Clause attributive de compétence : 26 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16018

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Clause attributive de compétence : 26 janvier 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/16018
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2023

N°2023/

NL/FP-D

Rôle N° RG 19/16018 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFA27

Société LE KIR LIMITED

C/

[K] [C]

Copie exécutoire délivrée

le :

26 JANVIER 2023

à :

Me Vincent ARNAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-

PROVENCE

Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d’AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de CANNES en date du 08 Octobre 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00272.

APPELANTE

Société LE KIR LIMITED agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, demeurant [Localité 1] – Seychelles

représentée par Me Vincent ARNAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [K] [C], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

et par Me Lionel BUDIEU, avocat au barreau de NICE substitué par Me Fanny LECADRE, avocat au barreau de NICE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Novembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés et ayant renoncé à la collégialité, devant Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre, et Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2023.

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société Le Kir Limited (la société) , immatriculée aux Seychelles, est propriétaire d’un navire de commerce dénommé ‘Motor Yacht Le Kir royal’.

Suivant contrat d’engagement maritime en date du 19 mars 2016 conclu à [U] (Seychelles), la société a engagé M. [C] (le salarié) en qualité de capitaine de navire à bord du navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ à compter du 1er avril 2016 pour une durée indéterminée moyennant une rémunération mensuelle de 4 500 euros.

Le préambule du contrat a prévu pour son exécution l’application de la loi des Seychelles.

Par courrier du 12 mai 2017 établi par son conseil, le salarié a pris acte de la rupture du contrat de travail en reprochant à son employeur un travail dissimulé en ce qu’il s’est abstenu de le déclarer aux administrations françaises alors qu’il exécute un travail exclusivement en France.

L’activité du navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ entre la conclusion du contrat de travail et la prise d’acte du salarié fait débat.

Par décision rendue le 30 mai 2017, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Draguignan, faisant droit à la demande du salarié, a ordonné la saisie conservatoire du navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ pour la garantie de ses créances, et a mis à la charge de la société une consignation d’un montant de 97 584 euros.

A une date qui n’a pas pu être précisée en l’état des pièces de la procédure, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Cannes pour obtenir, en vertu du droit français, le paiement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement rendu le 08 octobre 2019, le juge départiteur du conseil de prud’hommes a:

– jugé, sur l’exception d’incompétence soulevée par la société, que le conseil de prud’hommes de Cannes est compétent pour connaître du litige,

– jugé que les dispositions impératives du droit français sont applicables,

– condamné la société au paiement des sommes suivantes:

* 9 000 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 900 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 080 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 18 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné à la société de remettre au salarié les bulletins de salaire, le certificat de travail et l’attestation Pôle Emploi dans un délai de deux mois,

– rejeté les autres demandes,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné la société aux dépens.

°°°°°°°°°°°°°°°°°

La cour est saisie de l’appel formé le 16 octobre 2019 par la société.

Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 27 mai 2020 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour de:

Recevoir la concluante en son appel comme régulier en la forme et justifié au fond

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il débouté Monsieur [K] [C] de sa demande au titre du travail dissimulé, d’indemnité compensatrice de congés payés ;

Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Cannes du 8 octobre 2019 en ce jugé que le conseil de prud’hommes de Cannes

est compétent pour connaître de la rupture du contrat de travail de M. [K] [C], jugé que M. [K] [C] est bien fondé à invoquer le bénéfice des dispositions impératives du code du travail français ,

a condamné la société LE KIR [C] LIMITED à payer à Monsieur [K] [C] les sommes suivantes :

9.000 euros au titre compensatrice de préavis outre 900 € au titre des congés payés y afférents

1.080 € au titre de l’indemnité de licenciement :

18.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

a dit que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation du Conseil de prud’hommes et que les créances de nature indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

a ordonné à la société LE KIR LIMITED de remettre à M. [K] [C] les bulletins de paie correspondant à la période d’embauche, un certificat de travail ainsi qu’une attestation Pôle Emploi conformes au présent jugement, ce, dans le délai de deux mois suivant son prononcé ;

acondamné la société LE KIR LIMITED aux dépens et à payer à M. [K] [C] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

a ordonné l’exécution provisoire de la décision

a rejeté l’ensemble des demandes de la société LE KIR LIMITED

Statuant à nouveau :

A titre principal, in limine litis,

o Entendre le Conseil se déclarer incompétent au profit du Tribunal de [U]

A titre subsidiaire, in limine fitis,

o Entendre le Conseil de Prud’hommes de Cannes dire et juger que le droit Seychellois est applicable à la relation contractuelle et donc débouter ipso facto le demandeur de ses réclamations ;

A titre infiniment subsidiaire,

oDire et juger que la Société LE KIR ROYAL a parfaitement respecté ses obligations sociales et fiscales s’agissant de l’embauche et de l’exécution du contrat de travail de Monsieur [C]

