Cession de droits : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/15839

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Cession de droits : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/15839
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15 décembre 2022
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/15839

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRET DU 15 DECEMBRE 2022

(n° , 22 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/15839 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEJST

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juin 2021 – Tribunal de Commerce de BOBIGNY – RG n° 2019F00497

APPELANTS

Monsieur [Z] [W]

[Adresse 8]

[Localité 6]

S.A.S. UNIVERS PHARMACIE

N° SIRET : 444 735 484

[Adresse 4]

[Localité 6]

S.A. FORUM SANTE

N° SIRET : 351 790 548

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentés par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020, avocat postulant

Représentés par Me Sébastien BEAUGENDRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0262, avocat plaidant

INTIMES

Monsieur [I] [I] [S]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Monsieur [P] [L]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Monsieur [R] [E] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentés par Me Arnaud VANBREMEERSCH de la SELARL DUCLOS THORNE MOLLET-VIEVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0075, avocat postulant et plaidant

INTIMEE

S.A.S. CARAVELLE

N° SIRET : 347 972 283

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125, avocat postulant

Représentée par Me Mathilde FLAMANT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 19 octobre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Sophie MOLLAT, Présidente

Madame [X] ROHART, Conseillère

Madame Déborah CORICON, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

– contradictoire

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .

**********

Exposé des faits et de la procédure

Forum Santé est une centrale de référencement de produits et objets pharmaceutiques et non pharmaceutiques, services accessoires et complémentaires à cette activité permettant aux affiliés d’améliorer les conditions d’exercice de leur profession.

Elle a été fondée par Messieurs [S], [L] et [V].

La société Caravelle qui est une société d’investissement a pris une participation minoritaires assortie de la souscription d’obligations convertibles en actions et est devenue majoritaire en 2008 à hauteur de 61% à l’échéance des obligations convertibles.

La société Univers Pharmacie exerce la même activité que la société Forum Santé.

Par acte sous seing privé en date du 14 septembre 2017, Messieurs [I] [S], [I] [L], [R] [V] et la société Caravelle ont cédé à la societé Univers Pharmacie et à son dirigeant Monsieur [Z] [W] 54.261 actions qu’ils détenaient dans la société Forum Santé représentant 89,19% du capital, pour un montant total de 178.355,90 € après:

– qu’un engagement de confidentialité ait été signé par les parties le 9 juin 2017

– qu’un audit comptable ait eu lieu dans les locaux de Forum Santé en date des 7, 11 et 12 juillet 2017 par un expert comptable et que de nombreux documents aient été remis aux cessionnaires

– qu’une promesse de vente ait été signée le 3 août 2017 comportant 3 conditions suspensives dont la réalisation a permis la passation de l’acte définitif.

Outre le prix des actions, la société Univers Pharmacie a payé à la société Caravelle et à M. [L], tous deux associés cédants de la société Forum Santé, les sommes inscrites à leurs comptes courant d’associés, pour un montant de 250.000 euros pour la société Caravelle (sur une somme totale inscrite de 500.000 euros) et de 152.555,39 euros pour M. [L].

Enfin des garanties ont été accordées par les cédants par acte du 3 août 2017 dont une garantie d’exactitude des déclarations et une garantie d’actif et de passif.

Par un courrier de leur conseil du 23 février 2018 adressé à chacun des cédants, Univers Pharmacie et M. [W] ont indiqué mettre en ‘uvre la garantie de passif de la convention de cession au motif de l’existence d’un passif non déclaré et d’actifs surévalués, d’un nombre de pharmacies affiliées au réseau Forum Santé à la date de la cession inférieur à celui déclaré par les cédants, et en dernier lieu d’un redressement de l’URSSAF portant sur une période couverte par la garantie.

Par actes d’huissier en dates des 6 et 11 mars 2019, la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] ont assigné Monsieur [I] [S], Monsieur [P] [L], Monsieur [M] [V] et la société Caravelle à comparaître devant le tribunal de commerce de BOBIGNY pour les voir condamner à diverses sommes au titre de la mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif et en indemnisation du dol commis par les cédants à leur encontre.

Par jugement en date du 29 juin 2021 le tribunal de commerce de BOBIGNY:

– a reçu la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] en leurs demandes, les a dit mal fondées et n’y a pas fait droit ;

– a débouté la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] de toutes leurs demandes ;

– a débouté Monsieur [I] [I] [S], Monsieur [P] [L] et Monsieur [M] [V] de leur demande au titre du préjudice moral ;

– a condamné la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] à payer chacun à Monsieur [I] [S], Monsieur [P] [L], Monsieur [M] [V] et à la société Caravelle la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– a ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;

– a condamné solidairement la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] aux entiers dépens de l’instance ;

– a liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 180,14 € TTC dont 30,02 € de TVA.

S’agissant du redressement URSSAF il a déclaré forclose la demande des demandeurs au motif que la responsabilité des garants ne pouvait être engagée faute pour les cessionnaires d’avoir informé les garants dans le délai de 15 jours du courrier de l’URSSAF reçu le 7 décembre 2018.

S’agissant des inexactitudes comptables le tribunal a retenu que les inexactitudes susceptibles de mettre en oeuvre la garantie d’actif et de passif auraient du être portées à la connaissance des garants au fur et à mesure des travaux comptables et sans attendre la date limite de la déclaration fiscale et que le courrier adressé aux garants l’a été au delà des 15 jours de la révélation de l’existence d’éléments irréguliers affectant les comptes arrêtés au 31 décembre 2016.

S’agissant de la perte d’adhérents le tribunal a jugé qu’entre 2016 et le 31 mai 2017 date de la situation arrêté, le chiffre d’affaire de Forum Santé a diminué proportionnellement à la diminution du nombre d’adhérents de près de 40% en 5 mois mais que les cessionnaires ne démontrent pas que la perte entre le 30 juin et le 14 septembre 2017 de neuf affiliés supplémentaires sur soixante-six, soit 14% en deux mois et demi, est de telle nature qu’ils auraient contracté de manière substantiellement différente au regard des autres éléments sur la situation de Forum Santé s’agissant des pertes cumulées au 31 mai 2017 de 1.184.051 euros, du fait que la société Caravelle a abandonné son compte courant à hauteur de 250.000 euros, de la valeur de la société qui a été évaluée sur la base de 100% des titres à 200.000 euros pour un capital de 608400 euros. Le tribunal a donc rejeté le fait que les nouvelles résiliations auraient vicié leur consentement.

La SAS Univers Pharmacie, la SA Forum Santé et Monsieur [W] ont formé appel par déclaration d’appel en date du 23.08.2021.

Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 27.09.2022, la SAS Univers Pharmacie, la SA Forum Santé et Monsieur [W] demandent à la cour de:

Vu les articles 1103, 1130, 1137, 1178, 1221, 1240, 1603 et suivants, 1190 du Code civil dans leur rédaction issue de la réforme par l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016,

Vu les déclarations des cédants, vu la garantie d’actif et de passif,

Vu les pièces, notamment l’acte de cession du 14 septembre 2017 et la garantie d’actif et de passif y annexée,

INFIRMER EN SON ENTIER le jugement du Tribunal de commerce de Bobigny rendu le 29 juin 2021,

ET STATUER A NOUVEAU COMME SUIT:

1/ IN LIMINE LITIS, SUR L’INTERPRETATION DU DISPOSITIF AMBIGU DU JUGEMENT DONT APPEL DU CHEF DE LA CONDAMNATION DES DEMANDEURS A UNE INDEMNITE AU TITRE DE L’ARTICLE 700 CPC ET LE CAS ECHEANT SUR LA SANCTION D’UN ULTRA PETITA COMMIS PAR LE PREMIER JUGE :

JUGER, par interprétation du dispositif du jugement entrepris rendu nécessaire par son ambiguïté, qu’il se comprend comme ayant condamné chacun des trois demandeurs à payer à l’ensemble des quatre défendeurs une indemnité de 6.000 euros, ce qui, après affectation, conduit chacun des quatre défendeurs à être indemnisé par une somme de 4.500 euros et conduit les demandeurs à devoir une indemnité globale cumulée de 18.000 euros ;

Le cas échéant, si au terme de son interprétation la Cour estimait que le dispositif se comprend comme condamnant chacun des demandeurs à devoir payer 6.000 euros d’articIe 700 CPC à chacun des défendeurs, RETRANCHER L’EXCES COMMIS PAR ULTRA PETITA DU PREMIER JUGE, Messieurs [V], [S] et [L] ayant demandé une indemnité pour frais irrépétibles fixée à 15.000 euros ;

