Chauffeur Poids-Lourd : décision du 29 juin 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 22/00993

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 29 juin 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 22/00993
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AFFAIRE : N° RG N° RG 22/00993 – N° Portalis DBWB-V-B7G-FWUH

 Code Aff. :AP

ARRÊT N° AP

ORIGINE :JUGEMENT du Pole social du TJ de SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 06 Avril 2022, rg n° 21/13

COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 29 JUIN 2023

APPELANTE :

Monsieur [W] [Y] [G]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Xavier BELLIARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION, substitué par Me Antony CHHANN, avocat au Barreau de Paris,

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/002418 du 25/05/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Saint-Denis)

INTIMÉ :

Organisme CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me Isabelle CLOTAGATIDE KARIM de la SCP CANALE-GAUTHIER-ANTELME-BENTOLILA, avocat au barreau de Saint-Denis de la Reunion, substituée par Me Anne-Laure SITALAPRESSAD, avocate au Barreau de Saint-Denis de la Réunion.

DÉBATS : En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Avril 2023 en audience publique, devant Aurélie POLICE, conseillère chargé d’instruire l’affaire, assistée de Jean-François BENARD, greffier placé, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 29 JUIN 2023;

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Président : Laurent CALBO

Conseiller : Aurélie POLICE

Conseiller : Laurent FRAVETTE

Qui en ont délibéré

ARRÊT : mis à disposition des parties le 29 JUIN 2023

Greffier lors des débats et lors de la mise à disposition : M. Jean-François BENARD

* *

*

LA COUR :

Exposé du litige’:

M. [G], salarié de la société [5], a déclaré avoir été victime d’un accident du travail survenu le 17 février 2020, sur son lieu de travail, lors de la démolition des bâtis.

Le 30 juillet 2020, la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion (la caisse) a notifié à M. [G] un refus de prise en charge de l’accident au titre de la législation professionnelle, en raison de l’absence de suite donnée aux différents courriers qui lui ont été adressés.

Après recours préalable devant la commission de recours amiable, M. [G] a saisi, le 18 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion d’une contestation de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de la caisse, concernant le refus de prise en charge de l’accident du 17 février 2020 au titre de la législation professionnelle.

La commission de recours amiable a confirmé ce refus par décision du 29 janvier 2021.

Par jugement rendu le 6 avril 2022, le tribunal a débouté M. [G] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens.

M. [G] a interjeté appel de cette décision par acte du 27 juin 2022.

Vu les conclusions déposées par M. [G] le 4 octobre 2022 auxquelles il s’est expressément référé lors de l’audience de plaidoiries’du 25 avril 2023′;

Vu les conclusions déposées par la caisse le 6 décembre 2022, auxquelles elle s’est expressément référée lors de l’audience de plaidoiries’;

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu’aux développements infra.

Sur ce’:

Selon l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

L’accident subi pendant le temps et sur le lieu du travail de la victime est présumé être un accident du travail, dès lors que le travailleur est nécessairement dans l’aire d’autorité de l’employeur.

La preuve de la matérialité de l’accident peut être rapportée par tous moyens. Les seules allégations de la victime ne sont pas suffisantes pour démontrer la réalité des circonstances invoquées. En effet, la législation relative aux accidents du travail instaure un régime spécial de responsabilité sans faute en vertu duquel il appartient au salarié, non pas de rapporter la démonstration d’une faute imputable à l’employeur, mais à tout le moins d’établir que les circonstances alléguées de l’accident sont corroborées par des éléments objectifs de nature à établir la survenance d’un fait accidentel au temps et au lieu du travail.

Dans l’hypothèse où l’accident déclaré a eu lieu aux temps et lieu du travail, il appartient à la caisse, qui conteste le bénéfice de la présomption d’imputabilité, d’apporter la preuve d’une cause totalement étrangère afin de justifier la survenance de la lésion ou de démontrer que la présomption d’imputabilité était inapplicable.

Au contraire, si la présomption d’imputabilité est inapplicable dès lors que la lésion n’est pas apparue aux temps et lieu de travail, il appartient à la victime d’apporter la preuve du lien entre le travail et les lésions constatées.

En l’espèce, M. [G] a déclaré le 24 avril 2020 un accident du travail intervenu le 17 février 2020 à 13h30. La déclaration, sur laquelle aucune réserve n’a été élevée par l’employeur, précise en ce qui concerne l’activité «’Démolition de chantier», la nature de l’accident «’Reçu des débris à l”il droit’» et le siège et la nature des lésions «”il droit. Rayure de la cornée’».

