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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 15 AVRIL 2022
(n° , 11pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/19823 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA36T
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Septembre 2019 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2017003033
APPELANTES
SASU EO2 AUVERGNE
prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
ZAC du Château
63470 SAINT-GERMAIN-PRES-HERMENT
RCS de CLERMONT-FERRAND: 500 300 306
SA EO2
prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
36 avenue Pierre Brossolette
92240 MALAKOFF
RCS de NANTERRE: 493 169 932
Représentées par Me Virginie DOMAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2440, avocat postulant
Ayant pour avocat plaidant Me Anne PACCARD de la SCP CANIS & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT- FERRAND
INTIMEES
SAS MAGUIN
prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
2 rue Pierre Sémard
02800 CHARMES
RCS de SAINT-QUENTIN: 875 420 192
Représentée par Me Stéphane FERMIER de la SELARL JRF ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075, avocat postulant
Ayant pour avocat plaidant Me Bruno LEMISTRE, avocat au barreau de LILLE
SAS NEXTENERGIES
prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social
55 boulevard Jules Verger
35800 DINARD
RCS de SAINT-MALO :491 687 992
Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU CICUREL MEYNARD GAUTHIER MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240
Ayant pour avocat plaidant Me Lyne HAIGAR de l’Association BELDEV, avocat au barreau de PARIS, toque : R61
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Denis ARDISSON, Président de chambre
Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère
Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Meggy RIBEIRO
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Anaïs DECEBAL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.
Il sera succinctement rapporté que la SA EO2 a pour activité la production de granulés de sciure de bois compressée (pellets), utilisés comme combustible pour les chaudières et poêles de particuliers, collectivités et industriels.
Elle a implanté la construction d’une usine de production à Saint Germain Près Herment (63), dans le Puy de Dôme en Auvergne, destinée à assurer la transformation de sciures et plaquettes de bois, par agglomération, en granulés à usage de combustible.
Pour ce faire elle a consulté séparément les sociétés Maguin pour la fourniture du tube sécheur et ses accessoires, et Nextenergies (qui a pour activité la conception, la fourniture et l’exploitation de centrales de production d’énergie thermique ou de cogénération -énergie thermique et électricité- fonctionnant avec la biomasse issue principalement des sous-produits de l’industrie du bois) pour la fourniture du foyer de combustion.
Préférant que Maguin assure la fourniture de l’ensemble du foyer de combustion et du tube sécheur, la SA EO2 a signé le 19 novembre 2007 avec celle-ci un “contrat de base” pour une ligne de déshydratation et séchage de particules de bois pour un montant de 1.100.000euros.
La prestation de Maguin incluait notamment la conception, la construction, le transport, l’installation et la mise en service du foyer de combustion et de l’unité de séchage, ainsi que l’ingénierie, la fourniture de documents techniques, et la formation des personnels de EO2 (pièce 1 EO2). Maguin retenait toutefois par erreur dans son offre à EO2, ce qu’elle reconnaît (page 4 de ses conclusions), la version V5 du descriptif technique fourni par Nextenergies pour le foyer de combustion, alors qu’elle sous-traitait pour un prix de 484.000euros HT la fourniture du brûleur à Nextenergies par contrat du 21 décembre 2007 en retenant sa version V7, qui comportait des modifications substantielles par rapport à la version V5 concernant les caractéristiques techniques du foyer (volume de la chambre de combustion modifié, débits de ventilateurs augmentés, surface de la grille réduite).
Le chantier a débuté en janvier 2008. Nextenergies a livré le brûleur sur site le 21 août 2008.
EO2 a invoqué des défauts de performance de la chaîne suite à des dysfonctionnements et des pertes d’exploitations subséquentes. L’expert judiciaire a conclu que les désordres, non façons, non conformités évoqués relevaient de l’erreur de spécification des données techniques par Maguin dans le contrat avec EO2, ayant pour conséquence des différences de prestations et de caractéristiques techniques entre les engagements contractuels de Maguin à l’égard de EO2, les performances se trouvant toutefois dans « une fourchette acceptable » tant en ce qui concerne la puissance du foyer, la capacité évaporatoire et la teneur en humidité des granulets, comparés au cahier des charges EO2.
