Chauffeur Poids-Lourd : décision du 2 février 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00341

·

·

Chauffeur Poids-Lourd : décision du 2 février 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00341
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 02 FEVRIER 2023

N° RG 21/00341 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UJF5

AFFAIRE :

[V] [C]

C/

SAS SUEZ RV ILE-DE FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Décembre 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : C

N° RG : 18/01853

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Anne-Laure PREVOT de la SELARL ANNE LAURE PREVOT

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l’ASSOCIATION AVOCALYS

Expédition numérique délivrée à POLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [V] [C]

né le 06 Septembre 1972 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Anne-Laure PRÉVOT de la SELARL ANNE LAURE PREVOT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0108

APPELANT

****************

SAS SUEZ RV ILE-DE FRANCE

N° SIRET : 662 014 489

[Adresse 1]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l’ASSOCIATION AVOCALYS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 – Représentant : Me Arnaud LEBIGRE de la SELARL LEBIGRE, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN, vestiaire : 94

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 07 Décembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame [T] [D],

Monsieur [V] [C] a été engagé par la société Derichebourg Ile-de-France à compter du 1er février 1996 par contrat à durée indéterminée en qualité de laveur manutentionnaire, aide, mécanicien. Par la suite, le contrat de travail a été transféré à la société Sita Ile-de-France, devenue Suez RV Ile-de-France. En dernier lieu, le salarié occupait le poste de chauffeur poids lourds au sein de la société Suez RV Ile-de-France.

La convention collective applicable est celle des activités du déchet.

Selon le salarié, la moyenne de ses douze derniers mois de salaire s’élevait à la somme de 2 639,15 euros.

L’effectif de la société était au moins égal à 11 salariés.

Le 5 septembre 2016, le salarié a été victime d’un accident de trajet ayant occasionné son placement en arrêt de travail.

Par avis du 12 avril 2018, le médecin du travail l’a déclaré inapte au poste de chauffeur poids lourds.

Par courrier du 31 mai 2018, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 11 juin 2018, puis licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par courrier du 16 juin 2018.

Par requête reçue au greffe le 13 juillet 2018, Monsieur [V] [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre afin de contester la légitimité de son licenciement et d’obtenir le paiement de diverses sommes.

Par jugement du 11 décembre 2020, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Nanterre, section commerce, a :

– Jugé que Monsieur [V] [C] avait fait l’objet d’un licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse.

– Débouté Monsieur [V] [C] de l’ensemble de ses demandes.

– Débouté la SAS Suez RV Ile-de-France de sa demande au titre de l’artie1e 700 du code de procédure civile.

– Mis en application des dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile les éventuels dépens à la charge de Monsieur [V] [C].

Par déclaration au greffe du 29 janvier 2021, Monsieur [V] [C] a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 7 avril 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Monsieur [V] [C], appelant, demande à la cour de :

– Le recevoir dans son action et l’y dire bien fondé,

– Infirmer le jugement

En conséquence,

Il est demandé à la cour d’appel de :

– Fixer la moyenne de sa rémunération brute mensuelle à 2 639,15 euros ;

A titre principal :

– Prononcer la nullité de son licenciement

A titre subsidiaire :

– Prononcer son licenciement sans cause réelle ni sérieuse

A titre principal :

– Condamner la société à lui verser :

‘ la somme de 63 339,60 (24 mois de salaire) pour nullité du licenciement ;

A titre subsidiaire :

– Condamner la société à lui verser :

‘ la somme de 43 545,97 (16,5 mois de salaire) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause prononcer :

‘ indemnité compensatrice de préavis (2 mois article 2.21 de la convention collective du 19 juin au 19 août 2018) : 5 278,30 euros bruts

‘ congés payés afférents : 527,83 euros bruts

‘ dommages et intérêts pour préjudice subi en raison de l’absence de formation : 7 917,45 euros

‘ dommages et intérêts pour préjudice subi en raison de l’absence d’entretien professionnel : 7 917,45 euros

– Ordonner :

‘ la remise des documents relatifs à la rupture modifiés ;

‘ remise des bulletins de paie modifiés sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

‘ 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ le paiement de l’intérêt au taux légal et des dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 28 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Suez RV Ile-de-France, intimée, demande à la cour de :

A titre principal

– Débouter Monsieur [C] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

En conséquence :

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nanterre, section commerce, en date du 11 décembre 2020, en toutes ses dispositions.