En conséquence,

oDire et juger que la prise d’acte de rupture du contrat de travail de Monsieur [C] doit s’analyser en une démission ;

En conséquence,

Débouter Monsieur [C] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

A titre reconventionnel,

oCondamner Monsieur [C] à payer et à porter à la Société LE KIR ROYAL, les sommes suivantes:

5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

o 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture du contrat de travail ;

o 11.690 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

o 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ,

oTransmettre l’entier dossier en possession du Conseil de Prud’hommes au Procureur de la République contre Monsieur [C] qui a tenté d’extorquer une forte somme d’argent sous des prétextes imaginaires et a commis un abus de confiance dans le fait de se servir d’une boîte mails professionnelle à des fins strictement personnelles

oAssortir ces condamnations de l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du Code de Procédure Civile

oDire et juger que le présent jugement constitue un titre pour obtenir la mainlevée du séquestre sans délai, ni condition ,

Condamner Monsieur [C] aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SELARL VINCENT ARNAUD, sous affirmation d’en avoir fait l’avance.

Par ses dernières conclusions régulièrement remises au greffe le 26 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, le salarié demande à la cour de:

CONFIRMER la décision rendue par le Juge Départiteur de Cannes en date du 8 octobre 2019 en ce qu’il a

-Dit et jugé le conseil de prud’hommes de Cannes compétent

-Dit et jugé le droit français applicable

-condamné la société LE KIR à payer à Monsieur [C] les sommes suivantes :

oIndemnité compensatrice de préavis : 9.000 € outre celle de 900 € au titre des congés payés y afférents

o dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 18.000 €

o indemnité de licenciement : 1.080 €

o article 700 du code de procédure civile : 2.000 €

-ordonné à la société LE KIR de remettre à Monsieur [C] Les bulletins de salaire correspondants à la période d’embauche, Un certificat de travail ainsi qu’une attestation destinée à Pôle-emploi conforme au présent jugement.

LE REFORMER sur le quantum

Statuant à nouveau,

CONDAMNER la société LE KIR à verser à Monsieur [C] les sommes suivantes :

oIndemnité compensatrice de préavis : 11.690 € outre celle de 1.169 € au titre des congés payés y afférents

o dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 35.070 €

o indemnité de licenciement : 5.845 € /5 x 1,2 = 1.402 €

o congés payés : 8.183 €

LE REFORMER pour le surplus,

Statuant à nouveau,

CONDAMNER la société LE KIR à verser à Monsieur [C] la somme de 35.070 € au titre de l’indemnité forfaitaire de travail dissimulé

CONDAMNER la société LE KIR à verser à Monsieur [C] la somme de 30.000 € en réparation de son préjudice distinct

-au paiement des charges et cotisations sociales afférentes à l’emploi salarié du demandeur depuis l’embauche, auprès des caisses compétentes

-à lui remettre :

o Un certificat de travail

o Une attestation destinée à Pôle-emploi

o Les bulletins de salaire depuis l’embauche

DIRE ET JUGER que ces condamnations seront assorties d’une astreinte comminatoire de 500 € par jour de retard qui commencera à courir dans le délai d’un mois à compter de la notification du jugement à intervenir.

DIRE ET JUGER que la Cour se réservera le droit de la liquider

ORDONNER la transmission au Procureur de la République de la décision à intervenir

CONDAMNER la société LE KIR au paiement d’une somme de 10.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX-EN-PROVENCE, avocats aux offres de droit.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 31 octobre 2022.

MOTIFS

1 – Sur la compétence du conseil de prud’hommes de Cannes

La section 5 intitulée ‘Compétence en matière de contrats individuels de travail’ du règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale dispose:

‘(…)

Article 20

1. En matière de contrats individuels de travail, la compétence est déterminée par la présente section, sans préjudice de l’article 6, de l’article 7, point 5), et, dans le cas d’une action intentée à l’encontre d’un employeur, de l’article 8, point 1).

2. Lorsqu’un travailleur conclut un contrat individuel de travail avec un employeur qui n’est pas domicilié dans un État membre mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, l’employeur est considéré, pour les contestations relatives à leur exploitation, comme ayant son domicile dans cet État membre.

Article 21

1. Un employeur domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait

a) devant les juridictions de l’État membre où il a son domicile; ou

b) dans un autre État membre:

i) devant la juridiction du lieu où ou à partir duquel le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant la juridiction du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail; ou

ii) lorsque le travailleur n’accomplit pas ou n’a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant la juridiction du lieu où se trouve ou se trouvait l’établissement qui a embauché le travailleur.

2. Un employeur qui n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre peut être attrait devant les juridictions d’un État membre conformément au paragraphe 1, point b).

