Votre panier est actuellement vide !
23 janvier 2020
Cour d’appel de Paris
RG n°
15/04719
Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 7
ARRÊT DU 23 JANVIER 2020
(n° 1 , 21 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 15/04719 – N° Portalis 35L7-V-B67-BV2WE
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Novembre 2014 – Juge de l’expropriation de PARIS – RG n° 11/00266
APPELANTS
Mme [B] [H] [U] veuve [C]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399
M. [E] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399
M. [S] [U]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représenté par Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399
M. [Q] [U]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représenté par Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DU [Adresse 5] représenté par son Syndic en exercice Monsieur [E] [U]
Monsieur [E] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Louis VERMOT de la SCP CORDELIER & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0399
INTIMES
SOCIETE D’ECONOMIE MIXTE D’AMENAGEMENT DE LA VILLE DE PARIS (SEMAVIP)
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Représentée par Me Stéphane DESFORGES de la SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0131
MADAME LA MAIRE DE LA VILLE DE PARIS agissant au nom et comme représentant de ladite Ville
[Adresse 7]ues
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Représentée par Me Stéphane DESFORGES de la SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0131
M. [J] [U]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
Représenté par Me Nadine RAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0412
Mme [I] [U] épouse [E]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
Représentée par Me Vincent CANU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0869
Mme [D] [U] épouse [S]
[Adresse 10]
[Adresse 10]
GRANDE BRETAGNE
Représentée par Me Vincent CANU, avocat au barreau de PARIS, toque : E0869
M. [X] [U]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
Représenté par Me Nadine RAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0412
Mme [L] [K]
[Adresse 12]
[Adresse 12]
Représentée par Me Catherine MUSSO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0102
M. [V] [U]
[Adresse 13]
[Adresse 13]
Représenté par Me Catherine MUSSO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0102
avocat plaidant Me Jean Marie POUILHE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0091
M. [A] [U]
[Adresse 14]
[Adresse 14]
Représenté par Me Catherine MUSSO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0102
avocat plaidant Me Jean Marie POUILHE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0091
M. [O] [Q] [U]
[Adresse 15]
[Adresse 15]
Représenté par Me Charles-hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
avocat plaidant Me Bertrand DE GERANDO, avocat au barreau de PARIS, toque : OA937
M. [N] [Y] [U]
[Adresse 16]
[Adresse 16]
Représenté par Me Charles-hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
avocat plaidant Me Bertrand DE GERANDO, avocat au barreau de PARIS, toque : OA937
M. [W] [R] [U]
[Adresse 17]
[Adresse 17]
Représenté par Me Charles-hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
avocat plaidant Me Bertrand DE GERANDO, avocat au barreau de PARIS, toque : OA937
M. [C] [T] [U]
[Adresse 18]
[Adresse 18]
[Adresse 18]
Représenté par Me Charles-hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
avocat plaidant Me Bertrand DE GERANDO, avocat au barreau de PARIS, toque : OA937
DIRECTION RÉGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS
[Adresse 19]
[Adresse 19]
[Adresse 19]
Représentée par M. [M] en vertu d’un pouvoir général
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Hervé LOCU, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Hervé LOCU,
Gilles MALFRE, Conseiller
Valérie MORLET, Conseillère
Greffier, lors des débats : Elodie RUFFIER
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Hervé LOCU, Président de chambre, et par Sixtine ROPARS, Greffier présent lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ
Par arrêté préfectoral du 3 novembre 1992, l’acquisition par la Société parisienne d’économie mixte d’aménagement (Soparema), aux droits de laquelle vient la société d’économie mixte d’aménagement de la ville de Paris (Semavip), d’une partie (1 412 m²) d’un terrain de 2 003 m², sis [Adresse 5], cadastré DR [Cadastre 1], faisant partie d’un ensemble immobilier, dont les consorts [U] sont propriétaires, comprenant également un immeuble d’habitation, a été déclarée d’utilité publique dans le cadre de la réalisation de la [Adresse 20].
L’arrêté de cessibilité est intervenu le 28 février 1995.
L’ordonnance d’expropriation a été prononcée le 5 avril 1995.
Par arrêt du 2 février 1996, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du 20 mars 1995 du juge de l’expropriation de Paris, ayant fixé le montant des sommes revenant aux consorts [U], à titre d’indemnisation, toutes causes confondues, à une somme équivalente à 4 100 000 euros. Cette somme a été versée le 4 janvier 1996.
Les fonds ont été répartis entre les membres des indivisions [U], divisées en trois branches :
– branche [K] [U] : 435 millièmes = 1 783 500 euros, étant précisé que M. et Mme [K] [U] sont décédés respectivement, les 29 février et 1er juin 1996, laissant pour leur succéder six enfants : [D], [Q], [J], [S], [X] et [I] ;
– branche [T] [U] : 435 millièmes = 1 783 500 euros, étant précisé que M. [T] [U] est décédé en [Date décès 1], laissant sa veuve, [Z], décédée le [Date décès 2] 2009, et leurs cinq enfants : [L] (actuellement épouse [K]), [E], [V], [B] (actuellement veuve [C]) et [A] ;
– branche [Y] [U] : 130 millièmes = 533 035 euros, étant précisé que les époux [Y] [U] sont décédés, quatre enfants venant à leurs droits, [O], [N], [C] et [W].
Le 22 mars 1996, la Semavip a vendu le terrain exproprié à la ville de Paris.
Par jugement du 3 mars 2000, le tribunal administratif de Paris, saisi par les consorts [U], a annulé l’arrêté de cessibilité du 28 février 1995, faute d’étude d’impact, dossier incomplet et information insuffisante du public sur les dépenses engendrées.( Pièce N°21)
Par deux arrêts du 27 février 2001, la Cour de cassation a annulé l’ordonnance d’expropriation du 5 avril 1995 et l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 2 février 1996. (Pièce N°8 )
Par courrier du 7 novembre 2001, la SEMAVIP (pièce N°28) a mis en demeure M. [E] [U] et le syndicat des copropriétaires de lui rembourser le montant de l’indemnité d’expropriation versée soit 26 896 000 F- 15000 F(frais de modification du règlement de copropriété) soit la somme de 26 881 000 francs soit 4 096 664,40 euros.
Sur assignations délivrées par la SEMAVIP aux consorts [U], en mars, avril et mai 2003, en condamnation solidaire à restituer les sommes versées en application de l’arrêt annulé de la cour d’appel de Paris, le tribunal de grande instance de Paris, statuant comme juridiction de droit commun, a, par jugement du 15 mars 2007, déclaré nulles les assignations délivrées par la SEMAVIP.
Par arrêt du 3 décembre 2009, la cour d’appel de Paris, statuant dans les mêmes conditions, a infirmé ce jugement, déboutant les consorts [U] de leur exception de nullité des assignations et a ordonné la réouverture des débats.
Par arrêt du 9 juin 2011 (pièce N°7), la cour d’appel de Paris a :
– jugé que l’arrêt de cassation du 27 février 2001 constituait le titre permettant à la SEMAVIP d’obtenir la restitution des indemnités versées ;
– renvoyé les consorts [U], qui soutenaient reconventionnellement que le bien exproprié n’était pas en état d’être restitué, à mieux se pourvoir devant le juge de l’expropriation .
Par assignations des mois d’août et septembre 2011, les consorts [U] ont saisi le juge de l’expropriation de Paris, lequel, compte tenu des pourvois dirigés contre l’arrêt du 9 juin 2011, a, par jugement du 5 mars 2012, sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Cour de cassation.
