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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-11 référés
ORDONNANCE DE REFERE
du 30 Mai 2022
N° 2022/47
Rôle N° RG 22/00259 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJLIZ
S.A.S.U. AZUR LOCATION SERVICES TRANSPORTS
C/
[Z] [W]
Copie exécutoire délivrée
le : 30 Mai 2022
à :
Me Frédéric CHAMBONNAUD,
avocat au barreau de NICE
Me Benjamin COHEN, avocat au barreau de NICE
Prononcée à la suite d’une assignation en référé en date du 05 Mai 2022.
DEMANDERESSE
S.A.S.U. AZUR LOCATION SERVICES TRANSPORTS, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Frédéric CHAMBONNAUD de la SELARL CHAMBONNAUD BAGNOLI SECHER, avocat au barreau de NICE
DEFENDEUR
Monsieur [Z] [W], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Benjamin COHEN, avocat au barreau de NICE substitué par Me François MAIRIN, avocat au barreau de TARASCON
* * * *
DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L’affaire a été débattue le 16 Mai 2022 en audience publique devant
Colette DECHAUX, Présidente de chambre,
déléguée par ordonnance du premier président.
En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile
Greffier lors des débats : Caroline POTTIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2022.
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 30 Mai 2022.
Signée par Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Caroline POTTIER, adjointe administrative faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [Z] [W], embauché le 17 juillet 2019 par la société Azur location services transports en qualité de chauffeur poids lourd, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, s’est vu notifier par courrier de son employeur en date du 04 octobre 2019 qu’il était placé en absence non rémunérée à compter du 30 septembre 2019, par suite de la suspension de son permis de conduire pendant six mois en lien avec une infraction au code de la route.
Par jugement en date du 5 novembre 2021, le conseil de prud’hommes de Nice, a:
* constaté que M. [Z] [W] est salarié de la société Azur location services transports,
* condamné la société Azur location services transports à payer à M. [Z] [W] les sommes suivantes:
– 31 854.96 euros au titre de salaire pour la période du 1er octobre 2019 au 31 mars 2021,
– 3 185.50 au titre des congés payés afférents,
* ordonné la remise des bulletins de paie par la société Azur location services transports à M. [Z] [W] pour la période du 1er octobre 2019 au 31 mars 2021, sans assortir cette obligation d’une astreinte,
* condamné la société Azur location services transports aux dépens.
La société Azur location services transports a relevé appel de ce jugement par déclaration d’appel en date du 13 décembre 2021.
Par acte d’huissier en date du 24 mars 2022, la société Azur location services transports a fait assigner, devant le premier président de cette cour, M. [Z] [W] en sollicitant:
* l’autorisation de consigner le somme de 35 040.46 euros auprès d’un séquestre,
* la désignation de la selarl Chambonnaud-Bagnole-Secher comme séquestre en charge de consigner la somme de 35 040.46 euros sur son compte Carpa dans l’attente de l’arrêt de la cour d’appel, en lui ordonnant de reverser dans le mois à compter de la décision à intervenir cette somme sur le dit compte,
* la condamnation M. [Z] [W] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions visées par le greffier le 22 avril 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société Azur location services transports, sollicite désormais:
* l’autorisation de consigner la somme de 15 927.48 euros auprès d’un séquestre,
* la désignation de la selarl Chambonnaud-Bagnole-Secher comme séquestre en charge de consigner la somme de 15 927.48 euros sur son compte Carpa dans l’attente de l’arrêt de la cour d’appel, en lui ordonnant de reverser dans le mois à compter de la décision à intervenir cette somme sur le dit compte,
* la suspension de l’exécution de droit attachée à la décision du conseil de prud’hommes de Nice du 05 novembre 2021 dés le moment où cette consignation aura été réalisée,
*la condamnation M. [Z] [W] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Enfin, elle nous demande de débouter M. [Z] [W] de ses demandes.
En l’état de ses conclusions visées par le greffier le 21 avril 2022, reprises oralement à l’audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé plus ample de ses moyens et arguments, Monsieur [Z] [W] soulève l’irrecevabilité des demandes de la société Azur locations services transports et subsidiairement nous demande de la débouter de ses demandes.
Il sollicite la condamnation de la société Azur location services transports au paiement de la somme de 2 000 euros ainsi qu’aux dépens.
MOTIFS
Il résulte de l’article 521 du code de procédure civile que la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.