Est joint le certificat médical initial du 18 février 2020 précisant «’Projection de corps étranger dans l”il Dt avec abrasion de cornée’».

Entendus les 13 et 20 mai 2020, lors de l’enquête administrative diligentée par la caisse, l’employeur reconnaît tout d’abord que M. [G] travaillait le jour des faits litigieux sur le chantier [7] à [Localité 6], chantier de démolition, tandis que le salarié précise que «’Le 17 février 2020, depuis le matin, je me trouvais sur le chantier [7] (à [Localité 6]) j’intervenais avec Monsieur [Z] [T] (employeur) et son fils [M]. J’ai démonté des bâtis vers 8.30/9 heures et j’ai mis les pièces en tas pour le chargement. Il y avait beaucoup de poussières. Sans aucune protection (lunette, chaussures de sécurité, casque), lors des démontages de ces bâtis, avec marteau et ciseau, j’ai reçu un débris dans l”il, qui s’est transformé en une gêne. Je n’ai pas d’heure précise. Dans l’après-midi, en chargeant le camion, la gêne s’est accentuée. J’ai toutefois conduit jusqu’au dépôt. Dans ma voiture, sur mon trajet retour, j’ai fait le choix d’aller consulter.’».

Il convient donc de relever que l’employeur ne conteste pas la participation de M. [G], embauché en qualité de chauffeur poids-lourd, aux travaux de démolition, sans qu’il soit contredit que le salarié ne disposait pas de lunettes de protection.

Le siège de la lésion médicalement constatée le jour même du fait accidentel allégué est donc compatible avec la nature des travaux et leur condition d’exercice par M. [G].

Ainsi que le relève la caisse, il est exact que M. [F] et M. [E], salariés présents sur le chantier, n’ont pas constaté que M. [G] s’était plaint d’une gêne, notamment lors de la pause déjeuner.

Toutefois, d’une part, M. [G] situe l’heure de l’accident en début d’après-midi, soit après la pause déjeuner.

D’autre part, il évoque en outre une gêne croissante. Ses déclarations sont corroborées par l’attestation de Mme [O], sa compagne, qui explique qu’à son retour au domicile, vers 16 heures 30 ou 17 heures, M. [G] se plaignait d’une gêne à l”il qui le grattait et qu’elle l’a emmené consulter, ce qui est établi par le certificat du docteur [I] [R] [X] qui indique avoir examiné M. [G] dès le 17 février 2020 après-midi «’pour un accident à l”il droit qui se serait passé pendant le travail l’après-midi’» et l’avoir orienté vers les urgences.

Enfin, il résulte du compte-rendu de passage aux urgences que M. [G] s’y est présenté le 18 février 2020 à 9 heures 15 pour une douleur oculaire, que la douleur à l”il droit provient d’un possible corps étranger la veille au travail, que le patient n’avait aucun antécédent ophtalmologique, qu’il a vu préalablement son médecin traitant qui lui a prescrit du sérum physiologique et du collyre et que la douleur est due à une abrasion de la cornée.

Ainsi, les témoignages de M. [F] et M. [E] ne contredisent pas la survenance du fait accidentel tel que présenté par M. [G], lequel est objectivé par les déclarations qu’il a tenu le jour même devant son médecin traitant et sa conjointe, et le lendemain devant l’urgentiste, ainsi que la comptabilité entre le siège des lésions et la nature des travaux effectués.

En conséquence, il est établi l’apparition soudaine d’une lésion à l”il droit au préjudice de M. [G]’à l’occasion des travaux de démolition effectués le 17 février 2020.

La présomption d’imputabilité des lésions étant établie, il appartient à la caisse d’en démontrer le caractère totalement étranger au travail ce qu’elle ne fait pas.

En conséquence, il y a lieu d’infirmer le jugement, de dire que le caractère professionnel de l’accident en litige est établi et d’ordonner à la caisse sa prise en charge.

PAR CES MOTIFS’:

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement,

Infirme le jugement rendu le 6 avril 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Dit que les lésions dont a été victime M. [G] le 17 février 2020 sont présumées imputables au travail’;

Ordonne à la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion de prendre en charge l’accident du 17 février 2020 au titre de la législation sur les risques professionnels’;

Condamne la caisse générale de sécurité sociale de La Réunion aux dépens de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Laurent CALBO, Conseiller, et par M. Jean-François BENARD, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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