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MINUTE N° 54/23
Copie exécutoire à
– Me Joseph WETZEL
-Me Patricia CHEVALLIER -GASCHY
Le 25.01.2023
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 25 Janvier 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 22/02219 – N° Portalis DBVW-V-B7G-H3JP
Décision déférée à la Cour : 30 Mai 2022 par le Juge de la mise en état de la Chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE
APPELANTE – INTIMEE INCIDEMMENT :
S.E.L.A.R.L. MJM FROEHLICH & ASSOCIES prise en la personne de Me [X] [V], mandataire judiciaire de la SAS PAKEA en liquidation judiciaire
[Adresse 1]
Représentée par Me Joseph WETZEL, avocat à la Cour
INTIMEE – APPELANTE INCIDEMMENT :
GMBH ENVICAN, société de droit suisse
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2] (SUISSE)
Représentée par Me Patricia CHEVALLIER-GASCHY, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me DUCROT, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, un rapport ayant été présenté, devant la Cour composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
Mme ROBERT-NICOUD, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
ARRET :
– Contradictoire
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
– signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Selon contrat régularisé le 22 décembre 2017, la SAS PAKEA a vendu à la société ENVICAN GMBH, une machine industrielle désignée ‘ligne SIRPAK’ destinée à la fabrication de canettes en carton pour un coût total de 1.656.234,51 €.
L’article 19.2 du contrat modifié selon avenant en date du 14 décembre 2018 prévoit que les litiges découlant du présent contrat ou en relation avec ce contrat seront résolus par arbitrage conformément aux règles de la chambre de commerce internationale.
Par jugement du 13 mai 2020, la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE a ordonné l’ouverture d’une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société PAKEA et a désigné en qualité de mandataire judiciaire la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, prise en la personne de Me [X] [V].
Par lettre AR en date des 14 septembre et 8 octobre 2020, la société ENVICAN GMBH a déclaré entre les mains de Me [V], une créance chirographaire d’un montant total de 4.133.345,00 €.
Par courrier du 4 janvier 2021, Me [V] a proposé le rejet en totalité de cette créance.
Par courrier du 29 janvier 2021, la société ENVICAN GMBH a maintenu l’intégralité de sa déclaration de créance.
Par jugement du 26 mai 2021, le Tribunal judiciaire de MULHOUSE a converti la procédure de sauvegarde ouverte en procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société PAKEA et a désigné Me [V] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par ordonnance du 5 juillet 2021, le juge commissaire, saisi de la contestation de créance de la société ENVICAN GMBH, s’est déclaré incompétent pour en connaître, a renvoyé la SAS PAKEA à mieux se pourvoir et a invité cette dernière à saisir la juridiction compétente dans un délai d’un mois sous peine de forclusion.
Par acte introductif d’instance en date du 26 juillet 2021, reçu au greffe le 30 juillet 2021 et signifié à la société ENVICAN GMBH le 15 octobre 2021, La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, a saisi la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE afin de voir dire et juger que la SAS PAKEA n’est redevable d’aucun montant à la société ENVICAN GMBH.
Par une ordonnance du 30 mai 2022, le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de MULHOUSE a rejeté l’exception d’incompétence matérielle, tirée de la clause d’arbitrage, soulevée par la société ENVICAN GMBH, a déclaré le Tribunal judiciaire de MULHOUSE, territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce du Canton de ZURICH en SUISSE, a renvoyé la SAS PAKEA à mieux se pourvoir, a dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du CPC, et a condamné la SAS PAKEA représentée par la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de mandataire liquidateur aux dépens de la procédure d’incident.
Par une requête aux fins d’être autorisée à assigner à jour fixe en date du 8 juin 2022, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, demande à la Cour de fixer le jour et l’heure auxquels l’affaire sera appelée en priorité pour être débattue à la suite de la déclaration d’appel et sur les conclusions déposées par l’appelante.
Par une déclaration faite au greffe en date du 9 juin 2022, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, a interjeté appel de cette décision.
Par une déclaration faite au greffe en date du 22 juin 2022, la société ENVICAN GMBH s’est constitué intimée dans la présente affaire.
Par une ordonnance en date du 6 juillet 2022, Madame la Présidente de chambre, vu la requête en date du 8 juin 2022 déposée par la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, l’a autorisé à assigner avant le 5 septembre 2022 la partie adverse à comparaître devant la Chambre 1A de la Cour d’appel de COLMAR le 24 octobre 2022.
Le 25 juillet 2022, La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, a produit son acte de dépôt d’assignation effectué auprès de la société ENVICAN GMBH le 20 juillet 2022.