– Condamner Monsieur [C] à lui verser la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– Condamner Monsieur [C] aux entiers dépens.

A titre subsidiaire

– Fixer le quantum des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul à la somme de 7 917,45 euros.

– Débouter Monsieur [C] du surplus de ses demandes.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 9 novembre 2022.

SUR CE,

Sur l’exécution du contrat de travail :

Monsieur [C] sollicite d’une part des dommages et intérêts pour préjudice subi en raison d’une absence de formation à hauteur de 7 917,45 euros et, d’autre part, des dommages et intérêts pour préjudice subi en raison de l’absence d’entretien professionnel à hauteur de la même somme ;

En application de l’article L. 6321-1 du code du travail, l’employeur est tenu d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations ;

Monsieur [C] fait valoir qu’il ne s’est jamais vu proposer de formation pendant la durée de la relation professionnelle qui lui aurait permis de développer des compétences nouvelles ou une adaptabilité ;

La société Suez RV Ile-de-France fait d’abord observer que l’employabilité d’un salarié exerçant les fonctions de chauffeur tient essentiellement au maintien de ses habilitations et titres de conduite et observe que Monsieur [C] ne précise pas quelles sont les formations dont il aurait été privé ;

Elle justifie ensuite du suivi de quatre journées de formations (conduite pro ; réflexes éco-conduites ; qualité de service chez le client ; FCO marchandises) sur la période comprise entre janvier 2015 et février 2016, précédant la période d’arrêt de travail à compter d’octobre 2017 ;

Faute de démontrer un manquement de l’employeur en lien de causalité avec un préjudice, Monsieur [C] est débouté de ce chef de demande ; le jugement est confirmé sur ce point ;

En application de l’article L.6315-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur depuis la loi du 5 mars 2014, le salarié est informé qu’il bénéficie tous les deux ans d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi ; cet entretien professionnel donne lieu à la rédaction d’un document dont une copie est remise au salarié ;

La société intimée, qui relève vainement sur ce point que Monsieur [C] a vu son contrat de travail suspendu en octobre 2017 jusqu’au constat d’inaptitude, soit postérieurement au terme prévu pour cet entretien et que le salarié n’a pas sollicité d’entretien, ne justifie aucunement avoir informé ce dernier ni organisé un entretien professionnel conforme aux prescriptions de l’article précité ;

Monsieur [C], n’ayant pas été en mesure d’exprimer et de voir aborder effectivement ses perspectives d’évolution dans l’entreprise est fondé à réclamer l’indemnisation du préjudice qui en résulte ;

Il lui est alloué la somme de 1 000 euros à ce titre ;

Le jugement est infirmé sur ce point ;

Sur la rupture du contrat de travail :

Monsieur [C] demande à titre principal de voir prononcer la nullité de son licenciement ; il soutient à ce titre que son licenciement a été rompu en raison de son handicap ; il indique à ce titre qu’il bénéficiait du statut d’handicapé depuis le 1er septembre 2016 et que depuis cette date, la société n’a organisé aucune visite médicale afin de préserver sa santé ;

A titre subsidiaire il demande de voir reconnaître son licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; il fait valoir à ce titre que la société n’a pas cherché à adapter ou transformer des postes existants pour permettre de le reclasser et qu’elle ne prouve pas qu’aucune permutabilité n’était possible ni que l’organisation des entreprises, leurs activités et leur lieu d’exploitation ne permettaient pas d’assurer la permutabilité du personnel et que finalement il n’est pas justifié de recherches de reclassement sérieuses au sein du groupe ;

Sur la demande de nullité du licenciement, la société intimée fait valoir en réplique, que la discrimination à raison de la situation de santé ou d’un handicap, implique d’abord implique d’abord de démontrer que l’employeur était régulièrement informé du statut de travailleur handicapé, ajoutant qu’elle ne l’était pas en l’espèce et ensuite qu’elle implique un traitement dérogatoire par rapport à d’autres salariés placés dans une situation identique, observant que le salarié n’apporte pas non plus d’argument ni de pièce à cet égard ;

