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N° RG 18/03161 – N° Portalis DBV2-V-B7C-H5JG
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 07 JUILLET 2022
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE BERNAY du 26 Juin 2018
APPELANTE :
SCP MANDATEAM, représentée par Maître [V] es qualité de liquidateur judiciaire de la société TRANSPORTS LOHEAC DE L’OUEST PARISIEN
[Adresse 6]
[Localité 2]
représentée par Me Jean-Yves PONCET de la SCP JY PONCET – P DEBOEUF et Associés, avocat au barreau de l’EURE substituée par Me Marie-Christine BEIGNET, avocat au barreau de l’EURE
INTIMES :
Monsieur [T] [K]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Valérie-Rose LEMAITRE de la SCP LEMAITRE, avocat au barreau de l’EURE
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA ROUEN
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentée par Me Linda MECHANTEL de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 07 Juin 2022 sans opposition des parties devant Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 07 Juin 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 07 Juillet 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [T] [K] a été engagé par la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien en qualité de chauffeur routier par contrat à durée déterminée renouvelé du 1er avril 2005 au 31 mars 2006, lequel s’est poursuivi en contrat à durée indéterminée.
Par avenant du 1er mars 2007, le salarié a été affecté au poste du BEM MULLER.
Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport.
Dans le cadre d’une procédure de licenciement pour motif économique, le contrat de travail a été rompu à effet du 3 décembre 2009, le salarié ayant adhéré à la convention de reclassement personnalisé.
M. [T] [K] a saisi le conseil de prud’hommes d’Evreux en contestation du licenciement et paiement de rappel de salaire et d’indemnités.
Le dossier a été transféré au conseil de prud’hommes de Bernay en exécution d’une ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel de Rouen du 7 octobre 2014.
Par jugement du 26 juin 2018, le conseil de prud’hommes a jugé que le licenciement de M. [T] [K] fondé sur son état de santé est nul, condamné la SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien à lui payer les sommes suivantes :
dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui a causé la perte injustifiée de son emploi : 48 976,56 euros
rappel d’heures supplémentaires : 4 418,70 euros
congés payés sur rappel d’heures supplémentaires : 441,87 euros
dommages et intérêts pour travail dissimulé : 12 244,14 euros,
indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros,
-débouté la SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien de ses demandes reconventionnelles, dit que les condamnations prononcées par la présente décision, en ce qu’elles n’ont pas le caractère de dommages et intérêts, portent intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil, et à compter du prononcé du présent jugement pour les condamnations à des dommages et intérêts, ordonné l’exécution provisoire du présent jugement, dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 08 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par la SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, condamne la SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien aux entiers dépens.
La SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien a interjeté appel le 26 juillet 2018.
Par jugement du tribunal de commerce d’Evreux du 20 décembre 2019, la SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien a été placée en liquidation judiciaire et la SCP Diesbecq [V], devenue SCP Mandateam, a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.
Par conclusions remises le 15 février 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. [T] [K] demande à la cour de dire les conclusions signifiées dans l’intérêt de l’appelante irrecevables,
-à titre principal, confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, sauf à préciser que les condamnations prononcés par le conseil de prud’hommes seront inscrites au passif de la liquidation judiciaire de la société TLOP, y ajoutant fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL TLOP sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 2 000 euros, condamner la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens,
-à titre subsidiaire, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions autres que celles relatives à la nullité de son licenciement, dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL TLOP à la somme de 48 976,56 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de cause économique réelle et sérieuse, y ajoutant, fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL TLOP sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 2 000 euros, condamner la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens,
-à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions autres que celles relatives à la nullité de son licenciement, dire que SARL TLOP n’a pas respecté les critères d’ordre du licenciement, fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL TLOP à la somme de 48 976,56 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice que lui a causé la perte injustifiée de son emploi, ainsi que la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en appel, et condamner la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 3 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, la SCP Mandateam, ès qualités, demande à la cour de recevoir son intervention volontaire, déclarer l’appel recevable et bien fondé, infirmer le jugement rendu le 26 juin 2018, débouter M. [T] [K] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, le condamner à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à titre subsidiaire, réduire l’indemnité sollicitée pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse à six mois de salaire, le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions remises le 28 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, l’AGS CGEA de Rouen demande à la cour de :
à titre principal,
-infirmer et ou réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
-juger le licenciement pour motif économique comme étant justifié,
-juger que la TLOP a respecté les critères d’ordre des licenciements,
en conséquence,
-débouter M. [T] [K] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-condamner M. [T] [K] aux entiers dépens,
à titre subsidiaire,
si par extraordinaire la Cour devait juger le licenciement pour motif économique comme ne reposant sur aucune cause réelle et sérieuse :
– réduire à six mois de salaire, soit une somme de 12 244,14 euros et à tout le moins à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts qui pourraient être alloués à M. [T] [K],
-débouter, au visa de l’article L.622-28 du code de commerce, M. [T] [K] de sa demande au titre des intérêts légaux à compter du 20 décembre 2019,
en toute hypothèse,
-donner acte au CGEA de Rouen de ses réserves et statuer ce que de droit quant à ses garanties,
-déclarer la décision à intervenir opposable au CGEA et à l’AGS dans les limites de la garantie légale,
-dire que la demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile n’entre pas dans le champ d’application des garanties du régime,
-dire que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L.3253-15, L.3253-18, L.3253-19, L.3253-20, L.3253-21, L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail,
-dire et juger qu’en tout état de cause la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l’article D.3253-5 du code du travail,
-statuer ce que de droit quant aux dépens et frais d’instance sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’association concluante.
L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 19 mai 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’irrecevabilité des conclusions de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien
M. [T] [K] soulève l’irrecevabilité des conclusions de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien au soutien de son appel au visa de l’article 954 du code de procédure civile, comme étant non conformes à la structuration des conclusions d’appel imposée par ce texte, faute de critique du jugement entrepris, ce qui entraîne dès lors l’irrecevabilité des conclusions déposées par le liquidateur de cette société.
La SCP Mandateam ès qualités s’y oppose au motif que l’examen des conclusions litigieuses révèle qu’il est apporté une critique du jugement déféré.
Selon l’article 954 du code de procédure civile, les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
Contrairement à ce qui est soutenu, dans ses conclusions d’appelante, la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien critique le jugement déféré en mentionnant au sujet du licenciement que cette juridiction n’a pas répondu à son argumentaire avant de le présenter à nouveau, considère, développement à l’appui, que c’est à tort que le conseil de prud’hommes a statué sur les heures supplémentaires et le travail dissimulé, sollicitant ainsi l’infirmation du jugement entrepris, énonçant ainsi distinctement les chefs du jugement critiqués, de sorte que ses conclusions sont recevables et a fortiori celles du mandataire liquidateur également.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires
Aux termes de l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte des articles L. 3171-2 à L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
M. [T] [K] soutient avoir accompli des heures supplémentaires non rémunérées à hauteur de la somme de 4 418,70 euros dont il sollicite qu’elle soit fixée au passif de la procédure collective outre les congés payés afférents.
L’employeur s’y oppose en faisant valoir le manque de sérieux des prétentions, le salarié ayant d’abord sollicité 21 790,38 euros, avant de réduire significativement sa demande, que le salarié n’a jamais formulé de demande lorsqu’il était chauffeur poids lourd jusqu’en mars 2007, que lorsqu’il a été affecté au contrôle technique à compter de mars 2007, il était rémunéré sur la base de 171,33 heures par mois soit 40 heures par semaine, incluant ainsi 21,33 heures supplémentaires à 25 %, que lorsqu’il a accompli des heures supplémentaires, elles ont toujours été régularisées le mois suivant et qu’en réalité, à l’examen des éléments produits, le salarié a été payé pour des heures qu’il n’a pas accomplies.
Alors que le salarié apporte des éléments préalables par le biais de décomptes mensuels de son temps de travail mentionnant les temps de conduite, heures de travail, quart d’heures et temps de service et les bulletins de salaire, l’employeur qui ne conteste pas que des heures supplémentaires ont été accomplies au-delà des 200 heures de travail payées mensuellement, justifie du décompte du temps de travail du salarié d’avril 2005 à janvier 2007 lorsqu’il était chauffeur routier permettant ainsi le contrôle qui lui incombe, mais aussi du paiement des heures supplémentaires au-delà du forfait de 200 heures, certes avec un décalage, leur paiement apparaissant généralement le mois suivant et il produit un décompte précis au soutien de ses allégations.
Aussi, au vu de l’ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que M. [T] [K] n’a pas accompli d’heures supplémentaires restées impayées au cours de la relation contractuelle.
Par conséquent, la cour infirme le jugement entrepris ayant accordé un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et congés payés afférents, ainsi qu’une indemnité pour travail dissimulé.
Sur la nullité du licenciement
M. [T] [K] soutient que son licenciement est fondé sur son état de santé aux motifs qu’il exerçait les fonctions de contrôleur technique pour lesquelles il était apte ; or, alors que la société a cédé son activité de maintenance, entretien et réparation des véhicules à une autre société du Groupe, la société Centre Couronnais de Maintenance à compter du 1er mars 2009, tous les salariés attachés à cette activité ont été transférés hormis lui, conduisant alors l’employeur à lui proposer un poste pour lequel son état de santé était incompatible, de sorte qu’il considère que son licenciement procédait directement de son état de santé et de son inaptitude au poste, ce qui le rend nul.
Dans sa version applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
M. [T] [K], qui avait été engagé en qualité de chauffeur routier, a été promu par avenant du 1er mars 2007 au poste du BEM MULLER, nom de l’appareillage permettant de réaliser le contrôle technique des véhicules, ce dont atteste M. [J] [L], son chef d’équipe, qui précise que M. [T] [K] travaillait au banc de freinage en remplacement d’un salarié parti à la retraite.
Le 10 juin 2008, la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien a proposé une réaffectation du salarié au poste de conducteur routier à compter du 1er août 2008 en raison d’une réorganisation des services à compter du 2ème semestre, que le salarié a refusé le 28 juillet 2008 après avoir obtenu plus de précisions et évoqué ses difficultés de santé en lien avec un traitement respiratoire.
Le même jour, le médecin du travail, intervenant à la demande de l’employeur, a déclaré M. [T] [K] apte au poste de contrôleur technique, précisant, pas de conduite chauffeur PL. Examen complémentaire nécessaire pour déterminer l’aptitude au poste de chauffeur Pl. A revoir dans un mois.
Cet avis était successivement maintenu les 12 septembre et 7 novembre 2008.
Le 15 mai 2009, M. [T] [K] a été déclaré apte au poste de contrôleur technique. Inapte à la conduite permanente d’un poids lourd, cette inaptitude ne concernant pas les déplacements de véhicules dans la cour, ni les temps de conduite ne dépassant pas une heure dans la journée.
Il est établi que, par acte du 21 juillet 2009 avec effet rétroactif du 1er juillet 2009, la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien a consenti une cession partielle de fonds de commerce pour la partie concernant la maintenance, l’entretien, la réparation de tous les véhicules à la société Centre Couronnais de Maintenance, filiale du Groupe auquel appartient l’employeur.
Le contrat de travail de M. [T] [K] n’a pas été transféré alors qu’à deux autres exceptions près, tous les autres salariés étaient affectés à la filiale cessionnaire.
Dans le recours hiérarchique du 23 septembre 2009 formé par l’employeur auprès du ministre du travail concernant la situation d’un salarié protégé, l’employeur expliquait que la situation de M. [T] [K] est complexe et qu’il sera transféré le 1er octobre 2009 bien que ne travaillant pas en réalité à l’atelier mais à l’entretien général des locaux.
La société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien a convoqué M. [T] [K] à un entretien préalable au licenciement le 4 novembre 2009 et son licenciement pour motif économique lui a été notifié le 24 novembre 2009, la suppression de son emploi étant motivée comme suit : ‘s’agissant du service atelier auquel vous êtes affecté, le volume des travaux ne justifie plus d’emploi relevant de votre qualification de chauffeur chez TLOP’.
Enfin, il résulte du compte rendu de l’entretien préalable qui s’est tenu le 12 novembre 2009 rédigé par Mme [L], déléguée du personnel titulaire, assistant le salarié, que Mme [B], comptable, après avoir évoqué les résultats de l’entreprise conduisant à sa réorganisation et à procéder à un plan social économique, a précisé que M. [T] [K] étant conducteur et inapte à la conduite, la société n’avait pas d’autre solution que de le licencier, faisant fi de l’argumentation selon laquelle M. [T] [K] avait un avenant ayant modifié son poste de conducteur pour un poste au banc de freinage de l’atelier.
Ainsi, alors que l’employeur était informé de l’impossibilité pour le salarié, affecté depuis plusieurs mois contractuellement au poste du BEM MULLER, pour y faire effectivement du contrôle technique des véhicules, comme en atteste son chef d’équipe, d’occuper le poste de conducteur routier, qu’il aurait pu et dû, comme les autres salariés affectés dans ce service être transféré dans le cadre de la cession partielle du fonds de commerce, solution que l’employeur avait admis dans son recours hiérarchique auprès du ministre du travail, sans néanmoins y procéder, en persistant à mettre en avant une fonction qu’en réalité le salarié n’occupait plus et pour laquelle il a été déclaré inapte bien en amont de la procédure de licenciement économique et que dans ces conditions l’employeur savait pertinemment que le salarié ne pourrait accepter la modification du contrat de travail au regard de son inaptitude connue depuis juillet 2018, de sorte qu’en la refusant l’employeur s’en emparait pour procéder à son licenciement économique, admettant au cours de l’entretien préalable qu’il ne disposait alors d’aucune autre solution, la discrimination en lien avec l’état de santé du salarié se trouve caractérisée et justifie que le licenciement soit dit nul.
Par conséquent, la cour confirme le jugement entrepris ayant statué en ce sens.
Sur les conséquences du licenciement
Compte tenu de l’ancienneté du salarié (4 ans), de son salaire de base d’un montant de 1 781,17 euros avant la rupture du contrat de travail, de son adhésion à la convention de reclassement personnalisé dont les effets ont pris fin le 3 décembre 2010, de sorte que l’allocation spécifique de reclassement a été remplacée par l’allocation de retour à l’emploi, de l’insertion professionnelle précaire postérieurement à la rupture, la cour fixe au passif de la procédure collective de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien la créance au titre des dommages et intérêts pour licenciement nul à la somme de 15 000 euros.
Dès lors que l’arrêt est infirmatif sur ce point et que la créance du salarié est indemnitaire, compte tenu des dispositions de l’article L.622-28 du code de commerce, les intérêts qui auraient dus courir à compter du présent arrêt, sont suspendus.
Sur la garantie de l’UNEDIC délégation AGS CGEA de Rouen
Compte tenu de la nature de la sommes allouée, l’AGS CGEA doit sa garantie dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, de laquelle est exclue notamment l’indemnité allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à défaut de fonds disponibles.
Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie partiellement succombante, la liquidation judiciaire de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien est condamnée aux entiers dépens, déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à M. [T] [K] la somme de 1 000 euros en cause d’appel, en sus de la somme allouée en première instance pour les frais générés par l’instance et non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par arrêt contradictoire,
Rejette le moyen tiré de l’irrecevabilité des conclusions de la partie appelante ;
Confirme le jugement entrepris ayant dit le licenciement nul et ayant statué sur les frais irrépétibles et les dépens ;
L’infirme en ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau,
Déboute M. [T] [K] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et travail dissimulé ;
Fixe la créance de M. [T] [K] au passif de la procédure collective de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien au titre des dommages et intérêts pour licenciement nul à la somme de 15 000 euros ;
Dit que le cours des intérêts est suspendu ;
Dit que l’Unedic délégation AGS CGEA de Rouen est tenue à garantie pour cette somme à défaut de fonds disponibles ;
Condamne la liquidation judiciaire de la société SAS Transport Loheac de l’Ouest Parisien à payer à M. [T] [K] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en appel ;
Déboute la SCP Mandateam de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en appel ;
Condamne la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens de première d’instance et d’appel.
La greffièreLa présidente