2/ AVANT-DIRE DROIT :

CONSTATER que, par attestation du 20 juin 2018 et 5 août 2019, Madame [X] [A], ès qualités d’expert-comptable de la société Forum Santé, atteste avoir relevé un ensemble d’irréguIarités, d’un montant de 614.000 euros, affectant les comptes de Forum Santé clos au 31 décembre 2016 ; irrégularités justifiées par de nombreuses pièces comptables et relevées par le commissaire aux comptes de la société dans son rapport du 25 juillet 2018;

ORDONNER une expertise judiciaire et DESIGNER tout expert-comptable de son choix si la Cour ne s’estimait pas suffisamment éclairée par les deux attestations de I’expert-comptable et le rapport du commissaire aux comptes ;

3/ AU FOND :

3.1 SUR LES MANQUEMENTS COMMIS PAR LES CEDANTS CONSTITUTIFS D’UNE VIOLATION DE LA GARANTIE D’EXACTITUDE, DE LA GARANTIE D’ACTIF ET DE PASSIF ET D’UN DOL :

JUGER que, par acte du 14 septembre 2017, il a été procédé au prix global de 178.355,90 € à la cession de 54.261 actions représentant 89,19 % du capital social de la société Forum Santé qui a été régularisée entre, d’une part, la société Caravelle et M. [L], M. [S] et M. [V], cédants et, d’autre part, la société Univers Pharmacie et M. [Z] [W], cessionnaires ; cession intervenue moyennant deux garanties distinctes et autonomes, une garantie des déclarations dite « garantie d’exactitude ” et une garantie d’actif et de passif ; que la SAS Univers Pharmacie a également payé 250.000 € à la SA Caravelle et 152.555,39 € à Monsieur [I] [L], au titre de leur compte-courant d’associé ;

JUGER que I’URSSAF a, par lettre du 7.12.2018, notifié à la société Forum Santé un rappel de cotisations sociales d’un montant de 13.573 euros pour irrégularités au titre des exercices 2016 et 2017 ;

CONDAMNER les cédants à répondre de la révélation d’un passif ignoré et d’un actif surévalué – d’un montant de 614.000 euros augmenté d’une dette URSSAF de 13.573 euros – constitutifs d’une violation cumulative de leur garantie d’exactitude, par manquement à l’obligation de délivrance conforme du vendeur, de la garantie d’actif et de passif et d’une réticence dolosive ;

CONDAMNER en outre les cédants à répondre de man’uvres dolosives quant au nombre d’affiIiés au 30 juin 2017, qu’ils ont déclaré être de 66 – selon liste figurant en annexe 6 de l’acte de cession – après avoir déclaré qu’aucune dénonciation de contrat d’affiIiation n’était survenue au 14 septembre 2017, alors que des lettres de rupture existaient, de sorte que le nombre réel de membres du réseau était alors de 53 et non de 66 au jour de la cession; subsidiairement les sanctionner de ce chef pour manquement à leur obligation d’information ;

3.2 SUR LA REPARATION DES PREJUDICES INFLIGES :

CONDAMNER in solidum la SA Caravelle, M. [L], M. [S] et M. [V], compte tenu du caractère collectif des manquements qu’ils ont commis au préjudice des demandeurs, à REPARER les préjudices infligés comme suit:

– LES CONDAMNER in solidum à payer à la société Univers Pharmacie la somme de 172.647 euros au titre des inexactitudes du bilan de référence de la cession et d’une dette révélée à I’égard de l’URSSAF ;

– LES CONDAMNER in solidum à payer à la Société Univers Pharmacie la somme de 247.500 € en réparation du préjudice inhérent au dol afférent au paiement du compte-courant d’associé de la société Caravelle et 63151.029,83 € en réparation du préjudice inhérent au dol afférent au paiement du compte-courant d’associé de Monsieur [I] [L] ;

– LES CONDAMNER in solidum du chef de dol sur le nombre d’affiIiés ayant engendré la perte d’une chance d’acquérir à de meilleures conditions et de percevoir des dividendes sur les résultats qu’aurait réalisés Forum Santé par l`affiIiation de 13 pharmacies que les cédants ont faussement présenté comme membres du réseau, à payer :

– à la société Forum Santé la somme à parfaire de 180.773 euros en réparation du préjudice économique, dont 146.280 euros pour le gain manqué au titre des redevances d’affiIiation et 34.493 euros au titre des prestations de référencement des laboratoires BIOGARAN et SANDOZ, causé par le dol sur le nombre d’affiIiés ;

– à la société Univers Pharmacie la somme de 20.000 euros ;

– à M. [Z] [W] et la somme de 5.000 euros ;

– LES CONDAMNER in solidum à payer à Monsieur [Z] [W] et à la société Univers Pharmacie une indemnité de 10.000 euros chacun en réparation du préjudice moral infligé ;

4/ SUR LES DEPENS ET FRAIS IRREPETIBLES :

CONDAMNER in solidum les intimés à :

– Restituer les frais irrépétibles que les appelants leur ont payés en exécution du jugement infirmé,

– Supporter les entiers dépens de première instance et d’appel;

– Payer à la société Univers Pharmacie, la SA Forum Santé et à Monsieur [Z] [W] la somme de 15.000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Si par impossible la Cour devait confirmer le jugement attaqué, REDUIRE très sensiblement les frais irrépétibles alloués en première instance.

Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 19.07.2022 messieurs [I] [I] [S], Monsieur [I] [D] [L] et Monsieur [R] [E] [V] demandent à la cour de:

Vu l’article 1103 du code civil,

Vu la jurisprudence,

DECLARER MM. [I] [I] [S], [I] [D] [L] et [R] [E] [V] recevables et bien fondés en tous leurs moyens, fins et prétentions ;

CONFIRMER le Jugement du 29 juin 2021 en ce qu’iI a:

1. débouté Univers Pharmacie, M. [W] et Forum Santé de toutes leurs demandes ;

2. condamné Univers Pharmacie, M. [W] et Forum Santé à payer une indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

REFORMER le Jugement du 29 juin 2021 en ce qu’iI a:

1. débouté MM. [I] [I] [S], [I] [D] [L] et [R] [E] [V] de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive et préjudice moral

STATUANT A NOUVEAU :

1. Sur I’article 700 du Code de procédure civile dû dans le cadre de la premiére instance:

DIRE que la condamnation par le Tribunal de commerce de Bobigny au titre de l’article 700 du Code de procédure civile est comprise comme allouant à:

– Monsieur [S] (outre les dépens) 6.000 euros de la société UNIVERS PHARMARCIE, 6.000 euros de la société Forum Santé et 6.000 euros de Monsieur [W].

– Monsieur [L] (outre les dépens) 6.000 euros de la société UNIVERS PHARMARCIE, 6.000 euros de la société Forum Santé et 6.000 euros de Monsieur [W].

– Enfin, Monsieur [V] (outre les dépens) 6.000 euros de la société UNIVERS PHARMARCIE, 6.000 euros de la société Forum Santé et 6.000 euros de Monsieur [W],

2. CONDAMNER in solidum à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et préjudice moral Univers Pharmacie, Forum Santé et et M. [W] à payer chacun, à:

-Monsieur [S], la somme de 6.666,66 euros (soit une somme globale de

20 000 euros) ;

– Monsieur [V], la somme de 6.666,66 euros (soit une somme globale de

20 000 euros) ;

et Monsieur [L], la somme de 6.666.66 euros (soit une somme globale de 20 000 euros) ;

3. REJETER Univers Pharmacie, M. [W] et Forum Santé en tous leurs moyens, fins et prétentions

4. CONDAMNER in solidum Univers Pharmacie, M. [W] et Forum Santé à payer chacun 15.000 euros à chacun de MM. [I] [I] [S], [I] [D] [L] et [R] [E] [V] sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile (pour la procédure d’appel)

5. CONDAMNER Univers Pharmacie, M. [W] et Forum Santé in solidum, aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 12.09.2022 la société Caravelle demande à la cour de:

Vu les articles 1103, 1 13 7, 1240 et suivants du code civil,

Vu les pièces annexées aux présentes,

I- Sur les demandes relatives à la garantie contractuelle :

A titre principal,

– REFORMER le jugement du 29 juin 2021 du Tribunal de commerce de Bobigny mais seulement en ce qu’il a déclaré recevables les demandes formées par la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W]

