Your cart is currently empty!
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 JANVIER 2023
N° RG 19/03714
N° Portalis DBV3-V-B7D-TPXV
AFFAIRE :
[A] [G]
C/
SAS TAIS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 septembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTMORENCY
N° Section : C
N° RG : 18/00262
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Fatima BOULAFRAH
Me Emmanuelle SAPENE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [A] [G]
née le 26 mai 1979 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Fatima BOULAFRAH, Plaidant/Constitué, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 774
APPELANT
****************
SAS TAIS
N° SIRET : 421 345 638
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Emmanuelle SAPENE de la SCP PECHENARD & Associés, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R047 substitué par Me Laetitia GARCIA, avocat au barreau de PARIS
INTIME
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 novembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,
Greffier lors des débats : Stéphanie HEMERY
Greffier en pré-affectation lors du prononcé : Domitille GOSSELIN
Rappel des faits constants
La société Taïs, dont le siège social est situé à [Localité 8] dans les Hauts-de-Seine, est spécialisée dans la collecte des déchets non dangereux. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des activités du déchet du 16 avril 2019.
Mme [A] [G], née le 26 mai 1979, a été engagée par cette société, selon contrat de travail à durée indéterminée du 27 mai 2015 en qualité d’attachée d’exploitation, statut agent de maîtrise, moyennant un salaire initial de 2 400 euros par mois outre un treizième mois.
Après un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 18 mars 2016, Mme [G] s’est vu notifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse, par courrier du 12 avril 2016, dans les termes suivants :
« Vous occupez le poste d’attachée d’exploitation au sein de la société Taïs Goussainville depuis le 1er juin 2015.
À ce titre, votre mission consiste à :
– Manager une équipe de chauffeurs poids-lourd,
– Contribuer à assurer la qualité au quotidien de la prestation de collecte de déchets auprès de nos clients industriels,
– Faire le relais entre les chauffeurs, le service logistique (planning), le responsable d’exploitation et le directeur d’Unité Opérationnelle, en cas de dysfonctionnement dans la prestation.
Or, nous sommes amenés à déplorer de graves manquements dans l’exécution de votre mission. Les faits reprochés sont les suivants :
– Le 23 février 2016, le client GSF Concorde Roissy Park fait une commande d’enlèvement de benne papier-carton pour le lendemain, soit le 24 février 2016, il a fallu que je vous relance pour avoir un retour sur la réalisation de cette prestation qui n’aurait pas été assurée sans mon intervention.
[‘]
– Le 8 mars 2016, 13h04, le client GSF Concorde Roissy Park fait une nouvelle demande d’enlèvement de benne « papier-carton » pour le 9 mars 2016 sur votre adresse mail et sur celle de MM [X] et [B] (service planning) ainsi que sur la boite mail générique du service planning. Cette prestation n’a pas été assurée dans le délai imparti, et aucune communication auprès du client lequel s’est retrouvé avec des bacs pleins. De plus, vous n’avez pas vérifié si la prestation avait bien été réalisée.
[‘]
– Puis, le 11 mars 2016, le client EDF commande le retrait des caisses palettes, de bennes et compacteurs, et de bacs roulants pour les semaines 22 et 23, vous avez reçu deux mails les 7 et 11 mars 2016 de ma part demandant l’organisation des retraits demandés (ainsi que de votre responsable d’exploitation, et auprès du service logistique). Vous n’avez pas traité cette demande et aucun retour concernant celle-ci à ce jour.
[‘]
– Vous avez également été absente du vendredi 5 février au jeudi 11 février 2016 inclus et vous n’avez prévenu votre hiérarchie de votre absence et de la durée que le 9 février 2016 par texto. L’absence de communication quant à la survenue et la durée de votre absence a perturbé fortement le fonctionnement de l’exploitation, qui a dû pallier votre absence dans l’urgence.
Nous avons tenté de vous joindre à plusieurs reprises sur votre téléphone professionnel et personnel sans réponses ni retour de votre part. C’est à votre retour le vendredi 12 février 2016, que vous nous avez fourni un certificat d’arrêt de travail.
[‘]
– Pour finir, vous étiez planifiée en semaine 10 pour assurer les départs et les retours chauffeurs. Sur les cinq jours vous n’avez assuré que deux fois les retours de façon complète alors que des directives et un planning de rotation avaient été mis en place. De plus, vous n’avez pas effectué les comptes-rendus correspondants. Vous n’avez remonté aucune difficulté dans la réalisation de cette mission à votre hiérarchie.