(…)

Article 23

‘Il ne peut être dérogé aux dispositions de la présente section que par des conventions:

1) postérieures à la naissance du différend; ou

2) qui permettent au travailleur de saisir d’autres juridictions que celles indiquées à la présente section.

(…).

L’article 81 du code de procédure civile dispose:

‘Lorsque le juge estime que l’affaire relève de la compétence d’une juridiction répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, il renvoie seulement les parties à mieux se pourvoir.

Dans tous les autres cas, le juge qui se déclare incompétent désigne la juridiction qu’il estime compétente. Cette désignation s’impose aux parties et au juge de renvoi.’

En l’espèce, il n’est pas discuté que:

– la société est immatriculée aux Seychelles, qu’elle est donc domiciliée dans ce pays, et que le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ qu’elle exploite bat pavillon seychellois;

– le salarié a été engagé en qualité de capitaine de navire sur le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’.

Pour soutenir que le litige dérivant du contrat de travail qui l’oppose à la société relève de la compétence du conseil de prud’hommes de Cannes, le salarié se prévaut des éléments suivants:

– le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ a disposé de l’ usage permanent d’une place à quai au port de [Localité 4] dans le Var du 1er avril 2016 au 1er avril 2017, ce dont il résulte que le port d’attache réel du navire pendant au moins un an s’est situé dans cette commune;

– le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ est arrivé au large des Iles de Lérins dans un chantier naval le 02 mai 2016 et il y était toujours à la date de la prise d’acte le 12 mai 2017;

– le contrat de travail a été intégralement exécuté en France, et plus précisément aux [Localité 5] de [Localité 4] du 1er avril au 02 mai 2016, et à [Localité 3] aux Iles de Lérins du 02 mai 2016 au 12 mai 2017; l’exploitation du navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ en France est également établie; le conseil de prud’hommes de Cannes est donc la juridiction du lieu à partir duquel le salarié a accompli son travail de manière habituelle en vertu de l’article 21 du règlement de l’Union Européenne n°2015/2012 du 12 décembre 2012 précité;

– l’article 7 de la convention de Bruxelles du 10 mai 1952 attribue compétence au fond au tribunal de l’Etat où la saisie a été pratiquée et où le demandeur a sa résidence habituelle ou son principal établissement;

– l’article 23 de ‘Bruxelles I BIS’ prévoit l’inopposabilité de la clause attributive de compétence insérée au contrat de travail qui est antérieure à la naissance du litige et qui ne permet pas au salarié de saisir d’autres juridictions que le conseil de prud’hommes de Cannes.

Il produit à l’appui les pièces suivantes:

– les factures du port de plaisance Les [Localité 5] de [Localité 4] à [Localité 4];

– les rapports d’intervention du Chantier Naval de l’Estérel à [Localité 3] afférents au navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’;

– les relevés de géolocalisation du ‘Motor Yacht Le Kir royal’ entre le 12 mai 2017 et le 18 décembre 2019 pour soutenir que le navire a passé ‘l’écrasante majorité de son temps en eaux françaises’ de juin 2017 au 31 décembre 2019.

Pour s’opposer à la compétence du conseil de prud’hommes de Cannes au profit de celle du tribunal de Mahe, la société soutient que:

– le contrat de travail a été conclu aux Seychelles;

– l’activité de la société se réalise aux Seychelles;

– le contrat de travail a été exécuté à bord d’un navire battant pavillon seychellois;

– le chantier de réparation français dans lequel le navire a été placé du 02 mai 2016 au 29 mai 2017 est indifférent pour déterminer la juridiction compétente dans les litiges entre les marins et les employeurs;

– l’équipage du navire était seychellois;

– le contrat d’engagement maritime conclu par le salarié prévoit régulièrement la compétence du tribunal de Mahe en cas de litige;

– le navire a quitté les Seychelles par cargo pour réparation dans un chantier français du 02 mai 2016 au 29 mai 2017 et n’a donc pas navigué dans les eaux françaises;

– l’activité commerciale a été mise en sommeil aux Seychelles durant les travaux;

– le salarié a pris acte de la rupture du contrat de travail avant la fin des travaux de réparation du navire;

– il n’existe aucun établissement de la société en France.

La cour rappelle que le contrat de travail en litige a été exécuté du 1er avril 2016 au 12 mai 2017.

Or, force est de constater que pour cette période, le salarié se borne à verser au débats des rapports d’intervention du 11 mai 2016 au 11 avril 2017 desquels il ressort en réalité que le ‘Motor Yacht Le Kir royal’ s’est trouvé durant cette période installé au sein du Chantier Naval de l’Estérel à [Localité 3] pour des réparations.