Statuant à nouveau de ce chef,

– JUGER irrecevables la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] en leurs demandes

A titre subsidiaire,

– JUGER les Appelants mal fondés en leur appel et CONFIRMER le jugement du 29 juin 2021 du Tribunal de commerce de Bobigny en ce qu’il les a déboutés de l’intégralité de leurs demandes

II- Sur les demandes relatives au dol et au manquement à l’obligation d’information :

– JUGER les Appelants mal fondés en leur appel et CONFIRMER le jugement du 29 juin 2021 du Tribunal de commerce de Bobigny en ce qu’il les a déboutés de l’intégralité de leurs demandes

III- Sur les demandes de condamnation in solidum

A titre subsidiaire, pour le cas où la Cour ferait droit à tout ou partie des demandes,

– DEBOUTER les Appelants de leurs demandes de condamnation in solidum des intimés;

– JUGER la société Caravelle recevable et fondée à demander à la Cour de faire application de la clé de répartition des responsabilités prévue à l’article 3.4.2.3 ‘Prise en charge par chacun des Garants’ du contrat de cession du 3 août 2017

En toute hypothèse,

JUGER la société Caravelle recevable et fondée à se voir garantir par Monsieur [I] [I] [S], Monsieur [I] [D] [L] et par Monsieur [R] [E] [V], selon la clé de répartition des responsabilités prévue à l’article 3.4.2.3 ‘Prise en charge par chacun des Garants’du contrat de cession du 3 août 2017, de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre par l’arrêt à intervenir,

IV- Sur les demandes relatives à l’article 700 :

– au titre de la procédure de première instance :

DEBOUTER les Appelants de leur demande d’interprétation du jugement du 29 juin 2021 du Tribunal de commerce de Bobigny et subsidiairement en retranchement d’ultra petita JUGER que le jugement du 29 juin 2021 du Tribunal de commerce de Bobigny doit s’interpréter comme ayant condamné la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] à payer, chacun, à la société Caravelle seule et non solidairement aux autres défendeurs, la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– au titre de la présente procédure :

CONDAMNER la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] à verser, chacun, à la société Caravelle la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNER les Appelants aux dépens de première instance et d’appel, avec distraction pour ceux le concemant au profit de Maître François Teytaud par application de l’article 699 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les constats et la demande d’expertise

Il n’appartient pas à la Cour de procéder à des constats et en conséquence la demande avant dire droit articulée à ce titre sera rejetée.

S’agissant de la demande d’expertise judiciaire de désignation d’un expert-comptable il sera vu infra le bien fondé éventuel de recourir à une expertise lorsque seront examinées les différentes demandes des appelants au titre de la mobilisation des garanties ou de l’action pour dol ou défaut d’information.

Sur la garantie d’exactitude

Les appelants exposent que les cédants se sont engagés à une garantie d’exactitude des déclarations énoncées par eux dans le contrat de cession s’agissant de la clause 3.4.1.

Ils exposent que lors de l’arrêté des comptes de l’exercice clos au 31.10.2017, achevé le 14 février 2018 le nouvel expert-comptable de Forum Santé – la société Expertise Alsace- révélait aux concluants les irrégularités affectant les comptes arrêtés au 31.12.2016, que Mme [X] [A], expert-comptable de la société Expertise Alsace, atteste ainsi que ses travaux ont révélé une inexactitude du bilan à hauteur de 614.000 €, comme suit :

– Surévaluation des Factures à établir au 31/12/2016 aux laboratoires ;

– Reversements aux pharmaciens effectués en 2017 au titre de 2016, et non intégrés dans les comptes du 31/12/2016 ;

– Stock n’ayant aucune valeur et valorisé au 31/12/2016 ;

– Acompte versé à l’ancien propriétaire, perdu et non provisionné au 31/12/2015 ;

– Avoir de l’ancien propriétaire de 2015 comptabilisé à recevoir en 2016 non reçu, donc perdu;

– Crédit Impôt intéressement 2009 inscrit à recevoir au 31/12/2016 mais perdu ;

– Clients 2016 non réglés à ce jour, donc douteux ;

– Provision insuffisante sur clients douteux au 31/12/2016 ;

– Honoraires du Cabinet d’expertise FCN ;

– Honoraires Commissaire Aux comptes.

Ils soulignent que ces inexactitudes ont amené la réintégration de 614.000 euros au titre du passif de la société et que cette réintégration a été admise par le commissaire aux comptes.

Ils indiquent avoir mis en oeuvre la garantie d’exactitude par courrier du 23.02.2018 accompagné de nombreuses pièces.

Ilss contestent que la mise en oeuvre de cette garantie soit enfermée dans le délai prévu dans le contrat (de 15 jours) par l’article 3.4.2.2 qui s’applique à la seule garantie d’actif et de passif, mais soutiennent que cette garantie est la mise en oeuvre de l’obligation de délivrance du vendeur et que la prescription de l’action en responsabilité contractuelle pour inexécution de l’obligation de délivrance conforme relève du droit commun soit 5 ans.

Subsidiairement ils soutiennent que si la cour considère qu’un délai de 15 jours est applicable la forclusion n’est pas encourue, que cette mise en oeuvre a été faite par courrier du 23.02.2018 dans la mesure où ils ont eu connaissance des inexactitudes que le 14.02.2018 à la date du dépôt du bilan 2017 et qu’aucun élément produit par les cédants, sur lesquels repose la charge de la preuve, n’établit qu’ils ont eu connaissance des éléments litigieux avant le 14.02.2018.

Ils exposent sur le fond que les cédants engagent leur responsablité sans pouvoir se prévaloir de leur méconnaissance des faits en cause, que par ailleurs la compétence de Monsieur [W] ou la réalisation d’un audit ne les exonèrent pas de leur responsabilité à ce titre, que ni l’existence d’un audit avant acquisition ni l’absence démontrée d’un dol ne sont de nature à faire obstacle à la mise en ‘uvre de la responsabilité contractuelle du garant/déclarant en cas d’inexactitude.

Messieurs [S], [L] et [V] exposent que comme pour la garantie d’actif et de passif la garantie d’exactitude est soumise à un délai de 15 jours au regard de la rédaction du contrat;

Ils font valoir que l’arrêté comptable du 31.10.2017 (clôture de l’exercice 2017) aurait du faire apparaitre des irrégularités sur les comptes sociaux de Forum Santé au 31.12.2016 et que les comptes sociaux ayant révélé les soit-disants irrégularités ont été établis au 31.10.2017 alors que la garantie n’a été mise en oeuvre que le 23.02.2018 soit au delà du délai de 15 jours.

Ils contestent le fait que ce soit la télétransmission de la liasse fiscale qui constitue la date de découverte des irrégularités alléguées dans la mesure où il s’agit d’une formalité administrative qui ne peut constituer la date à laquelle les cessionnaires ont pris connaissance des irrégularités, et donc qu’il convient de retenir la date de clôture des comptes.

Ils contestent le fait que le régime légal de l’obligation de délivrance conforme du vendeur de biens corporels, qui se prescrit par 5 ans, s’applique à une cession de droits sociaux, et soutiennent qu’aucun fondement ne permet d’assimiler les garanties de déclaration souscrite dans le cadre de conventions de garantie d’actif et de passif à l’obligation légale de délivrance conforme.

Ils exposent que les appelants n’ont nullement établi en quoi les déclarations faites par eux étaient inexactes et exposent que l’attestation produite est irrecevable comme n’étant pas conforme aux exigences de l’article 2020 du code de procédure civile et viole les principes d’indépendance en ce qu’elle est établie par l’expert comptable de la société Forum Santé, la société Expertise Alsace, dont la directrice associé est Mme [C] [W] épouse de Monsieur [W] et ancienne directrice générale de la société Univers Pharmacie laquelle a participé à la mission d’audit d’acquisition.

La société Caravelle expose que lorsque le contrat prévoit expressément que la sanction de la violation de l’obligation d’information emporte déchéance de la garantie en cas de notification tardive, le juge doit exécuter le contrat (il en a même l’obligation), qu’il ne peut faire échec à la déchéance conventionnelle et doit déclarer irrecevable le cessionnaire en sa demande, la clause

de déchéance s’analysant en une fin de non-recevoir d’origine conventionnelle pouvant être soulevée en tout état de cause.

Elle fait valoir que les stipulations de l’article 3.4.2.4 de la convention prévoient un délai de 15 jours pour informer le cédant de tout évenement susceptible d’entrainer la mise en oeuvre de la garantie et une sanction spécifique en cas de non-respect de cette obligation s’agissant de la déchéance de la garantie.