Par ses dernières conclusions en date du 8 juin 2022, auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, demande à la Cour :
– d’infirmer l’ordonnance rendue par Mme le juge de la mise en état de la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE le 30 mai 2022,
Et statuant à nouveau,
– de déclarer irrecevable et en tout état de cause mal fondée l’exception d’incompétence territoriale soulevée par la société ENVICAN GMBH,
– de confirmer la compétence territoriale de la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE,
– de renvoyer l’affaire devant la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de MULHOUSE,
– de confirmer l’ordonnance rendue le 30 mai 2022 par Mme le juge de la mise en état pour le surplus,
– de débouter la société ENVICAN GMBH de toutes conclusions plus amples ou contraires.
– de condamner la société ENVICAN GMBH à 5.000 € au titre de l’article 700 du CPC,
– de condamner la société ENVICAN GMBH aux dépens de l’appel.
Au soutien de ses prétentions, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, sur l’incompétence soulevée par la société ENVICAN GMBH au titre de la clause compromissoire, affirme que les deux parties ont renoncé de manière irrévocable à l’arbitrage, le fait que la société ENVICAN GMBH invoque cette clause d’arbitrage ultérieurement est irrecevable, ce que le Premier Juge a décidé à bon droit, que le litige a été évoqué devant le juge commissaire du Tribunal judiciaire de MULHOUSE, la SAS PAKEA contestant la déclaration de créance présentée par la société ENVICAN GMBH, qu’à cette occasion, la société ENVICAN GMBH n’a que fait valoir des arguments de fond et n’a donc pas fait appel à la clause compromissoire, qu’ainsi ni la SAS PAKEA, ni la société ENVICAN GMBH n’ont voulu voir régler leur litige par un arbitre et ne peuvent donc pas ultérieurement vouloir que ce soit le cas.
La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, soutient que la qualité d’une partie, à savoir défenderesse pour la société ENVICAN GMBH ne l’empêche pas de soulever une incompétence matérielle, et la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, ajoute que si la société ENVICAN GMBH s’est contentée de conclure au fond pour que le juge commissaire admette sa créance contre la SAS PAKEA, alors cela caractérise une renonciation de sa part à l’application de la clause compromissoire.
Sur l’incompétence territoriale soulevée par la société ENVICAN GMBH, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, conteste le fait que le Premier Juge ait accueilli l’incompétence territoriale alors qu’il a rejeté l’incompétence matérielle.
La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, estime que la société ENVICAN GMBH a soulevé d’abord l’incompétence matérielle dans des conclusions soulevant une exception d’incompétence du 9 décembre 2021 puis l’incompétence territoriale dans des conclusions d’incident responsives et récapitulatives du 2 mai 2022, alors que toutes les exceptions devaient être soulevées simultanément et dans les mêmes conclusions, ce qui caractérise une violation de l’article 74 du CPC.
La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, prétend dès lors que l’exception d’incompétence territoriale doit être considérée comme ayant été soulevée tardivement par la société ENVICAN GMBH et doit donc être rejetée selon la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA.
La SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, prétend par ailleurs que la société ENVICAN GMBH aurait dû soulever cette incompétence devant le juge commissaire, et qu’elle ne peut plus le faire devant la chambre commerciale.
Dans des dernières conclusions du 19 Octobre 2022, la société ENVICAN GMBH demande à la Cour :
DECLARER l’appel de la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES mal fondé,
JUGER l’appel incident formé par la société ENVICAN recevable,
REJETER toutes demandes, fins ou conclusions contraires de la SELARL MJM FROEHLICH &ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], ès-qualités de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA,
INFIRMER les chefs suivants de l’ordonnance du 30 mai 2022, rendue par le juge de la mise en état près la chambre commerciale du Tribunal judiciaire de Mulhouse :
‘REJETONS l’exception d’incompétence matérielle, tirée de la clause d’arbitrage, soulevée par la société à responsabilité limitée Envican Gmbh ; ‘
‘DISONS n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile ;’
ET STATUANT A NOUVEAU,
DECLARER le tribunal judiciaire de Mulhouse matériellement incompétent au profit d’un tribunal arbitral à constituer à VIENNE, Autriche ;
Subsidiairement,
DECLARER le tribunal judiciaire de Mulhouse territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce du Canton de Zurich, en Suisse.
En tout état de cause,
CONDAMNER la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], ès-qualités de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, à payer à la société ENVICAN la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNER la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], ès-qualités de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, aux entiers dépens à distraire entre les mains de Maître [W] [Z].
