Chauffeur Poids-Lourd : décision du 23 mai 2022 Cour d’appel de Metz RG n° 20/02162

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 23 mai 2022 Cour d’appel de Metz RG n° 20/02162
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Arrêt n° 22/00232

23 Mai 2022

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N° RG 20/02162 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FMF5

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Pole social du TJ de METZ

21 Octobre 2020

18/01703

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

Section 3 – Sécurité Sociale

ARRÊT DU

vingt trois Mai deux mille vingt deux

APPELANTE :

S.A.S. [4] ([4])

ayant siège social

[Adresse 5]

[Localité 2]

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric BLAISE, avocat au barreau de METZ

substitué par Me MARCHAL, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES VOSGES

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Mme [H], munie d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre, magistrat chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre

Mme Carole PAUTREL, Conseillère

Mme Sophie RECHT, Vice-Présidente placée

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier

ARRÊT : contradictoire

Prononcé publiquement après prorogation du 03.05.2022

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [Y] [S] a, le 23 novembre 2017, adressé à la CPAM des Vosges une déclaration de maladie professionnelle avec à l’appui un certificat médical initial du 17 novembre 2017 mentionnant syndrome canal carpien gauche ( EMG du 18 10 17) mouvements répétitifs et vibrations sur son lieu de travail: chauffeur poids lourd+ chargeur à la pelle mécanique depuis 33 ans.

Le médecin conseil de la caisse a retenu que Monsieur [Y] [S] était atteint d’un syndrome du canal carpien gauche du tableau n° 57 C des maladies professionnelles et le colloque médico-adminidtratif s’est orienté vers un accord de prise en charge au titre de ce tableau.

Le 25 mai 2018, la caisse a, après instruction notifié à l’employeur, la société [4], la prise en charge de la pathologie, syndrome du canal carpien gauche inscrite au tableau n° 57: affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail , de M. [S] au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le 27 juillet 2018, la société [4] a saisi la commission de recours amiable de la caisse d’un recours contre cette décision.

Elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Moselle, le 25 octobre 2018, d’un recours contentieux contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Le 5 novembre 2018, la commission de recours amiable de la CPAM des Vosges a rendu une décision explicite de rejet de sa réclamation.

Par jugement du 21 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Metz nouvellement compétent a:

– confirmé la décision de la CRA de la CPAM des Vosges du 5 novembre 2018;

– débouté la société [4] de l’ensemble de ses demandes;

– constaté le caractère professionnel de la pathologie , syndrome canal carpien gauche dont est atteint M. [S],

– déclaré opposable à la société [4] la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [Y] [S] en date du 25 mai 2018;

– condamné la société [4] aux dépens engagés à compter du 1er janvier 2019.

Par déclaration électronique du 24 novembre 2020, effectuée via le RPVA, la société [4] a interjeté appel dudit jugement à elle notifié par LRAR du 26 octobre 2020.

Par conclusions écrites du 23 février 2021, verbalement développées à l’audience de plaidoirie par son conseil, elle demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de dire que la décision de prise en charge de la pathologie de Monsieur [Y] [S] au titre de la législation professionnelle est infondée, de dire que la maladie de Monsieur [S] ne peut pas être reconnue comme ayant pour origine le travail et qu’elle ne peut en conséquence être prise en charge au titre de la législation du travail, de déclarer inopposable à la société [4] la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [S] et de condamner la CPAM, outre aux dépens, à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que M. [S] n’effectuait aucun des travaux visés dans le tableau n° 57C; qu’il a principalement été embauché comme chauffeur au sein du service transport à compter du 2 mars 2015, après avoir effectué plusieurs missions d’intérim au sein de la société depuis mars 2014; qu’il passait environ 60% de son temps assis dans son camion;qu’il n’effectuait aucun mouvement d’extension du poignet , aucun mouvement de préhension de la main et aucun appui prolongé sur le talon de la main droite ou gauche; que surtout, s’agissant des autres opérations, le nombre de mouvements, les durées cumulées journalières et hebdomadaires ne correspondent pas; que sa main gauche n’était quasiment jamais sollicitée.

