Chauffeur Poids-Lourd : décision du 15 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/11165

·

·

Chauffeur Poids-Lourd : décision du 15 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/11165
Ce point juridique est utile ?

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 15 JUIN 2022

(n°2022/ , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11165 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA5LY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Octobre 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX – RG n° F15/00474

APPELANTE

SARL TRANS’LIVE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Xavier MARTINEZ, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB 216

INTIME

Monsieur [P] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Emily GALLION, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 avril 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS ET DU LITIGE

M. [P] [Z] a été embauché par la société Trans’Live en qualité de chauffeur poids lourd coefficient 128, par contrat à durée indéterminée, du 21 avril 2003 au 29 janvier 2004 puis de nouveau à compter du 23 janvier 2005, coefficient 128 puis 138.

La société Trans’Live compte plus de 11 salariés.

La convention collective applicable à la relation de travail est celle des transports routiers et des activités auxiliaires de transport.

Par courrier recommandé en date du 30 janvier 2015, la société Trans’Live a convoqué M. [Z] à un entretien préalable à un licenciement avec mise à pied puis par courrier recommandé en date du 18 février 2015, l’a licencié pour faute grave.

Le 5 mai 2015, M. [Z] a saisi le conseil de prud’hommes afin de faire requalifier son licenciement prononcé pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement prononcé le 8 octobre 2019, le conseil de prud’hommes de Meaux a requalifié le licenciement pour faute grave de M. [Z] en un licenciement pour cause réelle et sérieuse et a notamment condamné la société Trans’Live à payer à M. [Z] :

3.028,54 euros au titre de l’indemnité de préavis,

302,85 au titre des congés payés afférents,

3.168 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

950,40 euros au titre du salaire correspondant à la mise à pied conservatoire,

95,04 euros au titre des congés payés afférents,

1.560,24 euros à titre de rappel de la prime d’ancienneté.

1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 11 novembre 2019, la société Trans’Live a formé appel de la décision.

Par déclaration du 14 novembre 2019, M. [Z] a également fait appel.

Par ordonnance du 3 février 2020, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux procédures.

Dans ses ultimes conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA en date du 14 février 2022, auxquelles il est fait expressément référence, la société demande à la cour de :

Dire et juger l’appel recevable et le maintenir en dépit du numéro de RG absorbé,

Réformer le jugement du conseil de prud’hommes de Meaux du 8 octobre 2019 en ce qu’il a :

– requalifié le licenciement pour faute grave en un licenciement pour cause réelle et sérieuse,

– condamné la société Trans’Live à payer à M. [Z] les sommes suivantes :

o 3 028,54 euros au titre de l’indemnité de préavis,

o 302,85 euros au titre des congés payés afférents,

o 3 168 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

o 950,40 euros au titre du salaire correspondant à la mise à pied conservatoire,

o 95,04 euros au titre des congés payés afférents,

o 1 560,24 euros au titre du rappel de la prime d’ancienneté, outre les intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 11 mai 2015,

o 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec intérêt au taux légal à compter du présent jugement,

– Ordonné à la société Trans’Live la délivrance à M. [Z] d’une attestation Pôle Emploi, d’un certificat de travail et d’un bulletin de salaire récapitulatif de la période travaillée incluant le préavis et conforme au présent jugement et sous astreinte de 15 euros par jour et par document à compter des 3 semaines après notification du présent jugement,

– débouté la société Trans’Live de ses demandes reconventionnelles,

– condamné la société Trans’Live aux entiers dépens y compris les frais éventuels d’exécution par voie d’Huissier de justice du présent jugement.

Statuant à nouveau,

A titre principal,

– Dire et juger la mise à pied du 31 janvier 2015 et le licenciement pour faute grave parfaitement justifiée en fait et en droit,

En conséquence,

– Débouter M. [Z] de l’ensemble de ses demandes et notamment de ses demandes d’indemnité de préavis, de congés payés afférents au préavis, d’indemnité de licenciement, d’indemnité de licenciement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dire et juger concernant les demandes de rappel de salaire et de prime d’ancienneté que la période de mai 2010 au 5 mai 2015 est prescrite,

En conséquence,

Débouter M. [Z] au titre de ces périodes,

Dire et juger que sur les périodes de mai 2012 à 30 janvier 2015, la société Trans’Live a appliqué à bon droit les règles de la convention collective,