En application de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être sanctionnée, licenciée ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son en n état de santé ou de son handicap ;

En application de l’article L.1132-4 du code du travail, le licenciement intervenu dans ce contexte est nul ;

En l’espèce, il est d’abord rappelé que Monsieur [C] a été licencié pour inaptitude après que par avis du 12 avril 2018 le médecin du travail l’a déclaré inapte au poste de chauffeur poids lourds ;

Monsieur [C] justifie de la reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé à compte du 1er septembre 2016 par la Maison départementale de personnes handicapées ;

Il ne justifie en revanche nullement avoir informé son employeur de cette qualité, ce dont il n’avait d’ailleurs pas l’obligation ;

Dans ces conditions, il ne peut valablement reprocher à l’employeur un manquement de l’employeur au regard d’un suivi médical renforcé au regard de ce handicap ;

Il ne produit pas d’autre élément laissant supposer l’existence d’une discrimination ni que son licenciement a été rompu en raison de son handicap ;

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il a rejeté ses demandes formées au titre de la nullité du licenciement ;

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

En application de l’ article L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, “lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L.4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu’il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en ‘uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. » ;

En application de l’ article L. 1226-2-1 du code du travail,« Lorsqu’il est impossible à l’employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent à son reclassement.

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail.

S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.

(…) » ;

Il appartient donc à l’employeur de justifier qu’il n’a pu, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste de travail ou aménagement du temps de travail, reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d’une recherche sérieuse, effectuée au sein de l’entreprise et des entreprises du groupe auquel il appartient, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d’y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ;

En l’espèce, l’avis d’inaptitude en date du 12 avril 2018 du médecin du travail est rédigé en conclusion en ces termes :

“A la suite de l’étude de poste et des conditions de travail réalisée le 22/02/2018 des examens complémentaires et avis spécialisés, et de l’échange avec l’employeur le 22/02/2018, Monsieur [C] est inapte au poste de chauffeur poids lourd (article R 4624-42 du code du travail). Le salarié pourrait occuper une activité sans port de charges lourdes, d’usage intensif du bras gauche et demandant une vigilance soutenue. Le salarié peut bénéficier d’une formation compatible avec ses capacités restantes susmentionnées.” ;

La société Suez RV Ile-de-France justifie avoir interrogé le salarié sur sa mobilité dans le cadre des recherches de reclassement et de la réponse apportée par ce dernier qui a limité sa mobilité à la sphère régionale et plus précisément “à une distance de 20 minutes de conduite par trajet du domicile (situé à [Localité 4])” ;

Elle justifie ensuite avoir consulté différents pôles au sein de la société Suez RV Ile de France et interrogé des services de ressources humaines d’autres filiales au sein du groupe Suez, une première fois par courriel du 26 avril 2018, puis à nouveau par une relance le 17 mai 2018 ;

Si la société Suez RV Ile-de-France a adressé par ces courriels une recherche de reclassement à de nombreux destinataires, elle ne justifie ni des fonctions de ceux-ci, ni de l’entreprise à laquelle ils appartenaient ; il est observé à cet égard que les courriels adressés ne permettant pas, par le destinataire nominativement désigné ni l’adresse de messagerie mentionnée, qui se termine toujours par « suez.com », de déterminer l’entreprise d’appartenance ; elle produit seulement les réponses, négatives, reçues du département recyclage et valorisation France et de la business line Services aux collectivités et Services aux entreprises au sein de la société Suez RV Ile-de-France, des sociétés Suez RV du Nord, de Normandie, Suez RV Territoire Sud-Est, OSIS Nord et SIRAC, de la société Suez IWS Chemicals France, Suez Rebond Insertion, BCM, Suez RVE IDF et Suez RV Bio énergies, Suez RV France, Suez R§V Trading France, Suez R§V Bois, Suez R§V MNF, Suez R§V OSIS FM et Suez R§V OSIS Industrial Cleaning ; elle ne produit pas d’éléments permettant de connaître de façon précise les sociétés composant le groupe, y compris au niveau régional, et de déterminer le contenu précis du périmètre de reclassement afin de s’assurer que toutes les sociétés concernées aient été effectivement interrogées et n’avaient pas de poste disponible à proposer à Monsieur [C] ;