La société ENVICAN GMBH soutient principalement que la juridiction compétente pour trancher la contestation sérieuse dont une créance déclarée au passif d’une procédure collective fait l’objet n’est pas le tribunal de la procédure collective mais celui que déterminent une clause attributive de compétence ou, a défaut, les règles de droit commun et qu’elle n’a pas de façon expresse et non équivoque renoncé à la clause d’arbitrage.
La Cour se référera aux dernières écritures des parties, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 24 Octobre 2022.
MOTIFS DE LA DECISION :
Dans l’ordonnance entreprise, le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mulhouse retient :
Sur l’exception d’incompétence matérielle tirée de la clause d’arbitrage contenue dans le contrat liant les parties, que même si le juge commissaire, désigné dans la procédure collective a invité la SAS PAKEA dans son ordonnance du 5 juillet 2021 à saisir la juridiction compétente pour connaître de sa contestation, la société ENVICAN GMBH avait la possibilité concomitamment ou préalablement de saisir le tribunal arbitral comme le prévoyait l’article 19.2 du contrat la liant à la SAS PAKEA, ce qu’elle ne fait que maintenant et qu’elle n’a pas fait auparavant, qu’en s’abstenant de se prévaloir de la clause d’arbitrage devant le juge commissaire et en présentant devant une juridiction des moyens tendant à voir reconnaître le bien-fondé de sa créance, en s’abstenant de saisir le tribunal arbitral désigné dans la clause du contrat liant les parties, la société ENVICAN GMBH a manifesté de façon non équivoque, sa volonté de renoncer à l’arbitrage, qu’il en est de même pour la SAS PAKEA, que les parties ont renoncé à l’arbitrage de manière irrévocable, dès lors la clause invoquée par la société ENVICAN GMBH est inapplicable et que l’exception d’incompétence soulevée par la société ENVICAN GMBH doit être rejetée.
Sur l’exception d’incompétence territoriale tirée du lieu du domicile du défendeur et du lieu de livraison de la chose vendue, qu’aucune défense au fond n’a été présentée par la société ENVICAN GMBH, que l’irrecevabilité de l’exception d’incompétence territoriale alléguée par la SAS PAKEA doit être écartée, qu’il est constant que le siège social de la société ENVICAN GMBH, partie défenderesse, est situé en SUISSE, et qu’en conséquence, le Tribunal judiciaire de MULHOUSE doit être déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce du Canton de Zurich en SUISSE en application des articles 42 et 46 du CPC et que la SAS PAKEA doit être renvoyée à mieux se pourvoir.
Par acte sous seing privé du 22 décembre 2017, la société PAKEA a vendu à la société ENVICAN GMBH une machine industrielle, désignée Ligne SIRPAK, contenant une clause compromissoire ou d’arbitrage pour la résolution de tout litige, controverse ou réclamation.
La société PAKEA a été placée en procédure de sauvegarde, convertie en liquidation judiciaire, et la société ENVICAN GMBH a dû déclarer à son passif, entre les mains du liquidateur, la créance dont elle entendait se prévaloir à l’encontre de la société PAKEA, à hauteur de 4.133.345 €.
Maître [V], es-qualités de liquidateur judiciaire, a proposé le rejet intégral de cette créance.
Par ordonnance du 05 Juillet 2021, le juge commissaire du Tribunal judiciaire de Mulhouse a notamment invité la SAS PAKEA à saisir la juridiction compétente dans le délai d’un mois sous peine de forclusion.
Il appartenait au mandataire liquidateur de saisir la juridiction compétente et par acte du 26 Juillet 2021, Maître [V] en qualité de mandataire liquidateur de la société PAKEA a saisi le Tribunal judiciaire de Mulhouse.
Or, l’article 19.2 du Contrat liant les parties, dans sa version originale rédigée en anglais stipule la clause compromissoire suivante :
‘Any dispute, controversy or claim arising out of, or in relation to, this Purchase Contract,
including the validity, invalidity, breach, or termination thereo’ shall be resolved by arbitration in accordance with the Arbitration Rules of the International Chamber of Commerce in force on the date on which the Request ofArbitration (as such term is defined in the Arbitration Rules of the International Chamber of Commerce) is submitted in accordance with such rules. The number ofarbitrators shall be three. The place of the arbitration shall be in [Localité 3], Austrla. The arbitral proceedings shall be conducted in English.’
Le même article a fait l’objet d’une traduction en français par les parties, qui l’ont toutes deux cité et versé aux débats dans les différentes procédures qui les ont opposées :
‘Tout litige, controverse ou réclamation découlant du présent contrat d’achat ou en relation
avec celui-ci, y compris la validité, l’invalidité, la violation ou la résiliation de celui-ci sera
résolu par arbitrage conformément aux règles d’arbitrage de la Chambre de commerce Internationale en vigueur à la date à laquelle la demande d’arbitrage (tel que ce terme est défini dans les règles d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale) est soumise conformément à ces règles. Le nombre d’arbitres est de trois. Le lieu de l’arbitrage sera à [Localité 3], Autriche. La procédure arbitrale se déroulera en anglais.’