En outre, il convient de relever que les factures dont le salarié se prévaut permettent seulement d’établir que la société s’est acquittée du prix de la location du poste n°JP.41 Escale pour la période du 1er avril 2016 12h00 au 1er avril 2017 12h00, sans qu’aucun élément ne vienne corroborer la présence réelle et effective du navire au port de plaisance Les [Localité 5] de [Localité 4] à [Localité 4] du 1er avril 2016 au début du mois de mai 2016.

Et la cour relève encore que la société justifie que:

– le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ a fait l’objet d’une exportation des Secheylles vers le chantier naval de l’Esterel à [Localité 3] ainsi que cela ressort du document établi par les services des douanes des Seychelles le 16 mars 2016 (pièce n°31);

– le salarié a pris en charge le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ arrivé à Gênes le 15 avril 2016 (pièce n°30);

– le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ a été hébergé et a fait l’objet de réparations au chantier naval de l’Esterel du 02 mai 2016 au 29 mai 2017 (pièce n°3).

Enfin, la société verse aux débats deux attestations établies l’une par M.[H] en sa qualité de capitaine du navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ depuis le départ du salarié, et l’autre par M.[E] en sa qualité chef cuisinier et marin sur la navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ depuis cinq années.

Or, il ressort de ces attestations, qui emportent la conviction de la cour dès lors qu’elles ne sont contredites par aucun élément objectif, que le navire, qui faisait des croisières internationales, a fait l’objet de réparations prévues pour une durée de quatre mois à partir de la fin du mois de mars 2016; que ces réparations se sont toutefois prolongées jusqu’au mois d’avril 2017; que le navire a repris son activité de croisière après avoir été mis à l’eau par M.[H] à l’issue des travaux.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que durant l’exécution du contrat de travail ici en litige, le navire ‘Motor Yacht Le Kir royal’ a été affecté dans un chantier de réparation situé dans les eaux françaises.

Pour autant, cette circonstance ne permet pas d’établir que la société, qui n’est pas domiciliée en France, posséderait une succursale, une agence ou tout autre établissement en France et qu’elle serait donc considérée, pour la résolution du présent litige, comme ayant son domicile en France.

Le litige ne relève donc pas de la compétence du conseil de prud’hommes de Cannes mais de celle du tribunal de [U].

En conséquence, et sans qu’il y ait lieu d’examiner le surplus des moyens du salarié, la cour dit, en infirmant le jugement déféré, que le conseil de prud’hommes de Cannes n’est pas compétent pour statuer sur le litige et renvoie les parties à mieux se pourvoir.

2 – Sur les demandes de la société

2.1. Sur le préavis de démission et les dommages et intérêts au titre de la rupture

Comme il a été précédemment dit, le conseil de prud’hommes de Cannes n’est pas compétent pour statuer sur le litige qui dérive du contrat de travail conclu entre les parties.

Il s’ensuit que la société n’est pas fondée à solliciter le paiement d’un préavis de démission, ni le paiement de dommages et intérêts pour brusque rupture, dès lors que ces demandes supposent de trancher ici le litige.

En conséquence, la cour, en infirmant le jugement déféré, dit que ces demandes sont irrecevables.

2.2. Sur l’abus de procédure

La société ne rapporte pas la preuve de ce que le salarié aurait fait un usage abusif de son droit d’agir en justice et d’exercer un recours, ou aurait commis une faute dans la conduite des procédures de première instance et d’appel.

En conséquence, la cour dit que la demande n’est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il l’a rejetée.

3 – Sur la transmission du dossier au procureur de la République

Force est de constater que ni le salarié ni la société ne justifient d’aucun fondement de leur demande respective de transmission du dossier au procureur de la République.

En conséquence, la cour dit que les demandes ne sont pas fondées de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il les a rejetées.

4 – Sur les demandes accessoires

Les dépens de première instance et d’appel, suivant le principal, seront supportés par le salarié.

Le ministère d’avocat n’étant pas obligatoire devant les juridictions statuant en matière prud’homale, la demande au titre de l’article 699 du code de procédure civile est rejetée.

L’équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu’il ne soit pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel.

Enfin, la cour rappelle que le présent arrêt est exécutoire nonobstant pourvoi de sorte que sa demande au titre de l’exécution provisoire est sans objet.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Le Kir Limited au titre:

– des dommages et intérêts pour procédure abusive,

– de la transmission du dossier au procureur de la République,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,

STATUANT sur les chefs infirmés et Y AJOUTANT,

DIT que le conseil de prud’hommes de Cannes n’est pas compétent pour statuer sur le litige,

RENVOIE les parties à mieux se pourvoir,

DECLARE la société irrecevable en ses demandes au titre du préavis de démission et à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture du contrat de travail,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d’appel,

CONDAMNE M. [C] aux dépens de première instance et d’appel,

REJETTE la demande au titre de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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