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Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 5
ORDONNANCE DU 10 JANVIER 2023
(n° /2023)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/15587 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGLJC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Novembre 2021 Tribunal de Commerce de CRETEIL – RG n° 2021F00313
Nature de la décision : Contradictoire
NOUS, Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.
Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDEUR
Monsieur [J] [B]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Et assisté de Me Christel BARANES BALDOCCHI, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : E0539
à
DÉFENDEUR
Monsieur [R] [K]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Jérémy AFANE-JACQUART, avocat au barreau de PARIS, toque : C0292
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 29 Novembre 2022 :
Par jugement du 30 novembre 2021 rendu entre, d’une part, M. [B], d’autre part, M. [K], le tribunal de commerce de Créteil a :
– Condamné M. [B] à payer à M. [K] la somme de 162 750 euros avec intérêt de retard au taux de 5% au dessus du taux de base allemand sur la somme de 73 500 euros à compter du 31 mars 2017 jusqu’au 31 mai 2017 et sur la somme de 162 750 euros à compter du 31 mars 2017 ;
– Condamné M. [B] à payer à M. [K] la contre valeur en euros de la somme de 10 957 livres sterling augmentée du taux d’intérêt légal à compter du lendemain de la date de délivrance de l’assignation du 31 décembre 2020 ;
– Condamné M. [B] à payer à M. [K] la somme de 5 399,27 euros avec intérêt au taux de base allemand augmenté de 5% à compter de la date de délivrance de l’assignation du 31 décembre 2020 et jusqu’à parfait paiement ;
– Débouté M. [K] de sa demande de livraison du tableau concerné et des ses demandes subsidiaires en relation avec cette demande ;
– Dit irrecevable la demande de M. [K] au titre de l’article L 111-8 du code des procédures civiles d’exécution ;
– Condamné M. [B] à payer à M. [K] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit ;
– Condamné M. [B] à supporter les dépens.
Par déclaration du 24 décembre 2021, M. [B] a interjeté appel de cette décision.
Par acte d’huissier du 23 septembre 2022, M. [B] a fait assigner en référé M. [K] devant le premier président de cette cour afin, à titre principal, de constater que M. [B] est recevable en ses demandes, les dire bien fondées et y faisant droit, constater que M. [B] a d’ores et déjà spontanément réglé la somme de 140 000 euros versés sur le compte CARPA du conseil de l’intimé, au titre de l’exécution provisoire, constater qu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation du jugement dont appel, constater que l’exécution provisoire de la décision déférée risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives au regard de la situation financière de M. [B], constater que M. [K] ne démontre pas qu’il est en capacité de restituer les sommes assorties de l’exécution provisoire si le jugement du 30 novembre 2021 venait à être infirmé. Dès lors, suspendre l’exécution provisoire. Subsidiairement, dire que M. [K] ne pourra revendiquer le versement des condamnations prononcées qu’après avoir produit une garantie bancaire susceptible d’assurer M. [B] de la restitution en temps voulu des mêmes sommes, dire par conséquent que la garantie bancaire devra être à hauteur de la totalité des condamnations prononcées par le tribunal de commerce de Créteil et dire que M. [K] devra entretenir ou prolonger cette garantie jusqu’à ce que la cour se soit prononcée dans le cadre de la procédure sur le fond. Très subsidiairement, autoriser M. [B] à verser en séquestre les condamnations prononcées, dire que les sommes resteront consignées jusqu’à ce que la cour d’appel se prononce sur le jugement du 30 novembre 2021, désigner la personne physique ou morale qui assumera la mission de séquestre et de détenteur des sommes litigieuses et réserver à la cour saisie au fond de se prononcer sur les sommes dues au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que sur les dépens. Par conclusions en réplique déposées lors de l’audience du 29 novembre 2022 et soutenues oralement lors de cette audience, M. [B] a maintenu ses précédentes demandes principales, subsidiaires et très subsidiaires.
Par conclusions déposées à l’audience du 29 novembre 2022 et soutenues oralement lors de cette audience, M. [K] demande au premier président de débouter M. [B] de sa demande de suspension de l’exécution provisoire, de condamner M. [B] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens de cette instance incidente.
Oralement à l’audience, il a indiqué demander la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au lieu de 5 000 euros mentionnée dans ses conclusions.
SUR CE,
En vertu de l’article 514-3 du code de procédure civile, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er janvier 2020, en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
– sur la recevabilité de la demande en suspension de l’exécution provisoire :
M. [K] soutient que la demande de M. [B] est irrecevable dès lors que le conseiller de la mise en état a jugé par ordonnance du 16 novembre 2022 radié l’affaire pour défaut d’exécution de la décision de première instance en application de l’article 524 du code de procédure civile.
M. [B] considère que dans le délai de péremption de l’instance de deux ans il peut toujours demander la réinscription de cette affaire au rôle. Dans ces conditions, sa demande de suspension de l’exécution provisoire n’est pas irrecevable.
Par ordonnance du 16 novembre 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a jugé qu’”aucun des éléments communiqués par M. [B] ne démontre que l’exécution du jugement dont appel en son intégralité serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives pour lui-même, ni qu’il se trouve dans l’impossibilité d’exécuter la décision, alors même qu’il en a réglé la majeure partie. L’affaire sera donc radiée du rôle de la Cour. Sa réinscription au rang des affaires de la Cour pourra être autorisée par le conseiller de la mise en état, sauf péremption, sur justification de l’exécution intégrale de la décision attaquée, conformément aux termes de l’article 524 alinéa 8 du code de procédure civile.”