Par ordonnance du 20 juillet 2010 la présidente du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a ordonné une expertise confiée à M. [R] [H], lequel a remis son rapport le 31 juillet 2015
Par jugement du 24 novembre 2016 le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Paris au regard de la clause attributive de compétence insérée au contrat entre EO2 et Maguin.
Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 20 septembre 2019, qui a :
– DIT recevable et bien fondée la fin de non-recevoir d’irrecevabilité à agir d’EO2, soulevée par la SAS MAGUIN et la SAS NEXTENERGIES pour défaut d’intérêt à agir, pour défaut de qualité et intérêt à agir
– DIT irrecevable EO2 en ses demandes émises par une personne dépourvue du droit
d’agir et l’en déboute,
– DIT recevable et bien fondée la fin de non-recevoir d’irrecevabilité à agir d’EO2 AUVERGNE soulevée par la SAS MAGUIN et la SAS NEXTENERGIES, pour cause de prescription,
– DIT EO2 AUVERGNE irrecevable en ses demandes, car prescrites et l’en déboute,
– DÉBOUTÉ EO2 et EO2 AUVERGNE de leurs plus amples demandes.
Vu l’appel interjeté par la SA EO2 et la SASU EO2 Auvergne le 24 octobre 2019,
Vu l’article 455 du code de procédure civile,
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 octobre 2021 pour la sa EO2 et la sasu EO2 Auvergne par lesquelles elles demandent à la cour de :
Vu l’article 1134 du code civil,
Dire partiellement mal jugé, dire bien appelé,
En conséquence,
Déclare r recevables et bien fondées les sociétés EO2 et la SASU EO2 AUVERGNE en leur appel.
Réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
– Dit recevable et bien fondée la fin de non-recevoir d’irrecevabilité à agir d’EO2, soulevée par la SAS MAGUIN et la SAS NEXTENERGIES pour défaut d’intérêt à agir, pour défaut de qualité et intérêt à agir
– Dit irrecevable EO2 en ses demandes émises par une personne dépourvue du droit
d’agir et l’en déboute,
– Dit recevable et bien fondée la fin de non-recevoir d’irrecevabilité à agir d’EO2 AUVERGNE soulevée par la SAS MAGUIN et la SAS NEXTENERGIES, pour cause de prescription,
– Dit EO2 AUVERGNE irrecevable en ses demandes, car prescrites et l’en déboute,
– Déboute EO2 et EO2 AUVERGNE de leurs plus amples demandes.
Statuant à nouveau :
– Dire et juger recevables et bien fondées les demandes formées par la SA EO2 à l’encontre de la SAS MAGUIN,
– Subsidiairement, dire et juger recevables et biens fondées les demandes formées par la SASU EO2 AUVERGNE,
En conséquence,
Au principal :
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, à procéder au remplacement global de l’installation de combustion et séchage, à ses frais, et à fournir et installer une installation conforme aux prescriptions contractuelles, sous astreinte de 2.000 Euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 1 mois après signification du jugement à intervenir.
Subsidiairement :
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, à réaliser, à ses frais exclusifs, et sous astreinte de 2.000 Euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 1 mois après signification du jugement à intervenir, les travaux suivants :
– fourniture et installation d’une grille de foyer conforme aux prescriptions
contractuelles, à savoir d’une surface de 12,5 m2 ;
– mise en conformité du volume du silo-doseur à 7,2 m3 ;
– calorifugeage externe du foyer (combustion et post-combustion) : mise en oeuvre de panneaux isolants avec tôles de garnissage et protection à la surface externe du foyer ;
– de la fourniture et mise en oeuvre d’un dispositif de réchauffage et refroidissement de l’huile de la centrale hydraulique ;
– mise en place et raccordement de sondes de température dans le foyer ;
-traitement et remise en état des zones de déformations et points de corrosion à la surface externe du foyer ;
– remplacement de la trappe d’accès au foyer.