Par arrêt du 26 juin 2013, (pièce N°8) la Cour de cassation a cassé partiellement l’arrêt du 9 juin 2011, au motif que seul le juge de l’expropriation était compétent pour statuer sur la demande de restitution formée par la SEMAVIP, laquelle devait le saisir, ce que celle-ci et la ville de Paris ont fait, le 5 mars 2014.
Par arrêt du 18 juin 2015, les différentes instances d’appel ont été jointes.
Un acte de quittancement notarié a été établi le 4 janvier 1996(pièce SEMAVIP N°3) et le terrain remis par procès verbal du 5 février 1996 (pièce N°5).
Par arrêt du 19 mai 2016, la cour d’appel de Paris a :
– déclaré recevable l’appel et les écritures des parties ;
– confirmé le jugement en ce que :
– il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la SEMAVIP et la ville de Paris ;
– il a déclaré recevable l’action introduite par les consorts [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ;
– il a déclaré recevable l’action de la SEMAVIP et de la ville de Paris ;
– il a constaté l’absence de base légale de l’ordonnance d’expropriation du 5 avril 1995 ;
– il a ordonné la restitution du terrain de 1 412 m² sis [Adresse 5], aujourd’hui cadastré DR [Cadastre 2], aux consorts [U] ;
– avant dire droit plus amplement, sur la demande de dommages et intérêts des consorts [U], et du syndicat de copropriétaires, ordonné une mesure d’expertise et désigné pour y procéder M. [F] [B], expert près la Cour d’appel de Paris, demeurant [Adresse 21], qui pourra se faire assister de tout technicien d’une spécialité différente de la sienne, avec pour mission de :
– entendre les parties, ainsi que tous sachants, et se faire remettre tous documents utiles ;
– déterminer le préjudice subi par les appelants en lien direct avec l’opération irrégulière d’expropriation résultant notamment de la privation du terrain depuis l’ordonnance d’expropriation, de la nécessité de le remettre dans l’état où il se trouvait lors de sa remise, ainsi que d’une éventuelle perte de chance pour les appelants d’avoir pu disposer des droits à construire susceptibles d’avoir été attachés au terrain litigieux ;
– fournir à la cour tous éléments techniques utiles à la solution du litige ;
– dire que l’expert adressera aux parties une note de synthèse de ses opérations, leur enjoindra de lui adresser leurs dires dans un délai de trois semaines et y répondra dans son rapport définitif, lequel devra être déposé au greffe de la cour au plus tard le 28 février 2017 ;
– dit que les appelants devront ensemble consigner entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de la cour d’appel de Paris la somme de 2 500 euros à valoir sur les frais et honoraires de l’expert judiciaire, avant le 31 juillet 2016, faute de quoi la désignation de celui-ci sera caduque et il sera tiré toutes conséquences de cette abstention ;
– renvoyé l’affaire à l’audience du 29 septembre 2016 pour vérification du versement de la consignation, puis à l’audience du jeudi 15 juin 2017 à 9h00, salle Malesherbes, pour plaidoiries après dépôt du rapport de l’expert ;
– sursis à statuer jusqu’au dépôt du rapport d’expertise sur le surplus des prétentions des parties en particulier l’indemnisation des appelants, la demande de remboursement de la SEMAVIP et de la ville de Paris, les frais irrépétibles en cause d’appel et la charge des dépens d’appel.
Par décision du 14 septembre 2017, la Cour de cassation a :
– partiellement cassé l’arrêt rendu le 19 mai 2016 en ce qu’il a :
– déclaré recevable le mémoire de Mmes [I] et [D] [U] déposé le 24 mars 2016, valant appel provoqué ;
– donné mission à l’expert de déterminer le préjudice subi par les appelants en lien direct avec l’opération irrégulière d’expropriation résultant d’une éventuelle perte de chance pour eux d’avoir pu disposer des droits à construire susceptibles d’avoir été attachés au terrain litigieux ;
– remis en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyé devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;
– condamné les consorts [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] aux dépens ;
– rejeté la demande des consorts [U] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et les a condamné à payer à la SEMAVIP et la Ville de Paris la somme globale de 3 000 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 05 juillet 2018, la Cour d’appel de Paris a ordonné la jonction, sous le numéro RG 18-00867, des saisines après cassation formées :
– le 11 janvier 2018 par Mme [B] [U] veuve [C], M. [E] [U], M. [S] [U], M. [Q] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], enregistrée sous le n° RG 18-00867 ;
– le 23 janvier 2018 par Mme [L] [K], née [U], M. [V] [U] et M. [A] [U], enregistrée sous le n° RG 18-01658 ;
– le 15 janvier 2018 par la SEMAVIP et la Ville de Paris, enregistrée sous le n° RG 18-01771 ;
– le 15 février 2018 par Mme [I] [U] épouse [E] et Mme [D] [U] épouse [S], enregistrée sous le n° RG 18-03377 ;
– le 10 avril 2018 par M. [J] [U] et M. [X] [U], enregistrée sous le n° RG 18-06735.
Par arrêt du 11 avril 2019, la Cour d’appel de Paris a constaté que, suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 14 septembre 2017, l’affaire a été enrôlée sous un nouveau numéro RG 18/00867, alors qu’elle était déjà suivie sous le numéro RG 15/04719, renvoyé à l’audience du 03 octobre 2019. Par conséquent, il a été sursis à statuer et l’affaire RG 18/00867 a été renvoyée à l’audience du 03 octobre 2019.
Les consorts [U] ont adressé un DIRE N°1 le 27 décembre 2016, en faisant état des rapports de M. [L] et de M. [Q] [W] [Q] et la SEMAVIP 4 DIRES, un DIRE N°4 le 20 juin 2017.
Par lettre du 15 mai 2017, l’expert M. [B] s’est interrogé pour savoir si plusieurs chefs de préjudices invoqués par les consorts [U] entrent ou non dans sa mission, à savoir l’examen des préjudices causés par la couverture de l’ancienne voie ferrée, la construction d’un immeuble de 7 étages au [Adresse 22] et les nuisances pour perte d’ensoleillement, celles occasionnées par la crèche et par la création de vues directes.
Par ordonnance du 19 mai 2016 le président de la chambre en qualité de juge du contrôle de la mesure d’instruction a précisé que l’ensemble des préjudices invoqués par les consorts [U] entre dans la mission de l’expert.
Suite à diverses ordonnances, les consignations complémentaires ont été versées par les consorts [U].
Par courrier du 15 janvier 2019, l’expert M. [F] [B] a demandé un report de délai au 28 juin 2019 afin de pouvoir faire intervenir le sapiteur. Une ordonnance de prorogation de délai a été rendue le 11 octobre 2019 pour un dépôt du rapport d’expertise au 29 juin 2020.