En conséquence,

Débouter M. [Z] de l’ensemble de ses demandes et moyens,

A titre subsidiaire,

Réduire à de plus justes proportions les demandes de M. [Z],

En tout état de cause,

Prendre acte de ce qu’aucune demande amiable n’a été formulée obligeant la société Trans’Live à requérir un conseil,

Condamner M. [Z] à restituer le trop perçu soit la somme de 10 202,52 euros correspondant aux périodes du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 soit 1 073,95 heures X 9,50 euros/heure,

Condamner M. [Z] à régler la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 en cause de première instance et 2 000 euros en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Maître Xavier Martinez, avocat à la cour de Paris,

Réformer le jugement déféré,

Débouter purement et simplement M. [Z] de son appel et de l’ensemble de ses demandes et moyens, y compris au titre de demandes reconventionnelles.

Dans ses ultimes conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA en date du 15 février 2022 auxquelles il est fait expressément référence, M. [Z] demande à la cour de :

– Débouter la société Trans’Live de l’ensemble de ses demandes,

– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a considéré que le licenciement de M. [Z] reposait sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

– Dire sans cause réelle et sérieuse le licenciement dont a fait l’objet M. [Z],

– Fixer le salaire de base à 2.307,16euros,

– Condamner la société Trans’Live à payer à M.[Z] les sommes suivantes :

Salaire mise à pied conservatoire du 31 janvier 2015 au 19 février 2015 : 1.538,11 euros

Congés payés afférents : 153,81 euros

Indemnité de préavis : 4.614,32 euros

Congés payés afférents au préavis : 461,43 euros

Indemnité de licenciement : 4.537,40 euros

Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 28.000,00 euros

avec intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 11 mai 2015,

A titre infiniment subsidiaire,

Confirmer le jugement le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 8 octobre 2019 en ce qu’il a :

– requalifié le licenciement pour faute grave de M. [P] [Z] en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

– condamné la société Trans’Live à payer à M. [Z] les sommes suivantes :

3.028,54 euros au titre de l’indemnité de préavis,

302,85 au titre des congés payés afférents,

3.168 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

950,40 euros au titre du salaire correspondant à la mise à pied conservatoire,

95,04 euros au titre des congés payés afférents,

Ces sommes, avec intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 11 mai 2015,

– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a débouté M. [Z] de sa demande de rappel de salaire pour non-respect des minimas conventionnels,

En conséquence,

-Condamner la société Trans’Live à payer à [P] [Z] la somme de 3.804,49 euros à titre de rappel de salaire pour non-respect des minimas conventionnels et la somme de 380,44 euros au titre des congés payés afférents,

– Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a condamné la société Trans’Live à payer à [P] [Z] la somme de 1.560,24 euros à titre de rappel de la prime d’ancienneté,

– Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a débouté la société Trans’Live de sa demande de restitution d’un trop perçu à hauteur de 10.202,52 euros outre la somme de 1.020,25 euros au titre des congés payés afférents,

-Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a condamné la Société Trans’Live à payer à [P] [Z] la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

En tout état de cause,

-condamner la société Trans’Live à payer à [P] [Z] à verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

-confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Meaux le 08 octobre 2019 en ce qu’il a ordonné à la société Trans’Live la délivrance à M. [Z] d’une attestation pôle emploi, d’un certificat de travail et d’un bulletin de salaire récapitulatif de la période travaillée incluant le préavis et conforme au présent jugement, et ce sous astreinte de 15 euros par jour et par document à compter de trois semaines après notification du jugement,

-condamner la société Trans’Live aux entiers dépens, lesquels comprendront les frais d’exécution forcée éventuelle par huissier de Justice.

La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 15 février 2022

MOTIFS

Sur le licenciement pour faute grave

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Elle implique une réaction de l’employeur dans un délai bref à compter de la connaissance des faits reprochés au salarié.

En application des articles L1232-1 et L 1235-1 du code du travail dans leur rédaction applicable à l’espèce, l’administration de la preuve du caractère réel et donc existant des faits reprochés et de leur importance suffisante pour nuire au bon fonctionnement de l’entreprise et justifier le licenciement du salarié, n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et, au besoin, après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute persiste, il profite au salarié.

En revanche la charge de la preuve de la qualification de faute grave des faits reprochés qui est celle correspondant à un fait ou un ensemble de faits s’analysant comme un manquement du salarié à ses obligations professionnelles rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et le privant de tout droit au titre d’un préavis ou d’une indemnité de licenciement, pèse sur l’employeur.