Elle soutient que ces stipulations s’appliquent à la garantie d’exactitude des déclarations de l’article 3.4.1.

Elle expose que les appelants agissent sur le fondement de l’action en responsabilité contractuelle pour déclarations inexactes et ne peuvent donc en même temps se prévaloir d’une part du contrat et de ses dispositions et d’autre part s’en affranchir s’agissant de la prescription de l’action.

En second lieu elle fait valoir que l’application du délai de droit commun ne s’entend qu’en l’absence de dispositions particulières.

Elle fait valoir que les modalités contractuelles de mise en oeuvre de la garantie n’ont pas été respectées dans la mesure où Univers Pharmacie n’a pas respecté le délai convenu de 15 jours, qu’en effet elle a établi ses comptes 2017 en collaboration avec son comptable bien avant la date du 14.02.2018 de telle sorte qu’elle a eu connaissance des éléments dont elle se prétend victime bien plus de 15 jours avant cette date.

Elle expose enfin que les faits allégués par les cessionnaires ne sont pas suffisamment démontrés par de simples affirmations de son expert comptable, que le commissaire aux compte n’indique à aucun moment de son rapport que les régularisations opérées en 2017 sont le fait d’irrégularités ou de dissimulations.

Sur ce

Il n’est pas contesté que la garantie de déclaration est une garantie autonome de la garantie d’actif et de passif.

Les appelants soutiennent que cette garantie doit s’analyser comme une garantie de délivrance conforme relevant des dispositions des articles 1604 et suivants et du régime de prescription quinquennale qui s’y applique.

L’article 1604 du code civil dispose que la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l’acheteur.

Il ressort de la jurisprudence au visa de cet article que la notion de conformité est inhérente à l’obligation de délivrance et que dès lors le vendeur est tenu de délivrer un bien conforme à la stipulation de l’acte de vente.

En l’espèce la chose objet de la vente intervenue entre les parties, à savoir les parts sociales de la société Forum Santé, a fait l’objet d’une délivrance puisque l’acte de cession a été signée et Monsieur [W] et la société Univers Pharmacie sont devenus propriétaires des parts sociales.

Le fait que des déclarations concernant certaines données financières effectuées dans le cadre de la vente ne seraient pas exactes ne relèvent pas de la délivrance de la chose objet du contrat qui consiste à remettre à la disposition de l’acheteur la chose vendue dans le délai convenu, la conformité s’entendant de la chose prévue par le contrat. En l’espèce la chose vendue est les parts sociales et ce sont bien celles ci qui ont été transmises par la cession aux acquéreurs.

Les arrêts produits par les appelants au soutien de leur moyen, ne sont pas fondés sur les dispositions de l’article 1604 mais uniquement sur les dispositions de l’ancien article 1134, et ne permettent donc pas de retenir une extension jurisprudentielle du régime légal de la délivrance conforme à la garantie de déclaration contractuelle.

Il y a donc lieu d’écarter l’application des articles 1604 et suivants du code civil et des conséquences qui en découlent, en particulier s’agissant du régime de prescription de l’action en mobilisation de la garantie contractée.

Le contrat comporte un paragraphe 3.4 intitulé ‘Garantie d’actif et de passif’ subdivisé en deux sous paragraphes:

3.4.1 garantie des déclarations des cédants

3.4.2 garantie d’actif et de passif.

Seul ce paragraphe 3.4.2 comprend des sous paragraphes relatifs à:

– l’étendue de la garantie: 3.4.2.1

– les conditions de la garantie-mode et calcul des versements: 3.4.2.2

– la prise en charge par chacun des garants: 3.4.2.3

– l’information et la participation des garants: 3.4.2.4

– les modalités de paiement: 3.4.2.5

– la durée des garanties: 3.4.2.6

– la franchise et le plafond: 3.4.2.7

– les bénéficiaires des garanties-transmission: 3.4.2.8

– la garantie de paiement: 3.4.2.9

La garantie des déclarations des cédants stipule: Les cédants, pour les besoins de la présente clause, s’engagent à indemniser, selon les modalités et dans les proportions indiquées ci-après, le Bénéficiaire, des conséquences dommageables susceptibles de résulter pour celui-ci d’une quelconque inexactitude ou mission relative à l’une ou plusieurs des déclarations y énoncées étant précisé que les conditions financières du présent protocole ont été arrêtées en fonction desdites obligations, déclarations et garanties.

Les garants ne pourront se soustraire aux obligations mises à leur charge par les présentes en invoquant leur méconnaissance des faits en cause.

La clause prévoyant la garantie de déclaration ne décline aucune modalité concernant sa mise en oeuvre.

Cependant le terme utilisé selon les modalités et dans les proportions indiquées ci-après renvoie aux modalités de mise en oeuvre prévues au titre de la mobilisation de la garantie d’actif et de passif qui suivent immédiatement.

Le fait que dans divers sous-paragraphes du point 3.4.2, il soit fait référence aux garanties (3.4.2.6: durée des garanties, 3.4.2.8: les bénéficiaires des garanties) et non pas à la garantie (d’actif et de passif) conforte cette analyse.

Il s’ensuit qu’il est fait application pour la mise en oeuvre de la garantie de déclarations, des dispositions prévues par l’article 3.4.2.4 qui prévoient que:

La mise en oeuvre de la Garantie est subordonnée à l’envoi aux Garants par le Bénéficiaire d’une réclamation justifiée par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les quinze jours impérativement qui suivent la révélation de l’existence d’un événement susceptible de provoquer l’application de la présente garantie.

(…)

Il est entendu que le défaut de respect par le Bénéficiaire des dispositions ci-dessus en matière d’information et de participation des Garants entrainera de plein droit l’impossibilité absolue pour le Bénéficiaire de faire valoir ses droits au titre des présentes.

Il y a donc lieu de vérifier que la mise en oeuvre de la garantie a été effectuée dans les 15 jours qui ont suivi la révélation de l’existence de l’événement susceptible de provoquer sa mise en oeuvre, ce que les intimés contestent.

Il ressort des pièces versées aux débats que la mise en oeuvre de la garantie a été effectuée par courrier datée du 23.02.2018.

Les appelants exposent qu’ils n’ont découvert que le 14.02.2018, lors du dépôt de la liasse fiscale de l’exercice clos le 31.10.2017, les inexactitudes justifiant la mobilisation de la garantie consentie.

Cependant la date du 14.02.2018 ne peut correspondre à la découverte des inexactitudes puisqu’il s’agit en réalité de la date de dépôt de la liasse fiscale, qui constitue la conséquence fiscale de l’établissement des comptes de l’exercice. Cet établissement est donc préalable au dépôt.

Les comptes étant clôturés au 31.10.2017, les travaux comptables ont donc été diligentés à compter de cette date par l’expert comptable.

Comme l’a retenu avec justesse le tribunal de commerce la société Expertis Alsace dans le cadre de sa mission de tenue de la comptabilité et d’établissement des comptes annuels de la société Forum Santé était en mesure dès le mois d’octobre 2017, au fur et à mesure de ses travaux conformément aux dispositions de l’article L 123-12 du code de commerce, d’identifier les inexactitudes susceptibles de faire mettre en oeuve la garantie d’actif et de passif sans attendre le dépôt de la liasse fiscale. Et ce d’autant plus que c’est la même société d’expertise comptable qui a procédé à l’audit comptable, social et financier de la société en juillet 2017, et qui a donc eu accès à l’intégralité des documents comptables et financiers de la société. Ce professionnel du chiffre n’a pas pu que se rendre compte, alors, des inexactitudes soulevées le 14.02.2018 par les cessionnaires relevant pour la plupart de l’exercice clos le 31.10.2016.

De telle sorte qu’il convient de retenir que les cessionnaires ont été informés par leur expert comptable des inexactitudes à une date bien antérieure au délai de 15 jours prévu entre la découverte de l’événement et la mobilisation de la garantie.

La demande de mobilisation de la garantie se heurte donc à une fin de non recevoir tirée de sa mobilisation tardive.

Il convient donc de confirmer la décision.

Sur la garantie d’actif et de passif

Les appelantes exposent que les cédants se sont engagés à une garantie d’actif et de passif s’agissant de la clause 3.4.2, que cette garantie a été mise en oeuvre lorsqu’elles ont eu connaissance des inexactitudes lors de la communication du bilan 2017 par leur expert comptable le 14.02.2018, qu’en conséquence et contrairement à ce que soutient le jugement de première instance, leur demande n’est pas forclose.