Pour l’exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :
– déposées au greffe, par [B] (veuve [C]), [E] de la branche [T] [U], [S] et [Q] [U] de la branche [K] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], respectivement le 15 février 2018, notifiées le 15 février 2018 (AR du 21 février 2018) puis le 01er août 2018, notifiées le 21 août 2018 (AR du 06 septembre 2018), aux termes desquelles ils demandent à la cour :
– à titre principal :
– de déclarer irrecevable l’appel formé par la SEMAVIP en ce qui concerne les points qui n’ont pas fait l’objet d’une cassation avec renvoi dans l’arrêt du 14 septembre 2017, à savoir plus précisément la légalité et l’utilité de la mesure d’expertise, les indemnités dues aux expropriés, à l’exclusion de la perte de constructibilité, et la demande de restitution de l’indemnité d’expropriation ;
– de constater qu’il entre dans la compétence et les pouvoirs du juge de l’expropriation de statuer sur la demande des expropriants en réparation du préjudice causé par l’opération irrégulière ;
– de constater que les consorts [U] se retrouvent propriétaires d’un bien frappé, de fait, d’inconstructibilité par la présence, sur le terrain voisin, d’un bâtiment de 7 étages, absorbant les droits à construire attachés à leur terrain ;
– de dire qu’il y a bien perte de constructibilité, dès lors que ce terrain demeuré la propriété des copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] aurait bénéficié de la constructibilité conférée par la PAZ (plan d’aménagement de la zone) applicable à la zone couverte par la ZAC ;
– en conséquence d’évaluer le préjudice subi au titre de la privation des droits à construire à la somme de 11 200 000 euros, sauf à parfaire ;
– à titre subsidiaire :
– de modifier la mission actuellement confiée à l’expert M. [F] [B] suite à l’arrêt du 19 mai 2016 afin d’y intégrer l’évaluation du préjudice subi au titre de la privation des droits à construire subi par les consorts [U] ;
– de condamner la SEMAVIP et la ville de Paris, in solidum, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens ;
– déposées au greffe, par [I] et [D] [P] (épouse [S]) [U] de la branche [K] [U], respectivement le 09 mars 2018, notifiées le 13 mars 2018 (AR des 13, 14, 16 et 17 mars 2018), puis le 11 février 2019, notifiées le 11 février 2019 (AR du 13 février 2019) aux termes desquelles elles demandent à la cour :
– de leur donner acte de leur acquiescement au désistement régularisé par la SEMAVIP et la ville de Paris ;
– de leur donner acte de ce qu’elles renoncent à toutes les demandes formées à l’encontre de la SEMAVIP et de la ville de Paris ;
– de dire que les concluantes, la SEMAVIP et la ville de Paris conserveront pour elles l’intégralité des frais liés à l’instance
Elles ont déposées le 17 octobre 2019 au greffe des conclusions aux fins du même objet de désistement, que celles du 11 février 2019 notifiées le 24 octobre 2019.
– adressées au greffe, par [O], [N], [W] et [C] [U] de la branche [Y] [U], le 19 mars 2018, notifiées le 21 mars 2018 (AR de 26 et 27 mars 2018), puis déposées au greffe le 10 août 2018, notifiées le 16 août 2018 (AR des 06 et 07 septembre 2018), aux termes desquelles ils demandent à la cour :
– à titre principal :
– de rejeter les conclusions de la SEMAVIP et de la ville de Paris comme irrecevables et mal fondées ;
– de condamner in solidum la SEMAVIP et la ville de Paris à payer au syndicat des copropriétaires, ou à défaut aux copropriétaires, la somme de 11 200 000 euros, avec intérêt à compter du 10 mai 2004 ;
– de réformer en cela le jugement dont appel du 18 novembre 2014 prononcé par le Tribunal de grande instance de Paris n° RG 11/00266 ;
– à titre subsidiaire :
– de modifier la mission actuelle confiée à l’expert judiciaire désigné par l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 19 mai 2016 afin d’y intégrer l’évaluation du préjudice subi au titre de la perte des droits à construire du terrain ;
– de condamner in solidum la SEMAVIP et la ville de Paris à leur payer la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– adressées au greffe, par [J] et [X] [U] de la branche [K] [U], respectivement le 10 avril 2018, notifiées le 10 avril 2018 (AR des 16 et 17 avril 2018), puis le 11 février 2019, notifiées le 11 février 2019 (AR du 13 février 2019) aux termes desquelles ils demandent à la cour :
– de constater l’accord de Messieurs [Y] et [X] [U] sur le désistement des demandes formulées par la SEMAVIP et la Ville de Paris à leur encontre ;
– de constater le désistement de Messieurs [J] et [X] [U] de leurs demandes à l’encontre de la SEMAVIP et de la ville de Paris ;
– de constater le désistement d’instance de Messieurs [J] et [X] [U] ;
– de constater que chacun gardera à sa charge ses dépens liés à l’instance ;
– adressées au greffe, par [D] [U] (épouse [K]), [V] et [A] [U], de la branche [T] [U], respectivement le 04 août 2018, notifiées le 16 août 2018 (AR des 06 et 07 septembre 2018) puis le 11 août 2018, notifiées le 17 août 2018 (AR des 06 et 07 septembre 2018), aux termes desquelles ils demandent à la cour :
– à titre principal : de faire droit à leurs conclusions initiales ;
– à titre subsidiaire :
– de compléter la mission d’expertise confiée à M. [F] [B] par l’arrêt du 19 mai 2016 pour fournir tous éléments utiles à la détermination de la valeur de la parcelle cadastrée à Paris DR [Cadastre 2] sur la base du plan d’aménagement de la zone de la [Adresse 20] du 22 juin 1992 avant toute cession de droits à construire ;
– de fixer la date à laquelle l’expert devra avoir remis son rapport ;
– adressées au greffe, par la SEMAVIP et la ville de Paris, le 05 février 2019, notifiées le 08 février 2019 (AR du 11 février 2019) aux termes desquelles elles demandent à la cour :
– avant dire-droit, sur la mesure d’expertise :
– de constater que l’expert ne peut se voir confier l’examen d’un prétendu préjudice de perte de constructibilité ;
– de rejeter l’expertise ;
– au fond, sur les indemnités :
– de constater l’annulation de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 2 février 1996 ayant alloué aux consorts [U] une indemnité de 4 100 000 euros toutes causes de préjudices confondus ;
– de constater le désistement de la ville de Paris et de la SEMAVIP de ses demandes à l’encontre des consorts [U] suivants, parties à un protocole d’accord :
– [I] [U] (épouse [E]) ;
– [D] [D] [U] (épouse [S]) ;
– [J] [U] ;
– [X] [U] ;
– de condamner en conséquence les consorts [U] non parties au protocole, solidairement, à restituer à la SEMAVIP la somme de 3 299 944 euros avec intérêts de retard au taux légal à compter du 07 novembre 2011 ;
– de dire que les intérêts échus des capitaux produiront des intérêts à compter d’une année entière ;
– sur la demande des consorts [U] :
– à titre principal : de constater qu’il n’y a pas lieu d’allouer aux demandeurs des dommages et intérêts ;
– à titre subsidiaire: de constater que les demandeurs n’apportent pas la preuve des préjudices qu’ils allèguent et les rejeter ;
– sur les frais irrépétibles : de condamner solidairement les consorts [U] au paiement d’une somme de 10 000 euros ;
MOTIFS DE L’ARRÊT
[B] (veuve [C]), [E], [S] et [Q] [U] de la branche [T] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] font valoir que :
– la demande de réparation du dommage causé repose sur les articles L 223-1, L 223-2 et R 223-6 du code de l’expropriation. La cour d’appel de Paris, dans son arrêt du 14 février 2008, a jugé que la perte de constructibilité était “la conséquence de la procédure d’expropriation dont ils (les copropriétaires) ont fait l’objet et non de la présence de l’ouvrage litigieux”, “que d’autre part, les préjudices résultant des dégradations ayant affectées leur propriété ainsi que la perte de constructibilité et de jouissance d’une parcelle de 1 414 m² sont la conséquence directe de la procédure d’expropriation dont les consorts [U] ont fait l’objet en 1995 et non de l’autorisation de construire litigieuse”. La cour est compétente pour indemniser les préjudices liés à l’indisponibilité du bien exproprié et à l’impossibilité d’accomplir les actes nécessaires à sa valorisation ; or le terrain bénéficie de droits à construire au titre de sa soumission au plan d’aménagement modificatif de la zone de la ZAC de Tage Kellerman du 22 juin 1992, ce que ne conteste pas la SEMAVIP ;
– le terrain était constructible avant que l’opération irrégulière ne lui fasse perdre ses droits à construire ;
