Paris compétent pour statuer sur l’entier litige,
Et renvoie l’affaire devant ce dernier,
Réserve les frais et dépens.
LA GREFFIERE LA CONSEILLÈRE POUR
LA PRÉSIDENTE EMPÊCHÉE