Messieurs [S], [L] et [V] exposent que la garantie d’actif et de passif est soumise à des conditions de délai pour sa mise en oeuvre qui sont strictes s’agissant d’une réclamation justifiée par lettre recommandée avec accusé de réception dans les 15 jours suivant la révélation de l’existence d’un évenement susceptible de provoquer l’application de la garantie d’actif et de passif et qu’il est expressement prévu que la sanction de ce défaut de respect des dispositions entraine de plein droit l’impossibilité pour le bénéficiaire de faire valoir ses droits.

Ils exposent que seul le passif ayant une cause antérieure au 31.12.2016 est couvert par la garantie d’actif et de passif.

Ils soutiennent que les prétendues irrégularités du bilan étaient accessibles dès le mois de juillet 2017 et au plus tard lors de l’arrêté des comptes le 31.10.2017 étant précisé que l’expert comptable qui a établi les comptes est le même que celui qui a réalisé l’audit et en concluent que la mise en oeuvre de la garantie le 23.02.2018 est tardive.

La société Caravelle fait valoir que les stipulations de l’article 3.4.2.4 de la convention prévoient un délai de 15 jours pour informer le cédant de tout évenement susceptible d’entrainer la mise en oeuvre de la garantie et une sanction spécifique en cas de non-respect de cette obligation s’agissant de la déchéance de la garantie.

Elle fait valoir que les modalités contractuelles de mise en oeuvre de la garantie n’ont pas été respectées dans la mesure où Univers Pharmacie n’a pas respecté le délai convenu de 15 jours, qu’en effet elle a établi ses comptes 2017 en collaboration avec son comptable bien avant la date du 14.02.2018 de telle sorte qu’elle a eu connaissance des éléments dont elle se prétend victime bien plus de 15 jours avant cette date.

Sur ce

Il n’est pas contestable, ni contesté que les stipulations de l’article 3.4.2.4 de la convention prévoient un délai de 15 jours pour informer le cédant de tout évenement susceptible d’entrainer la mise en oeuvre de la garantie et une sanction spécifique en cas de non-respect de cette obligation s’agissant de la déchéance de la garantie.

Ces dispositions s’appliquent à la garantie d’actif et de passif que les appelants souhaitent voir mobiliser en sus de la garantie d’exactitude des déclarations, au titre des inexactitudes dans les comptes arrêtés au 31.10.2016 de la société acquise.

La garantie d’actif et de passif a été mobilisée par courrier du 23.02.2018.

Comme il a été indiqué supra au titre de la mobilisation de la garantie de déclaration, les appelants ne peuvent valablement soutenir qu’ils ont découvert des inexactitudes dans les comptes arrêtés au 31.10.2017 lorsqu’ils ont déposé la liasse fiscale 2017 le 14.02.2018 qui est une date choisie par eux puisque correspondant à une démarche administrative.

Les comptes ont été arrêtés au 31.10.2017 date de clôture de l’exercice, et les travaux comptables ont été diligentés à compter de cette date. Les appelants ont donc été informés avant la date du 14.02.2018 des inexactitudes relevées par l’expert comptable qui en outre ayant réalisé l’audit connaissait déjà celles qu’elle attribue à l’exercice clos le 31.10.2016 , de telle sorte qu’ils n’ont pas mobilisé la garantie d’actif et de passif dans les délais contractuels prévus.

Les dispositions de l’article 3.4.2.4 n’ayant pas été respectée, les cessionnaires sont déchus de la garantie d’actif et de passif s’agissant des inexactitudes des comptes arrêtés au 31.10.2016.

Il convient donc de confirmer la décision.

Sur le rappel des cotisations sociales

Les appelantes exposent que la société Forum Santé a fait l’objet d’un redressement URSSAF pour un montant de 13.753 euros.

Elles exposent que les cédants sont tenus par la garantie d’exactitude sans pouvoir opposer que la notification faite le 3.01.2019 pour une réclamation datant du 7.1.2018 serait tardive, puisqu’ils ne pouvaient ignorer les irrégularités relevés par l’URSSAF, qu’ils sont tenus dans la mesure où les irrégularités antérieures au 31.12.2016 relèvent bien du champs de la garantie d’exactitude et de la garantie d’actif et de passif.

Messieurs [S], [L] et [V] exposent que la mise en oeuvre de la la garantie d’actif et de passif est tardive.

Sur le fond ils exposent que le contrôle de l’URSSAF porte sur les années 2016 et 2017 alors que la garantie d’actif et de passif ne porte que sur le passif ayant une cause ou une origine antérieure au 31.12.2016, alors que les appelants ne distinguent pas les chefs de redressement en fonction des périodes.

La société Caravelle expose que le non-respect de l’information due aux Cédants emporte déchéance des garanties. Elle indique ainsi que par lettre du 3 janvier 2019, Univers Pharmacie a notifié à Caravelle la réclamation URSSAF du 7 décembre 2018. Le délai contractuel d’information de quinze (15) jours à compter de toute réclamation des organismes sociaux n’a donc pas été respecté. Elle expose qu’elle n’a jamais été informée de la vérification URSSAF (uniquement de la réclamation), la privant ainsi de la possibilité offerte par la Convention de Cession de désigner, dès le début de toute opération de vérification, un mandataire chargé de suivre la discussion avec 1’URSSAF, qu’enfin la demande de garantie est infondée dans la mesure où la période vérifiée par l’URSSAF vise des événements intervenus après le 31 décembre 2016 qui n ‘entrent donc pas dans le champ contractuel de la garantie.

Sur ce

Les stipulations de l’article 3.4.2.4 de la convention prévoient un délai de 15 jours pour informer le cédant de tout évenement susceptible d’entrainer la mise en oeuvre de la garantie et une sanction spécifique en cas de non-respect de cette obligation s’agissant de la déchéance de la garantie.

Ces dispositions s’appliquent à la garantie d’actif et de passif que les appelants souhaitent voir mobiliser au titre du redressement URSSAF.

En l’espèce la vérification effectuée par l’URSSAF a donné lieu à une réclamation par courrier du 7.12.2018. Or ce n’est que par courrier du 3.01.2019 que la société Univers Pharmacie a mobilisé la garantie d’actif et de passif auprès des cédants, soit dans un délai de plus de 15 jours.

Il s’ensuit que le cessionnaire est déchu de la garantie d’actif et de passif s’agissant du redressement URSSAF.

Sur le dol

Les appelants exposent que les cédants ont été doublement dolosifs: du chef de la situation financière réelle de la société au 31.12.2016 et pour avoir opéré des déclarations mensongères quant au nombre d’Affiliés du réseau lors de la cession, alors qu’ils constituent l’élément essentiel du « fonds de commerce ” d’une société Affiliante d’un réseau.

Ils indiquent qu’ils ne demandent pas l’annulation de la cession mais des dommages et intérêts en rappelant que s’agissant d’une action indemnitaire fondée sur le dol la clause limitative d’indemnisation contenue dans le contrat au titre des garanties ne peut leur être opposée.

S’agissant de la situation financière de la société ils exposent que le bilan présenté fait état d’un résultat net bénéficiaire de 7.447 euros alors qu’après réintégration de la somme de 614.000 euros et de la dette sociale de 13.573 euros le résultat est déficitaire à hauteur de 620.126 euros, qu’à ce niveau d’inexactitude le dol est certain et que si ils avaient connu l’ampleur du déficit et la réalité de la situation financière de la société ils n’auraient pas acquis celle ci au prix versé.

S’agissant du nombre d’affiliés au réseau Forum Santé au jour de la cession ils exposent que les cédants ont caché qu’une partie substantielle des membres avaient résilié leur contrat, ce qui affectait la consistance même du réseau, élément essentiel de tout réseau de distribution et donc déterminant, qu’en effet selon la liste figurant en annexe 6 de l’acte de cession le nombre d’affiliés était de 66 alors que le nombre réel était de 53, que dans la promesse de vente du 3 août 2017 il est mentionné que les affiliés sont au nombre de 66 et qu’aucune demande de résiliation de la part d’adhérents figurant sur cette liste n’a été reçue à la date de réalisation des présentes, ce qui est un mensonge puisque de nombreuses lettres de résiliation avaient été adressées à la société Forum Santé entre le 23.02.2017 et le 24.07.2017 et ensuite entre le 3.08 et le 14.09.2017, que les cédants ont ainsi caché 12 résiliations et ont inventé un adhérent, ce qui porte la fausseté à 13 membres sur un total de 66 soit 19,69% du réseau, ce qui est très important.

Messieurs [S], [L] et [V] exposent que les cessionnaires ont été lors de la cession accompagnés par un avocat et ont diligenté un audit fiscal, social et comptable par leur expert comptable qui a ensuite établi l’attestation qui sert de fondement àl’action pour dol.

Ils contestent tout dol en faisant valoir qu’il n’existe aucun élément objectif, précis et matériellement vérifiable permettant de caractériser a minima un faisceau d’indices caractérisant un dol, et aucune manoeuvre dolosive n’est caractérisée.

S’agissant des affiliés ils exposent que les contrats d’affiliés ont été transmis antérieurement à la cession, soit le 23 juin 2017, que la liste des contrats des affiliés quant à elle était arrêtée à la date du 16 juin 2017, qu’il y était expressément précisé la date de résiliation pour la totalité des affiliés visés par les appelants comme ceux dont les résiliations n’auraient pas été portés à la connaissance de Univers Pharmacie, qu’il est établi ainsi l’absence d’intention de leur part de dissimuler les résiliations intervenues, au contraire. Ils indiquent que certaines annonces de résiliation sont postérieures au 30 juin 2017 et que les affiliés qui ont résilié entre le 30 juin et le 14 septembre ne pouvaient figurer sur une liste arrêtée au 16.06.2017, que les appelants ne peuvent soutenir que la liste des affiliés était déterminante de leur consentement puisqu’ils n’ont pas prévu contractuellement la mise à jour de la liste durant la période intermédiaire.

Ils expliquent ainsi qu’en réalité, les annonces de résiliation sont une chose courante dans un réseau et ne présagent pas nécessairement d’une sortie du réseau, ce qu’Univers Pharmacie sait pertinemment, en ce qu’elle gère également un réseau d’officines de pharmacie, que d’ailleurs, une demande de résiliation s’apparente souvent à une technique de renégociation de son contrat pour l’affilié voire une bascule vers un changement de ‘ pack’ ou encore résulte de la cession de la pharmacie et bien souvent le repreneur renégocie un nouveau contrat, qu’Univers Pharmacie ne pouvait donc croire à la constance du périmètre du réseau de Forum Santé résultant d’un document intitulé Liste des affiliés au 30 juin 2017.

Ils soulignent que les demandes en première instance d’Univers Pharmacie au titre de la perte de chiffre d’affaire représentaient 3,5% de son CA annuel et qu’il n’est donc pas sérieux de soutenir que cela était de nature à emporter son consentement.

Ils font valoir en outre qu’au jour de la cession les cessionnaires étaient parfaitement informés de la baisse du CA mensuel de la société cédée de 40% en 5 mois et ont décidé en pleine connaissance de cause d’acquérir ladite société.

Ils soulignent que les acquéreurs ont fait valoir la perte de 9 affiliés et non de 13 devant le premier juge soit 14% en deux mois et demi.

La société Caravelle expose que le dol revêt, si l’on se place du côté de son auteur, un aspect délictuel, en ce qu’il est composé:

– d’un élément matériel, et à ce titre suppose une man’uvre telle une tromperie, une machination, un mensonge, voire une dissimulation intentionnelle (une réticence dolosive), destinées à surprendre le consentement du cocontractant

– et d’un élément intentionnel : le dol ne se présume pas et nécessite l’intention de tromper.

Elle fait valoir que s’agissant de l’actionnaire majoritaire qui n’est pas en charge de la gestion de la société celui ci ne sait pas forcèment ce que sait la société cédée et la seule connaissance du dirigeant de la société cédée de 1’information recelée est insuffisante à démontrer que son actionnaire en avait également connaissance.

Elle indique que si 1’on se place du côté de la victime, le dol revêt un aspect psychologique en ce que les tromperies doivent avoir provoqué une erreur déterminante de son consentement, c’est-à-dire que sans les manoeuvres, la partie n’aurait pas contracté ou aurait accepté mais à des conditions différentes, que le caractère déterminant s’apprécie in concreto, compte tenu des circonstances dans lesquelles le consentement a été donnée et au regard de la personne et que le dol sera donc écarté dès lors que celui qui s’en prétend victime aurait pu ou dû se renseigner lui-même, notamment lorsqu’il s’agit d’un professionnel averti disposant de moyens d’information lui permettant d’apprécier les risques encourus et ne pouvant soutenir valablement avoir été trompé, comme en l’espèce.

Elle expose ainsi qu’elle n’est jamais intervenue dans la gestion quotidienne de la société cédée, et que la méconnaissance par elle des faits en cause qui lui sont reprochés suffit à écarter tant l’existence même de l’élément matériel du dol (une prétendue information connue de Caravelle) que l’intention qu’elle aurait eu de tromper intentionnellement les Cessionnaires en dissimulant cette information, qu’elle n’avait donc pas connaissance des faits en cause qui lui sont reprochée et que les appelants ne rapportent pas la preuve d’une manoeuvre intentionnelle de la société Caravelle visant à les tromper.

Elle expose qu’au surplus l’acquisition s’est réalisée sur la base d’un audit comptable, fiscal et social complet de la société par des cessionnaires qui étaient des professionnels du secteur et qui avaient été informés de la diminution du chiffre d’affaires de Forum Santé de près de 40% par la situation arrêtée au 31.05.2017.

Sur ce

s’agissant du dol sur la situation financière de la société

S’agissant des inexactitudes comptables, qui après avoir justifié la mobilisation de la garantie d’exactitude, puis la garantie d’actif et de passif, sont avancées au soutien de l’action pour dol par les appelants, il convient de constater que:

– l’élément matériel du dol n’est pas établie puisque les inexactitudes dont il est fait état par les cessionnaires ne ressortent que d’une unique attestation de l’expert comptable de la société qui a en outre réalisé l’audit pour le compte des cessionnaires et a donc pris connaissance de la situation comptable et financière de la société avant la cession de celle ci. Ainsi la preuve de l’existence des données inexactes qui justifierait que soit réintégrée au titre des charges la somme de 614.000 euros n’est pas établie.

En outre les cessionnaires, qui sont des professionnels, ont fait diligenter un audit comptable avant la vente et dans ce cadre n’ont fait valoir aucune critique concernant les éléments qu’ils soulèvent aujourd’hui et qui relèvent des comptes 2016 pour la plupart et donc étaient parfaitement connus et vérifiables s’agissant de: la surélévation des factures à établir au 31.12.2016, l’absence de valeur du stock au 31.12.2016, la perte d’un acompte versé à l’ancien propriétaire au 31.12.2015, le crédit impôt intéressement 2009 à recevoir en 2016 mais non reçu, les clients 2016 non réglés et donc douteux, la provision insuffisante sur clients douteux au 31.12.2016 qui se confond avec le point précédent, les honoraires du cabinet FCN et du commissaire aux comptes.

Le fait que le commissaire aux comptes ne se soit pas opposé aux régularisations mises en oeuvre par l’expert comptable ne signifie nullement que les éléments qui ont donné lieu à ces modifications dans la présentation des comptes aient été dissimulés par les cédants aux cessionnaires mais uniquement qu’il s’agit d’une changement de méthode comptable.

Enfin il n’y a pas lieu d’organiser une expertise judiciaire dans la mesure où conformement aux dispositions de l’article 146 du code de procédure civile dans son deuxième alinéa une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve et il appartenait aux appelants de recourir à l’expertise d’un expert indépendant pour établir la preuve de ce qu’ils soutiennent.

– l’élément intentionnel du dol n’est pas plus établie puisqu’il n’est en rien démontré une volonté des cédants de dissimuler des informations aux cessionnaires puisqu’aucune manoeuvre dolosive n’est caractérisé, étant de nouveau souligné que la plupart des éléments que fait valoir l’expert comptable des cessionnaires dans son attestation établie unilatéralement, relève d’éléments qui étaient inscrits dans les comptes clos au 31.12.2016 auxquels les cessionnaires ont eu accès et qu’ils étaient en capacité de vérifier et critiquer.

En conséquence les éléments caractérisant le dol s’agissant d’éléments intentionnellement dissimulés par les cédants aux cessionnaires ne sont pas constitués et il convient de confirmer la décision de première instance.