– la cour de renvoi est saisie de la cassation partielle et ne doit statuer que sur la demande d’indemnisation au titre de la perte des droits à construire du terrain, elle n’est pas saisie des autres demandes indemnitaires et les conclusions de rejet prises par la SEMAVIP et la ville de Paris sont dès lors irrecevables ;
[I] et [D] [D] (épouse [S]) [U] de la branche [K] [U] font valoir que :
– elles ont conclu un protocole transactionnel le 04 octobre 2018 avec la Ville de Paris et la SEMAVIP ;
– ce protocole a été exécuté, la SEMAVIP et la Ville de Paris se sont désistées de leurs demandes à leur encontre ;
– en conséquence, elles acquiescent à ce désistement et se désistent de toutes leurs demandes formées à l’encontre de la SEMAVIP et de la ville de Paris, chaque partie conservant l’intégralité des frais liés à cette instance ;
[O], [N], [W] et [C] [U], de la branche [Y] [U], soutiennent que :
– suite à l’arrêt de la cour de cassation du 14 septembre 2017, la cour doit statuer sur le principe du préjudice évoqué par les appelants avant de décider, le cas échéant, de confier la mission à l’expert judiciaire d’en déterminer le montant ;
– la demande de réparation du dommage causé repose sur les articles L 223-1, L 222-3 et R 223-6 du code de l’expropriation ;
– suite à quoi, la cour est compétente pour indemniser les préjudices liés à l’indisponibilité du bien exproprié et à la possibilité pour les expropriés d’accomplir les actes nécessaires à sa valorisation ;
– la cour pourra se référer au règlement du PAZ pour considérer que le terrain était constructible avant que l’opération irrégulière ne lui fasse perdre ses droits à construire ;
– la cour de renvoi ne doit statuer que sur la demande d’indemnisation au titre de la perte des droits à construire du terrain, et elle n’est pas saisie des autres demandes indemnitaires qui font l’objet, au terme de l’arrêt du 19 mai 2016 – avant dire droit, d’une mission d’expertise. En conséquence, les conclusions de rejet prises par la Semavip et la ville de Paris sont irrecevables ;
[J] et [X] [U] de la branche [K] [U] font valoir que :
– ils ont conclu un protocole d’accord transactionnel le 04 octobre 2018 avec la ville de Paris et la SEMAVIP ;
– ce protocole a été exécuté, la SEMAVIP et la Ville de Paris se sont désistées de leurs demandes à leur encontre ;
– en conséquence, ils acquiescent à ce désistement et se désistent de toutes leurs demandes formées à l’encontre de la SEMAVIP et de la ville de Paris, chaque partie conservant l’intégralité des frais liés à cette instance ;
[D] [U] (épouse [K]), [V] et [A] [U], de la branche [T] [U] considèrent que :
– la cassation prononcée par l’arrêt du 17 novembre 2017, porte sur le troisième chef des missions d’expertise, à savoir l’éventuelle perte de chance de disposer des droits à construire attachés au terrain ;
– la cassation ne porte pas sur la privation de jouissance, ni sur la remise en état du terrain ;
– la cassation ne porte que sur la constructibilité, et la demande d’indemnisation à hauteur de 11 200 000 euros est maintenue, s’appuyant sur un avis d’un expert ;
– si la cour s’estimait insuffisamment informée, il conviendra d’étendre la mission de l’expert en estimation de la valeur du terrain résultant de l’application du plan d’aménagement de la zone de la ZAC Tage-Kellerman, approuvé par délibération du 22 juin 1992, qui comportait attribution de droits à construire ;
– ces droits à construire ont été cédés à l’OPAC, qui les a consommés pour édifier un immeuble sur un terrain voisin, la ville a ensuite rendu à nouveau le terrain constructible dans son PLU approuvé les 12 et 13 juin 2006. La restitution de la parcelle irrégulièrement expropriée par la ville portera donc sur un terrain inconstructible. Or, si la restitution du terrain était intervenue en temps utile, les expropriés auraient pu se prévaloir des règles de la ZAC ;
– la mission d’expertise ne peut porter sur l’existence d’une perte de chance, mais elle peut en revanche éclairer le débat sur les valeurs à retenir pour apprécier le préjudice au regard des droits à construire qui étaient attribués dans le PAZ. Il convient en conséquence, à titre subsidiaire, de compléter la mission donnée à l’expert ;
La Semavip et la ville de Paris répondent que :
– avant dire droit, sur l’illégalité et l’inutilité de la mesure d’expertise : ils maintiennent qu’une mesure d’expertise est en effet inutile et illégale, notamment au regard de l’article 146 du code de procédure civile. Depuis 2000, date à laquelle les consorts [U] ont fait annuler l’ordonnance d’expropriation portant sur leur terrain, ils n’ont cessé de retarder la restitution de l’indemnité d’expropriation, prétendant ainsi qu’ils ont subi un préjudice en lien avec l’expropriation et d’un montant supérieur à l’indemnité d’expropriation. Or, ce préjudice allégué est essentiellement dû à une prétendue perte de constructibilité du terrain, qui n’était pour autant pas constructible à la date de l’ordonnance d’expropriation, ni à ce jour. Par ailleurs, le fait que le terrain soit inclus dans le périmètre de la ZAC ne signifie pas que les parcelles prises individuellement bénéficient de droits à construire propres ;
– en ce qui concerne la dégradation du terrain : celle-ci ne saurait être reconnue sachant que les consorts [U] ont récupéré leur bien le 07 novembre 2001 ;
– concernant les nuisances dues au voisinage, c’est à juste titre que le juge de l’expropriation a rejeté ces demandes, car la cour administrative d’appel leur a déjà alloué des dommages et intérêts ;
– sur la jouissance des nuisances subies depuis 1995, le juge de l’expropriation a rejeté à juste titre ces demandes des consorts [U], puisqu’ils ont été indemnisés lors de la fixation des indemnités d’expropriation par le juge de l’expropriation ;
– en ce qui concerne la perte de constructibilité invoquée par les consorts [U] : le juge de l’expropriation a, à juste titre, écarté cette demande. En effet, la prétendue perte de chance n’est pas sérieuse car le terrain exproprié n’a jamais été constructible, ce qui est souligné par le commissaire du gouvernement ;
– sur la demande de restitution de l’indemnité d’expropriation : le premier juge a condamné les consorts [U] à restituer l’indemnité de 15 532 000 francs, soit 2 367 838 euros, qui leur a été versée, et ce avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 07 novembre 2007. Cette solution n’est pas satisfaisante en ce qu’il a été retenu une restitution incomplète de l’indemnité d’expropriation. Toutefois, sur le principe, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a ordonné la restitution de l’indemnité principale en première instance ;
– s’agissant de la modification du règlement de copropriété, les consorts [U] n’ont pas apporté la preuve que ce règlement de copropriété a été effectivement modifié ;
– sur la restitution de l’indemnité de remploi : les consorts [U] n’ont pas effectué une acquisition de biens de même nature, moyennant un prix égal au montant de l’indemnité principale. Dès lors que l’ordonnance d’expropriation et les décisions indemnitaires de la juridiction judiciaire ont été annulées, ladite indemnité d’expropriation doit être restituée tant en son principal que ses accessoires ;
– concernant la perte d’agrément du jardin, le premier juge a décidé à tort que celle-ci était acquise, puisque précisément le jardin leur a été restitué ; il relève ainsi de la responsabilité des consorts [U] d’avoir refusé d’en reprendre la possession dès le 07 novembre 2001 ;
– par le protocole transactionnel du 04 octobre 2018, la Ville de Paris et la SEMAVIP ont conclu un accord, qui a été exécuté, et il convient en conséquence de constater leur désistement à l’encontre de Mme. [I] [U], [D] [D] [S] [U], M. [J] [U] et M. [X] [U] ;
SUR CE
Sur la jonction
En application des articles 337 et 368 du code de procédure civile, il convient dans l’intérêt d’une bonne justice de procéder à la jonction du dossier RG n°15/04719 avec le dossier RG n° 18/00867, puisque par arrêt du 11 avril 2019, la cour d’appel de Paris a déjà constaté que, suite à la décision de la Cour de cassation du 14 septembre 2017, l’affaire a été enrôlée sous le RG n° 18/00867, alors qu’elle était déjà suivie sous le RG n° 15/4719, renvoyé à l’audience du 3 octobre 2019 et qu’il a été sursis à statuer et l’affaire 18/00867 a été renvoyée à l’audience du 3 octobre 2019.