À titre infiniment subsidiaire :
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à la SA EO2 ou subsidiairement à la SASU EO2 AUVERGNE, prise en la personne de son représentant légal, les sommes de :
-705.276 Euros TTC au titre des travaux sur le foyer
-3.840 Euros TTC au titre des travaux de traitement et remise en état des déformations et points de corrosion à la surface externe du foyer
– 3.200 Euros au titre de la trappe d’accès au foyer
– Mise en conformité du silo doseur : mémoire
– Calorifugeage externe du foyer : mémoire
– Fourniture et mise en oeuvre d’un dispositif de réchauffe et refroidissement de l’huile
de la centrale hydraulique : mémoire
– Mise en place et raccordement de sondes de température dans le foyer : mémoire
En toute hypothèse,
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à la SA EO2, subsidiairement à la SASU EO2 AUVERGNE, prise en la personne de son représentant légal, les sommes de :
– 61.680 Euros au titre de la perte sur granulés
– 2.055.496 Euros au titre du manque à gagner lié au surcoût du combustible
– 48.000 Euros HT au titre des travaux de garnissage du foyer en béton réfractaire à titre conservatoire
– 57.972,51 Euros TTC au titre de la réfection des réfractaires
– 62.951 Euros au titre du coût des arrêts de production 2009-2010
– 696.696,00 Euros au titre du coût des arrêts de maintenance ultérieurs
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– 440.657,00 Euros au titre du coût des arrêts du fait des travaux à réaliser, à parfaire
– 100.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice commercial subi en terme d’image et de positionnement
– Dire que les sommes allouées porteront intérêts à compter de l’assignation introductive
d’instance.
– Déclarer irrecevables et mal fondées toutes autres demandes, plus amples ou contraires
et confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, à payer et porter à la SA EO2, subsidiairement à la SASU EO2 AUVERGNE, prise en la personne de son représentant légal, la somme de 10.000 Euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– Condamner la SAS MAGUIN, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens, incluant les dépens de la procédure de référé et les frais d’expertise, et autoriser Maître [C] à recouvrer directement ceux dont elle aura fait l’avance.
Vu les dernières conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats pour la sas Maguin le 27 septembre 2021 par lesquelles elle demande à la cour de :
A titre principal :
Vu les articles 31 et 32 et ensemble 122 et 123 du Code de procédure civile,
– Constater que la SA EO2 immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 493 169 932 n’a ni qualité ni intérêt pour agir et en conséquence déclarer son action irrecevable.
Subsidiairement :
Vu les articles 1147 ancien et 1231-1 nouveau du Code civil,
– Dire, juger et constater que la SA EO 2 n’a subi aucun préjudice et la débouter de ses demandes, fins et conclusions.
– Dans tous les cas confirmer sur ce point le jugement du Tribunal de commerce de Paris.
Vu l’article 2224 du Code civil, et ensemble l’article 122 du Code de procédure civile,
– Dire, juger et constater que le point de départ la prescription de l’action de la SA EO2 Auvergne, si elle était déclarée recevable, est constitué par le procès-verbal de réception provisoire du 9 juin 2009.
– Constater que la SA EO2 Auvergne ne peut se prévaloir, ni de la suspension de la prescription édictée par l’article 2239 du Code civil, ni de l’interruption de la prescription prévue par l’article 2241 du même code.
– En conséquence déclarer l’action de la SA EO2 Auvergne irrecevable comme prescrite et confirmer sur ce point le jugement du Tribunal de commerce de Paris.
