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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 56C
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 13 OCTOBRE 2022
N° RG 22/03341 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VGMW
AFFAIRE :
S.A. SWISSBIOLAB
C/
S.A.R.L. SICOFOR-PACKAGING & SOLUTIONS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 04 Mai 2022 par le Tribunal de Commerce de CHARTRES
N° RG : 2021J00143
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Emmanuel MOREAU
Me Oriane DONTOT
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A. SWISSBIOLAB
Registre du commerce du Haut-Valais n° CHE 312 450 305
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2] – SUISSE
Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 22/03340 (Fond)
Représentant : Me Emmanuel MOREAU de la SCP MOREAU E. & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C 147 – N° du dossier 20228925
Représentant : Me Emmanuel MOREAU substituant à l’audience Me Jack CANNARD, Plaidant, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS, vestiaire : 10
APPELANTE
****************
S.A.R.L. SICOFOR-PACKAGING & SOLUTIONS
RCS Chartres n° 792 892 754
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 22/03340 (Fond)
Représentant : Me Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20220497
Représentant : Me Claire GINISTY MORIN, Plaidant, avocat au barreau de Chartres
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 Septembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
EXPOSE DU LITIGE
Les 13 janvier, 11 mai et 9 septembre 2020, la société Sicofor Packaging & Solutions, ci-après dénommée la société Sicofor, a adressé trois devis relatifs au conditionnement de produits cosmétiques à la société de droit suisse Swissbiolab qui les a acceptés. Deux de ces trois devis ont fait l’objet de livraisons.
Invoquant l’existence de graves malfaçons, la société Swissbiolab a refusé de régler les factures émises par la société Sicofor.
Par acte du 22 octobre 2021, la société Sicofor a assigné la société Swissbiolab devant le tribunal de commerce de Chartres afin d’obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 73.335,06 €.
Dans le cadre de cette instance, la société Swissbiolab a soulevé in limine litis une exception d’incompétence du tribunal de commerce de Chartres au profit du tribunal cantonal du [Localité 1] en Suisse.
Par jugement du 4 mai 2022, le tribunal de commerce de Chartres a :
– Déclaré la société Swissbiolab recevable mais mal fondée en son exception d’incompétence;
– S’est déclaré compétent ;
– A renvoyé l’affaire pour être plaidée au fond à l’audience du mardi 28 juin 2022;
– A condamné la société Swissbiolab à payer à la société Sicofor la somme de 2.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– A condamné la société Swissbiolab aux entiers dépens.
Par déclaration du 17 mai 2022, la société Swissbiolab a interjeté appel du jugement.
Par ordonnance du 23 juin 2022, le Président de la 12ème chambre de la cour d’appel de Versailles a autorisé la société Swissbiolab à assigner à jour fixe la société Sicofor à l’audience du mardi 13 septembre 2022 à 14h00.
Par ordonnance du 8 septembre 2022, le conseiller de la mise en état de la 12ème chambre de la cour d’appel de Versailles a joint les procédures inscrites sous les n° RG 22/03340 et n° RG 22/03341 sous le n° RG 22/03341.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2022, la société Swissbiolab demande à la cour de :
– Recevoir la la société Swissbiolab en son appel et l’en dire recevable et bien fondé ;
En conséquence de quoi,
– Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Chartres le 04/05/2022 ;
Statuant à nouveau,
– Déclarer la clause d’attribution de compétence territoriale non écrite ;
– Déclarer irrecevable la société Sicofor en l’ensemble de ses demandes devant le tribunal de commerce de Chartres ;
– Déclarer le tribunal de commerce de Chartres incompétent au profit des juridictions de l’État de la Suisse ;
– Renvoyer en tout cas la société Sicofor à mieux se pourvoir, notamment au profit du tribunal cantonal du [Localité 1] ;
– Débouter la société Sicofor de l’intégralité de ses demandes, fins et moyens, les rejeter;
– Condamner la société Sicofor à payer à la société Swissbiolab la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance et de l’instance de premier degré.
Par dernières conclusions notifiées le 12 septembre 2022, la société Sicofor Packaging & Solutions demande à la cour de :
– Déclarer mal fondée la société Swissbiolab en son appel et en ses demandes ;
– Confirmer la décision du tribunal de commerce de Chartres en date du 4 mai 2022, en ce que ce dernier s’est déclaré compétent ;
– Déclarer en conséquence compétent le tribunal de commerce de Chartres.
– Débouter la société Swissbiolab de l’ensemble de ses demandes ;
– Condamner la société Swissbiolab à verser à la société Sicofor la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société Swissbiolab aux entiers dépens de l’instance de la présente instance et de celle de premier degré, dont distraction au profit de Me Oriane Dontot, JRF & Associés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur l’exception d’incompétence
La société Swissbiolab demande à la cour d’écarter la clause attributive de compétence territoriale considérant qu’elle ne figure pas de façon très apparente au contrat, en méconnaissance des dispositions de l’article 48 du code de procédure civile. Elle précise que la clause attributive de compétence :
– est libellée dans la même taille de police et dans la même typologie que le reste des clauses, sans aucun caractère gras, italique ou attirant l”il d’une quelconque manière, dans le cadre d’une présentation non aérée ne comportant aucun espace,
– porte le titre « LITIGES », intitulé qui ne saurait faire référence ou interpeller le lecteur sur une question de compétence territoriale.
La société Sicofor conclut à la confirmation du jugement du tribunal de commerce ayant rejeté l’exception d’incompétence. L’intimée se prévaut des dispositions de l’article 23 de la convention de Lugano relative à la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, du 30 octobre 2007, s’appliquant dans le cadre des relations entre les États de l’Union européenne et ceux de l’Association européenne de libre-échange, dont fait partie la Suisse.
La société Sicofor considère que la clause satisfait aux conditions de l’article 48 dès lors qu’elle est rédigée dans le cadre d’un paragraphe apparent consacré aux litiges, dans une police et une taille lisibles et donc apparentes, sans qu’il soit nécessaire de la distinguer des autres clauses. L’intimée souligne que la société Swissbiolab, en validant les devis, a accepté les conditions générales de vente.
*****
A titre liminaire, la cour constate que la société Swissbiolab ne conteste pas la possibilité de recourir à une clause attributive dans le cadre d’un contrat conclu entre une société française et une société de droit suisse, possibilité au demeurant confirmée par les dispositions de l’article 23 de la convention de Lugano qui prévoient que «’Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État lié par la présente Convention, sont convenues d’un Tribunal ou de Tribunaux d’un État lié par la présente Convention pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les Tribunaux de cet État sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraires des parties (‘)’».
L’article 48 du code de procédure civile dispose que «’Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée’».
L’aspect « très apparent » que doit revêtir une clause attributive de compétence territoriale ne tient pas spécialement à la typographie du texte, mais surtout à la situation de la clause dans le corps du contrat qui doit permettre à la clause d’être lisible. Le critère essentiel est celui de l’attention du lecteur.
En l’espèce, les conditions générales de vente des contrats litigieux conclus par les parties comportent, en première page, une clause attributive de compétence ainsi rédigée :
« LITIGES
Hormis les litiges dus aux conditions de transports, aucune réserve ne sera acceptée après le délai d’un mois consécutif à l’expédition de la marchandise. Toute marchandise qui n’a pas fait l’objet de réserve ou réclamation écrite pendant la période suscitée sera réputée conforme au cahier des charges.
Si un traitement amiable n’était pas possible en cas de réclamation, l’affaire serait portée au Tribunal de Commerce de Chartres (Eure et Loir). » ‘
La clause attributive de compétence fait ainsi l’objet, dans le contrat litigieux, en première page des conditions générales de vente, d’un paragraphe particulier se distinguant clairement des autres et comportant un titre explicite, à savoir «’LITIGES’», rédigé en caractères gras, plus grands et en majuscules, attirant de cette manière l’attention du lecteur. Le corps de la clause est écrit dans une taille de police normale et parfaitement lisible, sans nécessité de comporter des caractères spécifiques. Elle stipule, sans équivoque, qu’en l’absence d’issue amiable à une réclamation, l’affaire doit être portée devant le tribunal de commerce de Chartres.
Le représentant de la société Swissbiolab a apposé sa signature sur le devis sous la mention selon laquelle il «’reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales de vente jointes’», celles-ci figurant au dos de la dernière page du devis signée par la société Swissbiolab.
Il se déduit de ce qui précède que la clause dérogatoire de compétence est conforme aux conditions posées à l’article 48 précité.
Le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence et s’est déclaré compétent pour connaître du litige.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Compte tenu de la décision, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
Par ailleurs, en application de l’article 696 du code de procédure civile, la société Swissbiolab, qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel, dont distraction au profit de Me Oriane Dontot, JRF & Associés. La demande de la société Sicofor concernant les dépens de première instance doit être déclarée irrecevable comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée, dès lors que le jugement déféré a déjà condamné la société Swissbiolab à les supporter.
La société Swissbiolab sera en outre condamnée à verser à la société Sicofor une indemnité de’2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déclare recevable l’appel interjeté par la société Swissbiolab,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne la société Swissbiolab aux dépens d’appel dont distraction au profit de Me Oriane Dontot, JRF & Associé,
Déclare irrecevable la demande de la société Sicofor concernant les dépens de première instance,
Condamne la société Swissbiolab à payer à la société Sicofor la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,