L’affaire sera désormais suivie sous le N° RG 15/04719.
Sur la recevabilité des conclusions
Aux termes de l’article 631 du code de procédure civile, devant la juridiction de renvoi, l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation. La juridiction de renvoi connaît donc le litige dans l’état où celui-ci se trouvait devant la juridiction dont la décision a été cassée. Il en résulte que les parties et le commissaire du gouvernement ne sont pas assujettis au respect des délais de dépôt de leurs conclusions tels que ceux-ci sont fixés par l’article R311’26 du code de l’expropriation, cet article n’étant pas applicable devant la cour d’appel statuant sur renvoi de cassation.
En l’espèce, suite à l’arrêt de la troisième chambre de la Cour de cassation du 14 septembre 2017, qui a partiellement cassé l’arrêt rendu le 19 mai 2016 par la cour d’appel de Paris, les conclusions déposées au greffe par Madame [B] ([C]), [E] de la branche [T] [U], [S] et [Q] [U] de la branche [K] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] du 15 février 2018, et du 1er août 2018, de Madame [I] et [D] (épouse [S]) [U] de la branche [K] [U] du 9 mars 2018, du 11 février 2019, adressées au greffe par Messieurs [O], [N], [W] et [C] [U] de la branche [Y] [U] du 19 mars 2018 et du 10 août 2018, de Messieurs [J] et [X] [U] de la branche [K] [U] du 10 avril 2018, et du 11 février 2019, de Madame [L] (épouse [K]), [V] [U], de la branche [T] [U] du 4 août 2018, et du 11 août 2018, de la SEMAVIP et la Ville de Paris du 5 février 2019 sont recevables.
Les conclusions de Mmes [I] [U] épouse [E] et Marie- [D] [U] du 17 octobre 2019 déposées après l’audience sont irrecevables.
Sur les désistements
1. Désistement de Mesdames [I] et [D] (épouse [S]) [U] de la branche [K] [U] (dossier initial 18’03377)
En application des articles 400 à 405 du code de procédure civile, il convient de constater le désistement de la Ville de Paris de leurs demandes à l’encontre de Mesdames [I] et [D] (épouse [S]) [U] et de l’acquiescement de celles-ci parties à un protocole d’accord, (pièce SEMAVIP N°16) de constater l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour.
Les concluantes, la SEMAVIP et la Ville de Paris conserveront à leur charge l’intégralité des frais liés à l’instance.
2. Désistement de Messieurs [J] et [X] [U] de la branche [K] [U] (dossier initial 18’06 735)
En application des articles 400 à 405 du code de procédure civile, il convient de constater le désistement de la Ville de Paris de leurs demandes à l’encontre de Messieurs [Y] et [X] [U] et de l’acquiescement de celles-ci parties à un protocole d’accord, de constater l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour.
Les concluants, la SEMAVIP et la Ville de Paris conserveront à leur charge l’intégralité des frais liés à l’instance.
Au fond
Par arrêt du 19 mai 2016, la cour d’appel de Paris a :
– déclaré recevable l’appel et les écritures des parties ;
– confirmé le jugement en ce que :
– il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la SEMAVIP et la ville de Paris ;
– il a déclaré recevable l’action introduite par les consorts [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ;
– il a déclaré recevable l’action de la SEMAVIP et de la ville de Paris ;
– il a constaté l’absence de base légale de l’ordonnance d’expropriation du 5 avril 1995 ;
– il a ordonné la restitution du terrain de 1 412 m² sis [Adresse 5], aujourd’hui cadastré DR [Cadastre 2], aux consorts [U] ;
– avant dire droit plus amplement, sur la demande de dommages et intérêts des consorts [U], et du syndicat de copropriétaires, ordonné une mesure d’expertise et désigné pour y procéder M. [F] [B], expert près la cour d’appel de Paris, demeurant [Adresse 21], qui pourra se faire assister de tout technicien d’une spécialité différente de la sienne, avec pour mission de :
– entendre les parties, ainsi que tous sachants, et se faire remettre tous documents utiles ;
– déterminer le préjudice subi par les appelants en lien direct avec l’opération irrégulière d’expropriation résultant notamment de la privation du terrain depuis l’ordonnance d’expropriation, de la nécessité de le remettre dans l’état où il se trouvait lors de sa remise, ainsi que d’une éventuelle perte de chance pour les appelants d’avoir pu disposer des droits à construire susceptibles d’avoir été attachés au terrain litigieux ;
– fournir à la cour tous éléments techniques utiles à la solution du litige ;
– dire que l’expert adressera aux parties une note de synthèse de ses opérations, leur enjoindra de lui adresser leurs dires dans un délai de trois semaines et y répondra dans son rapport définitif, lequel devra être déposé au greffe de la cour au plus tard le 28 février 2017 ;
– dit que les appelants devront ensemble consigner entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de la cour d’appel de Paris la somme de 2 500 euros à valoir sur les frais et honoraires de l’expert judiciaire, avant le 31 juillet 2016, faute de quoi la désignation de celui-ci sera caduque et il sera tiré toutes conséquences de cette abstention ;
– renvoyé l’affaire à l’audience du 29 septembre 2016 pour vérification du versement de la consignation, puis à l’audience du jeudi 15 juin 2017 à 9h00, salle Malesherbes, pour plaidoiries après dépôt du rapport de l’expert ;
– sursis à statuer jusqu’au dépôt du rapport d’expertise sur le surplus des prétentions des parties en particulier l’indemnisation des appelants, la demande de remboursement de la SEMAVIP et de la ville de Paris, les frais irrépétibles en cause d’appel et la charge des dépens d’appel.