La lettre de licenciement reproche expressément au salarié un manquement grave à la discipline générale de l’entreprise en évoquant les griefs suivants:

– le salarié s’est présenté en retard à son poste,

– après avoir mis le véhicule de la société à quai, il a demandé au responsable combien de tours il avait à faire et dès lors que cela ne lui convenait pas, il a rangé le véhicule et est rentré chez lui;

le même jour en fin de journée, il a adressé plus de 50 appels au responsable d’exploitation et a perturbé le planning de l’entreprise,

-le 30 janvier 2015, voyant que son véhicule habituel était parti, il a placé sa carte chauffeur à 7h du matin dans un véhicule en panne et a continué d’envoyer des messages pour savoir ce qu’il devait faire alors que la société lui avait adressé la veille une lettre de mise à pied conservatoire,

-le 31 janvier 2015 et le 1er février 2015, il a adressé des messages d’intimidation à son employeur.

Pour avérer les griefs précités, l’employeur se prévaut en premier lieu de l’attestation du responsable d’exploitation M. [L] qui relate de manière précise les faits suivants :

« Monsieur [P] [Z], le 29 janvier 2015, s’est présenté en retard comme toujours pour effectuer trois tours [Localité 4] (77), [Localité 5] (94).

Une fois à quai, sachant qu’il avait ces trois tours à faire, ce dernier est rentré chez lui sans rien dire à personne.

Ce même jour, il m’a harcelé au téléphone bureau et sur le portable de la société en m’insultant, ce qui a eu pour conséquence de bloquer mon standard, donc je ne pouvais plus joindre mes clients et mes chauffeurs.

Le lendemain matin, il s’est présenté dans un camion en panne à 7 h, il a mis sa carte de chauffeur dans le camion.

Il choisissait ses clients, donc je devais faire avec.

Suite à mes reproches, ce dernier m’a harcelé jour et nuit sur mon portable par SMS »

L’employeur se prévaut également de l’attestation du responsable de quai, M. [N] qui confirme le refus par M. [Z] d’exécuter son travail dans les termes ci-après : « Le 29 janvier 2015, Monsieur [Z] s’est mis à quai pour charger le premier tour (3 tours), n’a pas voulu le faire en étant vulgaire, puis est parti en laissant son camion à quai. »

Si le harcèlement téléphonique n’est pas démontré en l’état des pièces du dossier, il apparaît en revanche que l’abandon de poste et l’insubordination se révèlent caractérisés.

Le salarié ne saurait sérieusement soutenir qu’il s’agit d’attestations de complaisance alors que celles-ci sont concordantes et circonstanciées. Du reste, il n’en conteste pas la teneur mais se borne à affirmer, sans aucun justificatif à l’appui, qu’il aurait prévenu son supérieur hiérarchique de ce qu’il était souffrant et était donc rentré chez lui.

Il ne saurait davantage soutenir qu’il s’agirait de faits isolés alors qu’il a déjà fait l’objet de trois sanctions disciplinaires les 25 janvier 2007, 24 novembre 2010, et 12 avril 2013 pour des actes d’insubordination et abandons de poste.

Si un fait fautif ponctuel ne peut pas à lui seul donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois, un autre fait fautif ponctuel de même nature peut permettre de l’invoquer à compter du moment où c’est le fait non prescrit qui a donné lieu à l’engagement des poursuites disciplinaires.

En l’espèce, les faits reprochés au travers de la lettre de licenciement attestent du refus du salarié d’accomplir son travail, et caractérisent une fois encore l’insubordination de ce dernier, de sorte que cette attitude a nuit au bon fonctionnement de l’entreprise. S’agissant de faits fautifs réitérés, le salarié ne pouvait être maintenu à son poste et la mise à pied conservatoire ainsi que la procédure de licenciement pour faute grave se sont révélés justifiés.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Il y a lieu de confirmer la mise à pied à titre conservatoire à effet immédiat notifiée par courrier recommandé du 30 janvier 2015 et d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Trans’Live à verser à M. [Z] la somme de 950,40 euros au titre du rappel de salaire de ce chef outre 95,04 euros au titre des congés payés afférents.

En outre, dès lors que le licenciement est justifié pour faute grave, il n’y a pas lieu d’accorder d’indemnité de licenciement, ni d’indemnité de préavis, le jugement étant également infirmé de ces chefs.

Il n’y a pas davantage lieu de statuer sur une quelconque demande indemnitaire au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse; le jugement étant confirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

Sur les demandes de rappels de salaires

M. [Z] s’estime fondé à solliciter un arriéré de salaire de mai 2010 à février 2015 à hauteur d’une somme de 3.804,49 euros ainsi que les congés payés afférents, soit 380,44 euros au titre des rappels de salaires minimas de la convention collective sur la base d’un coefficient de 138.

Il sollicite également un rappel de prime d’ancienneté d’un montant de 1.560,24 euros depuis mai 2010 jusqu’au 30 janvier 2015.

La société oppose tout d’abord la prescription de ces chefs.

Avant loi n°2008-561 du 17 juin 2008, les actions en paiement des salaires se prescrivaient par 5 ans, selon l’ancien article 2277 du code civil, avec possibilité d’inversion de prescription selon la jurisprudence alors applicable.

L’article L. 3245-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 19 juin 2008 au 17 juin 2013 dispose : ‘L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l’article 2224 du code civil’.

Néanmoins à partir du 17 juin 2013 : ‘L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat’.

Les dispositions du nouvel article L. 3245-1 du code du travail s’appliquent aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit cinq ans.

En l’espèce, M. [Z] ayant saisi le conseil de prud’hommes le 5 mai 2015, il pouvait parfaitement solliciter des rappels de salaires remontant au mois de mai 2010.

Ses demandes ne sont donc pas prescrites et par conséquent les moyens contraires seront rejetés.

Dès lors que le salarié exerce effectivement les fonctions correspondant à la qualification mentionnée sur son bulletin de paie, cette qualification ne peut lui être contestée y compris s’il n’exerce pas en permanence les fonctions en question.

M. [Z] a commencé au coefficient 128 puis a évolué au coefficient 138 tels que le démontrent ses bulletins de salaires versés aux débats.

Il convient donc de lui appliquer les minimas conventionnels correspondant à ce coefficient et non à celui de 128.

En l’état des pièces versées aux débats, il y a lieu de lui allouer un arriéré de salaire de mai 2010 à février 2015 à hauteur d’une somme de 3.804,49 euros ainsi que les congés payés afférents, soit 380,44 euros. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

Ce jugement sera en revanche confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande justifiée de M. [Z] au titre du rappel de prime d’ancienneté à hauteur de 1 560, 24 euros de ce chef.

Sur la demande de restitution du trop-perçu

La Société Trans’Live fait valoir avoir reconstitué, grâce à la carte de chauffeur, les heures effectivement travaillées par M. [Z] or celui-ci n’aurait pas réalisé les heures contractuellement dues. Elle s’estime en droit de solliciter la somme de 10 202,52 euros au titre du trop-perçu.

Il reste néanmoins que le salarié qui est demeuré à la disposition de l’entreprise doit percevoir le salaire correspondant, peu important que l’employeur ne lui fournisse pas de travail, sauf abstention volontaire du salarié d’effectuer le travail demandé.

En l’espèce, il ressort que M. [Z] est resté à la disposition de son employeur 151,70 heures par mois. La société Trans’Live ne peut donc solliciter la restitution d’une partie de son salaire. Ce dernier a perçu le salaire tel qu’il résultait de son contrat de travail et de ses fiches de paie. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande.

– Sur les autres demandes

Il n’apparaît pas inéquitable que chaque partie conserve à charge ses propres frais irrépétibles et ses propres dépens d’appel, chacune d’elles succombant partiellement à la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la société Trans’live à payer 1 560, 24 euros à titre de rappel de la prime d’ancienneté ainsi que 1200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre la charge des dépens et en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle de la société en restitution d’un trop-perçu sur salaire.

Statuant à nouveau des chefs infirmés ;

DIT que le licenciement pour faute grave est justifié.

DÉBOUTE en conséquence M. [P] [Z] de ses demandes en paiement au titre de la mise à pied à titre conservatoire, de l’indemnité de licenciement, de l’indemnité de préavis, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

CONDAMNE la société Trans’Live à payer à M. [P] [Z] la somme de 3.804,49 euros au titre de l’arriéré de salaire de mai 2010 à février 2015 ainsi que les congés payés afférents, soit 380,44 euros outre les intérêts légaux à compter de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes en date du 11 mai 2015.

DIT que chaque partie conservera à charge ses propres frais irrépétibles et ses propres dépens d’appel.

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x