Par principe, le tribunal ayant ouvert une procédure collective dispose d’une compétence dans les termes de l’article R. 662-3 du code de commerce :
‘Sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires…’
Cette compétence est toutefois limitée aux litiges sur lesquels la procédure collective exerce une influence sur le fond et la Cour de Cassation, chambre commerciale, a rappelé dans un arrêt rendu le 1er Juillet 2020, que ‘la juridiction compétente pour trancher la contestation sérieuse dont une créance déclarée au passif d’une procédure collective fait l’objet n’est pas le tribunal de la procédure collective mais celui que déterminent une clause attributive de compétence ou, a défaut, les règles de droit commun.’
Ainsi, Le juge-commissaire doit donc tout d’abord, vérifier la régularité de la déclaration de créance, puis renvoyer l’affaire devant le tribunal arbitral. A l’issue de la procédure arbitrale, le juge-commissaire fixera la créance suivant la sentence, dès lors que celle-ci ne sera pas contestée par les parties’.
Cette solution, qui constitue quoi qu’il en soit le droit positif, s’explique par le fait que l’ouverture d’une procédure collective n’exerce pas d’influence sur le fond du litige au sujet de l’existence de la créance et de son montant. En vertu du principe dit ‘compétence-compétence’, l’arbitre a une compétence exclusive pour se prononcer sur sa compétence et la validité d’une clause d’arbitrage, à moins qu’il ne soit pas encore saisi et que la clause soit ‘manifestement nulle ou manifestement inapplicable’.
La partie appelante soutient que les parties à l’instance ont renoncé à l’application de la clause d’arbitrage.
Toute renonciation à un droit est appréciée restrictivement et doit être claire et non-équivoque, car les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et en matière de renonciation à une clause d’arbitrage, il est exigé par l’article 1448 du code de procédure civile, que la renonciation soit manifeste.
La Cour de cassation a rappelé que la renonciation au droit de se prévaloir d’une clause compromissoire ne peut résulter que d’actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer.
Ainsi, la renonciation a un droit peut être tacite mais doit impérativement relever d’actes non équivoques démontrant la volonté manifeste de son auteur de renoncer à ce droit.
Il appartient dès lors à la partie appelante de démontrer des actes positifs de la société ENVICAN GMBH, constitutifs d’une renonciation à se prévaloir de la clause d’arbitrage.
Or, la partie appelante ne rapporte la preuve d’aucun acte positif de renonciation et ne peut soutenir à cet effet que l’absence de saisine par la société intimée de la juridiction arbitrale constitue un acte positif de renonciation, alors que le demandeur à l’instance en contestation, déterminé par ailleurs par l’ordonnance du juge commissaire est la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA et non la société ENVICAN GMBH.
La Cour relèvera par ailleurs, que la société ENVICAN a soulevé in limine litis cette exception d’incompétence, avant toute défense au fond, et dans le cadre de la mise en état des incidents de procédure devant le juge de la mise en état.
Dans ces conditions, la juridiction compétente pour statuer sur la contestation de créance n’est pas la juridiction suisse désignée par le juge de la mise en état dans l’ordonnance entreprise mais la juridiction arbitrale.
L’ordonnance entreprise sera en conséquence infirmée de ce chef.
Succombant, la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, sera condamnée aux entiers dépens et sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
L’équité ne commande pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société ENVICAN, outre confirmation de l’ordonnance de ce chef.
P A R C E S M O T I F S
La Cour,
Infirme l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Mulhouse le 30 Mai 2022, en ce qu’elle a rejeté l’exception d’incompétence matérielle, tirée de la clause d’arbitrage, soulevée par la société ENVICAN GMBH et déclaré le Tribunal judiciaire de Mulhouse, en sa chambre commerciale territorialement incompétent au profit du tribunal de commerce du canton de Zurich en Suisse,
Confirme la décision entreprise pour le surplus,
Statuant à nouveau et Y Ajoutant,
Déclare le tribunal judiciaire de Mulhouse matériellement incompétent au profit d’un tribunal arbitral à constituer à VIENNE, en Autriche,
Condamne la SELARL MJM FROEHLICH & ASSOCIES, représentée par Maître [X] [V], agissant en qualité de liquidateur judiciaire la SAS PAKEA, aux dépens de l’appel,
Rejette les demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au profit des parties appelante et intimée.
La Greffière : la Présidente :