Par décision du 14 septembre 2017, la Cour de cassation a :
– partiellement cassé l’arrêt rendu le 19 mai 2016 en ce qu’il a :
– déclaré recevable le mémoire de Mmes [I] et [D] [U] déposé le 24 mars 2016, valant appel provoqué ;
– donné mission à l’expert de déterminer le préjudice subi par les appelants en lien direct avec l’opération irrégulière d’expropriation résultant d’une éventuelle perte de chance pour eux d’avoir pu disposer des droits à construire susceptibles d’avoir été attachés au terrain litigieux ;
– remis en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyé devant la cour d’appel de Paris autrement composé ;
– condamné les consorts [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] aux dépens ;
– rejeté la demande des consorts [U] et du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et les a condamné à payer à la SEMAVIP et la Ville de Paris la somme globale de 3 000 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 05 juillet 2018, la Cour d’appel de Paris a ordonné la jonction, sous le numéro RG 18-00867, des saisines après cassation formées :
– le 11 janvier 2018 par Mme [B] [U] veuve [C], M. [E] [U], M. [S] [U], M. [Q] [U] et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], enregistrée sous le n° RG 18-00867 ;
– le 23 janvier 2018 par Mme [L] [K], née [U], M. [V] [U] et M. [A] [U], enregistrée sous le n° RG 18-01658 ;
– le 15 janvier 2018 par la SEMAVIP et la Ville de Paris, enregistrée sous le n° RG 18-01771 ;
– le 15 février 2018 par Mme [I] [U] épouse [E] et Mme [D] [U] épouse [S], enregistrée sous le n° RG 18-03377 ;
– le 10 avril 2018 par M. [J] [U] et M. [X] [U], enregistrée sous le n° RG 18-06735.
Par arrêt du 11 avril 2019, la Cour d’appel de Paris a constaté que, suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 14 septembre 2017, l’affaire a été enrôlée sous un nouveau numéro RG 18/00867, alors qu’elle était déjà suivie sous le numéro RG 15/04719, renvoyé à l’audience du 03 octobre 2019. Par conséquent, il a été sursis à statuer et l’affaire RG 18/00867 a été renvoyée à l’audience du 03 octobre 2019.
Par courrier du 9 juillet 2019, l’expert M. [F] [B] a indiqué qu’il était en attente d’un arrêt de la Cour de cassation le 3 octobre prochain (en réalité de la cour), que de ce fait il a suspendu ses opérations ; que si le bien est constructible, il devra s’adjoindre un architecte en tant que sapiteur pour faire une étude de faisabilité ; que les opérations sont loin d’être terminées. En conséquence il a demandé un report de délai au 28 juin 2020 afin de pouvoir faire intervenir le sapiteur .Une ordonnance de prorogation de délai a été rendue le 11 octobre 2019 pour un dépôt du rapport d’expertise au 28 juin 2020.
La Cour de cassation dans son arrêt du 14 septembre 2017, a donc partiellement cassé l’arrêt de la cour d’appel du 19 mai 2016, uniquement en ce qu’il a déclaré recevable le mémoire de Mesdames [I] et [D] [U] déposé le 24 mars 2016, valant appel provoqué, et en ce qui concerne la partie de la mission relative à une éventuelle perte de chance pour les appelants d’avoir pu disposer des droits à construire susceptibles d’avoir été attachés au bien litigieux, en demandant au technicien de se prononcer sur les conséquences juridiques des règles d’urbanisme applicables au terrain en cause, la cour, qui a délégué ses pouvoirs, ayant violé l’article R 311’26 du code de l’expropriation. En conséquence la mission de l’expert se poursuit en ce qui concerne la mission de déterminer le préjudice subi par les appelants en lien direct avec l’opération irrégulière d’expropriation résultant notamment de la privation du terrain depuis l’ordonnance d’expropriation, de la nécessité de le remettre dans l’état où il se trouvait lors de sa remise.
S’agissant de la troisième branche du deuxième moyen de cassation du pourvoi principal, il était conclu que les juges du fond ont commis un excès de pouvoir en dissociant la réparation du préjudice éprouvé par l’exproprié, du contentieux relatif à la restitution du bien et à la restitution de l’indemnité, alors que s’il peut y avoir compensation de la créance de restitution de l’indemnité d’expropriation avec celle de la réparation due à l’exproprié en raison du préjudice souffert par l’opération irrégulière, c’est à la condition que le juge soit en mesure de statuer sur la réparation.
La Cour de cassation a donc retenu qu’en application de l’article R 12’5-4 , devenu R 223-6 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, (et non l’article L 321-1 dudit code), qui dispose que le juge statue sur la demande de l’exproprié en réparation du préjudice causé par l’opération irrégulière, et qu’il précise que la restitution de son bien à l’exproprié ne peut intervenir qu’après paiement par celui- ci des sommes mises à sa charge, après compensation, le juge était tenu de préciser dans sa décision que la restitution de son bien à l’exproprié ne pouvait intervenir qu’après paiement par celui-ci à l’expropriant des sommes mises à sa charge, le cas échéant après compensation avec les indemnités mises à la charge de l’expropriant, et qu’ainsi il ne pouvait y avoir restitution du bien et ce remboursement préalable de l’indemnité d’expropriation. C’est par suite d’une omission matérielle que la cour d’appel a confirmé le jugement ordonnant la restitution du terrain et a sursis à statuer sur les demandes d’indemnisation des consorts et du syndicat des copropriétaires et sur la demande de remboursement de la SEMAVIP et de la Ville de Paris, sans préciser que la restitution ne pourrait intervenir qu’après paiement par les consorts [U] et des sommes mises à leur charge ; que cette erreur, pouvant être rectifiée suivant la procédure de l’article 462 du code de procédure civile, ne donne pas à ouverture à cassation et que ce moyen est irrecevable.
1. Sur les demandes relatives aux dégradations et réhabilitation, nuisances de voisinage, perte de jouissance et nuisances depuis 1995
S’agissant des autres demandes formulées par la SEMAVIP et la Ville de Paris, que celle de la constructibilité de la parcelle, en ce qui concerne la dégradation du terrain, les différents travaux d’assainissement, les nuisances de voisinage, la perte de jouissance et les nuisances subies depuis 1995, comme l’indiquent les consorts [U], ces demandes sont irrecevables , la cour de renvoi n’étant saisie que de la cassation partielle de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 mai 2016, et ces demandes faisant l’objet avant dire droit d’une mission d’expertise confiée à l’expert Monsieur [B] prorogée au 30 juin 2020.
2. Sur la demande relative à la constructibilité de la parcelle
Le premier juge a indiqué que la demande des consorts [U] visant la perte de constructibilité de la parcelle sous emprise ne saurait aboutir dans la mesure où le terrain exproprié n’a jamais été constructible ; il a été évalué comme étant non constructible, et le demeure à ce jour comme il l’ était à la date de l’expropriation. Par ailleurs, l’indemnité a été calculée en fonction des prix de mutation des terrains constructibles sur le 13e arrondissement, en appliquant à la valeur retenue un abattement de 40 % en raison de son inconstructibilité. Il n’est pas établi que restés propriétaires du terrain, les consorts [U] auraient été en mesure d’en disposer comme d’un terrain constructible par application du plan d’aménagement de zone.
La SEMAVIP et la Ville de Paris soutiennent comme le premier juge que la parcelle litigieuse n’a jamais été constructible.
Les consorts [U] rétorquent de leur côté que si leur parcelle n’avait pas fait l’objet d’une expropriation, ils auraient pu bénéficier des possibilités de construction couverts par le PAZ applicable à la Zac dans laquelle se trouve leur terrain. Aujourd’hui, ils ne peuvent plus bénéficier des possibilités de construction, car la SEMAVIP a cédé à l’OPAC les droits à construire résultant de leur parcelle en lui octroyant un bail à construire sur la parcelle voisine sur laquelle l’OPAC a édifié un immeuble de sept étages, absorbant la totalité des droits de la zone.