S’agissant du dol concernant la liste des affiliés

Les cessionnaires soutiennent que les cédants ont commis un dol en ne les informant pas des résiliations d’affiliations intervenues.

La cour rappelle que le dol sanctionne des tromperies ou des réticences dolosives au cours des négociations pré-contractuelles.

En l’espèce les appelants font état d’une part de résiliations d’affiliations intervenues avant la signature de la promesse synallagmatique de vente et d’achat du 3.08.2017 et d’autre parts de résiliations intervenues pendant la période comprise entre la signature de la promesse de vente et la réalisation de la cession le 14.09.2017.

Or s’agissant de cette période entre le 3.08 et le 14.09.2017 les parties étaient engagées contractuellement et la recherche de la responsabilité des cédants ne peut s’envisager que sur le fondement de la responsabilité contractuelle sur la base du contrat signé et ne peut être fondée sur le dol qui est une action pré-contractuelle.

Il convient donc d’écarter les résiliations d’affiliation intervenues entre le 3.08.2017 et le 14.09.2017 (pharmacie du canal et pharmacie de la poste) qui n’ont pu participer à la constitution du dol.

S’agissant de la période pré- contractuelle la promesse de vente signée entre les parties stipule que les cédants déclarent que l’ensemble des affiliés à la société Forum Santé résulte de la liste des 66 affiliés arrêtée au 30 juin 2017 ci après annexée (Annexe 6)

et qu’ aucune demande de résiliation de la part d’adhérents figurant sur cette liste n’a été reçue à la date de réalisation des présentes.

La liste des affiliés arrêtée au 30 juin 2017 comprend 65 noms de pharmacies et non 66.

La mention d’une liste de 66 affiliés est donc erronée mais cette erreur n’a pas été dissimulée puisqu’il suffisait de compter les noms inscrits sur la liste.

Les appelants soutiennent que cette liste est fausse car comportant des noms d’adhérents ayant résilié leur contrat et ils versent aux débats des courriers de résiliation.

Cependant cette liste comprend les noms des affiliés en cours d’abonnement à une date donnée, en l’espèce le 30.06.2017 et en conséquence le fait que des adhérents qui ont résilié mais dont la résiliation ne prendra effet que postérieurement à la date du 30.06, figure sur la liste n’est pas une tromperie.

Au surplus et surtout les appelants étaient parfaitement informés des résiliations intervenues puisqu’ils ont été destinataires le 23.06.2017 d’une liste des affiliés comportant la date de fin de contrat, date qui ne figure pas sur la liste qui constitue l’annexe 6.

La comparaison de la liste adressée le 23.06.2017 et de la liste des adhérents permet ainsi d’établir que les appelants ont été informés des résiliations de:

– la pharmacie Lison (courrier du 9.05 pour une fin de contrat au 31.10)

– la pharmacie Gallais Geffray ( courrier du 23.02 pour une fin de contrat au 8.07)

– la pharmacie De Rebais (courrier du 23.02 pour une fin de contrat au 30.06)

– la pharmacie Ritouet-Poirier (courrier du 9.06 pour une fin de contrat au 31.01.2018).

La même comparaison permet de conclure que le courrier de résiliation du 30.05 de la pharmacie du Marché qui résilie son contrat pour 15.11 alors que la date de fin de contrat mentionné sur la liste du 23.06 était le 19.12.2017, n’a pas été porté à la connaissance des cessionnaires

Enfin les cédants ne rapportent pas la preuve qu’ils ont informé les cessionnaires des résiliations intervenues après la communication de la liste du 23.06 s’agissant de:

– la pharmacie des Lions (courrier du 28.06 pour une fin de contrat au 31.10)

– la pharmacie Gallieni (courrier du 24.07 pour une fin de contrat au 31.08).

La pharmacie du plein ciel et la pharmacie Venant n’ont pas résilié leur contrat d’affiliation mais simplement informé la société de leur projet de cession de l’officine.

C’est donc 3 courriers de résiliation sur 65 affiliés, qui n’ont pas été portés à la connaissance des cessionnaires avant la signature de la promesse de vente, soit 4,5% des affiliés.

Ce nombre très peu important de résiliation dans une activité où les affiliations et résiliations relèvent de la gestion courante du réseau, ne permet pas de caractériser l’élément matériel du dol.

L’élément intentionnel s’agissant de la volonté de dissimulation n’est pas caractérisée par les cessionnaires alors que par ailleurs il ressort de la liste communiquée par les cédants le 23.06.2017 qu’ils ont fait preuve de loyauté et de transparence dans les informations communiquées aux cessionnaires.

Enfin, s’agissant de 3 résiliation d’affiliés sur 65, les cessionnaires échouent à rapporter la preuve du vice de leur consentement, constituée par le fait qu’informés de ces trois résiliations ils n’auraient pas contracté ou auraient donné un prix plus faible, en l’état d’une vente effectuée au forfait ainsi qu’il ressort du contrat de cession qui indique d’un commun accord entre les parties le prix de cession des actions a été déterminé de manière forfaitaire et irréductible et ceci, quelque soit l’actif et le passif existant au jour du transfert de propriété des actions.

Les cessionnaires expliquent que la consistance du réseau était un élément essentiel de la vente et constituait une information déterminante sans cependant établir cette preuve qui ne peut ressortir de leur propre déclaration effectuée postérieurement à la cession dans le cadre de la présente instance. En outre force est de constater que la mise à jour de la liste des affiliés au jour de la cession n’a pas été prévue dans la promesse de vente ce qui démontre que cette mise à jour, et donc que la consistance du réseau,n’avait pas l’importance que lui donnent aujourd’hui les cessionnaires.

Les éléments constitutifs d’un dol ne sont donc pas caractérisés et il convient de confirmer la décision de première instance.

Sur le manquement à l’obligation d’information par les cédants

Les appelants exposent que si le la cour considérait qu’il n’y a pas dol elle sanctionnerait pour défaut d’information, que c’est vainement que la société Caravelle prétend, sur le fondement de l’article 1112-1 du Code civil, qu’il ne serait pas établi qu’en tant que venderesse, elle serait débitrice d’une obligation d’informer le cessionnaire sur la composition du réseau, qu’au contraire, cette obligation est certaine dès lors que la consistance du réseau Forum Santé constituait, compte tenu de l’activité de la société cédée (diriger le réseau éponyme), la valeur même de ce qui était cédé, qu’elle constituait ainsi une information déterminante du consentement de l’Acquéreur.

Messieurs [S], [L] et [V] exposent que le manquement à l’obligation d’information est une nouvelle prétention en comparaison de la première instance de telle sorte qu’elle ne peut être reçue en cause d’appel, qu’en outre les appelants ne démontrent pas en quoi elle se rattache aux autres prétentions par un lien suffisant et qu’enfin ils ne démontrent pas la réalité de l’allégation relative à l’obligation d’information.

La société Caravelle expose que s’agissant de la violation de l’obligation d’information il appartient à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait et que le manquement à l’obligation d’information suppose donc d’établir:

– que le défendeur avait connaissance de l’information,

– que cette information était d’une importance déterminante pour le consentement de la partie qui se prévaut du manquement

– et que cette dernière ignorait légitimement cette information.

Elle expose que les appelants ne caractérisent aucun manquement de sa part et qu’en tout état de cause d’une part elle n’avait pas connaissance des faits en cause qui lui sont reprochés, d’autre part les appelants ne caractérisent pas le caractère déterminant de l’information pour eux, et enfin qu’ils ne peuvent prétendre, en tant que spécialistes du secteur, ignorer les informations dont ils disent qu’elles n’ont pas été portées à leur connaissance s’agissant en particulier de la diminution du chiffre d’affaire.

Sur ce

La demande fondée sur le manquement à l’obligation d’information procède des mêmes arguments que ceux développés au soutien d’une action pour dol et en conséquence cette demande ne constitue pas une demande nouvelle mais un moyen nouveau au soutien d’une action en responsabilité pré-contractuelle.

Les appelants fondent leur demande sur l’article 1240 du code civil aux termes duquel tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

De la même façon que pour le dol les éléments à prendre en compte pour caractériser l’existence d’une faute commise par les cédants, relèvent de la période antérieure à la signature de la promesse de vente du 3.08.2017. En effet à compter de cette date les parties s’étaient engagées dans une relation contractuelle et les éventuelles fautes commises ne peuvent être sanctionnées que dans le cadre de la responsabilité contractuelle.