A titre infiniment subsidiaire
Vu les articles 1134 et 1147 ancien du Code civil,
– Débouter EO2 de sa demande nouvelle formulée à titre principal des condamnations de Maguin à procéder au remplacement global de l’installation de combustion et de séchage à ses frais et à fournir et installer une installation conforme aux dispositions contractuelles sous astreinte.
– Débouter EO2 de sa demande nouvelle présentée à titre subsidiaire des condamnations de Maguin à réaliser à ses frais exclusifs et sous astreinte différents travaux de mise en conformité.
– Débouter EO2 de sa demande subsidiaire en paiement de la somme de 705 276 euros pour mise en conformité de la grille du foyer ;
– Débouter EO2 de ses demandes :
– de 1 627 846 euros portée à 2 055 496 eurosau titre des coûts de combustible,
– de 440 657 euros au titre du préjudice économique,
– de 100 000 euros au titre du préjudice commercial,
– de sa demande indéterminée relative à la capacité du silo,
– de sa demande nouvelle de 61 680 euros au titre de la perte sur granulés,
– de sa demande nouvelle de 62 951 euros au titre du coût des arrêts de production 2009/2010,
– de sa demande nouvelle de 696 696 euros au titre des arrêts de maintenance ultérieurs.
– Dire et juger que les préjudices liés au remplacement du calorifugeage doivent être fixés à 48 000 euros HT au titre des travaux réalisés et 62 951 euros au titre des pertes de production corrélatives ;
– Débouter la société EO2 de sa demande de 57 972,51 euros TTC au titre des travaux de réfection des réfractaires ;
– Débouter EO2 de ses demandes indéterminées concernant les défauts du foyer et de celle de 3 200 euros au titre de la trappe d’accès au foyer et 3 840 euros concernant les déformations et points de corrosion.
– Débouter de même la société EO2 Auvergne des demandes formulées par EO2 qu’elle reprend à son compte à titre subsidiaire.
– Statuant sur la demande en garantie dirigée par Maguin contre Nextenergies, condamner Nextenergies à garantir Maguin des condamnations prononcées au profit de EO2 et/ou de EO2 Auvergne :
– Au titre des coûts de remplacement du calorifugeage et de la perte de marge corrélative,
– Et si elles sont accueillies en tout ou en partie au titre des demandes relatives aux réfections de réfractaires, aux corrosions et aux demandes indéterminées de mise en conformité du foyer, ainsi qu’au titre des demandes nouvelles concernant les coûts des arrêts de production, le coût des arrêts de maintenance ultérieurs, le coût des arrêts du fait des travaux à réaliser.
– Condamner in solidum EO2, EO2 Auvergne et Nextenergies ou l’une à défaut de l’autre dans des proportions à définir à payer à Maguin la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
– et aux dépens en ce compris les frais d’expertise dont le recouvrement sera effectué par la SELARL JRF & ASSOCIES représentée par Maître Stéphane FERTIER conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile
Vu les dernières conclusions pour la sas Nextenergies dont il n’est pas contesté qu’elles ont été notifiées aux parties le 15 juin 2021 comme il ressort du courrier du représentant de Nextenergies adressé par le réseau privé des avocats le 15 juin 2021, et renvoyées en fin de procédure, par lesquelles elle demande à la cour de :
Vu les articles 31, 32, 122 et 123 du Code de procédure civile,
Vu l’article 2224 du Code civil et l’article L110-4 du Code de commerce,
Vu l’article 1353 du Code civil, Vu les articles 1231 et suivants du Code civil,
Vu le jugement entrepris,
A titre principal
– confirmer le jugement rendu le 20 septembre 2019 par le tribunal de commerce de paris,
ce faisant,
– declarer la société eo2 irrecevable à agir pour défaut d’intérêt et de qualité à agir
– en consequence, la debouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
– constater que la demande de garantie de la société maguin à l’encontre de la société nextenergies est sans objet et l’en débouter ;
– declarer la société eo2 auvergne irrecevable à agir pour cause de prescription.