En raison de l’annulation de l’ordonnance d’expropriation du 5 avril 1995 par la Cour de cassation le 27 février 2001, à compter de cette date, les consorts [U] sont considérés comme ayant rétroactivement recouvré la pleine et entière propriété dudit bien et replacés dans l’état où ils se trouvaient avant la décision cassée et que pour la période 1995’2001, la SEMAVIP et la ville de Paris se trouvent avoir été en situation d’emprise irrégulière, de nature à engager sa leur responsabilité pour les troubles divers occasionnés par cette occupation sans titre juridique.
La cour d’appel de Paris dans l’arrêt susvisé, infirmant le jugement, a donc ainsi jugé de façon définitive, en l’absence de cassation sur ce point que : ‘considérant sur les dommages et intérêts réclamés par les consorts [U] et le syndicat des copropriétaires que le juge, qui n’est pas soumis dans cette procédure particulière aux prescriptions applicables en matière d’expropriation d’indemnisation de ce préjudice matériel direct, a vocation à réparer l’intégralité du préjudice subi par les copropriétaires en relation directe avec l’opération irrégulière, sans qu’il soit nécessaire de rapporter la preuve d’une faute ; considérant sur l’étendue et le quantum du préjudice que les consorts et le syndicat des copropriétaires s’appuient sur un rapport d’expertise non contradictoire contesté par la SEMAVIP et la Ville de Paris ; que la réalité du préjudice subi par les demandeurs est manifeste, notamment du fait de la dépossession du bien pendant de longues années et de la circonstance qu’il ne sera pas rendu dans l’état où il se trouvait lors de sa remise à l’expropriante’.
‘Considérant que le montant des dommages-intérêts susceptibles d’être alloués aux consorts [U] et au syndicat des copropriétaires devant se compenser avec le montant des sommes à restituer à l’expropriant, il convient de surseoir également sur la demande de remboursement de la SEMAVIP et de la Ville de Paris, jusqu’au dépôt du rapport d’expertise’.
La cour a donc retenu le principe d’un préjudice de jouissance subi par les expropriés, mais en revanche n’a pas déterminé l’étendue de ce préjudice, puisqu’elle a ordonné une mesure d’expertise sur ce point, qui a fait l’objet d’une cassation uniquement sur la mission relative à l’éventuelle perte de chance.
En conséquence, la détermination de l’existence de droits à construire sur le terrain en cause depuis la date de référence, à laquelle sa constructibilité avait été appréciée pour fixer les indemnités, et la capacité des expropriés à en bénéficier ou pas, est une question juridique qui relève non de la mission d’un technicien, motif de la cassation partielle, mais de celle du juge, qui doit donc être tranchée par la cour.
En l’espèce, par la même expropriation, la SEMAVIP a acquis une parcelle de terrain situé [Adresse 23], jouxtant la parcelle objet de la présente procédure. Elle a conclu le 10 avril 1997 avec l’Office public d’aménagement et de construction de Paris une convention de bail à construction d’une durée de 65 ans, en vue de l’édification sur cette parcelle d’un bâtiment de sept étages de deux niveaux de sous-sol, à usage d’habitation, de commerce, stationnement et comprenant un jardin maternel de 25 berceaux. Les permis de construire successifs ont été annulés, mais l’immeuble a été réalisé et se trouve entièrement occupé. Les consorts [U] ont fait assigner le 12 janvier 2001 la Ville de Paris et l’OPAC, aux fins de voir condamner l’OPAC, à démolir, sous astreinte, l’immeuble litigieux. Par ordonnance du 2 décembre 2002, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a déclaré celui-ci incompétent pour connaître du litige. La cour d’appel de Paris par arrêt du 7 janvier 2004 a confirmé cette ordonnance. Par arrêt du 6 juillet 2005, la Cour de cassation a considéré les juridictions judiciaires incompétentes pour connaître de la demande des consorts [U] en démolition de cet immeuble voisin, qualifié d’ouvrage public, et la cour administrative d’appel de Paris a finalement, par arrêt du 14 février 2008 (pièce N°32), débouté les consorts [U] de leurs demandes de démolition et le Conseil d’Etat les a débouté de leur pourvoi par décision du 17 juin 2009 (pièce N°33).
Les consorts [U] se retrouvent donc propriétaires d’un bien frappé, de fait, d’inconstructibilité par la présence, sur le terrain voisin, d’un bâtiment de sept étages, absorbant les droits à construire sur leur terrain.
Or, pour pouvoir construire l’immeuble de l’OPAC, la SOPAREMA (SEMAVIP) avait besoin des droits à construire du terrain [U]. Il ressort en effet des rapports des conseils d’administration de la SOPAREMA devenue SEMAVIP, aux assemblées des 31 décembre 1992 et 31 décembre 1993 (pièce numéro 31), que l’acquisition de la parcelle des consorts [U] était indispensable à la mise en ‘uvre de la construction en limite de la propriété du lot numéro neuf portant sur 60 logements. Le rapport du conseil d’administration du 31 décembre 1992 indique page 9 : ‘la décision de conserver l’immeuble du [Adresse 5], a modifié de manière importante le plan d’aménagement de la partie nord, de la Zac, et notamment le 9 dont le nouveau programme comprend 50 logements PLA et une mini crèche, développée sur une hauteur de 23 mètres’. Le rapport du conseil d’administration de l’AGO du 31 décembre 1993 (pièce N°13) mentionne page 3 : ‘cette emprise est indispensable à la réalisation du programme de la Zac, car elle permet la construction de 60 logements PLA du lot numéro neuf, extension du parc, et la création de la place publique reliant le parc à l’avenue d’Italie’ et page 10 ‘sur la [Adresse 20], l’OPAC a fait étudier par le cabinet d’architecte [D] et [Z] le permis de construire des 60 logements PLA du lot numéro neuf, dont la réalisation dépend de l’acquisition de la partie arrière de la propriété du [Adresse 24], appartenant aux consorts [U]. La promesse de bail à construction sera régularisée dès le lancement de la procédure d’expropriation’.
La SEMAVIP a donc conféré à un tiers des droits à construire qu’elle n’avait pas, et ainsi créé un préjudice aux consorts [U], copropriétaires de l’immeuble [Adresse 5] et du syndicat que constituent leurs collectivités.
Il y a donc eu perte de constructibilité, dès lors que ce terrain demeuré la propriété des copropriétaires de l’immeuble 166-168 aurait bénéficié de la constructibilité conférée par le plan d’aménagement de zone applicable à l’espace couvert par la Zac ; que si le terrain pris dans l’opération d’expropriation a été évalué par le juge de l’expropriation comme inconstructible, c’est uniquement par application des règles propres à la matière de l’expropriation qui lui imposait de prendre en compte la situation du bien au regard des règles d’urbanisme découlant du POS en vigueur à la date de référence au sens des articles L 322-1 et suivants du code de l’expropriation, c’est-à-dire avant la création de la Zac. Il est d’ailleurs établi qu’un mois après avoir acquis le terrain situé dans la Zac le qualifiant d’inconstructible, la SEMAVIP et la Ville de Paris l’ont vendu comme terrain à bâtir (pièce numéro 16 : vente du 22 mars 1996), avec mention d’un impôt sur la mutation : ‘la présente acquisition a pour objet des terrains destinés à la réalisation d’ouvrages assimilés à des immeubles au regard de la doctrine énoncée au BOI sous la référence 8A.
