Chauffeur Poids-Lourd : décision du 6 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02042

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 6 octobre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02042
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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 06 OCTOBRE 2022

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02042 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSOM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOBIGNY – RG n° 18/00435

APPELANT

Monsieur [V] [I] En qualité de mandataire ad litem de la SARL TLTP

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Sandrine FARRUGIA, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [P] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Agnès CITTADINI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2185

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 1er Juillet 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

– CONTRADICTOIRE,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre et par Madame Joanna FABBY, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC”DURE ET PR”TENTIONS DES PARTIES

M. [P] [L] a été engagé par la société [I] Bâtiment et Travaux (ci-après désignée la société [I]) par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein prenant effet le 5 mars 2012 en qualité de chauffeur poids lourd non cadre.

M. [L] a été engagé par la société TLTP par contrat de travail à durée indéterminée non daté et prenant effet, selon son article 7, à compter de la réception de ‘l’accord de la DRE’ en qualité de directeur technique. La date de prise d’effet de ce contrat est discutée par les parties, l’employeur et le salarié soutenant respectivement qu’elle doit être fixée au 1er avril 2013 et au 17 janvier de la même année.

Par courrier du 21 mars 2013, M. [L] a démissionné de son poste de chauffeur poids lourd au sein de la société [I] à compter du 29 mars 2013.

Par courrier du 13 juin 2013, la société TLTP a mis fin à la période d’essai de trois mois du contrat de travail conclu avec M. [L].

Contestant le bien fondé de cette rupture, ce dernier a saisi le conseil de prud’hommes de Bobigny le 29 juillet 2014 aux fins d’obtenir la condamnation de la société TLTP au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Le 20 mai 2015, la société TLTP a été dissoute par décision de son assemblée générale.

Par ordonnance du 7 septembre 2015, le tribunal de commerce de Bobigny a désigné M. [V] [I] en qualité de mandataire ad litem de la société TPLP pour représenter celle-ci dans le cadre de l’instance prud’homale.

Par jugement du 5 février 2020, le conseil de prud’hommes de Bobigny a :

Prononcé la mise hors de cause de l’AGS CGEA IDF Est,

Dit qu’il n’y a pas eu de transfert du contrat de travail de M. [L] entre la société [I] et la société TLTP au sens de l’article L. 1224-1 du code du travail,

Fixé la date de prise d’effet du contrat de travail de M. [L] au 17 janvier 2013,

Requalifié le licenciement de M. [L] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamné la société TLTP, représentée par M. [I] en sa qualité de mandataire ad litem, à verser à M. [L] les sommes suivantes, avec intérêts de droit au taux légal et capitalisation à compter du 8 septembre 2014, date de la citation délivrée à la société TLTP pour l’audience devant le bureau de conciliation :

– 3.429,51 euros à titre de rappel de salaire du 17 janvier 2013 au 28 février 2013,

– 342,95 euros au titre des congés payés afférents,

– 7.277,76 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 727,77 euros au titre des congés payés afférents,

Et avec intérêts au taux légal et capitalisation à compter de la date de mise à disposition du présent jugement :

– 2.425,92 euros au titre de l’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

– 2.424,92 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive,

– 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonné l’exécution provisoire de droit sur les créances à caractère salariale,

Débouté M. [L] du surplus de ses demandes,

Ordonné à la société TLTP représentée par M. [I] la remise à M. [L] du certificat de travail, de l’attestation Pôle emploi et d’un bulletin de salaire récapitulatif rectifiés conformes au présent jugement,

Débouté la société TLTP de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société TLTP représentée par M. [I] aux entiers dépens.

Le 4 mars 2020, la société TLTP représentée par M. [I] en qualité de mandataire ad litem a interjeté appel du jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 19 Juin 2020, la société TLTP représentée par M. [I] en qualité de mandataire ad litem demande à la cour :

D’infirmer le jugement sauf en ce qu’il a, d’une part, dit qu’il n’y a pas eu transfert du contrat de travail de M. [L] entre les sociétés [I] et TLTP et, d’autre part, rejeté la demande d’indemnité pour absence de visite médicale d’embauche,

En conséquence, de :

Débouter M. [L] de toutes ses demandes,

Le condamner au versement d’une somme de 3.000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 3 septembre 2020, M. [L] demande à la cour de :

Dire et juger la société TLTP mal fondée en son appel et l’en débouter,

Confirmer le jugement en ce qu’il a :

– requalifié son licenciement en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

– condamné la société TLTP représentée par M. [I] en sa qualité de mandataire ad litem à lui verser à les sommes suivantes avec intérêts de droit au taux légal et capitalisation à compter du 8 septembre 2014, date de la citation délivrée à la société TLTP pour l’audience devant le bureau de conciliation :

3 429,51 euros à titre de rappel de salaire du 17 janvier 2013 au 28 février 2013,

342,95 euros au titre des congés payés afférents,

7.277,76 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

727,77 euros au titre des congés payés incidents,

Et avec intérêts de droit au taux légal et capitalisation à compter de la date de mise à disposition du présent jugement :

2 425,92 euros au titre de l’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Confirmer le jugement en ce qu’il lui a, dans son principe, alloué des dommages-intérêts en réparation de la rupture abusive de son contrat de travail,

Le recevoir dans son appel incident,

Et, statuant à nouveau,

Infirmer le jugement en ce qu’il a dit que son contrat de travail n’a pas fait l’objet d’un transfert de la société [I] vers la société TLTP,

A titre principal :

Dire et juger que son contrat de travail a été transféré de la société [I] à la société TLTP à compter du 17 janvier 2013 en application de l’article L. 1224-1 du code du travail,

Dire et juger abusive la rupture du contrat de travail notifiée par la société TLTP par lettre du 13 juin 2013,

Porter le montant des dommages-intérêts alloués au titre de la rupture injustifiée de son contrat de travail à la somme de 15 000 euros,

Ordonner la remise d’un certificat de travail conforme comportant comme date d’entrée le 2 mars 2012 et comme date de sortie le 13 septembre 2013, fin de préavis, d’une attestation destinée au Pôle emploi conforme et d’un bulletin de salaire récapitulatif conforme, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la notification de l’arrêt à intervenir,

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour confirmerait le jugement sur la question de la non application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail et retiendrait, en conséquence, l’existence de deux relations de travail distinctes,

Dire et juger abusive la rupture du contrat de travail notifiée par la société TLTP par lettre du 13 juin 2013,

Porter le montant des dommages-intérêts alloués au titre de la rupture injustifiée de son contrat de travail à la somme de 7 500 euros,

Ordonner la remise d’un certificat de travail conforme comportant comme date d’entrée 17 janvier 2013 et comme date de sortie le 13 septembre 2013, fin de préavis, d’une attestation destinée au Pôle Emploi conforme et d’un bulletin de salaire récapitulatif conforme, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter de la notification du jugement à intervenir,

En tout état de cause,

Condamner la société TLTP représentée par M. [I] en sa qualité de mandataire ad litem à lui verser la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d’embauche,

Condamner la société TLTP, représentée par M. [I] en sa qualité de mandataire ad litem à lui verser la somme 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,

Dire que la cour se réservera le droit de liquider l’astreinte,

Condamner la société TLTP représentée par M. [I] en sa qualité de mandataire ad litem, aux entiers dépens, lesquels comprendront l’intégralité des éventuels frais de signification et d’exécution qu’il pourrait avoir à engager,

Dire que les intérêts courront à compter de la saisine du conseil de prud’hommes,

Ordonner la capitalisation des intérêts par application de l’article 1343-2 du code civil.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L’instruction a été déclarée close le 11 mai 2022.

MOTIFS :

Sur le transfert du contrat de travail :

M. [L] soutient qu’à compter du 17 janvier 2013, date de l’immatriculation de la société TLTP au registre du commerce et des sociétés, le contrat de travail conclu avec la société [I] a été transféré à la société TLTP en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail dans la mesure où cette dernière et la société [I] :

– ont la même activité, celle de transporteur routier de marchandise,

– sont dirigées par un membre de la famille [I] : [D] [I] pour la société [I] et [V] [I] pour la société TLTP,

– ont leur siège social domicilié à la même adresse,

– ont émis des bulletins de paye issus du même logiciel et mentionnant la même adresse,

– ont le même numéro de téléphone et le même numéro de télécopie,

– ont payé ses salaires au moyen de chèques rédigés et signés par M. [V] [L].

En défense, la société TLTP sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce que le conseil de prud’hommes a jugé qu’il n’y avait pas transfert du contrat de travail.

L’article L. 1224-1du code du travail prévoit que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. Cet article L. 1224-1ducodedutravail, interprété à la lumière de la Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s’applique en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise. A cet égard, constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d’une telle entité se réalise si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation de l’entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant.

Par ailleurs, l’article L. 1224-1 du code du travail s’applique, même en l”absence d’un lien de droit entre les employeurs successifs, à tout transfert d’une entité économique conservant son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise et le transfert d’éléments d’exploitation au repreneur ne suppose pas nécessairement un transfert de propriété des actifs, une simple mise à disposition du nouvel exploitant des moyens d’exploitation nécessaires à l’activité pouvant suffire.

En l’occurrence, pour preuve du transfert invoqué de la société [I] à la société TLTP, M. [L] produit :

– les kbis des sociétés [I] et TLTP,

– ses bulletins de paye émis par ces deux entreprises,

– un chèque tiré le 29 juin 2013 par la société [I] auprès de la banque LCL et à son profit,

– un chèque tiré le 29 juin 2013 par la société TLTP auprès de la banque CIC et à son profit.

En premier lieu, il ne ressort pas des éléments versés aux débats que, comme l’affirme l’intimé, les sociétés [I] et TLTP ont le même numéro de téléphone et le même numéro de télécopie ou que les chèques susmentionnés ont été rédigés et signés par M. [V] [L]. En outre, la forme des bulletins de paye émis par la société [I] étant différente de celle de la société TLTP, il ne peut se déduire des bulletins produits qu’ils ont été réalisés au moyen du même logiciel comme le soutient l’intimé. Au surplus, l’utilisation d’un même logiciel est indifférente.

En deuxième lieu, s’il est vrai que les sociétés [I] et TLTP ont une activité similaire, qu’elles sont domiciliées à la même adresse et que leur gérant respectif appartient à la famille [I], ces seuls éléments sont insuffisants pour démontrer le transfert par la société [I] d’une entité économique autonome à la société TLTP.

En troisième lieu, il ressort de la comparaison des contrats de travail conclus par M. [L] avec les sociétés [I] et TLTP que l’intimé a été engagé par la première en qualité de chauffeur poids lourd non cadre et par la seconde en tant que directeur technique cadre. Il s’en déduit que la relation de travail de M. [L] avec la société [I] ne portait pas sur le même poste que celle de l’intimé avec l’appelant.

En quatrième et dernier lieu, il est produit par M. [L] un courrier du 21 mars 2013 par lequel ce dernier informe la société [I] de son ‘intention de démissionner de (son poste) de chauffeur poids lourd qu'(il) occupe depuis le 5 mars 2012 au sein de (la société [I])’ et que son dernier jour de travail sera le 29 mars 2013. L’intimé ayant reconnu dans ce courrier avoir travaillé pour la société [I] jusqu’à cette dernière date, il ne peut en même temps soutenir dans ses conclusions que le contrat de travail conclu avec cette entreprise a été transféré le 17 janvier 2013 à la société TLTP.

Il résulte de ce qui précède que le contrat de travail conclu par M. [L] avec la société [I] n’a pas été transféré à la société TLTP. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le rappel de salaire :

M. [L] soutient que sa relation de travail avec la société TLTP a débuté le 17 janvier 2013, date d’immatriculation de cette dernière au registre du commerce et des sociétés et qu’il n’a pas été rémunéré pour la période du 17 janvier 2013 au 28 février 2013. Il sollicite ainsi la confirmation du jugement par lequel le conseil de prud’hommes a condamné la société TLTP à lui payer la somme de 3.429,51 euros à titre de rappel de salaire, outre 342,95 euros de congés payés afférents.

A titre principal, il soutient que le contrat de travail conclu avec la société [I] a été transféré à la société TLTP le 17 janvier 2013.

A titre subsidiaire, il reprend l’interprétation par le conseil de prud’hommes de l’article 7 du contrat de travail conclu avec la société TLTP selon laquelle l’accord de la DRE est réputé donné à la date d’immatriculation de cette société.

La société TLTP conclut au débouté des demandes pécuniaires de l’intimé et soutient que la relation de travail n’a commencé que le 1er avril 2013, M. [L] travaillant à temps plein pour la société [I] jusqu’à fin mars 2013.

Le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération. L’existence d’un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans laquelle s’est exercée l’activité.

S’il appartient à celui qui se prévaut de l’existence d’un contrat de travail d’en établir l’existence, en présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d’en apporter la preuve.

En l’absence d’écrit ou d’apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d’en rapporter la preuve.

Il est constant qu’une personne est placée sous la subordination d’une société dès lors qu’elle perçoit chaque mois une rémunération d’un montant fixe, est intégrée dans un service organisé et exécute une prestation de travail sous le contrôle des dirigeants de la société dont elle reçoit les ordres.

En premier lieu, il résulte des développements précédents que le contrat de travail conclu par M. [L] avec la société [I] n’a pas été transféré à la société TLTP. Par suite, l’intimé ne peut se fonder sur ce transfert pour soutenir qu’il travaille pour cette dernière depuis le 17 janvier 2013.

En deuxième lieu, M. [L] a informé par courrier du 21 mars 2013 la société [I] qu’il envisageait de démissionner de son poste de chauffeur poids lourd, ce qui atteste qu’il a travaillé au moins jusqu’à cette date pour cette société.

En troisième lieu, le contrat de travail conclu entre M. [L] et la société TLTP est signé par les parties sans indiquer sa date de conclusion et comporte un article 7 qui stipule ‘le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée. Il ne deviendra définitif qu’à l’issue d’une période d’essai de trois mois renouvelable une fois au cours de laquelle chacune des parties pourra rompre le contrat sans indemnité, dans le respect du délai de prévenance. Le contrat prend effet dès la réception de l’accord de la DRE’.

La cour constate, d’une part, que l’objet de l’accord de la direction régionale de l’équipement (DRE) au sens de cet article 7 n’est défini ni par les stipulations du contrat ni par aucune autre pièce versée aux débats et, d’autre part, qu’aucun accord de cette direction n’est produit. Par suite, le conseil de prud’hommes ne pouvait déduire de l’immatriculation de la société TLTP au registre du commerce et des sociétés l’obtention de cet accord et, par suite, la prise d’effet le 17 janvier 2013 de la relation de travail entre l’appelante et l’intimé en application de l’article 7 du contrat de travail.

En quatrième et dernier lieu, il ressort des pièces versées aux débats que la société TLTP:

– n’a émis des bulletins de paye au profit de M. [L] que pour les périodes du 1er avril au 30 juin 2013 et pour une date d’entrée dans l’entreprise au 1er avril 2013 (pièce 7),

– a établi un certificat de travail au profit de M. [L] pour la période du 1er avril au 30 juin 2013 et une attestation de travail mentionnant que ce dernier était employé en tant que directeur technique depuis le 2 avril 2013.

En outre, il n’est pas démontré que M. [L] a réalisé un travail pour la société TLTP avant le 1er avril 2013.

En l’absence d’éléments versés aux débats permettant de déterminer que M. [L] était placé sous la subordination juridique de la société TLTP à compter du 17 janvier 2013, la cour considère, au regard des pièces précitées, que la relation de travail n’a pris effet qu’à compter du 1er avril 2013.

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur la rupture du contrat de travail :

M. [L] soutient que la société TLTP ne pouvait rompre le 13 juin 2013 la période d’essai de trois mois stipulée à l’article 7 de son contrat de travail puisqu’ayant été engagé le 17 janvier 2013, cette période a pris fin le 17 avril 2013.

La société TLTP expose au contraire qu’elle pouvait rompre la période d’essai dans la mesure où M. [L] a été engagé à compter du 1er avril 2013.

Aux termes de l’article L. 1221-20 du code du travail, la période d’essai a pour objet de permettre à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, au regard de son expérience et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent.

La partie qui prend la décision de rompre la période d’essai au cours de celle ci n’a pas à indiquer les raisons qui la motivent. L’employeur peut de manière discrétionnaire mettre fin à la période d ‘essai avant son expiration sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus.

La période d’essai commence à la date où le salarié est engagé et rémunéré.

Il ressort des développements précédents que M. [L] a été engagé et rémunéré par la société TLTP à compter du 1er avril 2013 et que l’article 7 du contrat de travail stipule une période d’essai de trois mois. Il s’en déduit que l’employeur pouvait de manière discrétionnaire mettre fin à la période d’essai par courrier du 13 juin 2013, un abus dans l’exercice de ce droit n’étant ni évoqué ni établi. M. [L] sera donc débouté de ses demandes d’indemnité de préavis, de congés payés afférents, de dommages-intérêts pour rupture abusive, d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et de remise de documents sociaux conformes.

Le jugement sera infirmé en conséquence.

Sur le préjudice résultant de l’absence de visite médical d’embauche :

Selon l’article R. 4624-10 du code du travail, dans sa version antérieure au décret n°2016-1906 du 27 décembre 2016 applicable à la date d’embauche de M. [L] le 1er avril 2013, le salarié bénéficie d’un examen médical avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail.

Ces examens concourent à la protection de la santé et de la sécurité des salariés et l’abstention de l’employeur, qui en la matière est tenu par une obligation de sécurité de moyen renforcée, doit en assurer l’effectivité. Toutefois, M. [L] n’invoque aucun préjudice résultant de l’absence de visite médicale d’embauche et il ne verse aux débats aucune pièce sur ce point de sorte que sa demande tendant à l’obtention de la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur les demandes accessoires :

M. [L] qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens de première instance et d’appel.

Il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a :

– prononcé la mise hors de cause de l’AGS CGEA IDF Est,

– dit qu’il n’y a pas eu de transfert du contrat de travail de M. [P] [L] entre la société [I] et la société TLTP au sens de l’article L. 1224-1 du code du travail,

– débouté M. [P] [L] de sa demande indemnitaire pour absence de visite médicale d’embauche ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE M. [P] [L] de l’ensemble de ses demandes ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [P] [L] aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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