Par un arrêt du 16 mai 2024, la cour a déclaré irrecevables les demandes de M. [N] [L] concernant l’omission de statuer et les demandes de condamnation à l’encontre de M. [I] [M]. Elle a confirmé la recevabilité de l’action en paiement de la SARL DS Développement contre M. [N] [L], tout en réformant le jugement initial qui avait débouté la société de ses demandes en paiement. La cour a réduit les sommes dues au titre de la clause pénale à un euro et a ordonné à la société de produire un décompte des sommes dues, en tenant compte des paiements effectués par M. [N] [L] et en appliquant un taux d’intérêt contractuel de 11 %.
Le 24 mai 2024, la société DS Développement a soumis un décompte. M. [N] [L] a ensuite notifié de nouvelles conclusions le 31 mai 2024, demandant l’annulation de la stipulation relative aux intérêts du prêt, l’application du taux d’intérêt légal, et le paiement d’une somme de 90 874,52 euros. Il a également contesté le décompte de la société, arguant qu’il violait les dispositions du code civil concernant la capitalisation des intérêts. La cour, statuant à nouveau, a débouté M. [N] [L] de toutes ses demandes et a condamné ce dernier à payer à la société DS Développement la somme de 400 000 euros, avec des intérêts au taux de 11 % depuis avril 2013, tout en appliquant la capitalisation des intérêts annuellement. M. [N] [L] a également été condamné à un euro au titre de la clause pénale et à payer des sommes en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 17/10/2024
N° de MINUTE : 24/780
N° RG 21/02048 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TRWP
Jugement rendu le 25 Février 2021 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Douai
APPELANT
Monsieur [P] [L]
né le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 9] – de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Nicolas Drancourt, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [N] [L]
né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 10] – de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 1]
Représenté par Me Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Philippe Samak, avocat au barreau de Nice, avocat plaidant
SARL DS Développement représentée par Monsieur [I] [M]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Florent Méreau, avocat au barreau de Lille, avocat constitué aux lieu et place de Me Etienne Chevalier, avocat
DÉBATS à l’audience publique du 12 juin 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d’instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024 après prorogation du délibéré du 17 octobre 2024 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Anne-Sophie Joly, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 12 juin 2024
Par arrêt du 16 mai 2024, la 8ème chambre section 1 de la cour a :
– déclaré irrecevable la demande de M. [N] [L] relative à l’omission de
statuer ;
– déclaré irrecevables les demandes de condamnation de M. [N] [L] formées à l’encontre de M. [I] [M] ;
– confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré recevable, comme non atteinte par la prescription prévue par l’article L.137-2 devenu L.218-2 du code de la consommation l’action en paiement de la SARL DS développement à l’encontre de M. [N] [L] ;
– réformé le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL DS développement de ses demandes en paiement à l’encontre de M. [N] [L] ;
Statuant à nouveau ;
– réduit les sommes dues au titre de la clause pénale incluse à l’acte de prêt à 1
euro ;
Sur le quantum de la créance de la société DS Développement à l’encontre de M. [N] [L]:
– ordonné à la société DS développement de produire un décompte des sommes dues par M. [N] [L] en tenant compte des différents règlements effectués par lui et en appliquant seulement le taux d’intérêt de 11 % contractuel depuis l’origine, à l’exclusion de la majoration de 4 % ;
– ordonné la réouverture des débats à l’audience de la 8ème chambre – section 1 de la cour du 12 juin 2024 à 9 heures 15 afin de permettre à la société DS développement de produire ledit décompte ;
– révoque l’ordonnance de clôture rendue le 25 janvier 2024 ;
– dit que l’ordonnance de clôture sera rendue le 12 juin 2024 ;
– réserve les autres demandes et les dépens.
*
La société DS Développement a communiqué un décompte le 24 mai 2024 (sa pièce n° 24).
M. [N] [L] a notifié de nouvelles conclusions le 31 mai 2024, aux termes desquelles il demande à la cour de :
Vu l’article L.341-1 du code de la consommation,
vu le TEG erroné,
vu les pièces versées aux débats,
– annuler la stipulation relative aux intérêts du prêt du 25 septembre 2012 conclu entre M. [I] [M] et M. [N] [L],
– dire que le taux d’intérêt légal est le seul applicable,
– condamner la société DS développement à payer la somme de 90’874,52 euros à M. [N] [L],
– débouter la société DS développement de son appel incident,
– débouter la société DS développement de ses demandes fondées sur un décompte capitalisant mensuellement les intérêts en violation du contrat prévoyant un taux annuel et des dispositions de l’article (1154) 1343-2 du code civil,
– condamner la SARL DS développement à payer à M. [N] [L] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
M. [N] [L] fait valoir que les parties ont entendu volontairement soumettre l’opération de crédit aux dispositions du code de la consommation.
Par ailleurs, il critique le décompte produit par la société DS développement en ce qu’il comptabilise et capitalise les intérêts mensuellement en violation de l’article 1343-2 anciennement 1154 du code civil.
A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes tendant à voir « constater, dire et juger » ne sont pas en l’espèce des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile mais le rappel des moyens.
Sur les demandes de M. [N] [L]
Il est rappelé que dans son arrêt du 16 mai 2024, la cour a relevé que le prêt conclu le 25 septembre 2012 entre M. [M], aux droits duquel vient la société DS développement, et M. [N] [L] n’était pas soumis au code de la consommation, notamment à la réglementation de ce code relative au TEG, que le TEG prévu à l’acte n’était donc pas erroné, que le taux d’intérêt n’était pas usuraire, et que la clause d’intérêt ne pouvait être annulée.
La cour a en conséquence jugé que le jugement dont appel devait être réformé en ce qu’il a débouté la société DS Développement de sa demande en paiement à l’encontre de M. [N] [L].
Dès lors, le nouveau moyen soulevé par M. [N] [L] tiré de ce que les parties ont volontairement soumis leur acte de prêt au droit de la consommation, destiné à voir remettre en cause le point déjà tranché par la cour dans son arrêt en date du 16 mai 2024 et revêtu de la chose jugée, n’est pas recevable.
Par ailleurs, en estimant que le TEG n’était pas erroné, et en réformant le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL DS développement de sa demande en paiement contre M. [N] [L], la cour a, dans son arrêt du 16 mai 2024, implicitement rejeté la nullité de la stipulation d’intérêts du prêt et la demande d’application de l’intérêt légal. Dès lors, les demandes de nullité de la stipulation d’intérêts et tendant à voir dire que le taux d’intérêt légal doit être appliqué, formées pour la première fois par M. [N] [L] aux termes de ses conclusions après réouverture des débats du 11 juin 2024, seront rejetées.
Pour les mêmes motifs, M. [N] [L] sera débouté de sa demande tendant à voir condamner la société DS Développement à lui payer la somme de 90 874,52 euros en remboursement de l’indu d’intérêts versés au titre du prêt du 25 septembre 2012, et le jugement entrepris sera réformé de ce chef.
Sur le quantum de la créance de la société DS développement
La société DS développement produit un décompte des sommes restant dues par M. [N] [L], arrêté au 1er juin 2024, aux termes duquel il serait dû la somme de 181 989,42 euros, constitué des intérêts de retard au taux de 11 %.
M. [L] critique à juste titre le décompte en ce qu’il comptabilise et capitalise les intérêts mensuellement, en violation de l’article 1343-2 anciennement 1154 du code civil.
En effet, l’article 1154 du code civil dans sa rédaction applicable à la date de conclusion du prêt dispose que ‘Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière.’
De plus, l’acte de prêt du 25 septembre 2012 prévoit en son article 5 que ‘les intérêts seront calculés annuellement et se capitaliseront s’ils n’ont pas fait l’objet d’un paiement dans l’année. En cas de remboursement anticipé, les intérêts seront calculés prorata temporis’.
Or, l’examen du décompte produit par la société DS développement montre que les intérêts de retard ont été capitalisés mensuellement, et non annuellement. La cour ne peut donc se fonder sur ce décompte pour entrer en voie de condamnation à l’encontre de M. [N] [L].
En conséquence, il y a lieu de condamner M. [N] [L] à payer à la société DS développement la somme de 400 000 euros, augmentée des intérêts au taux de 11 % depuis avril 2013, à l’exclusion de la majoration de 4 % et en appliquant la capitalisation des intérêts annuellement et non mensuellement, dont il conviendra de déduire l’ensemble des règlements effectués par M. [N] [L] à hauteur de 495 000 euros aux dates où ils ont été effectués.
M. [N] [L] sera également condamné à payer la somme de un euro au titre de la clause pénale réduite.
L’action en paiement de la société DS Développement prospérant à l’encontre de M. [N] [L], l’action en responsabilité formée à titre subsidiaire par la société DS Développement l’encontre de M. [P] [L], rédacteur de l’acte de prêt du 25 septembre 2012 litigieux, sera rejetée.
Le jugement entrepris sera donc réformé en ce qu’il a déclaré recevable cette action et a condamné M. [P] [L] à payer à la société DS développement la somme de 150 535,09 euros en réparation de son préjudice financier, avec intérêts au taux légal à compter du jugement et capitalisation des intérêts par période annuelle.
Sur la demande de condamnation pour résistance abusive formée par la société DS développement à l’encontre de M. [N] [L]
Aux termes de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, dans les obligations qui se bornent au paiement d’une certaine somme, les dommages et intérêts résultant du retard dans l’exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.
La société DS Développement ne justifiant pas de la nature, du principe et de l’étendue d’un préjudice distinct de celui qui sera réparé par les intérêts assortissant sa créance, elle sera déboutée de sa demande et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires
Compte tenu de l’issue du litige, le jugement sera réformé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
M. [N] [L] qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 696 du code de procédure civile.
Il ne paraît pas inéquitable de le condamner à payer à la société DS développement et à M. [P] [L], chacun, la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour statuant par arrêt contradictoire ;
Vu l’arrêt rendu par la 8ème chambre de la cour le 16 mai 2024 qui a :
– déclaré irrecevable la demande de M. [N] [L] relative à l’omission de statuer ;
– déclaré irrecevables les demandes de condamnation de M. [N] [L] formées à l’encontre de M. [I] [M] ;
– confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré recevable, comme non atteinte par la prescription prévue par l’article L.137-2 devenu L.218-2 du code de la consommation l’action en paiement de la SARL DS développement à l’encontre de M. [N] [L] ;
– réformé le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL DS développement de ses demandes en paiement à l’encontre de M. [N] [L] ;
– réduit les sommes dues au titre de la clause pénale incluse à l’acte de prêt à un euro ;
Y ajoutant ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la SARL DS développement de sa demande en paiement de la somme de 10 000 euros ;
Le réforme pour le surplus ;
Statuant à nouveau ;
Déboute M. [N] [L] de l’ensemble de ses demandes ;
Condamne M. [N] [L] à payer à la société DS développement la somme de 400 000 euros, augmentée des intérêts au taux de 11 % depuis avril 2013, à l’exclusion de la majoration de 4 % et en appliquant la capitalisation des intérêts annuellement et non mensuellement, dont il convient de déduire l’ensemble des règlements effectués par M. [N] [L] à hauteur de 495 000 euros aux dates où ils ont été effectués ;
Condamne M. [N] [L] à payer à la société DS développement la somme de un euro au titre de la clause pénale ;
Déboute la société DS développement de ses demandes formées à l’encontre de M. [P] [L] ;
Condamne M. [N] [L] à payer à la société DS développement et à M. [P] [L], chacun, la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [N] [L] aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier
Anne-Sophie JOLY
Le président
Yves BENHAMOU