[‘]
Les explications que vous nous avez fournies lors de l’entretien préalable à votre éventuel licenciement ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation quant aux faits qui vous sont reprochés et leur gravité.
Les conséquences de votre comportement rendent impossible la poursuite de votre activité au sein de l’entreprise, de ce fait, nous vous notifions par la présente, votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. »
Mme [G] a saisi le conseil de prud’hommes de Montmorency en contestation de son licenciement, par requête reçue au greffe le 10 avril 2018.
La décision contestée
Par jugement contradictoire rendu le 2 septembre 2019, la section commerce du conseil de prud’hommes de Montmorency a :
– rejeté la demande de requalifier le licenciement sans cause réelle et sérieuse de Mme [G] par la société Taïs en licenciement nul,
– débouté en conséquence Mme [G] de l’intégralité de ses demandes,
– débouté la société Taïs de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [G] avait présenté les demandes suivantes :
– requalifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse en licenciement nul,
– dommages-intérêts pour licenciement nul : 16 800 euros,
– article 700 du code de procédure civile : 1 400 euros,
– exécution provisoire,
– intérêts au taux légal,
– dépens.
La société Taïs avait quant à elle conclu au débouté de Mme [G] et avait sollicité sa condamnation à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La procédure d’appel
Mme [G] a interjeté appel du jugement par déclaration du 9 octobre 2019 enregistrée sous le numéro de procédure 19/03714.
Par ordonnance rendue le 2 mars 2022, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 24 mars 2022.
Par arrêt rendu le 19 mai 2022, la cour d’appel de Versailles, après avoir constaté que le conseil de Mme [G], appelante, n’était pas présent à l’audience, qu’il n’avait pas écrit pour demander à être dispensé de se présenter et qu’il n’avait pas adressé son dossier de plaidoiries au greffe, a :
– ordonné la réouverture des débats,
– dit que l’affaire sera de nouveau appelée à l’audience du jeudi 3 novembre 2022,
– réservé les dépens.
A cette nouvelle audience, Mme [G] a fait déposer son dossier de plaidoiries sans se présenter à l’audience, de sorte qu’il n’a pu être proposé aux parties de recourir à la médiation.
Prétentions de Mme [G], appelante
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 24 octobre 2019, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [G] demande à la cour d’appel de :
à titre principal,
– requalifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse en licenciement nul,
– fixer les dommages-intérêts pour licenciement nul à la somme de 16 800 euros (7,5 mois de salaire),
à titre subsidiaire,
– requalifier son licenciement pour cause réelle et sérieuse en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– article 700 du code de procédure civile, frais irrépétibles : 1 400 euros,
– condamnation aux dépens,
– intérêts au taux légal sur toutes les condamnations pécuniaires,
– exécution provisoire sur le fondement de l’article 515 du code de procédure civile.
Prétentions de la société Taïs, intimée
Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 6 février 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la société Taïs conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande donc à la cour d’appel de :
– déclarer mal fondé l’appel de Mme [G],
en conséquence,
– débouter Mme [G] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
– condamner Mme [G] à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [G] en tous les dépens.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Mme [G] prétend, à titre principal, que son licenciement serait nul car fondé sur une discrimination liée à son appartenance syndicale et, à titre subsidiaire, qu’il serait sans cause réelle et sérieuse, la salariée remettant en cause la réalité et la gravité des griefs qui lui sont reprochés.
Sur la discrimination
L’article L. 1132-1 du code du travail dispose : « Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de nomination ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d’un mandat électif local, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français ».
L’article L. 1134-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
A l’appui de son allégation tendant à voir reconnaître que son licenciement est « dû à sa sympathie avec le milieu syndical », Mme [G] présente deux éléments.
Elle fait d’abord valoir qu’elle conteste l’ensemble des griefs qui lui sont reprochés aux termes de la lettre de licenciement et qu’elle démontre l’absence de fondement de chacun d’eux, qu’il apparaît dès lors que c’est sa seule appartenance à un mouvement syndical qui motive la rupture de son contrat de travail.