Les éléments produits demeurent ainsi insuffisants à justifier d’une recherche sérieuse de reclassement et de l’absence de poste disponible approprié aux capacités du salarié, conforme aux conclusions écrites du médecin du travail et aux indications qu’il formule sur les capacités du salarié et correspondant aux compétences professionnelles de l’intéressé, au sein des entreprises du groupe dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation permettaient, en raison des relations qui existaient entre elles, d’y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ;

La société Suez RV Ile-de-France ne démontre pas dès lors avoir satisfait à l’obligation de reclassement qui lui incombait ;

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement entrepris et de dire le licenciement de M. [C] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

A la date de son licenciement Monsieur [C] avait une ancienneté de 22 ans au sein de l’entreprise qui employait de façon habituelle au moins 11 salariés ;

L’article L. 1235-3 du code du travail issu de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 publiée le 23 septembre 2017 prévoit, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et si la réintégration n’est pas demandée et acceptée, une indemnisation à la charge de l’employeur dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau produit, soit pour une ancienneté telle que celle de M. [C], une indemnité minimale de 3 mois de salaire brut et une indemnité maximale de 16,5 mois de salaire brut ;

Au-delà de cette indemnisation minimale, et tenant compte notamment de l’âge, de l’ancienneté du salarié et des circonstances de son éviction, étant observé qu’il justifie avoir perçu de Pôle emploi l’allocation de retour à l’emploi puis percevoir à compter du 28 août 2020 l’allocation de solidarité spécifique, et avoir bénéficié d’un accompagnement spécifique d’orientation professionnelle, il convient de condamner l’employeur au paiement d’une indemnité totale de 31 670 euros à ce titre ;

Le salarié inapte dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d’un manquement de l’employeur à l’obligation de reclassement a droit à l’indemnité de préavis prévue par l’article L. 1234-5 du code du travail ;

Il convient en conséquence de condamner la société Suez RV Ile-de-France à payer à M. [C] la somme de 5 278,30 euros, correspondant à deux mois de salaire, à titre d’indemnité de préavis ainsi que la somme de 527,83 au titre des congés payés afférents ;

En conséquence, le jugement sera infirmé de ces chefs ;

Sur le remboursement par l’employeur à l’organisme des indemnités de chômage

En application de l’article L. 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de 6 mois d’indemnités ;

Sur les autres demandes

Il y a lieu d’enjoindre à la société Suez RV Ile-de-France de remettre à M. [C], dans le mois suivant la signification du présent arrêt, l’attestation pôle emploi, un bulletin de salaire et le certificat de travail rectifiés ;

Le prononcé d’une astreinte ne s’avère pas nécessaire ;

Sur les intérêts

Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale seront dus à compter de la réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation.

S’agissant des créances de nature indemnitaire, les intérêts au taux légal seront dus à compter de la décision les ayant prononcées ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera infirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance d’appel seront mis à la charge de l’employeur ; la société Suez RV Ile-de-France sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et il sera alloué à Monsieur [C] la somme de 3 000 euros au titre des frais par lui exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant,

Dit que le licenciement de Monsieur [V] [C] est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SAS Suez RV Ile-de-France à payer à Monsieur [V] [C] les sommes de :

– 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi en raison de l’absence d’entretien professionnel,

– 31 670 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 5 278,30 euros à titre d’indemnité de préavis et 527,83 au titre des congés payés afférents,

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la SAS Suez RV Ile-de-France de remettre à Monsieur [V] [C] dans le mois de la notification de la présente décision, un bulletin de paie, le certificat de travail, l’attestation Pôle emploi rectifiés,

Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte,

Ordonne le remboursement par la SAS Suez RV Ile-de-France, aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Monsieur [V] [C] dans la limite de 6 mois d’indemnités en application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SAS Suez RV Ile-de-France aux dépens de première instance et d’appel.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x