La société débitrice qui sollicite dans le dernier état de ses conclusions la consignation des condamnations relevant de l’exécution provisoire de droit, soutient que les dispositions de l’article 521 du code de procédure civile concernent tous les jugements et qu’il ne peut lui être opposé l’irrecevabilité tirée du défaut de protestation sur l’octroi de l’exécution provisoire au motif que sa demande n’est pas fondée sur l’article 514-3 du code de procédure civile et ne tend pas à la suspension de l’exécution provisoire mais porte sur la consignation et émane de la partie condamnée. Elle invoque le risque avéré de non-restitution, soulignant que M. [W] est criblé de dettes et ne dispose pas de logement propre, ce qui fait obstacle à une saisie à son domicile.
Elle souligne que la suspension du permis de conduire du salarié s’est transformée en retrait total du permis en raison de l’état de récidive légale retenu, que l’infraction pénale à l’origine de cette annulation a été constatée sur son temps de travail et a généré une mesure d’immobilisation du véhicule.
Le salarié lui oppose d’une part que les conditions de la suspension de l’exécution provisoire de droit ne sont pas réunies le jugement du conseil de prud’hommes étant bien fondé et qu’il n’y a aucune conséquence manifestement excessive, puisque sa créance couvre largement ses dettes. Il soutient que la demande de consignation est irrecevable en l’absence de contestation de l’exécution provisoire de droit en première instance.
Il résulte du jugement du conseil de prud’hommes de Nice que l’instance prud’homale a été introduite le 11 septembre 2020.
Il est exact que la demande de la société employeur ne porte pas sur l’arrêt de l’exécution provisoire de droit, mais uniquement sur une demande de consignation dont la finalité est selon l’article 521 du code de procédure civile d’éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie.
Une telle demande est donc étrangère aux dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile lequel dispose qu’en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives et que la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Il importe peu dès lors que la société Azur location services transports n’ait pas fait valoir d’observations en première instance, elle est recevable en sa demande d’aménagement de l’exécution provisoire fondée sur les dispositions de l’article 521 du code de procédure civile.
L’aménagement de l’exécution provisoire sollicité n’est pas davantage subordonné à la condition que cette exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives et il est laissé à la discrétion du premier président.
Il résulte des dispositions de l’article R. 1454-28 alinéa 2 du code du travail que l’exécution provisoire de droit concerne notamment le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement et l’article R.1454-14 2° liste:
a) les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions,
b) les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement,
c) l’indemnité compensatrice et de l’indemnité spéciale de licenciement en cas d’inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l’article L. 1226-14,
e) l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 et de l’indemnité de fin de mission mentionnée à l’article L. 1251-32.
Le jugement frappé d’appel porte condamnation au paiement de salaires et indemnités de congés payés y afférents, pour un montant total de 35 040.46 euros (dont 31 854.96 euros en salaires et 3 185.50 euros d’indemnités de congés payés) relatifs à la période du 1er octobre 2019 au 31 mars 2021, durant laquelle l’employeur a placé son salarié en situation d’absence non rémunérée en raison de la suspension puis du retrait de son permis de conduire, nécessaire à l’exécution de son poste de travail de chauffeur poids lourd, et à l’indemnité de congés payés y afférents, période durant laquelle le salarié n’a donc perçu aucun salaire, tout en ne pouvant pas par ailleurs bénéficier d’allocations chômage, en l’absence de rupture de son contrat de travail.
Il n’est pas contesté que l’exécution provisoire de droit porte sur la somme de 15 927.48 euros ce qui ne justifie pas un aménagement de celle-ci et que soit ordonnée la consignation de cette somme.
La société Azur location services transports doit donc être déboutée de sa demande.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [W] les frais qu’il a été contraint d’exposer pour sa défense dans le cadre de la présente procédure, ce qui justifie l’octroi de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Succombant dans ses demandes la société Azur location services transports doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter l’application à son bénéfice des dispositions précitées.
PAR CES MOTIFS,
– Déboutons la société Azur location services transports de sa demande d’aménagement de l’exécution provisoire de droit,
– Condamnons la société Azur location services transports à payer à M. [Z] [W] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Disons n’y avoir lieu à application au bénéfice de la société Azur location services transports des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamnons la société Azur location services transports aux dépens.
LE GREFFIERLE PRESIDENT