Charte informatique : 7 novembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02395

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Charte informatique : 7 novembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02395

ARRET

N° 861

[F]

C/

Société [17]

Société [16]

CAISSE PRIMAIRE D ASSURANCE MALADIE DE L ARTOIS

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 07 NOVEMBRE 2022

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N° RG 21/02395 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IC3V – N° registre 1ère instance : 17/00889

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ ARRAS EN DATE DU 12 avril 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [R] [F]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée et plaidant par Me Bénédicte ONRAEDT, avocat au barreau de LILLE, substituant Me François-xavier WIBAULT de la SELARL WIBAULT AVOCAT, avocat au barreau d’ARRAS, vestiaire : 53

ET :

INTIMÉES

La société [17] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée et plaidant par Me Gaëlle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS substituant Me Franck DERBISE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocat au barreau D’AMIENS

La société [16] ( SAS) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée et plaidant par Me Flore AUBIGNAT, avocat au barreau de PARIS, substituant Me Juliette BARRE de la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

La CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’ARTOIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 6]

Représentée et plaidant par Mme Laura LESOBRE, dûment mandatée

DEBATS :

A l’audience publique du 02 Juin 2022 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Audrey VANHUSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Renaud DELOFFRE en a rendu compte à la Cour composée en outre de :

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 07 Novembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Mélanie MAUCLERE, Greffier.

*

* *

DECISION

Madame [R] [F] a travaillé en qualité d’agent de production à compter du 1er juin 2004 au sein de la société [16], par le biais de la société de travail intérimaire [17].

Elle a été victime d’un accident du travail le 16 janvier 2013, décrit comme suit:

“Madame [F] déclare qu’en voulant rentrer dans une étuve, la porte sectionnelle s’est refermée sur elle, la blessant à la jambe. Elle a une facture ouverte.”

Son état a été consolidé le 11 aout 2015 par la CPAM avec un taux d’incapacité permanente de 55% au 5 novembre 2015.

Par requête du 25 octobre 2017, Madame [F] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale afin de voir reconnaître la faute inexcusable de son employeur, la société [17], substitué dans sa direction par la société [16].

Le contentieux de la sécurité sociale a été transféré, à compter du ler. janvier 2019, au tribunal de grande instance d’ARRAS spécialement désigné en application du décret du 04 septembre 2018.

Par jugement en date du 12 avril 2021, le Tribunal a décidé ce qui suit’:

Le Tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

DEBOUTE [R] [F] de l’ensemble de ses demandes

DIT n’y avoir lieu aune condamnation au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE [R] [F] aux dépens.

Ce jugement est motivé comme suit’:

Sur la faute inexcusable

Sur le caractère professionnel de l’accident

Aux termes de l’article L.411-1 du code de la sécurité sociale « est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise. »

L’accident subi pendant le temps et sur le lieu du travail de la victime est présumé être mi accident-du travail.

A titre liminaire ; il convient de constater que le caractère professionnel de l’accident n’est pas contesté: Ce dernier a été pris en charge paf la CPAM et indemnisé en tant que tel.

Sur la faute inexcusable présumée

L’article L.452-1 du code de la sécurité sociale dispose que « lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou dé ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à. une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants..»

Aux termes de l’article L4154-3 du code du travail :

La faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article L452-1 du code de la sécurité sociale est présumée établie pour les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée, les salariés temporaires et les stagiaires en entreprise victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité ils n’auraient pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée prévue par l’article L4154-2.

L’article L4154-2 du code du travail prévoit que les salariés titulaires d’un contrat de travail à durée déterminée, les salariés temporaires -et les stagiaires en entreprise affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité bénéficient d’une formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et d’une information adaptés dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés.

La liste de ces postes de travail est établie par l’employeur, après avis du médecin du travail et du comité social et économique; s’il existe. Elle est tenue à la disposition de l’agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L. 81.12-1.

En l’espèce, [R] [F] a travaillé au sein de la société [16] à compter de 2004, par le biais de contrats d’intérim.

Madame [F] a signé le 23 avril 2012 une fiche “procédure d’intégration d’un intérimaire”, avec une date d’entrée dans l’entreprise le 20 décembre 2004. Dans cette fiche il est indiqué que la salariée s’est « vue remettre un livret d’accueil [16] qui a été lu avec elle et une brochure sécurité ainsi qu’.un livret spécifique.au site d’accueil [16].

Elle a également signé le 23 janvier 2012, l’attestation indiquant avoir lu, compris et accepté les règles de sécurité figurant dans la brochure de sécurité [16] et les consignes de sécurité figurant sur la fiche de poste.

Il ressort de la fiche de poste “agent de production – étuve” qu’il est mentionné “attendre l’ouverture complète de la porte avant d’entrer dans l’étuve”.

Madame [F] a également signé la “fiche d’accueil du personnel temporaire ou permanent” le 8 juin 2004, dans laquelle elle atteste “avoir reçu la formation renforcée au poste de travail présentant des risques particuliers : opératrice de presse”.

En conséquence, la société [16] démontre que Madame [F], salariée intérimaire a bien reçu la formation renforcée à la sécurité ainsi qu’un accueil et une information adaptés dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés. Dès lors la présomption de faute inexcusable ne peut s’appliquer.

Sur la faute inexcusable de ‘droit commun’

En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers ce dernier d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail. Le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens du texte sus-visé, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver :

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident subi par le salarié. II suffit qu’elle en soit une cause nécessaire.pour que la responsabilité. de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes en ce compris la faute d’imprudence de la victime ‘ auraient concouru au dommage.

Il incombe au salarié de prouver que soit employeur, qui devait avoir conscience du danger auquel il était exposé, n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.”’

En”’l’espèce, concernant la conscience du danger, il n’est pas contesté que le risque de fermeture de la porte sectionnelle sur un salarié était connu de l’employeur. Ce dernier a d’ailleurs donné comme directive l’interdiction de passer lorsque la porte est en mouvement afin de prévenir ce risque.

””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””””’

Concernant les mesures mises en place, il ressort des pièces versées que la société [16] a effectué plusieurs vérifications et entretiens périodiques.

L’employeur fournit le contrat signé avec le [11] du 25 juin 2010, pour 3 ans renouvelable tacitement, qui a pour vocation de vérifier la sécurité du matériel au scinde la société.

La société [16] justifie également d’un contrat de maintenance [12], a effet le 22 mars 2012, pour un an renouvelable tacitement. Dans l’annexe il est précisé que la porte sectionnelle fait Partie des éléments à contrôler, Madame [F] ne fournit aucun élément de nature à démontrer que ces contrôles réguliers étaient insuffisants à assurer la sécurité des salariés.

En effet, les défectuosités signalées lors du rapport de vérification du [11] du 17 septembre 2008 ont été réparées et il ressort du rapport du 9 octobre 2012 que le seul défaut était le feu clignotant. Le système de retenue pour éviter la chute inopinée de la porte était en état selon les constations du [11].

Dès lors, la société [16] avait mis en place l’ensemble des mesures nécessaires et c’est un défaut imprévisible et non constaté par. les entreprises de contrôle et de maintenance qui a provoqué l’accident. Il ne peut donc pas être reproché de manquement à la société.

En conséquence, Madame [F] ne démontre pas que son employeur n’avait pas mis en place les mesures nécessaires pour protéger sa salariée du risque lié à la porte sectionnelle et elle sera déboutée de l’ensemble de ses demandes.

Par courrier de son avocat portant le tampon d’expédition du 17 avril 2021 et reçu le 5 mai 2021 par le greffe, Madame [F] a interjeté appel général du jugement.

Par conclusions d’appelante n°2 reçues par le greffe le 27 mai 2022 et soutenues oralement par son avocat, l’appelante demande à la Cour de’:

– INFIRMER le jugement rendu le 12 avril 2021 par le pôle social du Tribunal judiciaire d’ARRAS en ce qu’il a :

– DEBOUTE Madame [R] [F] de l’ensemble de ses demandes

– DIT n’y avoir lieu à une condamnation au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– CONDAMNE Madame [R] [F] aux dépens

– DIT que la notification du présent jugement vaut convocation des parties ou de leurs représentants à ladite audience

En conséquence :

STATUANT A NOUVEAU

– CONSTATANT que Madame [R] [F] est recevable et bien fondée en ses demandes et y faisant droit ;

– DEBOUTER les sociétés [16] et [17] de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et conclusions ;

– RECONNAÎTRE la faute inexcusable l’employeur, la société [17], substitué dans la direction par la société [16] ;

– FIXER au maximum la majoration de la rente ;

– ORDONNER une expertise laquelle devra définir et évaluer les différents postes de préjudices subis par Madame [R] [F] ;

– ALLOUER à Madame [R] [F] une indemnité provisionnelle qui ne saurait être inférieure à 15.000,00 € ;

– CONDAMNER solidairement les sociétés [16] et [17] à payer à Madame [R] [F] la somme de 2.000,00 €, au titre de la procédure de première instance, ainsi que 3.000,00 € au titre de la procédure d’appel, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– CONDAMNER solidairement les sociétés [16] et [17] au paiement des entiers frais et dépens tant de première instance que d’appel.

Elle fait en substance valoir ce qui suit’:

En ce qui concerne la présomption de faute inexcusable :

Elle a bien signé le 8 juin 2004 la fiche d’accueil du personnel temporaire ou permanent attestant qu’elle a reçu une formation à la sécurité mais la société [16] ne rapporte pas la preuve de lui avoir dispensé une formation à chaque nouvelle fonction.

La présomption de faute inexcusable doit donc jouer.

La remise du passeport sécurité fait apparaître que la formation doit être dispensée et aucun élément probant ne permet de justifier dans quelles conditions cette formation a été dispensée.

Il est établi par le témoignage de Monsieur [H] qu’aucune formation n’est intervenue concernant les portes.

Elle n’a donc pas reçu de formation spécifique et renforcée liée au risque que représentaient les portes sectionnelles pas plus qu’elle n’a reçu une information sommaire sur leur fonctionnement.

En ce qui concerne «’la faute inexcusable de l’employeur sous l’angle du droit commun’» :

Le rapport du 11 septembre 2008 du [11] liste un certain nombre d’actions à entreprendre notamment en ce qui concerne l’installation d’un dispositif de retenue non sollicitée en fonctionnement normal.

La société [16] n’a pas cru devoir se rapprocher de la société [14] pour obtenir des explications sur les avis divergents de les [10] et du [11] concernant la sécurité de ses salariés.

L’équipement préconisé par le [11] concernant le dispositif précité n’a pas été suivi d’effet.

Le [11] a mis à nouveau en exergue dans son rapport du 28 août 2012 des anomalies auxquelles la société [16] ne justifie pas avoir remédié et qu’en particulier les salariés interrogés en ce qui concerne le feu clignotant orange indique qu’ils ne savent pas s’il était fonctionnel lors de l’accident.

Des dysfonctionnements étaient déplorés les 4 et 7 janvier 2013 en ce qui concerne la porte sectionnelle et la société [16] a fait procéder à des réparations en interne et qu’une demande de devis de réparation a dû être formulée le 7 janvier 2013.

Un témoin, Monsieur [I], indique le marquage au sol n’existait pas lors de l’accident et qu’une note de service concernant le fonctionnement des portes a été remise à chaque employé deux jours après l’accident.

Monsieur [H] confirme qu’à l’époque de l’accident, il n’y avait aucun balisage au sol.

les mesures de prévention drastiques décidées après l’accident démontrent bien que la machine présentait des anomalies très dangereuses et révèlent une absence totale d’information des salariés sur la dangerosité des portes sectionnelles ainsi qu’une carence en matière de formation et dans la délivrance des consignes de sécurité.

Par conclusions enregistrées par le greffe à la date du 5 mai 2022 et soutenues oralement par avocat, la société [17] demande à la Cour de’:

– CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement du 12 avril 2021 rendu par le Pôle Social du Tribunal Judiciaire d’ARRAS ;

A titre principal

Sur la faute inexcusable présumée :

– DIRE ET JUGER que Madame [F] n’est pas affectée sur un poste à risques ;

– CONSTATER que l’accident n’est pas survenu sur le poste ;

– DIRE ET JUGER que Madame [F] a bénéficié de la formation et de l’information imposées par les textes ;

Sur la faute inexcusable non présumée

– CONSTATER qu’aucun grief n’est dirigé contre la Société [17] ;

– CONSTATER qu’aucune faute ne peut donc être imputée à la Société [17] ;

– CONSTATER que sur le fond, la Société [17] s’en remet aux observations de la Société [16] et à la sagesse du Tribunal ;

A titre subsidiaire

Dans l’hypothèse de la reconnaissance de la faute inexcusable :

– CONSTATER qu’aucun grief n’est dirigé contre la Société [17] ;

– DIRE ET JUGER que la Société [17] n’a commis aucune faute ni manquement dans la survenance de l’accident de Madame [F] ;

– CONSTATER que la Société [17] a parfaitement respecté les obligations lui incombant ;

– DIRE ET JUGER que la faute inexcusable éventuelle relève de la seule et exclusive responsabilité de l’entreprise utilisatrice, la Société [16], substituée dans la direction des salariés en application de l’article L.452-1 du Code de la Sécurité Sociale ;

– CONDAMNER, en application des articles L. 452-1 et L. 412-6 du Code de la Sécurité Sociale, la Société [16], à garantir la Société [17] de toutes les condamnations qui seront prononcées au titre de l’éventuelle faute inexcusable (majoration de rente et préjudices extra patrimoniaux), tant en principal qu’en intérêts et frais ;

– CONDAMNER en application des articles L.241-5-1 et R. 242-6-1 du Code de la Sécurité Sociale, la Société [16] à prendre en charge sur son compte employeur la totalité de la rente (soit les 3/3) de Madame [F] résultant de son accident du travail du 16 janvier 2013;

– CONSTATER que la Société [17] s’en remet à la sagesse du Tribunal concernant l’organisation d’une expertise médicale judiciaire dans la limite des préjudices indemnisables au titre de la faute inexcusable ;

– CONSTATER que la Société [17] s’en remet à l’appréciation du Tribunal concernant la demande de provision de la demanderesse ;

– DIRE ET JUGER que la Société [17] ne fera pas l’avance des frais d’expertise ;

– DEBOUTER les autres parties de toute demande de condamnation qui pourrait être formulée à l’encontre de la Société [17] au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile et de toute autre demande formulée à son encontre,

et subsidiairement CONDAMNER la Société [16] à garantir la Société [17] des sommes auxquelles elle serait éventuellement condamnée au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

– DECLARER l’arrêt commun à la Caisse Primaire d’assurance maladie ;

Elle fait en substance valoir ce qui suit’:

1°/ Sur l’absence de faute présumée

1. a) L’absence d’affectation à un poste à risque

La salariée étant dans l’incapacité de démontrer l’existence d’une faute inexcusable, elle tente vainement de bénéficier du régime de la présomption de faute inexcusable.

Cela ne résiste pas à l’analyse pour les brèves mais péremptoires raisons suivantes :

En premier lieu, force est de constater que le contrat de mise à disposition fait état d’un poste d’agent de production imposant du travail sur presse aux pièces moulées. (Pièce n°5)

La Société [17] a réalisé une étude précise du poste (Pièce n°9) faisant état de l’absence de risques particuliers.

En outre, la fiche précise que l’accueil de l’intérimaire se fait :

– Par une formation générale à la sécurité ;

– Formalisation de l’accueil et de la formation ;

– Modèle de fiche d’accueil transmise par le client ;

Seules des chaussures de sécurités sont nécessaires et ont été remises à la salariée (Pièce n°8)

Enfin, l’indication «poste à risque : non » vient confirmer ces éléments.

En deuxième lieu, Madame [F] a occupé ce poste de manière régulière depuis 2011 (Pièce n°6).

Ainsi, factuellement et matériellement, Madame [F] connaît tant l’environnement que les tâches à réaliser sur le poste.

En troisième et dernier lieu, l’accident a eu lors du passage d’une porte située dans une zone commune à tous les salariés et non inhérente au poste.

Ainsi, à supposer que le poste soit à risque, manifestement l’accident a eu lieu en dehors du poste de travail, ce qui rend matériellement non pertinent le régime juridique de la faute inexcusable présumée.

Les circonstances de l’accident établissent clairement que l’accident n’est pas lié au poste de travail.

1. b) En tout état de cause une formation renforcée a été délivrée

L’entreprise utilisatrice démontre et établi qu’une information et une formation renforcée à la sécurité ont été réalisées avant la survenance de l’accident.

Le Tribunal a d’ailleurs retenu ce point en première instance de manière précise et pertinente.

2°/ Sur l’absence de faute inexcusable

1. a) La Société [17] n’a joué aucun rôle dans la survenance de l’accident subi par Madame [F].

Le recours a été formé contre la Société [17] en sa qualité d’employeur légal, cependant, lors de l’accident, Madame [F] était déléguée au sein de la Société [16] et ce, conformément aux contrats de mission et de mise à disposition (Pièce n°5).

Or, en vertu des articles L. 452-1 et L. 412-6 du Code de la Sécurité Sociale, l’entreprise utilisatrice, à savoir la Société [16], est regardée comme substituée à l’entreprise de travail temporaire dans la direction des salariés qu’elle délègue.

De ce fait, l’Entreprise de Travail Temporaire n’a aucun pouvoir de direction sur les salariés qu’elle délègue, et ne peut se trouver sur les lieux de l’accident.

Il n’appartenait donc pas à la Société [17] de se substituer à l’entreprise utilisatrice dans la mise en place des règles de sécurité qui lui incombent, ni de veiller à la mise en place de dispositifs appropriés au bon déroulement de la mission de Madame [F].

Seule l’entreprise utilisatrice, titulaire du pouvoir de direction pendant la durée de la mission, est responsable des conditions de travail qu’elle impose, du respect des règles d’hygiène et de sécurité, ainsi que du maintien de l’ordre en son sein.

1. b) Il ne saurait donc être reproché à la Société [17] un quelconque défaut de formation à la sécurité, cette dernière incombant uniquement à l’entreprise utilisatrice.

Par ailleurs, la Cour notera que la Société [17] a procédé à l’étude précise du poste (Pièce n°9) le 6 février 2012 :

-‘Poste à risque particuliers : non

– Accueil et formation générale à la sécurité et au poste de travail : oui

– Formalisation de l’accueil et de la formation : oui

– Modèle de fiche d’accueil transmise par le client : oui

Il apparait donc clairement que la Société [17] :

– A analysé le poste avec l’entreprise utilisatrice (Pièce n°9)

– A recherché une salariée compétente, formée et expérimentée sur le poste (Pièces n°4, n°6 et n°6) ;

– A vérifié l’aptitude de la salariée au poste (Pièce n°7).