En conséquence, elle relève du champ de la TVA immobilière, au sens de l’article 257-7 du code général des impôts, celle- ci étant acquittée au taux de 20,60%.
Depuis 2006, le terrain, est en outre irrémédiablement affecté dans sa constructibilité par son placement en espaces libres à végétaliser,(ELV) avec l’obligation pour le propriétaire d’entretenir et de revêtir cet espace d’éléments végétaux. En l’absence d’emprise irrégulière, après un transfert de propriété opérée par une ordonnance d’expropriation annulée, les copropriétaires auraient été en mesure de céder le terrain alors constructible, ou d’opérer une opération de construction. Les consorts [U], s’ils avaient librement disposé de la parcelle, auraient pu se prévaloir du règlement de la [Adresse 20] , affectant la zone où est situé ce terrain, à la réalisation de logements, d’équipements publics, espaces verts, aires de jeux, crèches, groupes scolaires, ainsi qu’à celle de locaux commerciaux et artisanaux (titre deux, introduction) ; le plan d’aménagement de zone comporte, outre une zone d’habitation, de commerce et d’activité et une zone de construction basse à usage principal d’activité « l’indication des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics, aux installations d’intérêt général », en précisant que « les bâtiments publics sont soumis aux mêmes règles d’urbanisme que celles applicables aux immeubles d’habitation » (article trois du règlement). Les parcelles comprises ainsi à l’intérieur du périmètre couvert par un PAZ, alors même qu’aucune affectation n’aurait été définie et aucune règle d’utilisation du sol fixée, doivent en effet être considérées comme constructibles.
Afin d’évaluer ce préjudice, les consorts [U] ont versé au débat une expertise de M. [M] [L] des 25 novembre 2003 (pièce N°30), 30 avril 2004 (pièce N°30) et 12 avril 2008 (pièce N°39), de A 4A du 16 juillet 2014 (pièce N°39) d’actualisation du rapport [L] du 12 avril 2008 et de Monsieur [Q] [W] [Q] de mai 2015 (pièce N°9) ce dernier a procédé à l’estimation de la valeur des droits à construire transférés, c’est-à-dire le prix auquel les consorts [U] pourraient vendre à un promoteur immobilier ces terrains s’ils bénéficiaient encore de sa constructibilité d’origine, avant utilisation par la SEMAVIP des droits à construire dans le périmètre de la [Adresse 20] (pièce numéro 40). Ce dernier expert a évalué ce préjudice à la somme de 11’200’000 €.
Cette expertise réalisée à la demande des consorts [U] est recevable, ayant été soumise au débat contradictoire.
Pour déterminer l’étendue de ce préjudice, les consorts [U] demandent à titre principal la somme de 11’200’000 €, et à titre subsidiaire de modifier les missions actuellement confiées à l’expert Monsieur [B] suite à l’arrêt du 19 mai 2016 afin d’y intégrer l’évaluation du préjudice subi au titre de la privation des droits à construire .
La question juridique ayant été tranchée par la cour, l’étendue et l’importance du préjudice étant contestées, il convient effectivement pour une juste indemnisation, d’étendre la mission de l’ expert M. [F] [B] comme mentionné dans le dispositif.
Il convient en conséquence de surseoir à statuer sur les demandes des consorts [U] et du syndicat des copropriétaires jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.
Le montant des dommages-intérêts susceptibles d’être accordés aux consorts [U] et au syndicat des copropriétaires devant se compenser avec le montant des sommes à restituer à l’expropriant, en application de l’article R 223-6 du code de l’expropriation qu’après paiement préalable par les consorts [U] des sommes mises à leur charge, il convient de surseoir également sur la demande de remboursement de la SEMAVIP et la Ville de Paris, jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.
Il sera également sursis à statuer sur les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition et en dernier ressort ;
Vu l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 mai 2016 ;
Vu l’arrêt de la troisième chambre de la Cour de cassation du 14 septembre 2017, de cassation partielle.;
Déclare recevables les conclusions des parties, sauf celles de Mmes [I] [U] épouse [E] et [D] [D] [U] épouse [S] du 17 octobre 2019 ;
Ordonne la jonction du dossier RG 15/04719 avec le dossier 18/00867, l’affaire étant désormais suivie sous le N° RG 15/04719.
Constate le désistement de la Ville de Paris et de la SEMAVIP de leurs demandes à l’encontre des consorts [U] suivant, parties à un protocole d’accord :
‘ [I] [U] (épouse [E])
‘ [D] [U] (épouse [S])
‘ [J] [U]
‘ [X] [U]
Constate pour ces parties son dessaisissement ;
Dit que chacune de ces parties supportera ses propres dépens liés à l’ instance ;
Déclare irrecevables les demandes de la SEMAVIP et de la Ville de Paris relatives à la dégradation du terrain et les différents travaux d’assainissement, les nuisances de voisinage, la perte de jouissance et les nuisances subies depuis 1995 ;
Avant dire droit plus amplement, sur la demande de dommages-intérêts des consorts [U], du syndicat des copropriétaires, en raison de la construtibilité, ordonne une mesure d’expertise complémentaire à celle ordonnée par la cour d’ appel de Paris du 19 mai 2016, et désigne également pour y procéder Monsieur [F] [B], expert près la cour d’appel de Paris, demeurant [Adresse 21], qui pourra se faire assister de tout technicien d’une spécialité différente de la sienne, avec pour mission de :
– entendre les parties, ainsi que tout sachant, et se faire remettre tous documents utiles ;
– fournir tous éléments utiles à la détermination de la valeur de la parcelle cadastrée à Paris DR [Cadastre 2] sur la base du plan d’aménagement de zone de la [Adresse 20] du 22 juin 1992 avant toute cession de droits à construire
– donner un avis sur le rapport de M. [M] [L] des 25 novembre 2003, ( pièce N°30), 30 avril 2004 et 12 avril 2008( pièce N°17) ,le rapport de A 4A du 16 juillet 2014(pièce N°39) d’actualisation du rapport [L] du 12 avril 2008 ( pièce N°39 ) et l’expertise de M. [Q] [W] [Q] de mai 2015( pièce N°40) réalisés à la demande des consorts [U]
– fournir à la cour tous éléments techniques utiles à la solution du litige ;
Dit que l’expert adressera aux parties une note de synthèse de ses opérations, leur adjoindra de lui adresser leurs dires dans un délai de trois semaines et répondra dans son rapport définitif, commun avec celui ordonné par la cour le 19 mai 2016, lequel devra être déposé au greffe de la cour au plus tard le 29 juin 2020
Dit que les appelants restants suite aux désistements susvisés devront ensemble consigner entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de la cour d’appel de Paris la somme de 5 000 euros à valoir sur les frais honoraires de l’expert judiciaire, avant le 23 février 2020, faute de quoi la désignation de celui-ci sera caduque et il sera tiré toutes conséquences de cette abstention
Renvoie l’affaire à l’audience du 12 mars 2020 pour vérification du versement de la consignation, et à l’audience du 3 décembre 2020 à neuf heures, salle Malhesherbe pour plaidoirie après dépôt du rapport d’expertise
Surseoit à statuer jusqu’au dépot du rapport d’expertise sur le surplus des prétentions des parties, en particulier l’indemnisation des appelants, la demande de remboursement de la SEMAVIP et la Ville de Paris, les frais irrépétibles en cause d’appel et la charge des dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT