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25 mai 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
21/03151
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 25/05/2023
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/03151 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TVNJ
Jugement (N° 19/00445) rendu le 06 Avril 2021
par le tribunal judiciaire d’Avesnes-sur-Helpe
APPELANTES
Madame [N] [Y] veuve [M]
née le 16 Mai 1929 à [Localité 29]
demeurant [Adresse 3]
[Localité 18]
Madame [U] [M]
née le 09 Juillet 1957 à [Localité 28]
demeurant [Adresse 26]
[Localité 1]
Madame [G] [M] épouse [D]
née le 21 Septembre 1962 à [Localité 18]
demeurant [Adresse 25]
[Localité 18]
représentées par Me Sandrine Billard, avocat au barreau d’Avesnes sur Helpe, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [H] [X]
né le 02 Janvier 1947 à [Localité 30]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 30]
représenté par Me Philippe Le Fur, avocat au barreau d’Avesnes sur Helpe, avocat constitué
Madame [B] [M]
demeurant [Adresse 16]
[Localité 24] (Suisse)
ordonnance de caducité partielle de déclaration d’appel rendue le 21 octobre 2021
Monsieur [I] [M]
demeurant [Adresse 7]
[Localité 19]
ordonnance de caducité partielle de déclaration d’appel rendue le 21 octobre 2021
DÉBATS à l’audience publique du 13 février 2023 tenue par Catherine Courteille magistrat chargé d’instruire le dossier qui, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Manon Caron
GREFFIER LORS DU PRONONCÉ : Anaïs Millescamps
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Catherine Courteille, président de chambre
Jean-François Le Pouliquen, conseiller
Véronique Galliot, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 25 mai 2023 après prorogation du délibéré en date du 04 mai 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Catherine Courteille, président et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 5 décembre 2022
****
Vu le jugement du tribunal judiciaire d’Avesnes-Sur-Helpe du 06 avril 2021,
Vu la déclaration d’appel de Mme [N] [M], Mme [U] [M] et Mme [G] [M] du 09 juin 2021,
Vu les conclusions de Mme [N] [M], Mme [U] [M] et Mme [G] [M] du 17 juin 2022,
Vu les conclusions de M. [H] [X] du 22 septembre 2022,
Vu l’ordonnance de clôture du 05 décembre 2022.
EXPOSE DU LITIGE
M. [H] [X] a fait l’acquisition, par acte du 26 mars 1979, reçu par Me [R], notaire à [Localité 20], de parcelles de terrain sises sur la commune de [Localité 30], [Adresse 27] cadastrées section B n° [Cadastre 15], [Cadastre 13], [Cadastre 5] et [Cadastre 14].
Mme [N] [Y]-[M], Mme [U] [M] et Mme [G] [M]-[D] sont propriétaires indivises des parcelles cadastrées section B n° [Cadastre 4] et [Cadastre 8], provenant de la succession de [I] [M] décédé le 18 septembre 1990.
Les parcelles appartenant à M. [X] et celles appartenant aux consorts [M], sont attenantes et ne sont pas clôturées.
Déclarant occuper depuis plus de trente ans les parcelles B n° [Cadastre 4] et [Cadastre 8], M. [H] [X] a, par acte d’huissier du 18 février 2019 fait assigner Mmes [N] [M], [U] [M], [G] [M], [B] [M] et M. [I] [M] aux fins de voir dire qu’il est propriétaire par usucapion des parcelles section B n° [Cadastre 4] et [Cadastre 8] et ordonner la publication du jugement à la conservation des hypothèques.
Par jugement en date du 06 avril 2021, le tribunal judiciaire d’Avesnes-sur-Helpe a :
– débouté les défenderesses de toutes leurs demandes fins et conclusions,
– dit que M. [X] est recevable en son action,
– dit que M. [H] [X] est propriétaire par usucapion des parcelles non-bâties sises [Adresse 27] figurant à la matrice cadastrale de la commune de [Localité 30] sous les n° [Cadastre 4] et [Cadastre 8] de la section B,
– ordonné la publication de la décision à intervenir à la conservation des hypothèques à la diligence de M. [H] [X],
– condamné in solidum Mme [G] [M], Mme [N] [M], Mme [B] [M], M. [I] [M] et Mme [U] [M] à payer à M. [H] [X] la somme de 1 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum Mme [G] [M], Mme [N] [M], Mme [B] [M], M. [I] [M] et Mme [U] [M] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Philippe Le Fur, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– rejeté les demandes s’agissant des dépens et de l’article 700 concernant M. [W] [D],
– rejeté les demandes plus amples ou contraires,
– ordonné l’exécution provisoire.
Par déclaration en date du 06 juin 2021, Mmes [U], [N] [M]-[Y] et [G] [M]-[D] ont interjeté appel de la décision.
Par dernières conclusions du 17 juin 2022, Mmes [U] [M], [N] [Y]-[M] et [G] [M]-[D] demandent à la cour, de :
Dire et juger tant recevable que bien fondées Mesdames [N] [Y] [M], [U] [M] et [G] [M] épouse [D] en leur appel.
Y faisant droit :
– Infirmer le jugement du tribunal judiciaire d’Avesnes-Sur-Helpe rendu 06 avril 2021.
– Y faisant droit,
– Débouter purement et simplement M. [H] [X] en l’ensemble de ses demandes,
– Recevoir les demandes de Mmes [M] en indemnité procédure vexatoire et leur allouer chacune une indemnité de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts.
– Condamner M. [H] [X] à leur verser chacune la somme de 1 500 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions en date du 22 septembre 2022, M. [H] [X] demande à la cour de :
– Débouter les appelantes de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
– Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
– Condamner in solidum les appelantes à payer à M [H] [X] la somme de 3 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner in solidum les appelantes aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Philippe Le Fur, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l’audience et rappelées ci-dessus.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 05 décembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
[B] [M] et [I] [M], ont été mis en cause devant le tribunal en qualité de coindivisiares, toutefois en cause d’appel, par ordonnances des 23 août 2021 et 20 septembre 2021, la déclaration d’appel les concernant a été déclarée caduque faute d’avoir été signifiée dans les délais fixés par l’article 902 du code de procédure civile.
En toute hypothèse, suivant acte de cession de droits successifs établi le 20 novembre 2004 par Me [C], de la SCP Mazan, [C], Guerin-Wacongne et Nicolle » notaire à [Localité 22] , M. [I] [M] (fils du défunt) et Mme [B] [M] ont cédé tous leurs droits à Mme [G] [M].
Devant la cour Mmes [N], [U] et [G] [M] ne soulèvent plus le moyen tiré de la nullité de l’assignation.
1-Sur l’usucapion
Mmes [M] soutiennent que M. [X] bénéficié d’une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 4] leur appartenant qu’il ne peut donc prescrire la propriété de la totalité de ladite parcelle, elles ajoutent que sa mauvaise foi est établie par le fait qu’il ne s’est jamais acquitté de la taxe foncière et qu’en outre en 2003, M. [X] a sollicité le bornage de ses parcelles avec les parcelles de l’indivision, M. [X] ne pouvait donc se méprendre sur ses droits.
M. [X] soutient que depuis qu’il a fait l’acquisition des parcelles N° [Cadastre 15],[Cadastre 13], [Cadastre 6] et [Cadastre 14], il occupe les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 12] qui sont attenantes à ses biens et forment un tout avec sa propriété, ces parcelles ne sont pas délimitées, il justifie par la production d’attestations de cette occupation paisible non équivoque, continue et publique.
Selon l’article 2258 du code civil la prescription acquisitive est un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi.
L’article 2261 du même code précise que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire.
Il appartient à M. [X] qui invoque la prescription trentenaire, de justifier d’une possession publique, paisible, continue et ininterrompue, non équivoque et à titre de propriétaire.
Ainsi que cela ressort de son titre de propriété, M. [H] [X] a acquis les parcelles n° [Cadastre 13], [Cadastre 14], [Cadastre 15] et [Cadastre 6] de [O] [M], par acte du 26 mars 1979.
Il fait valoir que les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 8] jouxtent ses propres parcelles et forment avec elles une continuité, il produit plusieurs attestations :
– du maire de la commune, indiquant que la parcelle [Cadastre 4] est occupée « gracieusement » par M. [X],
– de voisins, Mme [V], M. [F], M. [A] indiquant que M. [X] occupent les parcelles litigieuses depuis trente et les entretient, ce qui est d’ailleurs confirmé par les photographies produites par les appelantes,
Ces éléments sont de nature à établir le caractère continu, paisible et public de la possession invoquée.
Pour prescrire utilement, doit également être caractérisé un élément intentionnel, la possession doit être non équivoque et à titre de propriétaire.
Il ressort de l’acte de vente de 1979, concernant les parcelles appartenant à M. [X] ([Cadastre 13],[Cadastre 14],[Cadastre 15] et [Cadastre 6]) ainsi que de l’acte de partage dressé le 13 décembre 1962 par Maître [Z], notaire à [Localité 23] (pièce 11 des appelantes), entre [O] [M] et [I] [M] que [O] [M] qui s’est vu attribuer les parcelles [Cadastre 14] et [Cadastre 6] « aura un droit de passage, à l’endroit teinté en jaune au plan ci-annexé, sur la parcelle attribuée à M. [I] [M], et cadastrée section B n° [Cadastre 4] pour lui permettre d’avoir accès auxdites (B [Cadastre 14] et B [Cadastre 6]) de la route Nationale de [Localité 30] à [Localité 31] par [Adresse 21] ».
M. [H] [X] soutient dans ses écritures que l’existence de cette servitude ne porte que sur la parcelle [Cadastre 4] et non sur la parcelle [Cadastre 8] et qu’il n’a jamais utilisé cette servitude.
Certes la servitude ne concerne que la parcelle [Cadastre 4], toutefois M. [X] ne saurait soutenir que le fait qu’il puisse accéder à ces terres par un autre chemin exclut toute utilisation de la servitude dès lors que par ailleurs, il déclare emprunter la parcelle [Cadastre 4] et l’entretenir.
Il s’observe que la mention dans son titre de propriété de la servitude est de nature à conférer à sa possession un caractère équivoque, que le caractère équivoque de la possession est également établi par le fait qu’en 2003, il a lui-même contacté les consorts [M] pour faire borner sa propriété ainsi qu’en atteste la lettre du cabinet Lévêque et Ninin adressée le 08 juillet 2003 à M. [I] [M] (pièce 5 des appelantes) indiquant « suite à la demande de M. [H] [X], demeurant [Adresse 17] à [Localité 30] nous vous informons que nous nous rendrons à [Localité 30] le mardi22 juillet 2003 à 9h30 afin de délimiter et borner sa propriété cadastrée section B n° [Cadastre 6],[Cadastre 9],[Cadastre 10] et [Cadastre 11]. Cette propriété étant contiguë à votre terrain cadastré section B n° [Cadastre 4] et [Cadastre 8], nous demandons de bien vouloir assister aux opérations de bornage ».
Il ressort de ce courrier que M. [X] ne possédait pas à titre de propriétaire ayant parfaite conscience des droits de ses voisins et qu’il ne s’est d’ailleurs jamais inquiété du paiement de la taxe foncière, en conséquence la possession ayant été équivoque, M. [X] n’a pu prescrire utilement, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.
2- sur la demande de dommages et intérêts
Les appelantes forment une demande de dommages et intérêts de 1 500 euros indiquant que la procédure revêt un caractère vexatoire.
Mmes [U] [M], [N] [Y] [M] et [G] [M]-[D] ne justifient d’aucun préjudice distinct de celui réparé par l’allocation d’une indemnité au titre des frais irrépétibles et seront déboutées de leur demande à ce titre.
3- sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
M. [H] [X] sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’au paiement d’une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [H] [X] de toutes ses demandes,
Déboute Mme [U] [M], Mme [N] [Y]-[M] et Mme [G] [M]-[D] de leur demande de dommages et intérêts,
Condamne M. [H] [X] au paiement de la somme de 1 500 euros à Mme [U] [M], Mme [N] [Y]-[M] et Mme [G] [M]-[D] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, pour la procédure de première instance et d’appel,
Condamne M. [X] aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier
Anaïs Millescamps
Le président
Catherine Courteille