S’agissant du manquement à l’obligation d’information le législateur, dans le cadre de la réforme du droit des obligations, a précisé les contours du défaut d’information dans le cadre des négociations contractuelles par l’article 1112-1 du code civil.

L’article 1112-1 du code civil dispose que celle des parties qui connait une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Néanmoins ce devoir d’information ne porte pas sur l’estimation de la valeur de la prestation.

Ont une importance déterminante les informations qui ont un lieu direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties.

Il incombe à celui qui prétend qu’une information lui était due de prouver que l’autre partie la lui devait, à charge pour cette autre partie de prouver qu’elle l’a fournie.

Les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir.

Outre la responsabilité de celui qui en était tenu, le manquement à ce devoir d’information peut entrainer l’annulation du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants.

En l’espèce les cédants n’ont pas porté à la connaissance des cessionnaires l’information portant sur la résiliation de 3 affiliations au réseau vendu sur 65 affiliés.

Ce nombre restreint ne permet pas de qualifier de faute, c’est à dire un acte volontaire d’une certaine gravité, ce qui relève de la négligence ou de l’erreur.

En outre le fait que la promesse de vente ne prévoit pas l’actualisation de la liste des affiliés au jour de la cession démontre que cette information n’était pas déterminante pour le consentement des cessionnaires. Ceux ci, sur qui repose la charge de rapporter la preuve du caractère déterminant de l’information qui n’a pas été portée à leur connaissance, sont des professionnels, gérant d’un réseau concurrent, parfaitement informés que des mouvements dans les affiliations -entrée et sortie- étaient courants dans le secteur d’activité de la société acquise.

En conséquence il ne convient pas de retenir un défaut d’information de la part des cédants justifiant la mise en oeuvre de leur responsabilité délictuelle.

Il convient de rejeter la demande des appelants fondée sur le défaut d’information.

Sur les préjudices

L’ensemble des fondements juridiques articulés par les appelants s’agissant de:

– la garantie de déclaration

– la garantie d’actif et de passif

– le dol

– le défaut d’information

ayant été rejeté, il n’y a pas lieu d’examiner le bien fondé des préjudices réclamés.

Sur le préjudice moral

Les appelants demandent l’allocation d’une indemnité de 10.000 euros à chacun des cessionnaires au titre du préjudice moral.

Leurs demandes ayant été rejetés les appelants sont mal fondés à demander l’octroi de demandes de réparation de leur préjudice moral.

Sur les dommages et intérêts pour abus du droit d’agir

Messieurs [S], [V], et [L] demandent l’infirmation du jugement qui a rejeté leur demande à ce titre et la condamnation des appelants à leur verser à chacun la somme de 6666,66 euros, soit 20.000 euros au total à chacun, en faisant valoir un abus d’ester en justice;

L’exercice d’une action en justice constitue un droit et ne peut dégénérer en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol, ce qui n’est pas établi en l’espèce.

Sur l’interprétation du jugement concernant les sommes allouées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Le tribunal a condamné la société Univers Pharmacie, la société Forum Santé et Monsieur [Z] [W] à payer chacun à Monsieur [I] [S], Monsieur [P] [L], Monsieur [M] [V] et à la société Caravelle la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Les appelants exposent que le jugement n’indique pas que chacun des demandeurs devrait verser à chacun des défendeurs une indemnité de 6.000 euros, que cette lecture dénaturanteamène le paiement de sommes totalement exorbitantes, soit au total 4 x 18.000 euros soit 72.000 euros d’articIe 700 et supérieures aux demandes sur ce fondement effectué par les intimés à hauteur de 15.000 euros chacun.

Elles expose que la formulation du dispositif se comprend comme impliquant condamnation de chacun des demandeurs à devoir la somme de 6.000 euros à l’ensemble des défendeurs (Messieurs [V], [L] et [S] et la société Caravelle), ce qui implique par ventilation la somme de 1.500 euros à chacun des défendeurs (6.000 euros /4) et une indemnité globale d’article 700 de 18.000 euros (6.000 € x 3) à a charge de chaque demandeur.

Subsidiairement elle demade le retranchement d’ultra petita.

Messieurs [S] [L] et [V] soutiennent qu’ils doivent chacun recevoir 6000 euros de la part de chacun des demandeurs et que le tribunal n’a pas commis d’ultra petita puisqu’ils sollicitaient chacun 15.000 euros de la part de chacun des appelants.

Sur ce

Le jugement du tribunal de commerce indique en page 10 que par conclusions en défense déposées à l’audience du 11 février 2021, Messieurs [S], [L], et [V] complètent leurs prétentions et demandent au tribunal de:

condamner in solidum Univers Pharmacie, Monsieur [W] et Forum Santé à payer 15.000 euros à chacun de MM. [I] [S], [P] [L] et [R] [E] [V] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Messieurs [S] , [L] et [V] ont donc demandé chacun, une somme maximale de 15.000 euros, somme que devaient payer les trois demandeurs ensemble.

En effet pour retenir que les trois appelants devaient payer aux trois défendeurs la somme chacun de 15.000 euros les conclusions auraient du être rédigées de la façon suivante: condamner in solidum Univers Pharmacie, Monsieur [W] et Forum Santé chacun à payer 15.000 euros à chacun de MM. [I] [S], [P] [L] et [R] [E] [V] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le montant maximum qui pouvait être alloué à chacun des trois défendeurs étaient donc de 15.000 euros.

S’agissant de la société Caravelle elle réclamait que chacun des trois demandeurs lui verse une somme de 30.000 euros, sa demande portait donc au total sur 90.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal de commerce a condamné les sociétés Univers Pharmacie, Forum Santé et Monsieur [Z] [W] à payer chacun à Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et à la société Caravelle la somme de 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Cette formulation doit se comprendre comme individualisant le montant de l’article 700 pour chacune des parties condamnées à le payer et le globalisant pour les 4 défendeurs c’est à dire que

Univers Pharmacie doit verser 6000 euros à Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et à la société Caravelle

Forum Santé doit verser 6000 euros à Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et à la société Caravelle

Monsieur [W] doit verser 6000 euros Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et à la société Caravelle.

En effet si le tribunal avait souhaité que la somme de 6000 euros soit versée par chacun des demandeurs à chacun des défendeurs il aurait rédigé sa condamnation en précisant qu’il condamnait les sociétés Univers Pharmacie, Forum Santé et Monsieur [Z] [W],chacun à payer à chacun de Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et de la société Caravelle la somme de 6000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Or cette condamnation aurait statué ultra petita puisqu’elle aurait accordé

18.000 euros pour Monsieur [S] alors qu’il n’avait réclamé que 15.000 euros

18.000 euros pour Monsieur [L] alors qu’il n’avait réclamé que 15.000 euros

18.000 euros pour Monsieur [V] alors qu’il n’avait réclamé que 15.000 euros.

Les 4 défendeurs se partagent donc chacun trois fois 6000 euros versés par chacun des demandeurs et la condamnation prononcée en première instance sur le fondement de l’article 700 ne peut dépasser la somme globale de 18.000 euros.

Sur les autres demandes

Les appelants demandent l’octroi de la somme de 15.000 euros chacun.

Messieurs [S], [L] et [V] demandent chacun que chaque appelant soit condamné à lui payer la somme de 15.000 euros.

La société Caravelle demande que lui soit allouéepar chacun des appelants, la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur ce

Les appelants qui succombent seront condamnés chacun à payer 3000 euros à chacun des intimés.

Les dépens sont laissés à la charge des appelants.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 5.07.2021

Et y ajoutant

Dit que la demande de condamnation fondée sur le défaut d’information n’est pas une demande nouvelle mais un moyen nouveau et déboute Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] de leur demande d’irrecevabilité,

Déboute la société Univers Pharmacie et Monsieur [W] de leur demande fondée sur le défaut d’information

Interprète le jugement du tribunal de commerce comme ayant condamné chacun des trois demandeurs la somme de 6000 euros à l’ensemble des défendeurs et dit en conséquence qu’en application de la condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile les sociétés Univers Pharmacie, Forum Santé et Monsieur [Z] [W] devront chacun s’acquitter de la somme de 6000 euros qui sera répartie entre les 4 défendeurs,

Condamne in solidum les sociétés Univers Pharmacie, Forum Santé et Monsieur [Z] [W], chacun, à payer à chacun de Monsieur [S], Monsieur [L], Monsieur [V] et de la société Caravelle la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne les sociétés Univers Pharmacie, Forum Santé et Monsieur [Z] [H] dépens.

La greffière La présidente

 


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