A l’appui de son allégation, elle produit une attestation de M. [N], chauffeur poids lourd et délégué du personnel au sein de la société Taïs, lequel indique : « Mme [G], attachée d’exploitation ayant sous sa responsabilité une équipe de chauffeurs m’a tenu les propos suivants à plusieurs reprises devant témoins « M. [F] [I] et M. [R] ainsi que M. [L] [K] l’avaient mise en garde au sujet de ses rapports amicaux avec les élus de la CGT ». Par la suite, elle était très souvent en conflit avec son encadrement, M. [F] et M. [T]. Suite au licenciement de Mme [G], des chauffeurs m’ont informé qu’ils avaient entendu des encadrants, M. [F] et M. [T], que Mme [G] avait été licenciée à cause de sa proximité avec la CGT et que cela avait été la vraie cause de son licenciement » (pièce 15 de la salariée).
Cette seule attestation, non circonstanciée et relatant de simples dires de tiers, ne revêt aucune force probante et ne permet donc pas d’établir, comme le soutient Mme [G], que son licenciement est fondé sur ses affinités syndicales.
Mme [G] fait valoir en deuxième lieu que son père, M. [D] [G], est adhérent CGT depuis le mois de janvier 2004, ainsi qu’en atteste M. [Z] (pièce 16 de la salariée), ce qui établit selon elle les bonnes relations qu’elle entretient avec les élus CGT.
Il sera relevé que M. [Z] est secrétaire de l’Union Locale CGT d’Agde, qui se situe dans l’Hérault, sans aucun rapport démontré avec la société Taïs, implantée en Île-de France et qu’en tout état de cause, le seul fait que le père de la salariée soit adhérent à la CGT est ici inopérant.
Il sera en outre constaté, ainsi que le souligne l’employeur, que Mme [G] ne justifie pas de son adhésion à un syndicat, quel qu’il soit, ni d’activités syndicales.
Il s’ensuit qu’en l’état des explications et des pièces fournies, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants laissant supposer, dans leur ensemble, l’existence d’une discrimination en raison d’une appartenance syndicale, n’est pas démontrée.
Mme [G] sera déboutée de sa demande de nullité et de la demande indemnitaire subséquente.
Sur le licenciement
L’article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l’existence d’une cause réelle et sérieuse.
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Aux termes de la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, la société Taïs reproche cinq griefs à Mme [G].
L’employeur reproche, en premier lieu, à la salariée, d’avoir le 23 février 2016, attendu d’être relancée par M. [F], directeur d’unité opérationnelle (DUO), pour organiser une commande d’enlèvement de bennes papier-carton sollicitée pour le lendemain par le client GSF Concorde à Roissy Park.
Conformément à la fiche de poste d’attaché d’exploitation (pièce 9 de l’employeur), Mme [G] avait pour mission de :
– manager les équipes d’exploitation,
– assurer la relation client de proximité,
– contribuer activement à la satisfaction du client.
A ce titre, elle devait :
– transmettre l’ensemble des documents de bord et accessoires nécessaires à la réalisation des prestations,
– s’assurer de la réalisation complète des prestations et identifier tout signal social lors du debriefing,
– proposer des actions correctives à chaque anomalie constatée,
– veiller à la qualité du service rendu et à la conformité des prestations au cahier des charges,
– effectuer la transmission des données recueillies (N+1, logistique, maintenance, commerce),
– faire remonter toutes les anomalies non résolues à la hiérarchie,
– contribuer aux interactions (commerce, exploitation, logistique, maintenance).
Concernant les faits du 23 février 2016, la fiche de suivi de l’opération ainsi que les courriels échangés (pièce 8 de la salariée) montrent, qu’alors que le 23 février 2016 à 13h29, M. [V], pour le compte de la société GSF, a demandé à la société Taïs de changer la benne papier/carton pour le 24 février suivant, la salariée étant destinataire principale du message, cette prestation n’a pas été traitée par Mme [G] mais par son collègue, M. [B], agent de maîtrise exploitation logistique, après relance infructueuse de la salariée à 17h50 par M. [T], responsable d’exploitation.
Mme [G], qui prétend avoir bien effectué la tâche, ne rapporte pas la preuve de cette allégation alors que son employeur établit qu’il a été contraint de la relancer et que la prestation a été traitée par un autre salarié.
Elle prétend encore avoir effectué cette tâche, même si celle-ci n’a pas été inscrite par les agents du planning sur le planning, cet argument étant toutefois inopérant dès lors qu’il ne lui est pas reproché l’absence d’inscription de la prestation sur le planning mais son inertie.
Ce grief, tenant à l’inertie de la salariée, est matériellement établi.
L’employeur reproche, en deuxième lieu, à Mme [G] de ne pas avoir, le 8 mars 2016, traité une demande du client GSF Concorde à Roissy Park dans le délai imparti et de ne pas avoir communiqué ni vérifié si la prestation avait été réalisée, ce qui a mis le client en grande difficulté puisqu’il s’est retrouvé avec des bacs de déchets pleins.
Il ressort là encore de la fiche de suivi de l’opération ainsi que des courriels échangés (pièce 9 de la salariée) qu’alors qu’une commande avait été passée, devant être exécutée avant 12h, M. [X] a été contraint de traiter lui-même cette demande, qui n’a été réalisée que le 10 mars 2016, au lieu du 9 mars comme demandé par le client.
Sur ce grief, Mme [G] rétorque que cette tâche était en principe dévolue au service planning et non à elle, qu’elle n’a pas été réalisée le 9 mars conformément à la demande du client mais qu’elle a été programmée le jour suivant par l’équipe planning de la société, qu’elle a reçu cette information verbalement par M. [X] qui s’est engagé à prévenir le client mais qui a manifestement omis de le faire.
En tout état de cause, ainsi que le souligne l’employeur, il appartenait à Mme [G], au vu de ses fonctions d’attachée d’exploitation, de contribuer à assurer la qualité de la prestation de collecte de déchets auprès des clients industriels et d’être le relais entre les chauffeurs, le service logistique (planning), le responsable d’exploitation et le directeur d’unité opérationnelle en cas de dysfonctionnement de la prestation.
Or, il résulte des faits relatés que Mme [G] a été défaillante dans cette mission.
Ce grief, tenant au manque de professionnalisme de la salariée, est également établi.
L’employeur reproche, en troisième lieu, à Mme [G], d’avoir refusé d’exécuter les directives de son supérieur hiérarchique, dans le cadre d’une commande passée le 4 mars 2016 par le client EDF, pour faire enlever des caisses palettes, des bennes, des compacteurs et des bacs roulants les semaines 22 et 23.
Il ressort des courriels échangés (pièce 11 de la salariée et 10 de l’employeur) que M. [F], DUO, a expressément chargé Mme [G] de gérer cette prestation, par courriel du 7 mars 2016, en ces termes : « [A], Messieurs, Pouvez-vous préparer l’organisation des retraits et alimenter le tableau pour [E]. Nous avons toute la semaine prochaine pour lui faire un retour ».
La société Taïs reproche dans ces conditions à juste titre à Mme [G] de ne pas avoir répondu à ce courriel, de ne pas avoir exécuté les directives données par son supérieur hiérarchique, de ne pas avoir traité la demande du client EDF.
Mme [G] oppose principalement à ce sujet la méprise de M. [F] sur son rôle au sein de l’entreprise. Elle prétend que c’était M. [U] qui était en charge de gérer les dépôts et retraits des matériels non roulants de l’agence. Elle soutient encore qu’elle ne faisait pas partie des destinataires de l’email du client EDF du 4 mars 2016 et donc qu’il ne lui appartenait pas d’exécuter cette mission, que le client EDF ne faisait pas partie de son portefeuille client et que M. [U] rencontrait des difficultés avec le service planning.
Si les contestations émises par Mme [G] apparaissent pour certaines bien fondées, il reste que la salariée ne justifie pas avoir répondu au courriel de M. [F], qui lui était plus particulièrement adressé, alors qu’il contenait une demande émanant de son supérieur hiérarchique.
Ce grief tenant à l’absence de réponse aux consignes de son supérieur hiérarchique, est établi.
L’employeur reproche, en quatrième lieu, à Mme [G], de s’être absentée du 5 février au 11 février 2016 sans en informer sa hiérarchie et en fournissant tardivement un justificatif de son absence, en dépit des relances téléphoniques qui lui ont été faites à plusieurs reprises sur son téléphone professionnel et personnel.
Il est constant que Mme [G] a été absente à compter du 5 février 2016 jusqu’au 12 février 2016.
L’employeur reconnaît avoir reçu un message le 9 février 2016 et l’arrêt de travail le 12 février 2016. Il reproche à Mme [G] le non-respect du délai de transmission de 48 heures.
De son côté, Mme [G] prétend avoir appelé M. [T], responsable d’exploitation, à plusieurs reprises le 8 février 2016 pour le prévenir et verse aux débats ses relevés téléphoniques (sa pièce 12). Elle prétend ensuite avoir fait déposer son arrêt de travail par M. [J] le lundi 8 février 2016 dans sa bannette et produit une attestation de l’intéressé en ce sens (sa pièce 13).
La cour considère que la preuve est rapportée des diligences de la salariée pour justifier avoir informé son employeur en temps utile de sorte que ce grief sera écarté.
L’employeur reproche, en dernier lieu, à Mme [G], de ne pas avoir assuré l’ensemble des retours et des départs des chauffeurs au cours des 5 jours de la semaine 10, correspondant à la période du 7 au 13 mars 2016, et de ne pas avoir effectué les comptes-rendus afférents, comme elle devait pourtant le faire.
Pour justifier de ce grief, la société Taïs produit un courriel que lui a adressé la salariée le 9 mars 2016, en ces termes :
« Messieurs,
Concernant mes horaires, effectivement, c’est ma semaine de retour (7h-15h).
Lundi 7 je devais être en DS avec [O] donc rdv à 5h (pour une fin évidente à 13h) mais j’avais prévu d’être là entre 11h et 13h. Bon il y a eu l’accident de M. [P] alors je (‘)
Mardi 8 je suis aussi venue à 5h car je devais donner le portable à [H]. Hier je me suis déplacée un peu partout pour des problèmes sur site et à [Localité 6], donc non je n’ai pas (‘)
Mercredi 9 + jeudi 10 : j’assure les retours, mais il y a un des deux jours où je partirai à 13h car je dois récupérer les heures à [Localité 6] et à [Localité 7].
Vendredi 11 je suis en DS avec [O], rdv à 5h mais retour prévu pour 10h donc retour chauffeur de 10h à 13h. » (pièce 12 de l’employeur).
Mme [G] souligne que la totalité des retours chauffeurs a été correctement réalisés au cours de cette semaine. Elle ajoute avoir informé sa hiérarchie de n’avoir été en mesure d’assurer l’ensemble des départs de la journée que sur deux jours pleins compte tenu du fait qu’elle devait également gérer les imprévus et les rendez-vous extérieurs dont la durée est extrêmement variable. Elle invoque une pratique d’entraide au sein de la société en pareil cas.
Aux termes de ses écritures, la salariée reconnaît donc ne pas avoir été en mesure d’assurer l’ensemble des départs et retours de la semaine 10. Pour expliquer ce manquement, elle invoque une pratique d’entraide existant au sein de l’entreprise, dont elle ne rapporte toutefois la preuve par aucune pièce utile. En effet, les échanges de courriels qu’elle verse aux débats ne permettent pas de retenir, comme elle le prétend pourtant, que ses collègues ont accepté de l’aider au titre d’une pratique d’entraide instaurée au sein de la société (sa pièce 14).
Il ressort au contraire du courriel qu’elle a adressé à sa hiérarchie qu’elle organisait son travail et ses horaires comme elle l’entendait, que de surcroît, elle n’a informé ses supérieurs de son organisation que tardivement, le mercredi 9 mars, alors que la semaine de référence était déjà largement entamée, les mettant devant le fait accompli.
Au regard de ces éléments, ce grief est également établi.
Les griefs retenus, en ce qu’ils caractérisent des manquements de la salariée à ses obligations telles qu’elles résultent du contrat de travail, apparaissent sérieux et justifient, par leur multiplication, le licenciement pour faute de Mme [G].
Il s’ensuit le rejet de la demande indemnitaire subséquente, par confirmation du jugement entrepris.
Sur l’exécution provisoire
Cet arrêt étant rendu en dernier ressort sans que soit ouverte la voie de l’opposition, il n’y a pas lieu à exécution provisoire.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
Mme [G], qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens, de première instance et d’appel, en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Mme [G] sera en outre condamnée à payer à la société Taïs une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, que l’équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 500 euros.
Mme [G] sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.
Le jugement de première instance sera confirmé en ses dispositions concernant et les frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Montmorency le 2 septembre 2019,
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [A] [G] au paiement des dépens de première instance et d’appel,
CONDAMNE Mme [A] [G] à payer à la SAS Taïs une somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE Mme [A] [G] de sa demande présentée sur le même fondement.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine BOLTEAU-SERRE, président, et par Mme Domitille GOSSELIN, greffier en pré-affectation, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER EN PRÉ-AFFECTATION, LE PRÉSIDENT,