Par conclusions du 3 février 2022, verbalement développées à l’audience de plaidoirie par son représentant, la CPAM des Vosges a conclu à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de la société [4] , outre aux dépens, à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que l’activité de conduite prolongée mise en évidence dans le rapport d’enquête administrative ( 60 à 70% du temps de travail) entraine nécessairement des mouvements prolongés de préhension de la main et d’appui prolongé. Elle souligne que pour les 30 à 40% restants de temps de travail, M. [S] effectuait des tâches de manutention des bennes; que ces tâches et les mouvements répétés de montée et descente de sa cabine entrainaient également des mouvements d’extension du poignet et de préhension de la main .

SUR CE,

Il résulte de l’article L 461-1 du code de la sécurité sociale qu’est présumée d’origine professionnelle toute maladie contenue dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions de ce tableau.

Le tableau n° 57 C des maladies professionnelles, affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail affectant le poignet, la main ou les doigts, désigne le syndrome du canal carpien comme maladie professionnelle et édicte un délai de prise en charge de 30 jours et une liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie.

Il n’est pas contesté que M. [S], embauché par la société [4] le 2 mars 2015 en qualité de chauffeur, affecté au service transport et dont le dernier jour de travail effectif était le 24 novembre 2017, avant une reprise le 2 janvier 2018, est atteint d’un syndrome du canal carpien gauche dont la première constatation médicale remonte au 18 octobre 2017.

Est discutée la condition tenant à la liste limitative des travaux du tableau n° 57 C laquelle énonce qu’il doit s’agir de travaux comportant de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés d’extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main.

Il ressort du rapport d’enquête établi par l’agent enquêteur de la caisse que M. [S] occupait au moment de la déclaration de maladie professionnelle, un poste de chauffeur poids lourd dans l’entreprise [4] , société spécialisée dans la récupération de déchets triés et travaillait entre 35 et 50 heures par semaine sur 5 jours.

Les parties s’accordent pour dire qu’il passait environ 60 % à 70% de son temps assis dans son camion, sa principale activité consistant à transporter à l’aide d’un camion et, occasionnellement , avec une remorque, des bennes ( en moyenne 20 par semaine), des caissons ( en moyenne 2 par semaine) ou des monoblocs ( en moyenne 2 par semaine).

La description de ses tâches n’est pas davantage discutée:manipulations manuelles lors du bâchage et du débâchage des bennes avec une perche téléscopique, mise en place ou enlèvement des caissons ( système de cliquet pour désolidariser le caisson du compacteur), ouverture des portes du monobloc en manipulant un cliquet, ces opérations l’amenant à monter et descendre de la cabine plusieurs fois par jour.

L’employeur admet que les opérations de manipulation de la benne pour son chargement, bâchage et débâchage compris représente une durée moyenne hebdomadaire de 3H 20.

La description de ces tâches caractérise une exposition habituelle au risque laquelle n’a pas besoin d ‘être permanente et continue , celles-ci, y compris celle de conduite du camion, comportant habituellement des mouvements répétés de préhension de la main, dont sa main gauche.

Le jugement entrepris qui a considéré comme étant remplie la condition tenant à la liste limitative des travaux du tableau n° 57C des maladies professionnelles est , en conséquence,confirmée.

Le caractère professionnel de la maladie étant dès lors présumé et l’employeur ne démontrant pas que la maladie est due à une cause totalement étrangère au travail, il convient de confirmer le jugement entrepris qui a déclaré opposable à la société [4] la décision de la CPAM des Vosges du 25 mai 2018 portant reconnaissance du caractère professionnel de la maladie de M. [S].

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement entrepris du 21 octobre 2020 du tribunal judiciaire de Metz .

DIT que l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la CPAM des Vosges.

CONDAMNE la société [4] aux dépens d’appel.

Le Greffier Le Président

 


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