– en consequence, la debouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
– constater que la demande de garantie de la société maguin à l’encontre de la société next energies est sans objet et l’en débouter ;
– condamner in solidum les sociétés eo2 et eo2 auvergne à verser à la société nextenergies la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens
à titre strictement subsidiaire, sur le fond
– prendre acte que la société maguin reconnaît son erreur et admet sa responsabilité dans les différences que comportent ses engagements contractuels à l’égard de eo2 et ceux de nextenergies
– dire et juger que les non conformités contractuelles nées des différences contractuelles ne concernent pas la société nextenergies et engagent la responsabilité exclusive de la société maguin conformément aux conclusions du rapport d’expertise
– prendre acte que la société maguin forme un appel en garantie partiel à l’égard de la société nextenergies reconnaissant que la majeure partie des demandes principales ne concerne pas next energies
– prendre acte que la société nextenergies a déjà procédé et pris en charge le remplacement de l’isolation intérieure du foyer.
– dire et juger infondées et injustifiées les demandes de la société maguin à l’encontre de la société nextenergies.
– par consequent, debouter la société maguin et toute autre parties de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société nextenergies.
– condamner solidairement les sociétés eo2, eo2 auvergne et maguin à verser à la société nextenergies la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ainsi qu’aux entiers dépens.
Vu l’ordonnance de clôture du 18 novembre 2021,
SUR CE, LA COUR,
Sur la recevabilité de l’action
Aux termes de l’article 55 du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile, les dispositions de ce décret confiant les fins de non-recevoir à la compétence exclusive du conseiller de la mise en état désigné ne sont applicables qu’aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020. En l’espèce, la déclaration d’appel en date du 24 octobre 2019 soumet le litige au droit procédural antérieur et la cour est ainsi compétente pour statuer sur ces demandes.
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt et la prescription.
La qualité et l’intérêt à agir sont régis par l’article 31 du même code selon lequel l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé, et l’article 32 selon lequel est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.
Par ailleurs, en vertu de l’article 9 de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, les contrats conclus avant le 1er octobre 2016 demeurent soumis à la loi ancienne, ce qui est le cas en l’espèce, les contrats litigieux datant de novembre et décembre 2007.
En l’espèce, il ressort des pièces produites que si le contrat de fourniture de l’installation a été conclu entre EO2 et Maguin, les travaux ont cependant été réalisés dans l’usine de EO2 Auvergne qui en a, seule, suivi l’exécution (lettres des 27 mars et 2 octobre 2008 : « nous faisons le point ce jour sur l’état d’avancement de notre commande auprès de votre société », pièces 3 et 4 EO2), en a également réglé seule les factures (pièce 3 EO2), et a signé le procès-verbal de réception provisoire le 9 juin 2009 en émettant plusieurs réserves (pièce 5 EO2).
Par ailleurs, il résulte de l’acte de caution du 15 janvier 2008 produit par EO2 (pièce 9) que EO2 Auvergne, la filiale, a sollicité auprès de Natixis Energeco (à hauteur de 67%) et Oseo Financement (à hauteur de 33%) « le financement d’une unité de fabrication de granulés de bois dans un bâtiment appartenant à la communauté de communes de Herment » sous la forme d’un crédit bail pour un montant total de 5.500.000 euros HT.
Il s’en déduit que EO2, dont les bilans font apparaître des immobilisations du matériel pour un montant de 3.418.853 euros en 2016 (pièce 8 Maguin), de 3.886 599 euros en 2017 au titre des installations techniques, matériel et outillage industriel (pièce 11 Maguin) et dans les mêmes proportions en 2018 (4,5 millions, pièce 11) et 2021 (5,6 millions, pièce 12), a financé seule les équipements de l’unité de production développée dans le Puy de Dôme, par ce crédit-bail, dont la fourniture de l’installation commandée à Maguin dont elle a d’ailleurs réglé seule les factures.