En l’espèce, la délégation de Madame [F] correspondait tout à fait au poste à pourvoir et le rôle de la Société [17] a été parfaitement rempli.

Aucun manquement n’ayant conduit à la survenance de l’accident du 16 janvier 2013 ne peut donc être imputé à cette dernière.

1. c) La Cour constatera que [17] a été contactée par la société utilisatrice qui avait besoin à nouveau d’un agent de production dans le cadre d’un accroissement temporaire d’activité afin de réaliser les tâches suivantes : « Travail sur presse aux pièces moulées » (Pièce n°5).

La Société [17] a mis à la disposition de la Société [16] une salariée remplissant toutes les conditions recherchées par cette dernière et jouissant de plusieurs années d’expérience au sein même de cette société.

En effet, Madame [F] a débuté sa première mission pour la Société [16] le 3 janvier 2011 et a effectué de nombreuses missions en tant qu’agent de production pour cette société jusqu’à la survenance de son accident du travail. Elle avait donc une excellente connaissance de cette société et de ses règles de sécurité (Pièces n°5 et n°6).

D’ailleurs, au sein de son curriculum vitae, Madame [F] a elle-même indiqué qu’elle avait travaillé pour la Société [16], au poste d’agent de production, entre 2004 et 2006, soit pendant 3 ans (Pièce n°4).

L’expérience professionnelle de Madame [R] [F] était en conséquence indéniable, et son profil était tout indiqué pour assurer la mission demandée par l’entreprise [16].

Ainsi, la Cour ne pourra que constater que Madame [R] [F] correspondait parfaitement au profil recherche par la Société [16] (Pièce n°9).

1. d) En outre, force est de constater que la Société [17] s’est assurée que Madame [F] rempli toutes les conditions nécessaires pour le poste à pourvoir.

Madame [F] a été déclaré médicalement apte à occuper ce poste sans restriction lors de sa visite médicale du 2 février 2012 (Pièce n°7) ;

Des chaussures de sécurité lui ont été remises (Pièce n°8) ;

Le 23 janvier 2012, Madame [F] a attesté avoir été informé de son droit de retrait, dans l’hypothèse où elle estimerait que les tâches demandées présentaient un risque pour sa santé et sa sécurité. (Pièce n°11) ;

Le 23 janvier 2012, elle a confirmé avoir bénéficié de la procédure d’intégration de la Société [17], notamment caractérisée par :

– La remise du livret d’accueil de la Société [16],

– La remise de la brochure sécurité et du livret spécifique au site d’accueil [16],

– Une sensibilisation à la sécurité,

– La vérification que l’intérimaire est bien en possession de ses équipements de protection et est à jour de sa visite médicale (Pièce n°10),

Madame [F] avait également passé avec succès plusieurs tests destinés à évaluer sa connaissance des situations à risques. Elle était par ailleurs titulaire du CACES de catégorie 3 et 5) (Pièces n°12, 13 et 14).

Aucun grief à l’encontre de la Société [17] n’est d’ailleurs formulé par Madame [F], considérant que la faute inexcusable est imputable à la seule entreprise [16].

Par conséquent, il ne serait être reproché à la Société [17] une quelconque négligence dans le respect de ses obligations.

Ainsi, il est établi que la Société [17] ne pouvait nullement avoir conscience d’un quelconque danger pour la sécurité et la santé de Madame [F] qui a été parfaitement déléguée au poste décrit par l’entreprise utilisatrice.

Aucune faute inexcusable ne pourra donc lui être reprochée.

1. b) Sur la faute inexcusable de la Société [16]

Au vu de l’ensemble des éléments apportés, la Société [17], qui ne se trouvait pas sur les lieux de l’accident, s’en remet totalement aux écritures de la Société [16] ainsi qu’à la sagesse du tribunal.

Au regard des arguments mis en avant par Madame [F], la Société [17] tient toutefois à formuler l’observation suivante :

Madame [F] soutient, en se fondant sur la fiche d’analyse de l’accident établie par la Société [16], que la porte litigieuse présentait un dysfonctionnement depuis le 4 janvier 2013, et qu’aucune action n’avait été mise en place pour la réparer.

Or, la fiche d’analyse de l’accident précise expressément qu’en date du 5 janvier 2013, une réparation et un essai concluant ont été effectués (Pièce [F] n°7.1).

En outre, les attestations produites par la salariée font état de supposées dysfonctionnements de la porte.

Or, une analyse fine permet de comprendre parfaitement ces observations, puisqu’effectivement début janvier la porte était en panne mais elle a fait l’objet d’une réparation.

Ainsi, les salariés ont indiqué avoir signalé les dysfonctionnements qui ont été réglés par l’entreprise utilisatrice sans délai.

1. SUR LA DEMANDE EN GARANTIE DE L’ENTREPRISE UTILISATRICE

Dans l’hypothèse où le Tribunal viendrait à reconnaître l’existence d’une faute inexcusable, la société concluante sollicite d’être garantie des conséquences de celles-ci par l’entreprise utilisatrice.

En effet, si le Tribunal imputera les conséquences de la faute inexcusable, eu égard aux éléments du dossier, à la seule Société [16], et accordera aussi à la Société [17] la modification de la charge financière du coût de l’accident du travail (au sens du seul impact de la rente).

La jurisprudence est précise sur ce point.

Ainsi, ayant relevé qu’aucune faute n’était établie à l’encontre de l’employeur dans la survenance de l’accident, imputable entièrement à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice qui avait affecté le salarié intérimaire à une tâche autre que celle pour laquelle il avait été mis à sa disposition, la cour d’appel a décidé à bon droit que cette dernière devait relever et garantir l’employeur des conséquences financières résultant de la faute inexcusable :

– tant en ce qui concerne la réparation complémentaire versée à la victime

– que le coût de l’accident du travail, dans la mesure qu’elle a souverainement déterminée (Cass. 2e civ., 12 mars 2009, n0 08-11.735).

La Cour de cassation, au visa des articles L.241-5-1, L.412-6 et R.242-6-1 du Code de la sécurité sociale et par un attendu de principe évoqué systématiquement, rappelle qu’en « cas d’accident du travail imputable à la faute inexcusable d’une entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire, seule tenue, en sa qualité d’employeur de la victime, des obligations prévues aux articles L.452-1 à L.452-4 du code précité, dispose d’un recours contre l’entreprise utilisatrice pour obtenir simultanément ou successivement le remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et la répartition de la charge financière de l’accident du travail ».

Cass. Soc. 18 décembre 2014, n°13-23.335 :

«Attendu que l’entreprise utilisatrice fait grief à l’arrêt de dire qu’elle est tenue de garantir l’employeur des conséquences de la faute inexcusable à l’origine de l’accident du travail subi par M. X.., et de mettre, en conséquence, à sa charge l’ensemble des conséquences financières résultant de cette faute et que constituent les indemnités complémentaires énumérées par les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ainsi que celles non prévues au livre IV du même code ;

Mais attendu qu’il résulte des articles L. 241-5-1, L. 412-6, R. 242-6-1 et R. 242-6-3 du code de la sécurité sociale qu’en cas d’accident du travail imputable à la faute inexcusable d’une entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire, seule tenue, en sa qualité d’employeur de la victime, des obligations prévues aux articles L. 452-1 à L. 452-4 du même code, dispose d’un recours contre l’entreprise utilisatrice pour obtenir simultanément ou successivement le remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et la répartition de la charge financière de l’accident du travail’

L’attestation de Monsieur [C] est manifestement insuffisante pour démontrer la conscience du danger de l’employeur.

D’une part, Monsieur [C] ne précise pas la date à laquelle il aurait alerté son employeur du dysfonctionnement de la porte sectionnelle.

D’autre part, il ne précise pas le nom du responsable à qui il aurait signalé le dysfonctionnement.

Surtout, il ne prend pas soin de préciser la nature du dysfonctionnement de la porte qu’il aurait signalé à son employeur, étant rappelé que celle-ci présentait, outre le dysfonctionnement du système de sécurité en lien avec la survenance de l’accident du travail, un dysfonctionnement au niveau du portillon et un dysfonctionnement au niveau de l’ouverture, sans lien avec la survenance de l’accident du travail.

Enfin, c’est par une lecture totalement erronée des pièces produites par l’employeur que Madame [F] soutient qu’« aucun contrôle, ni vérification de la porte sectionnelle n’ont été opérés depuis l’année 2008, date de sa mise en service, jusqu’au 28 juin 2012, date à laquelle la société [11] a procédé à une vérification de l’équipement ».

En effet, il sera rappelé que l’intervention de la société [11] du 28 juin 2012 s’inscrit dans le cadre d’un contrat de maintenance signé à compter du 5 novembre 2009 (pièce n°12) de sorte que des vérifications périodiques ont bien été réalisées avant le 28 juin 2012.

Dans ces conditions, l’employeur ne pouvait avoir conscience d’un quelconque danger, et le jugement dont appel devra être confirmé.

Par conclusions enregistrées par le greffe à la date du 25 avril 2022 et soutenues oralement par avocat, la société [16] demande à la Cour de’:

A titre principal,

– Recevoir la société [16] en ses conclusions et l’y dire bien fondée ; Confirmer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions.

En conséquence, débouter Madame [R] [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

– Pour le cas où la Cour imputerait l’accident du travail survenu le 16 janvier 2013 à la faute inexcusable de l’employeur, ordonner avant dire droit une expertise médicale ;

Allouer à Madame [R] [F] une provision à valoir sur ses préjudices personnels n’excédant pas 5.000 euros ;

Débouter Madame [R] [F] de toutes demandes plus amples OU contraires,

Dire n’y avoir à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Elle fait valoir en substance que’:

S’agissant de la présomption de faute inexcusable revendiquée par Madame [F].

Sa pièce n° 4 «’ accueil de nouvelles personnes’» et le document intitulé «’ procédure d’intégration d’un intérimaire’» signé par Madame [F] démontrent que cette dernière a bénéficié d’une formation renforcée à la sécurité.

Contrairement à ce qu’affirme Madame [F] aucune disposition du code du travail n’impose le renouvellement de cette formation qu’elle reconnaît d’ailleurs avoir reçue.

Cette absence de renouvellement n’a d’ailleurs aucun lien causal avec l’accident puisqu’elle était informée dès son entrée dans l’entreprise des risques liés à l’utilisation des portes sectionnelles.

A titre subsidiaire, sur l’absence de toute faute inexcusable prouvée.

Contrairement à ce que soutient Madame [F], elle lui a bien transmis l’ensemble des informations et consignes de sécurité relatives au risque d’écrasement lors de l’utilisation de la porte sectionnelle litigieuse.

En effet, la société [16] communique une attestation signée par Madame [F] le 23 janvier 2012, au terme de laquelle elle reconnaît « avoir reçu, lu, compris et accepté d’appliquer dès à présent :

– les consignes de sécurité figurant dans la brochure de sécurité [16];

– les informations spécifiques au site d’accueil [16],

– les modalités du règlement intérieur et les modalités de la charte informatique le cas échéant ;

– le livret d’accueil de la société [16];

– les consignes d’opération, de Qualité et de sécurité, figurant sur la fiche de poste ou de fonction » (pièce n°8).

La fiche de poste de Madame [F] indique explicitement’: «’ Attendre l’ouverture complète de la porte avant d’entrer dans l’étuve’».

En tout état de cause, Madame [F] était présente dans l’entreprise depuis près de 9 ans de sorte qu’elle ne pouvait ignorer le risque d’écrasement lié à l’ouverture de la porte sectionnelle, mais également qu’une signalisation au sol matérialisait la zone de danger.

A cet égard, la Cour céans observera que la photographie de l’étuve produite par la société [16] fait très clairement apparaître un marquage au sol, qui signale une zone de danger (pièce n°9).

Par ailleurs, la société [16] démontre, au terme de plusieurs attestations, d’une part, que les salariés étaient parfaitement informés que la signalisation au sol matérialisait une zone de danger, et d’autre part, qu’ils avaient reçu la consigne de ne pas passer sous la porte sectionnelle lorsque celle-ci était en mouvement (pièce n°10). Ainsi :

Messieurs, [W] [V] [K] [T], [U] [P], [D] [X] ont tous attesté avoir été informés que la signalisation au niveau du sol matérialisait une zone de danger ;

Messieurs, [W] [V] [K] [T], et [L] [J] ont également déclaré qu’ils avaient reçu pour consigne de ne pas passer sous la porte sectionnelle lorsque celle-ci était en mouvement.

Par conséquent, la société [16] démontre :

– avoir matérialisé une zone de danger au niveau de l’entrée de l’étuve ;

– avoir expliqué à Madame [F] la signification de cette signalisation ;

– avoir informé Madame [F] de ne pas passer sous la porte sectionnelle lorsque celle-ci était en fonctionnement ;

– que Madame [F] a elle-même attesté avoir reçu l’ensemble de ces informations.

Dans ces conditions, aucun manquement tiré d’un prétendu défaut d’information et de délivrance des consignes de sécurité ne saurait être reproché à l’employeur.

Le grief n’est donc pas démontré.

En ce qui concerne le dysfonctionnement allégué des portes sectionnelles, Madame [F] soutient que la société « [16] (…) reconnaît au terme de cette fiche d’analyse que le portillon était condamné en suite d’un problème survenu le 7 janvier 2013 ».

Le portillon dont fait état Madame [F] correspond à une petite porte située dans la porte sectionnelle, et visible sur la photographie communiquée par l’employeur (pièce n°9 précitée).

Or, le portillon n’est pas à l’origine de l’accident du travail du 16 janvier 2013, lequel est survenu alors que Madame [F] avait actionné l’ouverture de la porte sectionnelle, et que celle-ci, alors qu’elle était en mouvement, est brusquement tombée sur sa jambe.

Par conséquent, le portillon n’étant nullement impliqué dans l’accident du travail de Madame [F], il n’a pu jouer aucun rôle causal dans sa survenance.

Ainsi, l’intervention sur le portillon du 7 janvier 2013 par le service de maintenance de l’entreprise utilisatrice ne présente aucun lien causal avec l’accident.

Madame [F] soutient ensuite que « la fréquence des révisions des portes [a été] augmentée de telle manière qu’elles étaient insuffisantes avant l’accident et en tout état de cause insusceptibles d’assurer efficacement la sécurité des salariés ».

Là encore, le grief est parfaitement vain.

En effet, l’employeur a mis en place des mesures destinées à vérifier périodiquement le bon état de fonctionnement des portes sectionnelles.

Ainsi, la société [16] a souscrit un contrat avec la société [11], organisme agréé, afin de procéder à des vérifications périodiques des portes sectionnelles (pièces n°12 et 25).

Par ailleurs, et en sus du contrat souscrit auprès de la société [11], la société [16] a souscrit un contrat de maintenance préventive, et corrective auprès de la société [12] (pièce n°13), et un contrat de maintenance corrective auprès de la société [18].

Ainsi, le contrat conclu avec la société [12] prévoyait que « le prestataire [devait] assurer les travaux de maintenance corrective et préventive tels que décrits à l’annexe 1 et [devait]assurer le fonctionnement des installations entre les visites préventives à la demande du CLIENT selon les tarifs convenus au présent contrat ».

Il prévoyait, s’agissant de la maintenance préventive, une périodicité des visites répartie comme suit : « 1 fois par an pour les équipements manuels et motorisés ; 2 fois par an pour les équipements semi-automatiques ou automatiques ».

La porte sectionnelle faisant donc l’objet d’une vérification biannuelle, en sus des vérifications semestrielles de la société [11].

Les portes sectionnelles étaient ainsi vérifiées, à minima, 4 fois par an, soit un contrôle tous les trimestres, à l’exclusion des vérifications qui avaient lieu lors de la maintenance corrective.

Par conséquent, l’entreprise utilisatrice s’est assurée, auprès de trois entreprises extérieures spécialisées, qu’une vérification des portes sectionnelles interviendrait à intervalles réguliers, sans qu’aucune de ces sociétés n’invite la société [16] à augmenter la périodicité des vérifications.

Madame [F] soutient que l’employeur aurait eu connaissance des dysfonctionnements de la porte sectionnelle dès le 4 janvier 2012, et qu’il aurait attendu « qu ‘un accident survienne pour envisager des mesures de prévention des risques ».

Cette affirmation est totalement fausse, et contredite par l’ensemble des éléments communiqués par la société [16].

En effet, contrairement à ce que soutient Madame [F], l’employeur avait bien pris des mesures de prévention destinés à prévenir les risques d’écrasement.

En premier lieu, la société [16] s’est équipée d’une installation conforme à la réglementation en vigueur, et disposant d’un système de sécurité destiné à prévenir le risque de chute intempestive de la porte sectionnelle.

Le système de sécurité est ainsi décrit en pages 19, 20, et 21 de la documentation technique de communiquée par la société [15] (pièce n°17).

La société [15] a délivré à la société [16] un certificat de conformité sur lequel il était indiqué que la porte était « conforme par sa conception et sa construction, ainsi que dans la version mise en circulation […] par nos soins aux exigences fondamentales pertinentes de sécurité et de santé prescrites par les directives européennes : Directive CEM 89/336/CCE (et modifications 91/263/CEE, 92/263/CEE, 92/31/CEE, 93/68/CEE, 73/23/CEE, 93/68/CEE) » (pièce n°18).

Par ailleurs, la porte sectionnelle avait fait l’objet d’un contrôle technique réalisé le 11 août 2005 par la société [19], société extérieure et indépendante du fabricant (pièce n°19).

En outre, avant la mise en service de la porte sectionnelle, la société [16] avait soumis celle-ci à une vérification préalable réalisée par la société [11] (pièce n°20).

Madame [F] prend le soin de lister l’ensemble des défectuosités ou anomalies révélées par la société [11] et soutient, là encore avec mauvaise foi, que la société [16] aurait fait «fi des défectuosités et anomalies constatées ».

En premier lieu la Cour de céans observera que les anomalies numérotées A.1, A.4, A.5, A.6,3.2, 3.7, sont sans aucun lien causal avec la survenance de l’accident.

S’agissant de l’anomalie numérotée 4.7, le rapport de vérification indique :

« 4.7 ‘ Dispositif automatique de retenue en cours de manoeuvre (ressort(s), suspension(s)) : NFP Equiper le tablier d’un dispositif de retenue ‘non sollicité en fonctionnement normal, empêchant la chute du tablier en cas de défaillance d’un des éléments du système porteur pour un parcours limité à 0,30 m (rupture des ressorts) ».

Contrairement à ce que soutient Madame [F], la société [16] n’a pas fait fi de ce rapport de vérification puisqu’elle l’a transmis, avant mise en service, à la société [10] à qui elle avait acheté l’ensemble de portes sectionnelles.

Celle-ci a sollicité la société [15].

Dans sa correspondance du 6 novembre 2008, la société [15] a indiqué à la société LES [10] :

« Les parachutes ressorts ne sont pas obligatoires sur les portes que nous installons car équipées à l’usine de moteurs de marque [14] homologué bris de ressorts avec un montage direct sur l’axe » (pièce n°21).

Il appert que l’accident du travail de Madame [F] est survenu à raison d’une défaillance du système de sécurité conçu par la société [14].

Or, aucune des sociétés intervenantes n’a alerté l’employeur d’un quelconque dysfonctionnement du système de sécurité, alors même que les sociétés [12], et [11] dans le cadre des vérifications périodiques, ont quant à elles contrôlé le bon fonctionnement de l’intégralité du système de sécurité de la porte.

L’intervention du service de maintenance de la société [16] est donc sans lien avec le dysfonctionnement qui s’est manifesté le 16 janvier 2013.

En effet, l’intervention du 5 janvier concernait un problème d’ouverture, et ne concernait donc pas le système de sécurité destiné à s’enclencher en cas de chute intempestive de la porte.

En outre, les interventions postérieures de la société [18] pour remettre en état la porte sectionnelle se sont avérées inefficaces, ce qui a conduit la société [16] à changer de porte sectionnelle.

Dans ces conditions, aucune conscience du danger ne peut être reprochée à la société [16].

A titre parfaitement surabondant, il sera indiqué que, le 28 juin 2012, soit 6 mois avant l’accident du travail de Madame [F], la société [11] est intervenue dans le cadre d’une vérification périodique des portes sectionnelles (pièce n°22).

La société [11] a préconisé différentes actions correctives à entreprendre, sans qu’aucune de ces actions ne révèle l’existence d’un dysfonctionnement particulier au niveau de l’ouverture ou de la fermeture de la porte.

A cet égard, aucune demande de mise à l’arrêt immédiat de la porte n’a été formulée.

Le 22 août 2012, la société [18] est intervenue dans le cadre d’une prestation de maintenance corrective (pièce n°23).

La prestation impliquait : « la décompensation et la dépose de la rampe de ressort, la dépose du moteur, la fourniture et la pose de 2 Axes de diamètre 25.4, la remise en place de la rampe de ressort, l’essai et le réglage de l’ensemble ».

Postérieurement à cette date, la porte sectionnelle ne présentait plus aucun dysfonctionnement.

En effet, dans le cadre d’une nouvelle vérification périodique, la société [11] est de nouveau intervenue le 9 octobre 2012, soit 1 mois et 19 jours après l’intervention de la société [18], et 3 mois avant l’accident du travail de Madame [F] (pièce n°24).

Là encore, aucune demande de mise à l’arrêt immédiat de la porte n’a été formulée, puisque la vérification n’a pas fait apparaître de dysfonctionnement particulier au niveau de l’ouverture ou de la fermeture de la porte.

Enfin l’intervention du service de maintenance de la société [16] du 5 janvier 2013 est sans lien avec l’accident du travail de Madame [F] puisqu’elle concernait un problème d’ouverture de la porte, totalement indépendant de la défaillance du système de sécurité en cas de chute intempestive de la porte.

En tout état de cause, à supposer pour les seuls besoins du raisonnement que ce dysfonctionnement ait un lien avec l’accident du travail de Madame [F], l’essai qui a été réalisé s’est révélé concluant puisqu’aucun dysfonctionnement n’a été porté à la connaissance de l’employeur jusqu’au 16 janvier 2013 (11 jours).

Enfin, aux termes de ses dernières conclusions, Madame [F] produit deux attestations qui démontreraient, selon elle, que l’employeur avait connaissance des dysfonctionnements de la porte, et qu’il n’aurait pris aucune mesure pour y remédier.

Monsieur [N] se limite à indiquer que le système de la porte automatique ne fonctionnait pas à la date de l’accident du travail, ce que l’employeur n’a jamais contesté.

Monsieur [C] indique quant à lui qu’il aurait signalé à son responsable que la porte était défectueuse avant le 16 janvier 2013.

L’attestation de Monsieur [C] est manifestement insuffisante pour démontrer la conscience du danger de l’employeur.

D’une part, Monsieur [C] ne précise pas la date à laquelle il aurait alerté son employeur du dysfonctionnement de la porte sectionnelle.

D’autre part, il ne précise pas le nom du responsable à qui il aurait signalé le dysfonctionnement.

Surtout, il ne prend pas soin de préciser la nature du dysfonctionnement de la porte qu’il aurait signalé à son employeur, étant rappelé que celle-ci présentait, outre le dysfonctionnement du système de sécurité en lien avec la survenance de l’accident du travail, un dysfonctionnement au niveau du portillon et un dysfonctionnement au niveau de l’ouverture, sans lien avec la survenance de l’accident du travail.

Enfin, c’est par une lecture totalement erronée des pièces produites par l’employeur que Madame [F] soutient qu’« aucun contrôle, ni vérification de la porte sectionnelle n’ont été opérés depuis l’année 2008, date de sa mise en service , jusqu’au 28 juin 2012, date à laquelle la société [11] a procédé à une vérification de l’équipement ».

En effet, il sera rappelé que l’intervention de la société [11] du 28 juin 2012 s’inscrit dans le cadre d’un contrat de maintenance signé à compter du 5 novembre 2009 (pièce n°12) de sorte que des vérifications périodiques ont bien été réalisées avant le 28 juin 2012.

Dans ces conditions, l’employeur ne pouvait avoir conscience d’un quelconque danger, et le jugement dont appel devra être confirmé.

Le Président a autorisé la société [16] à produire sous un mois le DUERP et la liste des postes à risque dans l’entreprise, à charge de réponse des autres parties sous un mois.

Ces documents ont été produits par la société [16] par courrier du 27 juin 2022 reçu par la Cour le 28 juin 2022.

Puis par message électronique en date du 20 septembre 2022, le magistrat chargé de l’instruction de la cause a écrit ce qui suit’aux parties’:

””””””””””Maître,

”””””””””’Monsieur le Directeur,

Dans cette affaire plaidée le 2 juin 2022 et en délibéré à la date du 7 novembre 2022, je suis amené à effectuer d’office un certain nombre de constatations. ‘

Parmi les documents opposés à Madame [F] par la société [16] pour établir qu’elle aurait eu connaissance de l’interdiction d’entrer dans l’étuve avant l’ouverture complète de la porte, il est produit en pièce n° 7 par cette dernière une ‘fiche de fonction dont Madame [F] aurait reconnu avoir eu connaissance en signant une attestation du 23 janvier 2012.

Cette fiche fait état de l’obligation d’attendre l’ouverture complète de la porte avant d’entrer dans l’étuve.

Je relève d’office que la pièce n°7 produite par la société [16] porte la mention «’ mise à jour le 10 janvier 2015’» ce dont il semble résulter qu’elle a été établie bien postérieurement à l’attestation précitée du 23 janvier 2012 et que Madame [F] a donc eu une version antérieure et possiblement différente.

Je relève également d’office que la fiche d’analyse d’accident établie par la société [16] évoque’dans la mesure de prévention 12 retenue l’intégration dans la fiche de poste du risque d’écrasement du fait d’une chute de porte ainsi que des consignes de sécurité lors de l’utilisation, ce dont il semble résulter que ce risque et la consigne d’attendre la fin de la man’uvre de la porte et son ouverture complète ne figuraient pas dans les fiches de poste existantes à la date de l’accident.

La société [16] produit également pour établir que Madame [F] était informée de l’interdiction d’entrer dans l’étuve avant ouverture complète de la porte une pièce n°11 «’affichage des consignes’» et qui expose cette interdiction en soulignant le risque d’écrasement.

Je relève d’office que les circonstances de temps et de lieu de cet affichage ne semblent pas établies par les éléments du débat et que l’on relève en outre que les photographies produites de la porte sectionnelle à l’origine de l’accident ne font pas apparaître que les indications en question figureraient ‘sur la porte elle-même ou à proximité immédiate.

Je relève également d’office que la fiche d’analyse accident produite en pièce 7 par Madame [F] fait apparaître la «’ signalisation du danger’» comme mesure de prévention possible et l’affichage du «’ flash sécurité’» parmi les mesures préconisées ce dont il semble résulter que cet affichage ou une signalisation n’existaient pas avant l’accident.

Il résulte du rapport établi par le bureau de contrôle Véritas en date du 9 octobre 2012, soit deux mois et une semaine avant l’accident, que’ parmi les actions à entreprendre il convenait de rendre visible le feu orange clignotant des deux côtés et de remettre le feu en service (ce dont l’on déduit que la position du feu ne permettait de le voir que d’un seul côté de la porte et qu’au surplus il ne fonctionnait pas).

Je relève d’office qu’il n’est aucunement établi par la société [16] qu’elle ait exécuté les préconisations du [11] en ce qui concerne le feu clignotant, aucune facture de travaux n’étant produite et aucun des témoignages produits dans sa pièce n° 10 n’étant en mesure d’indiquer si à la date de l’accident le feu de signalisation orange indiquant que la porte est en mouvement était fonctionnel.

La société [16] dispose d’un délai de 15 jours à réception de la présente pour faire parvenir à la Cour et à ses contradicteurs une note en délibéré sur les points relevés d’office ci-dessus à charge pour les autres parties de répondre sous 15 jours à toute note en délibéré de la société [16] qui leur sera expédiée dans le délai imparti ‘à cette dernière et portant sur les points relevés d’office.

Veuillez croire, Maître, Monsieur le Directeur, en l’expression de ma considération distinguée.’

Par courrier en date du 4 octobre 2022 reçu par le greffe par message électronique le 4 octobre 2022 puis par courrier recommandé avec accusé de réception le 6 octobre 2022, la société [16] fait valoir en substance ce qui suit’:

En ce qui concerne la fiche de poste de Madame [F] produite par elle aux débats.

Aucune disposition du code du travail n’impose à l ’employeur d’établir une fiche de poste et elle ne peut donc avoir commis une faute en relation avec la fiche de poste de Madame [F].

En ce qui concerne la fiche d’analyse d’accident du travail.

La mesure de prévention figurant sur la fiche d’analyse d’accident du travail visait simplement à édicter les mesures de sécurité sur un document complémentaire en sus de l’affichage déjà existant et du signalement de la zone de danger. Compléter la fiche de poste n’aurait nullement permis d’éviter l’accident.

En ce qui concerne la pièce n°11 produite par la société et relative à l’affichage des consignes.

Il a été attesté par plusieurs salariés que le marquage au sol signalisait bien une zone de danger et il est démontré que depuis 2010 la société informait les salariés, dès leur arrivée, de la signification des panneaux de signalisation (pièce 5 page 20). Elle a rapporté la preuve que la zone de danger était signalée.

En ce qui concerne les mesures de prévention préconisées par la fiche d’accident produite en pièce n°7 par Madame [F].

Cette pièce n’est pas de nature à établir une quelconque faute dès lors qu’il est démontré que la zone de danger était signalée et que Madame [F] avait connaissance du risque d’écrasement et des consignes de sécurité.

En ce qui concerne les mesures préconisées par le rapport Véritas du 9 octobre 2012.

La mesure de prévention préconisée par le [11] est sans lien avec la survenance de l’accident. Le mouvement de la porte est visible à l”il nu et la réparation du feu n’aurait pu hélas empêcher la chute de la porte. Cette signalisation n’est d’ailleurs pas obligatoire comme l’a indiqué la société [15]. Elle produit le justificatif de réparation du feu clignotant

MOTIFS DE L’ARRET

SUR LA DEMANDE DE MADAME [F] EN RECONNAISSANCE DE LA FAUTE INEXCUSABLE DE LA SOCIETE [17] SUBSTITUEE DANS SA DIRECTION A LA SOCIETE [16] ET SUR SES DEMANDES EN MAJORATION DE RENTE ET INDEMNITAIRES AFFERENTES.

Attendu qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat notamment en ce qui concerne les accidents du travail survenus au salarié ou les maladies professionnelles contractées par le salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise et que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du Code de la Sécurité Sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver et qu’il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié mais qu’il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée.

Vu les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale , L. 4121-1 à L. 4121-3, et R. 4323-82 à R. 4323-84 du code du travail ;

Qu’il résulte de ces textes qu’il appartient à l’employeur d’identifier et d’évaluer 2les risques auquels est exposé le salarié de manière si possible à les éviter et à les combattre à la source et, en toute hypothèse, de mettre en ‘uvre des actions d’information, de formation ainsi qu’une organisation et de moyens adaptés pour protéger le salarié (en ce sens notamment 3 2e Civ., 14 mars 2019, pourvoi n° 17-31.458).

Attendu qu’en application de l’article L.4154-3 du code du travail, la faute inexcusable de l’employeur est présumée établie pour les salariés temporaires victimes d’un accident du travail alors, qu’affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, ils n’auraient pas bénéficié de la formation à la sécurité renforcée prévue par l’article L.4154-2 du code du travail dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés’;

Attendu qu’en l’espèce les circonstances de l’accident du 16 janvier 2013 sont établies par la déclaration effectuée par l’employeur aux termes de laquelle’:

“Madame [F] déclare qu’en voulant rentrer dans une étuve, la porte sectionnelle s’est refermée sur elle, la blessant à la jambe. Elle a une facture ouverte.”

Que ces circonstances sont précisées par la fiche d’analyse accident produite en pièce n° 7 par Madame [F], relatant les déclarations de la salariée, indique qu’elle est entrée dans l’étuve pendant la montée de la porte (porte à mi-hauteur, environ 2 m) et que la porte est brusquement et rapidement descendue en venant projeter la personne au sol et en écrasant la jambe droite.

Que la société [17] marque son accord avec les circonstances ainsi décrites de l’accident puisqu’elle indique dans ses écritures soutenues à l’audience que le 16 janvier 2013 alors que Madame [F] entrait dans l’étuve après avoir actionné la montée de la porte sectionnelle, pendant la phase de montée de la porte, cette dernière est brutalement descendue en la projetant au sol.

Que de même, la société [16] indique dans ses conclusions soutenues à l’audience que Madame [F] a été victime d’un accident du travail en s’engageant à l’intérieur de l’étuve alors que la porte sectionnelle qu’elle avait actionnée était en train de s’ouvrir et elle fait à cet égard référence à sa pièce n° 2 qui est la déclaration d’accident du travail, marquant ainsi son accord sur les circonstances de l’accident telles que rapportées dans cette déclaration.

Qu’il est donc constant que l’accident est survenu alors que l’intérimaire franchissait la porte en mouvement et que cette dernière est tombée brutalement sur la salariée en lui écrasant la jambe.

Attendu que Madame [F] soutient qu’elle serait fondée à se prévaloir de la présomption de faute inexcusable de son employeur au motif qu’elle était affectée à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé et sa sécurité et qu’il ne lui aurait été dispensé aucune formation renforcée à la sécurité.

Attendu que si Madame [F] s’attache à démontrer qu’elle n’aurait pas reçu cette formation lors de son dernier contrat de mission, elle ne démontre à aucun moment que son poste soit un poste à risque et ne donne aucune précision sur les fonctions qui étaient les siennes au service de la société utilisatrice.

Que s’il résulte des pièces produites par d’autres parties que la salariée occupait le poste d’agent de production pour un «’ travail sur presse aux pièces moulées’» (contrat de mission produit en pièce n°5 par la société [17]), ses conditions effectives de travail à ce poste ne sont aucunement décrites par la salariée et il n’est aucunement établi que cette dernière ait occupé un poste à risque ce dont il résulte qu’elle n’est pas fondée à se prévaloir de la présomption de faute inexcusable prévue par l’article L.4154-3 précité du Code du travail.

Qu’il appartient donc à la salariée d’établir que l’entreprise utilisatrice, que son employeur la société de travail temporaire [17] s’est substituée dans la direction des intérimaires mis à la disposition de cette entreprise, avait conscience du danger auquel elle l’exposait en lui faisant utiliser la porte sectionnelle à l’origine de l’accident et qu’elle n’a pas pris les mesures permettant de la protéger de ce danger.

Attendu que la société [16], entreprise utilisatrice, reconnaît à plusieurs reprises dans ses écritures soutenues à l’audience que la porte sectionnelle à l’origine de l’accident présentait un risque puisqu’elle soutient que la fiche de poste de Madame [F] indiquait expressément «’ attendre l’ouverture complète de la porte avant d’entrer dans l’étuve’», qu’elle ajoute que l’intérimaire «’ ne pouvait ignorer le risque d’écrasement lié à l’ouverture de la porte sectionnelle ( page 14 des conclusions de la société [16]) et qu’elle fait état d’un panneau d’affichage sur lequel il était distinctement écrit «’ risque d’écrasement’: attendre l’ouverture complète de la porte avant de pénétrer dans l’étuve”».

Que l’employeur, qui s’est substitué la société utilisatrice dans l’emploi et la direction de la salariée, avait donc nécessairement conscience du danger auquel était exposée cette dernière.

Qu’il convient donc de déterminer si la société utilisatrice, substituée dans la direction de la salariée, a pris les mesures suffisantes pour protéger Madame [F] de ce risque d’écrasement qu’elle avait parfaitement identifié.

Attendu que la société [16] fait valoir qu’elle a mis en place un certain nombre de mesures pour assurer la protection de ses salariés contre ce risque.

Qu’en réponse à l’argumentation contraire de Madame [F], elle fait valoir qu’elle a mis en place une vérification régulière des portes sectionnelles et justifie qu’il avait été remédié à l’anomalie constatée par le [11] avant la mise en service de la porte en 2005 et tenant à l’absence de dispositif automatique de retenue en cours de man’uvre empêchant la chute du tablier en cas de défaillance d’un des éléments du système porteur puisqu’il résulte du rapport de la société [11] du 9 octobre 2012 que ce dispositif était installé sur la porte à l’origine de l’accident.

Qu’elle indique par ailleurs avoir mis en place deux autres mesures de prévention à savoir la signalisation au sol matérialisant la zone de danger et l’information des salariés et notamment Madame [F] du danger de franchir la porte pendant son fonctionnement avec interdiction de la franchir avant son arrêt total, ce dont il résulte qu’elle avait parfaitement conscience de ce que le seul entretien régulier de la porte et l’installation du dispositif automatique de retenue de la porte étaient utiles mais insuffisants à assurer la protection des salariés contre le risque, étant en outre relevé que le dispositif précité limite la chute sur une distance de 0,30 m et ne supprime donc pas tous les risques d’écrasement et de choc.

Attendu que parmi les documents opposés à Madame [F] par la société [16] pour établir qu’elle aurait eu connaissance de l’interdiction d’entrer dans l’étuve avant l’ouverture complète de la porte, il convient en premier lieu d’examiner la fiche de fonction qu’elle produit aux débats et dont elle soutient que Madame [F] a reconnu avoir eu connaissance en signant une attestation du 23 janvier 2012.

Qu’il est exact que cette fiche fait état de cette interdiction puisqu’elle mentionne l’obligation d’attendre l’ouverture complète de la porte avant d’entrer dans l’étuve.

Attendu cependant qu’il n’est aucunement établi que Madame [F] se soit vue remettre une fiche de fonction identique à celle produite aux débats en pièce n°7 puisque cette pièce porte la mention «’ mise à jour le 10 janvier 2015’» ce dont il résulte qu’elle a été établie bien postérieurement à l’attestation précitée du 23 janvier 2012 et que Madame [F] a donc eu une version antérieure et possiblement différente.

Que cette constatation relevée d’office par le magistrat chargé de l’instruction de la cause n’a pas suscité la production par la société [16] de la fiche de fonction remise à Madame [F] en janvier 2012 ou auparavant et dont elle a reconnu avoir eu connaissance dans son attestation du 23 janvier 2012.

Attendu ensuite que la fiche d’analyse d’accident établie par la société [16] évoque dans la mesure de prévention 12 retenue à la suite de l’accident (pièce n° 7 de l’appelante) l’intégration dans la fiche de poste du risque d’écrasement du fait d’une chute de porte ainsi que des consignes de sécurité lors de l’utilisation, ce dont il résulte que ce risque et la consigne d’attendre la fin de la man’uvre de la porte et son ouverture complète ne figuraient pas dans les fiches de poste existantes à la date de l’accident.

Qu’il n’est donc aucunement établi, contrairement à ce que soutient la société [16], que Madame [F] ait eu connaissance, par sa fiche de fonctions, de l’interdiction d’entrer dans l’étuve avant l’ouverture complète de la porte.

Qu’il sera en outre fait remarquer que si certains salariés ont attesté 6 ans plus tard (février 2019) qu’à la date de l’accident ils avaient reçu la consigne de ne pas passer sous la porte lors de son fonctionnement, un salarié Monsieur [P] et un chef d’équipe Monsieur [X] ont indiqué ne pas savoir s’ils avaient reçu cette consigne.

Qu’il n’est en tous cas aucunement établi que Madame [F] ait reçu personnellement cette consigne.

Qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il n’est aucunement établi que Madame [F] ait eu connaissance par sa fiche de poste ou verbalement du danger du franchissement de la porte pendant son fonctionnement et de l’interdiction de la franchir avant son ouverture complète.

Attendu par ailleurs qu’il n’est pas plus démontré par la société [16] que ce danger et cette dernière consigne aient été portés à la connaissance des salariés par voie d’affichage, l’existence d’un affichage avant l’accident des indications figurant en pièce n°11 de la société n’étant en aucune manière établie et les photographies produites ne faisant pas apparaître que les indications en question figurent sur la porte elle-même ou à proximité immédiate ni d’ailleurs qu’elle aient été affichée à un quelconque emplacement dans l’entreprise.

Que le fait indiqué par la note en délibéré que les salariés aient été informés depuis 2010 de la signalétique figurant en pages 37 et 38 du livret d’accueil, n’établit aucunement l’existence d’une signalétique dans l’entreprise mettant en garde contre les risques afférents au fonctionnement de la porte sectionnelle.

Qu’il sera également souligné à titre surabondant que la fiche d’analyse accident produite en pièce 7 par Madame [F] fait apparaître la «’signalisation du danger’» comme mesure de prévention possible et l’affichage du «’flash sécurité’» parmi les mesures préconisées ce dont il résulte que cet affichage ou une signalisation n’existaient pas avant l’accident.

Que la Cour entend en définitive retenir qu’il n’est pas non plus établi que Madame [F] ait eu connaissance par une signalétique ou un affichage quelconque de l’interdiction de franchir la porte sectionnelle avant son ouverture complète.

Attendu que la première mesure de prévention du risque invoquée par la société utilisatrice n’est donc pas établie.

Attendu ensuite que la société [16] fait valoir qu’elle a fait le nécessaire pour assurer la signalisation de la zone d’écrasement par un marquage apposé au sol et qu’elle produit à l’appui de son affirmation sa pièce n° 9.

Attendu que la pièce n° 9 de la société, non datée et non datable, fait apparaître des bandes de couleur différentes sous la porte.

Que la société produit des attestations de ses salariés a qui l’on a produit cette photo et auxquels la société a demandé notamment d’indiquer si le marquage au sol était présent conformément à la photo produite.

Que ces attestations font apparaître une réponse affirmative pour trois d’entre elles tandis que deux salariés indiquent ne pas se souvenir.

Que la salariée quant à elle produit des témoignages dont il résulte qu’il n’y avait aucun marquage au sol avant l’accident et que ce dernier a été effectué postérieurement (pièces 16 et 17 de la salariée).

Qu’il résulte du rapport établi par le bureau de contrôle Véritas en date du 9 octobre 2012, soit deux mois et une semaine avant l’accident, que parmi les actions à entreprendre il convenait notamment de remettre en état le marquage au sol sous la zone d’écrasement .

Que compte tenu des déclarations contradictoires des salariés sur cette question du marquage au sol et du rapport Véritas, la Cour entend retenir que s’il existait bien un marquage au sol sous la porte avant l’accident ce dernier n’était plus suffisamment visible, ce qui explique que des salariés déclarent qu’il n’existait pas, et qu’il devait être remis en état pour avoir une visibilité suffisante.

Qu’il sera en outre fait remarquer que la simple existence d’un marquage au sol sous la porte ne peut venir qu’en complément d’une information des salariés sur la dangerosité de la porte et d’une interdiction de son franchissement avant son ouverture complète et n’est pas de nature à elle-seule à alerter suffisamment les salariés du risque encouru par un tel franchissement.

Que la mesure de marquage au sol invoquée par la société [16], outre qu’elle n’était pas suffisamment visible, n’a donc pas constitué une mesure de protection suffisante des salariés contre le risque.

Attendu ensuite qu’il résulte du rapport Véritas précité du 9 octobre 2012, établi deux mois et une semaine avant l’accident, que parmi les actions à entreprendre il convenait également de rendre le feu orange clignotant des deux côtés et de remettre le feu en service (ce dont l’on déduit que le feu n’était prévu que pour être vu que d’un côté et qu’au surplus il ne fonctionnait pas).

Attendu qu’il n’est aucunement établi par la société [16] qu’elle ait exécuté les préconisations du [11] en ce qui concerne le feu clignotant, aucune facture de travaux n’étant produite et aucun des témoins dont les attestations sont produites dans sa pièce n° 10 n’étant en mesure d’indiquer si à la date de l’accident le feu de signalisation orange indiquant que la porte est en mouvement était fonctionnel tandis que les pièces produites par la société en annexe de sa note en délibéré n’établissent aucunement que le feu clignotant ait été réparé.

Qu’il résulte de tout ce qui précède que la société [16] avait estimé qu’il était nécessaire pour alerter les salariés du risque d’écrasement d’installer un feu orange clignotant signalant le fonctionnement de la porte mais que trois mois et une semaine après qu’il ait été constaté par le [11] que ce clignotant ne fonctionnait plus , elle n’avait pas fait le nécessaire pour faire procéder à sa remise en fonctionnement.

Qu’il s’ensuit qu’à l’exception des mesures insuffisantes à elles seules de l’entretien régulier des portes sectionnelles et de l’installation d’un dispositif antichute du tablier de la porte, la société [16] n’a pris aucune mesure de protection complémentaire des salariés et notamment Madame [F] contre le risque puisque les deux mesures mises en place, à savoir le marquage au sol et l’installation d’un feu de signalisation, n’étaient pour l’un pas suffisamment visible et pour l’autre en panne ou débranché.

Qu’en outre, le fait que la société [16] ait prévu parmi les mesures de prévention retenues dans la fiche d’analyse d’accident produite par l’appelante en pièce n° 7, la révision du balisage de toutes les zones d’écrasement, l’affichage du «’flash sécurité’», l’information de l’ensemble du personnel sur les consignes de sécurité pour l’utilisation d’une porte sectionnelle, sur les risques d’écrasement, l’intégration des consignes de sécurité pour l’utilisation de ces portes dans le livret d’accueil et dans la fiche de poste, confirme s’il en était besoin que la société utilisatrice n’avait mis en place, à l’exception des mesures nécessaires mais insuffisantes d’entretien régulier de la porte et d’installation d’un dispositif antichute, aucune mesure de prévention suffisante du risque d’écrasement ou de choc avec une porte sectionnelle en fonctionnement.

Que cette carence manifeste de l’employeur à prévenir les risques en informant la salariée des risques encourus par le franchissement de la porte en fonctionnement, en lui interdisant ce franchissement avant l’arrêt total de la porte, en balisant de manière visible la zone de danger et en attirant l’attention de la salariée sur le fonctionnement de la porte et donc sur le danger par le fonctionnement effectif d’un feu clignotant constitue une des causes nécessaires de l’accident puisque ce dernier ne serait pas survenu si ces mesures avaient été mises en ‘uvre.

Qu’il convient en conséquence, réformant le jugement de ce chef, de dire que la société [17] qui s’est substituée la société [16] dans la direction de la salariée et répond des manquements de cette dernière, a commis une faute inexcusable à l’origine de l’accident survenu à Madame [R] [F].

Attendu qu’aux termes des deux premiers alinéa de l’article L.452-2 du Code de la sécurité sociale en cas de faute inexcusable de l’employeur la victime qui s’est vu accorder une indemnité en capital reçoit une majoration ne pouvant excéder le montant de ladite indemnité et celle ayant obtenu le bénéfice d’une rente reçoit une rente majorée ne pouvant excéder soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité soit le montant de ce salaire dans le cas d’incapacité totale.

Qu’il résulte du texte précité que la majoration de la rente ou du capital alloué à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle consécutif à une faute inexcusable de l’employeur est calculée en fonction de la réduction de la capacité dont celle-ci reste atteinte et que dès lors la majoration doit suivre l’évolution du taux d’incapacité de la victime.

Qu’il résulte également de la combinaison du texte précité et des articles L. 434-2 et L.453-1 du code de la sécurité sociale seule la faute inexcusable du salarié est de nature à limiter la majoration de la rente à laquelle il est en droit de prétendre en raison de la faute inexcusable de son employeur ;

Attendu qu’en l’espèce il n’est pas soutenu et encore moins démontré que la salariée ait commis une faute inexcusable.

Qu’il convient donc d’ordonner la fixation à son maximum la majoration de la rente accordée à la victime au titre de l’article L.452- 2 du Code de la sécurité sociale et dire que cette majoration suivra le taux d’évolution de l’incapacité de cette dernière.

Attendu que la Cour ne disposant pas de suffisamment d’éléments pour fixer les indemnisations sollicitées par la victime sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité social au titre de l’indemnisation de ses souffrances physiques et morales, de son préjudice esthétique et d’agrément, au titre de la diminution ou perte de possibilités professionnelles et au titre d’un déficit fonctionnel temporaire, il convient d’ordonner une mesure d’expertise selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt, mesure qui sera limitée aux préjudices revendiqués par la victime.

Que les pièces médicales produites par cette dernière justifient l’octroi par la caisse d’une provision de 10’000 €.

SUR LA DEMANDE DE LA CAISSE AU TITRE DE SON ACTION RECURSOIRE.

Attendu qu’aux termes de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale la majoration du capital ou de la rente est payée par la caisse qui en récupère le capital représentatif auprès de l’employeur dans les conditions déterminées par décret et qu’aux termes de L.452-3 du Code de la sécurité sociale la récupération des préjudices de la victime indemnisés en application de ce texte est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur.

Qu’en application de ce texte il convient de dire que la caisse pourra poursuivre à l’encontre de la société [17] le remboursement des indemnisations à revenir à Madame [F] sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale et le capital représentatif de de la majoration de la rente versées par la caisse à cette dernière.

SUR LE RECOURS DE LA SOCIETE [17] CONTRE LA SOCIETE [16].

Attendu qu’il résulte des articles L. 241-5-1, L. 412-6, R. 242-6-1 et R. 242-6-3 du code de la sécurité sociale qu’en cas d’accident du travail imputable à la faute inexcusable d’une entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire, seule tenue, en sa qualité d’employeur de la victime, des obligations prévues aux articles L. 452-1 à L.452-4 du même code dispose d’un recours contre l’entreprise utilisatrice pour obtenir simultanément ou alternativement le remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et la répartition de la charge financière de l’accident du travail, étant précisé que le coût de l’accident du travail mis intégralement à la charge de l’entreprise utilisatrice en application de l’article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est entièrement imputable à la faute inexcusable de cette entreprise, doit s’entendre, en vertu de l’article R. 242-6-1 du même code, du seul capital représentatif de la rente accident du travail .

Attendu qu’en l’espèce il vient d’être jugé que les manquements commis par l’entreprise utilisatrice à ses obligations en termes d’information de la salariée du risque et de mise en place de mesures de protection contre ce dernier constituaient la cause nécessaire de l’accident, sans qu’aucune faute n’ait été retenue à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire.

Qu’il convient donc de dire que la société [16] devra garantir la société [17] de toutes les sommes dont cette dernière sera tenue envers la caisse du fait de la reconnaissance de sa faute inexcusable en application des dispositions des articles L.452-2 et L.452-3 du code de la sécurité sociale, en ce compris la provision mise à la charge de la caisse et les frais de l’expertise judiciaire.

Qu’il convient ensuite de dire que le coût de l’accident, c’est-à-dire le coût afférent à l’incapacité permanente partielle de 55% reconnu à Madame [F] par notification du 5 novembre 2015, à savoir un coût d’incapacité permanente de catégorie 4, sera inscrit en totalité au compte employeur de la société [16].

SUR LES DEPENS ET LES FRAIS NON REPETIBLES.

Attendu que la solution du litige justifie la réformation des dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais non répétibles et, statuant à nouveau de ces chefs et ajoutant au jugement, la condamnation de la société [16] aux dépens de première instance et d’appel et à verser à Madame [F] une somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et une somme de 3000 € au titre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement,

DIT que la société [17], qui s’est substituée la société [16] dans la direction de Madame [R] [F], a commis une faute inexcusable à l’origine de l’accident survenu à cette dernière le 16 janvier 2013 dans les locaux de l’entreprise utilisatrice [16] ;

ORDONNE la fixation à son maximum de la majoration de la rente accordée à la victime au titre de l’article L.452- 2 du Code de la sécurité sociale et dit que cette majoration suivra le taux d’évolution de l’incapacité de cette dernière ;

MET à la charge de la caisse une provision de 10’000 € à valoir sur l’indemnisation des préjudices de la victime sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale ;

DÉSIGNE le Docteur [O] [A] Doctorat en médecine, CES en médecine légale, CES de médecine du travail, Diplôme de réparation du Dommage corporel et inscrite sur la liste des experts judiciaires près la Cour d’Appel d’Amiens, [Adresse 1] [Localité 8] avec la mission, les parties et leurs conseils convoquées, d’examiner Madame [R] [F], née le 20 mars 1963 à Cherchell (Algérie) immatriculée sous le numéro de sécurité sociale 263039935241492, de prendre connaissance de tous éléments utiles, de décrire les lésions subies par elle à la suite de son accident du travail survenu dans les locaux de la société [16] le 16 janvier 2013, de donner son avis sur le préjudice éventuellement subi par elle du fait des souffrances physiques et morales endurée avant la date de sa consolidation telle que retenue par la caisse, en l’évaluant sur l’échelle des 7 degrés, de donner son avis sur le préjudice esthétique éventuellement subi par lui tant avant qu’après la consolidation, en l’évaluant sur l’échelle des 7 degrés, d’indiquer si à son avis elle a subi un préjudice d’agrément c’est-à-dire une incapacité du fait de l’accident de se livrer à une activité spécifique de sport ou de loisir exercée avant l’accident, de dire si elle a subi un déficit fonctionnel temporaire lequel inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle, ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante pendant la maladie traumatique, en indiquant sa durée et son taux en cas de déficit partiel, d’indiquer si à son avis, au vu des pièces qui lui seront communiquées par la victime, d’indiquer si cette dernière a pu subir à la suite de l’accident une perte ou une diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ;

FIXE à 600 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert qui sera avancée par la la caisse primaire d’assurance maladie de Lille Douai entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de la cour d’appeld’Amiens dans le mois de la notification du présent arrêt ;

DIT que les frais d’expertise, qui constituent un poste de préjudice régi par l’article L.452-3 in fine, seront avancés par la caisse primaire d’assurance maladie de Lille Douai et pourront être recouvrés par elle à l’encontre de la société [17] laquelle pourra en obtenir le remboursement par la société [16] ;

DIT que l’expert ne débutera les opération d’expertise qu’à réception de l’avis de consignation ;

DIT que l’expert devra dresser un rapport qui sera déposé au greffe de la chambre de protection sociale de la cour dans les six mois de sa saisine et qu’il devra en adresser copie aux parties ;

DÉSIGNE le magistrat chargé du contrôle des expertises de la cour d’appel d’Amiens afin de surveiller les opérations d’expertise,

DIT que la caisse pourra poursuivre à l’encontre de la société [17] le remboursement de la provision mise à sa charge ainsi que des indemnisations à revenir à Madame [F] sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale et qu’elle pourra également recouvrer à l’encontre de cette société de travail temporaire le capital représentatif de la majoration de la rente versée à la victime ;

DIT que le coût de l’accident, c’est-à-dire le coût afférent à l’incapacité permanente partielle de 55% reconnu à Madame [F] par notification du 5 novembre 2015, à savoir un coût d’incapacité permanente de catégorie 4, sera inscrit au compte employeur de la société [16] ;

CONDAMNE la société [16] à rembourser à la société [17] toutes les sommes que cette dernière sera amenée à verser au titre de l’action récursoire de la caisse, en ce compris la provision mise à la charge de la caisse et les frais de l’expertise judiciaire supportés par cette dernière ;

CONDAMNE la société [16] à verser à Madame [F] une somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et une somme de 3000 € au titre de la procédure d’appel.

RESERVE les dépens

RENVOIE la présente affaire à l’audience du 04 septembre 2023 à 13h30,

DIT que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à cette audience,

Le Greffier,Le Président

 


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