Selon l’article 524 du code de procédure civile, la décision de radiation est une mesure d’administration judiciaire qui suspend les délais impartis à l’intimé mais pas ceux impartis à l’appelant et ces délais recommencent à courir à compter de la notification de la décision autorisant la réinscription de l’affaire au rôle de la cour. Le délai de péremption de l’instance court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation et le premier président ou le conseiller de la mise en état autorise, sauf s’il constate la péremption d’instance, la réinscription de l’affaire au rôle de la cour sur justification de l’exécution de la décision attaquée.
C’est ainsi que la radiation est une mesure d’administration judiciaire provisoire qui fait que l’affaire n’est plus inscrite au rôle de la cour mais ne fait pas disparaître la déclaration d’appel et l’affaire peut toujours être réinscrite au rôle dès lors que la cause de la radiation a été supprimée et que la demande est effectuée dans le délai de deux ans de la péremption de l’instance.
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la demande de M. [B] de suspension de l’exécution provisoire attachée à la décision du tribunal de commerce de Créteil du 30 novembre 2021 n’est pas irrecevable à la suite de l’ordonnance sur incident du conseiller de la mise en état.
– sur la demande d’arrêt de l’exécution provisoire :
M. [B] considère qu’il dispose d’un moyen sérieux d’annulation et de réformation du jugement entrepris dans la mesure où le tribunal de commerce a jugé cette affaire en son absence et sans qu’il puisse faire valoir aucun argument. Le tribunal de commerce n’a pas tenu compte du transfert de propriété de certains objets mobiliers à M. [K] en date du 13 septembre 2017 et a retenu à tord que le droit allemand devait s’appliquer concernant les trois premiers contrats, les pénalités de retard appliquées sont donc contestables et si on applique les dispositions de ces trois contrats il convenait de retenir la compétence du tribunal de Berlin et non celui de Créteil. C’est ainsi que le jugement entrepris du tribunal de Créteil encourt la réformation. Il estime en outre que l’exécution provisoire entraîne des conséquences excessives susceptible de compromettre de manière irréversible son équilibre financier.
M. [K] estime que la demande de M. [B] est irrecevable, que ce dernier exerce une activité occulte car il n’est pas déclaré au registre du commerce et des sociétés allemand et que son adresse professionnelle est erronée et il ne démontre pas ni avoir des moyens sérieux de réformation de la décision entreprise ni que l’exécution provisoire entraînerait des conséquences manifestement excessives.
En l’espèce, l’assignation est du 31 mai 2021 et le jugement litigieux ne rapporte aucune observation de M. [B] sur l’exécution provisoire.
– sur le moyen sérieux d’annulation ou de réformation :
Le seul fait que la décision de première instance ait été rendue en l’absence de M. [B] ne constitue pas en soit un moyen sérieux de réformation de cette décision, dès lors que ce dernier avait été valablement assigné.
Le demandeur fonde principalement son raisonnement sur le contrat du 13 septembre 2017 qu’il qualifie de transfert de propriété et qu’il considère comme annulant les trois précédents. Or, ce contrat était connu des premiers juges qui en ont tenu compte et qui en ont fait une appréciation qui diffère de celle de M. [B], sans qu’il soit démontré que cette appréciation est manifestement erronée. En outre, la compétence territoriale soulevée par le demandeur du tribunal de commerce de Berlin en application de trois premiers contrats a vocation à s’appliquer entre commerçants. Or, M. [K] est un particulier et non un commerçant et il n’est pas évident que la clause attributive de compétence ait vocation à s’appliquer à un simple particulier non commerçant.
C’est ainsi qu’aucun moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision entreprise ne s’impose avec l’évidence requise en matière de référé.
– sur l’existence de conséquences manifestement excessives révélées postérieures à la décision de première instance :
Selon la jurisprudence, les conséquences manifestement excessives s’apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.
Il y a lieu de noter que l’existence de conséquences manifestement excessives est un critère cumulatif avec le moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision entreprise, en application des dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile. Dès lors que le premier critère n’est pas rempli, il n’y a pas lieu d’apprécier si les conditions du second critère sont réunies en l’espèce.
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter la demande d’arrêt de l’exécution provisoire jusqu’à ce que la cour d’appel de Paris ait statué sur les mérites de l’appel présentée par M. [B].
Il n’y a pas lieu non plus d’ordonner la consignation de la somme objet de la condamnation pécuniaire de première instance auprès d’un tiers dès lors que la somme de 140 000 euros a déjà été versée soit les trois quart de la somme effectivement due et qu’il n’est pas démontré l’existence d’un risque de non remboursement de cette somme par M. [K] en cas d’infirmation de la décision de première instance. Il n’y a pas lieu non plus d’ordonner que M. [K] constitue des garanties bancaires pour justifier de sa solvabilité dans la mesure où il n’est à ce jour débiteur d’aucune somme d’argent à l’égard de M. [B].
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [K] ses frais irrépétibles non compris et une somme de 2 000 euros lui sera allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les dépens seront laissés à la charge de M. [B].
PAR CES MOTIFS,
Déclarons recevable la demande présentée par M. [B] sur le fondement de l’article 514-3 du code de procédure civile ;
Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par M. [B] ainsi que la demande subsidiaire de consigner les sommes dues auprès d’un tiers détenteur et très subsidiaire de constitution de garantie bancaire de la part de M. [K] ;
Rejetons la demande présentée par M. [B] de réserver les condamnations sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens ;
Condamnons M. [B] à payer à M. [K] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Laissons à M. [B] la charge des dépens de l’instance.
ORDONNANCE rendue par M. Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, assisté de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, Le Président