Le fait que EO2 soit caution pour ce financement par Natixis Energeco et Oseo financement, lui ouvre certes un droit d’action concernant ce crédit bail, mais aucun pour les contrats de fourniture ainsi financés.
Or, il résulte de ce qui précède que EO2 Auvergne qui a payé l’intégralité des prestations de Maguin prévues au contrat du 19 novembre 2007, en a suivi l’exécution et signé les procès-verbaux de réception, a bénéficié d’un transfert de ce contrat, cédé par EO2, sans que cette cession, antérieure à la réforme de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, n’ait requis un écrit pour être valable.
Les extraits du registre du commerce et des sociétés mentionnent par ailleurs que EO2 et EO2 Auvergne sont bien deux entités distinctes, la première inscrite au RCS de Nanterre, la seconde au RCS de Clermont-Ferrand.
Or, si l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l’action et que l’existence du préjudice invoqué par le demandeur n’est pas une condition de recevabilité de l’action mais de son succès, une société mère ne peut cependant pas se substituer à sa filiale pour intenter à ses lieu et place une action visant à la réparation d’un préjudice subi par cette seule filiale, la seule relation de contrôle de celle-ci par la société mère ne conférant pas à cette dernière un intérêt à agir.
Ainsi, le fait que « EO2 consolide intégralement les comptes de la SAS EO2 AUVERGNE, qui représente 80 % du groupe EO2, de sorte que la SA EO2 subit nécessairement les pertes de la SAS EO2 AUVERGNE » ne lui confère aucun intérêt à agir.
Partant l’action de EO2 est irrecevable pour défaut de qualité et d’intérêt à agir.
EO2 Auvergne, seule titulaire du droit et de l’intérêt à agir contre Maguin, n’est intervenue volontairement à l’instance que le 17 mai 2018.
Or, en application de l’article L110-4 du code de commerce et de l’article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
En l’espèce, il est rapporté par le procès-verbal de réception provisoire que EO2 Auvergne a eu connaissance du défaut de conformité de l’installation à la commande passée à Maguin pour cette installation dès le 9 juin 2009, cette réception faisant état dans ses réserves, notamment, d’une surface de grille du foyer diminuée de 21,5 % par rapport au cahier des charges et au contrat, d’une diminution de la capacité de la trémie, de problèmes de voûte conduisant au blocage de biomasses et à l’absence de vidange totale de la trémie voire à son blocage lors des premiers gels, et d’un problème d’isolation du foyer faute de calorifugeage extérieur prévu au contrat, lesquels sont effectivement à l’origine de la procédure actuelle.
Si l’effet interruptif de prescription du fait d’une demande en justice, en l’espèce l’assignation en référé par EO2 le 7 juin 2010 à l’origine de l’expertise dont le rapport sera déposé le 31 juillet 2015, peut être étendu à une autre action, lorsque les deux actions tendent aux mêmes fins, encore faut-il que ces deux actions soient engagées par la même personne, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Partant, l’interruption de la prescription entre 2010 et 2015 ne peut bénéficier à EO2 Auvergne qui dès lors, ayant formée ses premières demandes le 17 mai 2018 alors qu’elle avait connaissance des désordres qu’elle invoque depuis le 9 juin 2009, voit son action irrecevable comme étant prescrite.
Il y a donc lieu d’infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu’il a retenu la qualité à agir de EO2 et de le confirmer pour l’ensemble de ses autres dispositions, y compris sur l’absence d’objet, en conséquence, de l’appel en garantie de Maguin contre Nextenergies.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement étant confirmé pour l’essentiel de ses dispositions, il convient de le confirmer en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.
Eu égard à ce qui précède il y a lieu, en appel, de laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens en appel et de ses propres frais irrépétibles de sorte que les demandes de ce chef seront rejetées.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
INFIRME le jugement en ce qu’il a jugé EO2 titulaire de la qualité à agir,
Statuant à nouveau,
JUGE EO2 irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT