Cession de droits : 11 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/07225

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Cession de droits : 11 mai 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/07225
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11 mai 2023
Cour d’appel de Lyon
RG n°
20/07225

N° RG 20/07225 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NJUO

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 11 juin 2014

RG : 2009j00605

[C]

C/

S.C.I. ATAR

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 11 Mai 2023

APPELANT :

M. [L] [C]

né le 16 Mai 1954 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547, postulant et plaidant par Me Jean-Pierre STOULS, avocat au barreau de LYON, toque : 1141

INTIMEE :

La société civile ORIAL (anciennement dénommée “ATAR”)au capital de 2.000.000 €, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 412 668 626, représentée par ses dirigeants légaux en exercice, représentée par ses dirigeants légaux en exercice

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et par Me Matthias VUILLERMET de la SELAS FIDUCIAL BY LAMY, avocat au barreau de LYON, substitué et plaidant par Me SERVOS, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 10 Janvier 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Mars 2023

Date de mise à disposition : 11 Mai 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Marianne LA-MESTA, conseillère

– Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Lyon Mag Group (ci-après la société LMG) éditait plusieurs titres de presse régionale et en particulier le mensuel Lyon Mag. Elle a été créée par M. [L] [C].

En 2007, la société Atar a consenti des avances en compte courant à la société Lyon Mag Group afin de lui permettre de faire face à des problèmes de trésorerie.

Le 2 août 2007, en contrepartie des apports réalisés par la société Atar à hauteur de 530.000 euros dont 80.211 euros de loyers impayés, M. [C], président et actionnaire principal de la société LMG, a consenti à la société Atar, le nantissement d’un compte d’instruments financiers constitué de 263.215 actions dans le capital de la société LMG sur un total de 585.683 actions.

Les parties ont par ailleurs entrepris de négocier les termes d’un accord visant à fixer les modalités de remboursement de l’avance susvisée, augmentée d’une somme de 170.000 euros, par compensation sous forme d’une augmentation de capital à réaliser. Le projet de protocole, transmis en octobre 2007 par la société Atar et devant lui permettre de détenir 50 % du capital de la société LMG, n’a pas été accepté par M. [C] en l’état.

La société Atar a alors mis en demeure, le 9 novembre 2007, la société LMG de lui rembourser sous 8 jours la somme de 449.163 euros.

La société Atar ayant demandé à la société LMG que lui soit attribuée la propriété du compte d’instruments financiers gagé suite à l’écoulement de ce délai, la société LMG l’a assignée en référé d’heure à heure devant le président du tribunal de commerce de Lyon pour obtenir des délais de paiement de la somme réclamée.

Suite à cette procédure, de nombreuses actions contentieuses ont eu lieu, en référé, au fond, devant le tribunal de commerce de Lyon, le juge de l’exécution, la cour d’appel de Lyon, et la Cour de cassation, visant principalement à faire échec à la prise de possession, par la société Atar, des actions nanties et au terme desquelles la demande de remboursement de la société Atar a été jugée non fautive, la réalisation de nantissement régulière et la date à laquelle le nantissement avait produit tous ses effets fixée au 22 novembre 2007. L’arrêt définitif de la cour d’appel de Lyon en date du 27 mars 2008 a également jugé que la procédure de sauvegarde ouverte le 20 décembre 2007 était inopérante sur la réalisation du nantissement. Le pourvoi contre cet arrêt a été rejeté par la Cour de cassation par décision du 16 décembre 2008.

Dans l’intervalle, la société LMG a en effet été placée sous sauvegarde par jugement du 20 décembre 2007 puis en liquidation judiciaire le 29 janvier 2009.

La société Atar a choisi M. [J] [F] comme expert, au regard du contrat de nantissement, afin d’évaluer la valeur des actions nanties et de déterminer s’il y avait lieu éventuellement à une soulte au profit de M. [C].

Le juge de l’exécution, par décision du 27 mai 2008, a rejeté la demande de limitation du nantissement à hauteur de 71.236 actions et a confirmé la désignation de M. [F] comme expert désigné par la société Atar.

Dans son rapport déposé le 11 juin 2009, M. [F] a fixé la valeur de la société LMG au 22 novembre 2007 à 919.000 euros, soit 413.012 euros pour les actions nanties, cette valorisation n’entraînant aucune soulte pour M. [C].

Par acte du 7 juillet 2010, M. [C] a assigné la société Atar devant le tribunal de commerce de Nanterre, en lui demandant, au vu du rapport d’expertise de M. [N], expert dont il a sollicité l’avis, de condamner la société Atar à lui payer une soulte après déduction de l’avance en compte courant, de 1.480.000 euros.

En parallèle, M. [C] et l’ensemble des actionnaires de la société LMG ont assigné le 9 février 2009 la société Atar devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins d’être indemnisés du préjudice qu’ils estimaient avoir subi du fait du comportement fautif de la société Atar, qui aurait profité, selon eux, de la situation financière de la société LMG pour en prendre le contrôle et la conduire à la ruine.

Le tribunal de commerce de Nanterre, constatant une connexité entre les deux procédures, a renvoyé l’affaire devant le tribunal de commerce de Lyon.

Par ailleurs, dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société LMG, une procédure pénale a été ouverte à l’encontre de M. [C] suite à une plainte de la société Atar sur l’absence de sincérité des écritures comptables.

Par jugement contradictoire du 11 juin 2014, le tribunal de commerce de Lyon a :

– ordonné la jonction des instances enrôlées sous les numéros 2009J00605 et 2011J02012,

– constaté le désistement d’instance des actionnaires de la société LMG autres que M. [C],

– constaté le désistement d’instance de la société Atar au titre de ses demandes reconventionnelles présentées à l’encontre des actionnaires de la société LMG autres que M. [C],

– s’est déclaré dessaisi de ces demandes,

– jugé que la désignation de l’expert [F] par la société civile Atar est conforme aux stipulations contractuelles ainsi qu’aux dispositions prévues par l’article 2348 du Code civil, et s’avère par conséquent opposable à M. [C],

– déclaré recevable la demande de M. [C], tendant à contester les conclusions de l’expert [F],

– dit qu’il convient d’écarter le rapport des experts [G] et [B], non recevable dans le cadre de l’instance,

– constaté que la société LMG se trouvait en état de cessation des paiements dès le 22 novembre 2007,

– dit qu’à cette date la situation de la société était irrémédiablement compromise, non seulement sur le plan financier, mais aussi et surtout sur le plan managérial et éditorial,

– constaté que l’expert [N] consulté par M. [C] n’a pas mis en évidence une quelconque erreur grossière commise par l’expert [F],

– jugé irrecevables les demandes de M. [C] fondées sur l’expertise [N],

– constaté que la valeur au 2 août 2007 du gage consenti par M. [C] a été établie par lui-même à 2,01 euros par action, soit 530.000 euros et que cette valeur au 22 novembre 2007 a été fixée par l’expert contractuellement seul compétent à 1,57 euros par action, soit 413.000 euros,

– constaté que la valorisation du gage consenti n’excède pas la valeur de l’apport que le constituant a entendu garantir,

– débouté M. [C] de sa demande de versement d’une soulte formée contre la société civile Atar,

– jugé infondée cette demande et abusive la procédure dont elle a fait l’objet,

– condamné M. [C] à payer à la société Atar la somme de 30.000 euros pour procédure abusive,

– condamné M. [C] à payer à la société Atar la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [C] aux entiers dépens.

M. [C] a interjeté appel par acte du 15 juillet 2015.

Par arrêt du 10 décembre 2015, la cour d’appel de Lyon a :

– sursis à statuer sur la présente instance jusqu’au sort final de l’instance pénale en cours devant le cabinet du juge d’instruction [O], à l’encontre de M. [C],

– ordonné dans l’attente, la radiation de l’affaire du rôle de 3ème chambre commerciale A,

– dit que l’affaire sera rétablie à la demande de la partie la plus diligente et sur justificatif de la survenance de cet événement,

– réservé les dépens.

Par jugement du 20 décembre 2019, le tribunal correctionnel de Lyon a relaxé M. [C] des fins de la poursuite et a débouté la société Atar de ses demandes. Par arrêt du 14 avril 2022, la cour d’appel de Lyon a confirmé les dispositions civiles du jugement du 20 décembre 2019. Par acte du 19 avril 2022, la société Atar a formé un pourvoi en cassation.

Par acte du 24 novembre 2020, M. [C] a ressaisi la cour d’appel de Lyon.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 4 janvier 2023 fondées sur les articles 2348 du code civil et l’article 31 du code de procédure civile, M. [C] demande à la cour de :

– réformer le jugement déféré en ce qu’il l’a débouté de sa demande de versement d’une soulte formée à l’encontre de la société Atar et en ce qu’il l’a condamné au paiement d’une indemnité de 30.000 euros pour procédure abusive ainsi qu’au paiement d’une somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.

– déclarer nulle ou non écrite la clause de l’article 1 de l’acte de nantissement,

– constater que les conditions de l’article 2348 n’étaient pas réunies et déclarer que le choix de M. [F] en qualité d’expert n’a qu’une portée officieuse, de libre choix d’une partie de se faire assister ou conseiller par son un expert,

– déclarer en tout cas que la désignation de M. [F] n’était ni judiciaire ni contradictoire,

si la cour le jugeait nécessaire, ordonner si besoin une expertise judiciaire contradictoire respectant les règles du code de procédure civile avec un nouvel expert indépendant et non lié aux parties,

– en tout état de cause, fixer à hauteur de 4.470.000 euros la valorisation du Groupe Lyon Mag conformément au rapport de M. [N] du 23 juin 2010,

– en conséquence, condamner la société Atar à lui payer la somme de 1.480.000 euros, outre intérêts légaux, à titre de soulte.

– très subsidiairement et si par extraordinaire, la cour devait retenir la valorisation faite par M. [F] du Groupe Lyon Mag, réintégrer les retraitements effectués par ce dernier et retenir une valorisation à hauteur de 2.385.000 euros,

– en conséquence et subsidiairement, condamner société Atar à lui payer la somme de 745.750 euros, outre intérêts légaux, à titre de soulte,

– rejeter toutes fins, moyens et prétentions contraires formulées par la société Atar,

– en tout état de cause, réformer le jugement déféré en ce qu’il a alloué une indemnité de 30.000 euros à la société Atar pour procédure abusive,

– ordonner la capitalisation des intérêts,

– condamner la société Atar à lui payer la somme de 15.000 euros titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– et en tous les dépens avec droit de recouvrement.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 15 novembre 2022 fondées sur les articles 1355 et 2348 du code civil et les articles 122 et 480 du code de procédure civile, la société Orial, anciennement dénommée Atar, demande à la cour de :

à titre principal,

– rejeter les prétentions élevées par M. [C] au titre de la soulte qui lui resterait due suite à l’attribution des titres nantis à son profit, en ce que :

– l’acte de nantissement susvisé prévoyait de manière claire et non équivoque, conformément à la lettre de l’article 2348 du code civil, qu’ils s’en remettraient conjointement et définitivement, pour l’évaluation des titres nantis à un tiers expert désigné à son initiative,

– le rapport déposé par l’expert ainsi désigné, M. [F], expert dont l’indépendance et l’impartialité ne peut sérieusement être remise en cause par M. [C], en a conclu, après une instruction menée au contradictoire des deux parties, que la valeur de ses titres n’excédait pas le montant de la créance garantie,

– le « contre-rapport » établi de manière non contradictoire et non conventionnelle par M. [N], expert-conseil missionné unilatéralement par M. [C], ne permet pas d’avantage de retenir que la valeur des titres litigieux excédait le montant de ladite créance,

– en la poursuivant de ce chef, M. [C] a abusé de son droit d’ester en justice

en conséquence,

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré

à titre subsidiaire,

en cas d’infirmation totale ou partielle du jugement dont appel :

– rejeter, comme étant irrecevables, les prétentions élevées par M. [C] au titre de la validité de l’article 1 a) de l’acte de nantissement signé avec elle le 2 août 2007, de la désignation de l’expert chargé d’évaluer ses titres nantis (pris en la personne de M. [F]), de l’opposabilité et/ou de la portée contractuelle du rapport déposé par ce dernier ou encore de la désignation d’un nouvel expert judiciaire, en ce que ces prétentions se heurtent :

– à l’autorité de chose jugée attachée aux décisions judiciaires précédemment rendues dans ce dossier,

– au principe d’irrecevabilité des demandes nouvelles en cause d’appel,

– au principe jurisprudentiel dit de l’estoppel, faisant interdiction à une partie de se contredire au détriment d’autrui et rendant irrecevables ses prétentions à ce titre,

– au principe jurisprudentiel dit de concentration des moyens, imposant au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci,

en conséquence,

– débouter purement et simplement M. [C] de sa demande de paiement d’une soulte,

en tout état de cause,

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné M. [C] à lui verser une somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour abus de son droit d’ester en justice,

– ainsi qu’une somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre frais et dépens d’instance,

y ajoutant,

– condamner M. [C] à lui verser une somme complémentaire de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 janvier 2023, les débats étant fixés au 1er mars 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l’action de M. [C]

Sur ce point, M. [C] a fait valoir :

– le respect du principe de concentration des moyens en ce que son action porte sur le versement de la soulte due suite au nantissement des parts sans intervertir les fondements

– le fait que la première demande en justice portait sur l’octroi de délais de paiement

– concernant la demande d’expertise, le fait qu’il ne s’agit pas d’une demande nouvelle et qu’elle est laissée à l’appréciation de la cour en cas de besoin pour l’évaluation de ses demandes en cas d’information insuffisante.

Sur ce point, la SC Orial a fait valoir :

– l’irrecevabilité des demandes résultant de l’autorité de chose jugée du jugement rendu par le Juge de l’exécution le 28 mai 2008 qui a confirmé, en tant que de besoin et conformément à la loi des parties la désignation de l’expert, désignation d’un expert choisi par le bénéficiaire

– le défaut de contestation dans cette instance par l’appelant de la désignation de M. [F] pas plus qu’en appel

– l’impossibilité dès lors de voir « écarter ou rendre inopposables » les conclusions de M. [F], la désignation ayant été entérinée par une décision définitive depuis 14 ans

– le caractère inopérant de la position de M. [C] qui prétend qu’il s’agissait uniquement d’un donner acte alors même que le jugement indique bien la confirmation de M. [F] en tant que de besoin en application de la loi des parties, sans compter que la SCI Atar demandait cette désignation à titre principal, et que cette désignation a été confirmée

– l’irrecevabilité de la demande de désignation d’un nouvel expert en application de l’article 564 du code de procédure civile, s’agissant d’une nouvelle demande formée pour la première fois en cause d’appel, d’autant plus que M. [C] a déjà sollicité une telle désignation dans le cadre de l’appel radié contre la décision du Juge de l’exécution

– l’application du principe d’estoppel eu égard aux contradictions judiciaires de l’appelant depuis 15 ans qui a soutenu en novembre 2007 que le groupe Lyon Mag était en cessation des paiements pour obtenir des délais de paiement, avant d’affirmer l’inverse dans d’autres instances pour retarder la transmission des parts sociales nanties

– sa demande de prise en compte d’un protocole jamais régularisé entre les parties pour établir leur commune intention, alors qu’il a refusé de le signer, soutenant pendant 10 ans la volonté de tiers de prendre le contrôle du groupe

– l’absence de contestation de la créance de la SCI Atar au passif, créance maintenue dans ce cadre alors que sa position actuelle le mène à affirmer que l’attribution des titres, du fait de leur valeur, l’a désintéressée et qu’il peut lui-même obtenir une soulte

– le non-respect du principe de concentration des moyens alors qu’il aurait pu faire état du rapport de M. [F] déposé le 11 juin 2009 dès le 6 mai 2010 devant la cour d’appel

– la mise en ‘uvre de différentes procédures avec des modifications de fondements, menant à des désistements de sa part, alors que toutes les instances découlaient de son refus de la mise en ‘uvre du nantissement.

L’article 1355 du code civil dispose que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

L’article 564 du Code de Procédure Civile dispose que à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

S’agissant de l’autorité de chose jugée revendiquée par la SC Orial, il convient de relever qu’il n’existe pas d’identité entre les demandes et la cause. S’il est exact que le Juge de l’exécution a confirmé la désignation de M. [F] en tant qu’expert, il a uniquement rappelé les termes de la convention liant les parties.

Dès lors, la SC Orial ne peut se prévaloir d’une autorité de chose jugée.

S’agissant de la recevabilité de la demande d’expertise, il est relevé que cet élément au dispositif ne relève pas d’une demande et est indiqué uniquement pour le cas où la cour ne s’estimerait pas suffisamment informée pour statuer. En outre, il s’agit d’une demande ayant le même objet qu’en première instance, à savoir obtenir une soulte pour M. [C].

Dès lors, cette demande sera déclarée recevable.

S’agissant du principe d’estoppel, il convient de rappeler que tendu que la seule circonstance qu’une partie se contredise au détriment d’autrui n’emporte pas nécessairement fin de non-recevoir. Toutefois, ce principe, tiré des dispositions de l’article 122 du code de procédure civile ne peut avoir des conséquences que si les contradictions d’une partie ou positions contraires, sont élevées dans le cadre d’une même instance, et non dans le cadre de différentes procédures.

De fait, les prétentions d’une partie antérieures ou postérieures à une instance, ne relèvent pas du régime de l’estoppel.

En conséquence, les demandes de M. [C] sont donc recevables.

Sur la validité de l’acte de nantissement et la désignation de M. [F] comme expert

Sur ce point, M. [C] a fait valoir :

– l’absence de désignation judiciaire et contradictoire, en l’absence de jugement en ce sens, le jugement du Juge de l’exécution du 27 mai 2008 ne l’ordonnant pas et ne disposant pas d’une autorité de chose jugée en ce sens

– le fait que la désignation est intervenue de manière unilatérale sur le fondement de la convention liant les parties, le juge indiquant que de fait, une désignation judiciaire n’était pas possible

– l’impossibilité de désigner de manière unilatérale un expert afin d’évaluer la valeur des parts, étant rappelé que l’article 2348 du code civil indique que l’évaluation est faite par un expert désigné à l’amiable ou judiciairement et que toute clause contraire est réputée non écrite

– le risque liée à une désignation unilatérale en raison de la convention des parties, avec le risque de désignation d’un expert lié à une partie

– le caractère non écrit de la clause de désignation de l’expert dans la convention de gage liant les parties puisque la désignation était unilatérale

– le caractère inopérant de l’assistance de M. [C] dans le cadre de la signature de la convention de gage et de réalisation du nantissement par un conseil, la clause restant contraire aux dispositions de l’article 2348 du code civil

– l’absence de réunion des conditions de l’article 2348 du code civil puisque la SC Orial a désigné de manière unilatérale M. [F] et l’a en outre rémunéré ce qui exclut toute indépendance de celui-ci, sans compter que le Juge de l’exécution n’a fait que confirmer le choix de la société intimée ce qui exclut tout contradictoire ou désignation par une juridiction, sans compter l’absence de consultation de l’appelant outre le contenu de l’article 1843-4 du code civil qui prévoit en cas de désaccord la désignation d’un expert aux fins d’évaluation des parts par le président du tribunal statuant en la forme des référés, le Juge de l’exécution n’ayant pas de compétence dans le domaine

– la demande de désignation d’un expert par la cour d’appel au regard des éléments contradictoires à disposition de la juridiction du fait des deux avis de M. [F] et de M. [N]

– l’absence de caractère contradictoire du rapport de M. [F] qui a été désigné et payé par une seule partie, et n’a pris en compte que les éléments de son mandant.

À ce titre, la SC Orial a fait valoir :

– les dispositions de l’article 2348 du code civil dans sa version applicable au litige, qui a permis de prendre en compte les pactes commissoires jusque là prohibés

– les stipulations du contrat de gage du 2 août 2007 dans son article 1 « Réalisation du nantissement », indiquant que la valeur des instruments financiers au jour du transfert sera déterminée par un expert choisi par le bénéficiaire qui en informera le constituant

– la réalisation du nantissement huit jours après notification du constituant restée infructueuse aux fins de recouvrer les sommes qui lui sont dues

– la réalisation du nantissement des titres le 22 novembre 2007, soit 8 jours ouvrés après le courrier du 9 novembre 2007 sollicitait le remboursement intégral de l’avance en compte-courant d’associé, demande restée sans effet

– la décision du Juge de l’exécution qui a « confirmé » la désignation de M. [F] par l’intimée, aux frais avancés de cette dernière, décision devenue définitive

– l’impossibilité de revenir sur cette décision, faite en application de la convention liant les parties et confirmée par le Juge de l’exécution

– la conformité de l’article 1er avec l’article 2348 du code civil qui indique qu’il n’est pas possible de déterminer la valeur des titres autrement, notamment en permettant au créancier d’évaluer unilatéralement le bien gagé

– le recours en raison de cet article à la désignation amiable d’un expert, accepté par avance par le débiteur, la clause empêchant quoi qu’il advienne une évaluation unilatérale par le créancier

– la nature des investigations réalisées par M. [F], de manière contradictoire et dont les conclusions indiquent qu’il n’y a pas lieu au versement d’une soulte à M. [C]

– la nécessaire application de la loi des parties, comme l’a fait le tribunal de commerce en première instance, par le recours à M. [F], expert reconnu, outre le contenu du rapport

– le contenu des rapports d’expertise ordonnés par le juge d’instruction, qui viennent confirmer la position de M. [F], notamment pour appliquer des décotes

– le respect du contradictoire dans la mesure réalisée par M. [F], au cours de laquelle M. [C] a présenté des dires, annexés au rapport, démontrant sa participation à la mesure à plusieurs reprises

– l’assistance de M. [C] par son conseil lors de la signature du contrat de nantissement, et sa présentation d’un contre-projet le 26 juillet 2007, ce qui démontre sa réflexion et son appréhension du sujet.

L’article 1134 du code civil dispose, dans sa version applicable au litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, et doivent être exécutées de bonne foi.

L’article 2348 du code civil, dans sa version applicable au litige dispose qu’il peut être convenu, lors de la constitution du gage ou postérieurement, qu’à défaut d’exécution de l’obligation garantie le créancier deviendra propriétaire du bien gagé, que la valeur du bien est déterminée au jour du transfert par un expert désigné à l’amiable ou judiciairement, à défaut de cotation officielle du bien sur un marché organisé au sens du code monétaire et financier et toute clause contraire est réputée non écrite.

L’article 1834-4 du code civil dans sa version applicable au litige dispose dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible.

En la présente instance, il doit être relevé que les parties ont conclu un pacte commissoire avec réalisation d’un nantissement et que l’intervention de M. [F] ne s’est pas faite dans le cadre d’une cession de droits sociaux ou de rachat comme le prévoit l’article 1834-4 du code civil dans sa version applicable à la date de la convention.

Dès lors, il ne saurait être fait application de ce texte, le moyen présenté par M. [C] devant écarté.

S’agissant de l’autorité de chose jugée invoquée par la SC Orial au titre de la décision du Juge de l’exécution du 27 mai 2008, il doit être relevé que le dispositif de la décision a indiqué « confirme » la désignation de M. [F].

Or, le terme confirme ne saurait renvoyer au fait de trancher un litige entre les parties, mais renvoie par contre à un choix déjà fait. Aucune autorité de chose jugée ne saurait dès lors être retenue sur ce point.

Il est nécessaire toutefois d’en revenir à la lettre de l’article 2348 du code civil et de l’article 1134 du code civil afin d’apprécier l’acte de nantissement du 2 août 2007, notamment l’article querellé concernant la réalisation du nantissement.

Le contenu de cet article reprend les dispositions de l’article 2348, indique le délai de réalisation du gage mais aussi les modalités de mise en ‘uvre de celui-ci.

L’article 3.a est rédigé de la manière suivante « en demandant sur simple notification adressée au constituant qui l’accepte d’ores et déjà par les présentes, en application de l’article 2348 du code civil, l’attribution au bénéficiaire de la propriété des instruments financiers, étant précisé que la valeur des instruments financiers au jour du transfert sera déterminée par un expert choisi par le bénéficiaire qui en informera le constituant ».

L’appelant entend faire déclarer non écrite cette clause au motif de ce qu’elle ne permet pas au constituant d’intervenir dans le choix de l’expert mais surtout en ce qu’elle contreviendrait à la lettre de l’article 2348 du code civil qui prévoir une désignation amiable ou judiciaire.

Il sera rappelé que l’acte de nantissement a fait l’objet de discussions entre les parties, et de multiples échanges, et que les parties ont entendu adopter la convention dont la stipulation querellée, l’appelant ne rapportant pas la preuve d’un vice de son consentement sur ce point.

En signant une convention prévoyant les modalités de désignation d’un expert, les parties ont défini les modalités de désignation amiable d’un expert, la convention respectant en conséquence les dispositions de l’article 2348 du code civil et s’appliquant en vertu des dispositions de l’article 1134 du code civil.

C’est donc à tort que M. [C] entend obtenir que la clause querellée soit déclarée non écrite. De même, il n’y a pas lieu d’ordonner une mesure d’expertise judiciaire eu égard au respect de la désignation d’un expert en application de la convention liant les parties.

Il convient dès lors de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur l’évaluation des titres

Sur ce point, M. [C] a fait valoir :

– la nécessité de fixer la date d’évaluation à une date autre que celle de la signature de l’acte de nantissement et à son sens au 31 juillet 2007, date de l’exercice clos, puisque la contrepartie a été fixée en fonction de la valeur des parts à cet exercice

– l’impossibilité de retenir la date du 31 juillet 2008 en raison de la dégradation de la société et de la procédure de sauvegarde qui ne doivent pas impacter la valeur des titres

– l’attitude de la société Atar qui a participé à la dégradation de la valeur du groupe en raison de ses agissements dès la signature de l’acte

– l’obligation d’évaluer les titres au 22 novembre 2007, date du transfert des titres ensuite de la décision rendue par la cour d’appel de Lyon le 27 mars 2008

– l’absence d’état de cessation des paiements au 22 novembre 2007, qui a toujours été en capacité de trouver des fonds notamment par des augmentations de capital en décembre 2005 et janvier 2007, une troisième restructuration avec augmentation de capital étant initialement prévue avant la mise en ‘uvre d’une mesure de sauvegarde suivant décision du Tribunal de Commerce du 20 décembre 2007

– l’évolution positive des comptes pendant la période de sauvegarde et l’échec d’un plan en raison de l’attitude la société Atar et de la société La Dame de L’est, bailleur, qui ont refusé une issue amiable concernant les dettes existantes, menant à une liquidation judiciaire avec fixation de la date de cessation des paiements au 19 janvier 2009 sans report

– l’évaluation de M. [F] qui au 31 juillet 2007, retient une situation nette de 46000 euros pour Lyon Mag, ce qui rend impossible une cessation des paiements en novembre 2007

– l’apport de fonds de l’intimée en compte-courant après audit

– l’existence de simples difficultés de trésorerie en novembre 2007 rendant impossible le remboursement en 8 jours de la somme de 449.800 euros comme attesté par l’expert-comptable du groupe

– l’absence d’irrégularités dans les comptes de la société Lyon Mag, comme retenu in fine ensuite des procédures en matière pénale sans compter la transaction intervenu avec Me [V] concernant les difficultés relevées et l’indication dans le jugement que les difficultés de trésorerie ont été accentuées par le conflit entre les associés

– le refus de prendre en compte les sommes indiquées par M. [F] comme des soustractions d’actifs

– la force probante équivalente du rapport remis par M. [N] à celle du rapport de M. [F], chaque rapport ayant été fait par désignation unilatérale

– le défaut de prise en compte par M. [F] de ses dires, notamment concernant la valorisation du portefeuille des marques de l’entreprise,

– la prise en compte du taux de circulation (nombre de lecteurs) et du prix du lecteur

– l’absence de légitimité contractuelle du rapport de M. [F]

– les conclusions du rapport fixant une valorisation des titres à 4,47 millions d’euros, soit in fine une soulte de 1.480.000 euros au profit de l’appelant

– la nécessité de ne pas ajouter les capitaux propres comptables puisqu’il avait déjà été réévalués et de ne pas retrancher la valeur du fonds de commerce inscrite au bilan car il ne s’agit pas d’une simple réévaluation des marques mais de l’évaluation des titres de la société

– la nécessité de ne pas déduire in fine comme l’a fait M. [F] la somme de 800.000 euros, nécessaire pour le fonctionnement, étant rappelé que l’apport de la somme de 530.000 euros par la société Atar avait pour effet d’apporter des fonds de fonctionnement ce qui a constitué l’origine du litige

– la position de la cour d’appel sur les différents points retenus par M. [F], qui a fait état de ce que l’imputation en compte était justifiée au regard des normes comptables et ne constituait pas une faute de gestion s’agissant des frais de recherches et de développement

– le rappel que les marques à elles seules ne constituent pas le fonds de commerce d’un groupe de presse

– la nécessité d’écarter les retraitements sur la perte intercalaire, les apports complémentaires, comme retenu par la cour d’appel statuant sur les intérêts civils, sans oublier que le tribunal correctionnel avait écarté la question de l’activation des frais de recherche et de développement des débats

– la nécessité pour la cour, au cas où elle retiendrait l’évaluation faite par M. [F] de réintégrer la somme de 1.116.000 euros soit une valorisation des titres à hauteur de 1.275.750 euros et la fixation d’une soulte pour l’appelant à 745.750 euros.

Pour sa part, la SC Orial a fait valoir :

– la réalisation de l’évaluation sur une période d’une année, avec deux dates alternatives pour évaluer les titres de la société Lyon Mag Groupe, l’une au 22 novembre 2007, date de la réalisation du nantissement et l’autre au 31 juillet 2018, date du transfert effectif des titres

– à la première date, le constat d’une situation obérée de la société placée en sauvegarde judiciaire le mois suivant, et la prise en compte des comptes clôturés au 31 juillet 2017

– la mise en ‘uvre de différents correctifs (besoin de recapitalisation de 800K€, perte intercalaire à hauteur de 125 k€, dégrèvement d’une partie des frais de développement du site internet pour 293K€ soit 30%)

– à la seconde date, l’évaluation du groupe à zéro euro, compte-tenu des 4,3 millions d’euros de passif et des financements conséquents à apporter aux fins de poursuite de l’activité

– in fine, quelle que soit la date choisie, une évaluation des titres de M. [C] qui n’est pas supérieure à la somme garantie soit 530.000 euros

– l’absence de toute erreur grossière d’évaluation dans la mesure conduite par M. [F]

– en cas d’examen au fond de l’évaluation, le fait que la société Lyon Mag Groupe était en difficultés financières à la date du 22 novembre 2007 même si cette situation n’était pas encore totalement obérée, un retraitement nécessaire en raison des frais de développement et de recherche figurant à l’actif des bilans et l’existence d’incohérences non prises en compte par M. [N] dans l’expertise unilatérale réalisée au profit de M. [C]

– s’agissant du premier point, l’absence de tout contradictoire, M. [N] ne sollicitant ni la SC Orial ni M. [F], étant rappelé que M. [C] sollicite que la cour ordonne une mesure d’expertise

– l’état de cessation des paiements à cette date puisque la société n’était pas en mesure de rembourser le compte-courant de la SCI Atar, la valeur devant s’apprécier à la date de réalisation du nantissement soit le 22 novembre 2007 et le fait que la mise en ‘uvre d’une procédure de sauvegarde n’est pas la preuve d’une absence de cessation des paiements, les dispositions de l’article L621-12 du code de commerce prévoyant ce cas, étant rappelé qu’à l’époque, la société Lyon Mag Groupe n’était pas non plus capable de payer les loyers dus à son bailleurs, une opposition étant formée au commandement de payer du bailleur, abandonnée par la suite

– l’existence d’irrégularité dans les comptes notamment concernant les frais de recherche et développement, la comptabilisation de la TVA ou l’évaluation des titres de la filiale Lyon Mag (cf. rapport des deux experts judiciaires qui ont indiqués que les titres de cette société comptabilisés pour 2006 à 760 K€ et en 2007 pour 1.100 K€ correspondaient en réalité à une valeur nulle voire négative)

– l’analyse par M. [F] des notes transmises par M. [C] et son expert-comptable, et le fait que l’appelant, dans la synthèse adressée le 29 octobre 2007, concluait lui-même au besoin d’un apporter de 800 K€ sur l’exercice à venir, sans compter l’apport de 500 K€ déjà fait, outre que fin octobre 2007, la situation de trésorerie indiquait un solde négatif de -700 K€

– la reconnaissance par M. [C], et l’attestation de l’expert-comptable en date du 14 novembre 2007, sur papier à en-tête, de l’état de cessation des paiements du groupe, afin de pouvoir obtenir des délais de paiement, le dégrèvement étant ainsi justifié

– l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Lyon le 14 avril 2022 concernant les intérêts civils, indiquant que les difficultés de trésorerie existantes ont été momentanément solutionnées par l’apport de fonds de la SCI Atar, cette dernière éteignant temporairement l’incendie jusqu’au 9 novembre 2009, date à laquelle M. [C] a fait volte-face, menant l’intimée à exiger le remboursement des sommes dues, et apportées sur le compte-courant d’associé

– l’absence de procédure de sauvegarde au 22 novembre 2017

– sur les frais de recherche et de développement, le commissaire aux comptes, lors de l’exercice clos au 31 juillet 2007, a déclaré ne pas être en mesure de certifier si les comptes consolidés sont réguliers et sincères en raison des incertitudes sur les actifs suivants : immobilisations corporelles correspondant aux frais de développement pour 508 K€ et en cours pour 1.161K€, et la difficulté d’évaluer les avantages économiques futurs attendus sur ces projets déjà en cours 2006 et que la disponibilité des ressources appropriées pour achever les projets était conditionnée à l’issue favorable de la procédure de sauvegarde

– l’absence de justificatifs fournis par M. [C] sur ces frais de recherche et développement, les experts judiciaires ayant conclu que les frais en question avaient été affectés par masse en pourcentage des dépenses globales engagées dans les sociétés et qu’aucun décompte précis n’était versé au débat

– le fait que la relaxe, fondée sur un défaut d’intention délictuelle, de M. [C] devant le tribunal n’atteste pas de la régularité des comptes, étant rappelé que le tribunal a retenu les réserves du commissaire aux comptes sur la régularité, les arbitrages comptables critiquables de l’appelant, les évaluations grossières et l’application de normes comptables inappropriées soit la conformation d’une attitude inappropriée de l’appelant

– l’existence d’un pourvoi rendu contre l’arrêt du 14 avril 2022, étant rappelé que la relaxe ne rend pas leur régularité aux comptes

– l’ouverture d’une instruction initialement sur instruction du procureur de la République

– l’irrégularité d’autres postes de dépenses, non examinés par M. [N], concernant le poste échanges de publicités, qui a fait l’objet de réserves par le commissaire aux comptes, la valorisation des titres Lyon Mag chez Lyon Mag Group, les dépenses personnelles de M. [C] sans lien avec l’activité de la société et reprises par le liquidateur judiciaire, étant rappelé qu’une action en comblement de passif a fait l’objet d’une transaction à hauteur de 10.000 euros, la cavalerie par rapport à la TVA et autres carences du rapport de M. [N] qui de manière erroné prétend que le plan de sauvegarde a été homologué en décembre 2007, alors qu’il s’agit du début de la procédure

– l’endettement du Groupe Lyon Mag et la cessation latente des paiements, qui atteignait au 31 juillet 2007, 2 millions d’euros soit l’équivalent du chiffre d’affaires du groupe au cours de son dernier exercice, étant rappelé qu’à compter de juin 2003, les sociétés ont commencé à ne pas déclarer à la TVA la totalité du CA encaissé, (cf rapport [I]), les demandes d’échelonnement de paiement de deux dettes fournisseurs en novembre 2004 et octobre 2006, courant 2005, 2006 et 2007, les alertes de la Lyonnaise de Banque concernant les découverts bancaires systématiquement au-delà des limites prévues, l’obligation d’échelonner une dette au titre de la contribution sociale de solidarité en présence d’un défaut de déclaration, à partir de 2007, la consolidation d’un découvert de 300K€ en prêts à moyen terme, et des facilités de caisse ne dépassant pas 50K€, la mise en ‘uvre d’un redressement URSSAF en avril 2007 avec une demande d’échelonnement sur 8 mois, l’impossibilité de payer à DCTC Rhône Alpes sa dette en deux fois mais en trois fois, et l’assignation en redressement judiciaire par la société ISTRA en mai 2007 concernant une dette échue de 249.163 euros et des traites revenues impayées en janvier et février 2007

– l’octroi du bénéfice de la sauvegarde après un référé d’heure à heure demandant des délais de paiement pour la dette en compte-courant de la SC Orial, accordés pour 5 mois, et l’appel subséquent de la société qui voulait une franchise de 10 mois et des délais plus longs, ce qui a suspendu momentanément l’état de cessation des paiements

– l’obtention d’une sauvegarde en tronquant la dette de loyer

– depuis la clôture des comptes, un chiffre d’affaires de Lyon Mag à hauteur de 2.378.544 euros pour une insuffisance d’actifs de 3.050.702 euros, les actifs revendiqués par M. [C] et retenus par M. [N] étant cédés pour 160.000 euros dans le cadre de la liquidation judiciaire

– le caractère inopérant de la méthode d’évaluation des titres par M. [N] qui retient une valeur médiane de 4,5 millions d’euros pour le groupe alors que les comptes sont déficitaires depuis plusieurs années, et le refus de prendre en compte les difficultés au 22 novembre 2007 en indiquant que tout était encore possible, outre l’indication qu’il a repris à son compte les évaluation de M. [C], sans compter une comparaison avec des cessions concernant des groupes in bonis ce qui n’était pas le cas de la société concernée, sans compter l’absence de comparables purs

– le rappel que la cour d’appel a jugé de manière définitive que le nantissement était réalisé à la date du 22 novembre 2007, mais que suite aux nombreuses oppositions de M. [C], leur transfert n’est intervenu qu’en juillet 2008, en exécution d’une décision rendue par le Juge de l’exécution le 27 mai 2008

– la différence de méthodologie entre les deux rapports, celui de M. [F] réalisé en application de la convention des parties, avec leur consultation, et celui de M. [N] réalisé de manière unilatérale et sans méthode, sur la base des seules informations données par l’appelant

– la liquidation judiciaire du Groupe Lyon Mag, avec un passif impayé de plusieurs millions d’euros, la démission de M. [C] et de l’ensemble de l’équipe dirigeante dès le prononcé de la liquidation judiciaire sans que les actifs, vendus pour 160K€, n’aient suffi à désintéresser les créanciers, et le caractère chimérique des demandes de l’appelant qui entend obtenir la somme de 1,5 million d’euros, soit la moitié du passif définitif alors que la SC Orial entend uniquement obtenir la somme de 500.000 euros qui avait été avancée en compte courant.

S’agissant de la date d’évaluation des parts sociales objet du nantissement, en application de l’article 2348 du code civil, il convient de retenir la date du 22 novembre 2007, soit 8 jours après l’envoi d’une mise en demeure de rembourser les sommes dues à la société Atar, en application des dispositions de l’article 2348 du Code civil.

S’agissant des rapports versés au débat, le rapport remis par M. [F] bénéficie d’une légitimité supérieure à celui remis par M. [N], étant rappelé que la désignation de M. [F] est intervenu conformément à l’engagement contractuel des parties.

En outre, le rapport de M. [F] démontre qu’il a tenu des réunions avec M. [C] et notamment son conseil Me [S] et qu’il a reçu les dires des parties et y a répondu. Il en va de même dans le courrier du 22 septembre 2009 dans lequel M. [F] répond à Me [S] s’agissant de la méthode d’évaluation utilisée, mais aussi des éléments devant être pris en compte et afin d’éviter une valorisation double.

Il est à relever les méthodologies employés par M. [F] concernant la valorisation des titres, y compris avec la méthode des comparables et la méthode des professionnels, sans compter le renvoi à la méthode du commissaire aux comptes, avec un détail des pages 49 à 59, cette dernière page se terminant sur la date limite pour les parties aux fins de fourniture des dires.

De même, M. [F] a retenu les éléments relatifs au taux de circulation, au prix du lecture, en lien avec le nombre d’exemplaires vendus et a tenu compte également de la situation de la société à la date du 22 novembre 2007, écartant par ailleurs des titres de presse sans lien avec Lyon Mag notamment en raison de leur ligne éditoriale ou de leur rythme de parution.

Là encore, il sera relevé en page 69 les dires des parties et l’opinion de l’expert.

S’agissant de l’évaluation du groupe Lyon Mag proposée par M. [F] (pages 71 à 75), la lecture complète du rapport ne permet pas de relever d’erreur d’appréciation, avec la prise en compte des difficultés financières du groupe à la période d’évaluation, notamment en tenant compte des écrits de M. [C] qui indique un besoin de trésorerie en date du 29 octobre 2007 mais aussi le courrier de l’expert-comptable le 14 novembre 2017 qui indique que le groupe ne dispose pas des ressources pour répondre favorablement à la demande de la société Atar dans le délai imparti.

Le rapport de M. [F] a également pointé des évaluations peu précises de plusieurs postes concernant le site internet notamment et la prise en compte de perte pour parvenir à une valorisation de 413.000 euros au titre des parts détenues par M. [C].

Il doit être relevé, que l’appelant, de lui-même, dans l’acte de nantissement, a évalué le prix d’une part sociale à la somme de 2,01 euros lors de la signature de l’acte de nantissement au 2 août 2007, pour garantir l’apport en compte-courant par la société Atar de la somme de 530.000 euros.

Cette évaluation par l’appelant démontre de fait qu’il ne peut prétendre à une évaluation supérieure sauf à méconnaître les éléments issus de la clôture des comptes au 31 juillet 2007, étant rappelé que postérieurement, une perte intercalaire sera constatée et prise en compte dans l’évaluation des parts sociales à un prix unitaire de 1,57 euros au 22 novembre 2007.

Ces deux évaluations concordantes entre M. [C] et M. [F] sont également à mettre en lien avec le rapport du commissaire aux comptes suite à l’exercice clos le 31 juillet 2007, qui indiquait que le groupe Lyon Mag disposait de capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social depuis le 31 juillet 2005 soit un signal d’alerte quant à la réalité de la santé de la société qui ne peut permettre d’envisager une valorisation dans les termes avancés par l’appelant.

S’agissant du rapport de M. [N], il ne pourra qu’être noté qu’il a été rédigé sur la base des seuls documents remis par l’appelant et sans qu’aucune interrogation des autres parties ne soient réalisées. De plus, il ne saurait être mis sur le même plan que celui réalisé par M. [F] qui bénéficiait d’une légitimité contractuelle comme indiqué à juste titre par les premiers juges.

Le rapport de M. [N] ne se fondant pas sur la réalité de la situation du groupe Lyon Mag, notamment sur les pertes subies ou les alertes du commissaire aux comptes, ne tirant pas de conclusions de la diminution de moitié du capital social ne peut être tenu comme un élément de preuve au profit de M. [C].

Dès lors, il sera écarté.

Enfin, s’agissant des retraitements critiqués par M. [C] dans le cadre de l’évaluation de M. [F], il ne saurait être fait droit aux demandes présentées qui ne sont fondées sur aucun élément objectif mais uniquement sur des affirmations de l’appelant qu’il a reprises dans le cadre du rapport de M. [N]. Il sera rappelé en outre que si le tribunal correctionnel a prononcé une relaxe au profit de l’appelant, elle repose sur un défaut d’intention délictuelle mais ne vient pas indiquer la régularité des comptes qui au contraire font montre des difficultés du groupe Lyon Mag du manque de précision comptable. Dès lors les moyens soulevés seront écartés.

Il convient de rappeler que M. [C] avait consenti un gage de 530.000 euros au profit de la société Atar aux droits de laquelle vient la SC Orial.

À la date de réalisation du gage soit le 22 novembre 2007, les parts de l’appelant avait une valeur de 413.000 euros, soit une valeur inférieure au gage consenti. Il ne peut dès lors prétendre à obtenir une quelconque soulte.

C’est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté les demandes de M. [C] et il convient dès lors de confirmer la décision déférée.

Sur la demande reconventionnelle de la SC Orial pour procédure abusive

Sur ce point, M. [C] a fait valoir :

– l’absence de preuve de toute faute de sa part, le tribunal ayant retenu des faits étrangers aux débats dans sa décision

– le fait qu’il a obtenu des décisions favorables mais aussi des décisions défavorables, relevant pour certaines du Tribunal Judiciaire.

Concernant cette demande, la SC Orial a fait valoir :

– la multiplication des instances devant différentes juridictions : Juge de l’exécution, Tribunal de Commerce, Conseil de Prud’hommes

– l’existence d’un harcèlement médiatique à l’encontre de M. [Y] présenté comme responsable de la situation alors que les entreprises étaient déjà en difficulté avant son intervention, M. [C] n’assumant pas ses choix et leurs conséquences

– la confirmation de la décision de première instance à ce titre.

L’article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l’espèce, s’il doit être relevé l’existence d’une multiplicité de procédures entre les parties, il convient d’envisager la question d’une faute liée uniquement à la présente procédure de la part de M. [C].

Les litiges autres intervenus entre les parties ont été réglés par les juridictions saisies et compétentes en la matière et n’ont pas vocation à intervenir dans l’appréciation de la situation.

Il est ainsi relevé que M. [C] avait connaissance de la nature des engagements pris au profit de la société Atar devenue la SC Orial et avait conscience également de la conséquence de l’acte de nantissement signé étant rappelé qu’il avait procédé lui-même à une évaluation des titres et était au fait de la situation de la société qu’il dirigeait et ne peut rapporter la preuve d’un quelconque vice de consentement à l’époque.

Dans le cadre de la présente instance, doit être relevé le caractère dilatoire de l’action qui revient à tenter de priver de tout effet une convention légalement formée entre les parties et la volonté de priver la SC Orial de ses droits, aujourd’hui minorés de fait en raison de l’évolution de la situation.

De même, le refus de respecter l’engagement contractuel concernant la désignation de M. [F] et la volonté de saisir un tiers aux fins d’obtenir une évaluation des parts sociales sans qu’aucun échange n’intervienne entre les différentes parties à la différence de la situation avec M. [F] montre une volonté de priver la SC Orial de ses droits.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, une faute doit être retenue à l’encontre de M. [C] constituée par un abus d’ester en raison de son refus de respecter ses engagements contractuels.

Cette faute est à l’origine d’un préjudice pour la SC Orial, distinct de celui des frais de défense engagée puisqu’elle a dû à nouveau se défendre, rapporter la preuve de ses dires, et reprendre les éléments nécessaires pour fonder ses propos.

De la sorte, M. [C] est redevable d’une indemnisation à la SC Orial. La somme de 30.000 euros fixée en première instance est satisfactoire et sera retenue.

En conséquence, la confirmation de la décision déférée sera ordonnée sur ce point.

Sur les demandes accessoires

M. [C] échouant en ses prétentions, il sera condamné à supporter les entiers dépens de la procédure d’appel.

L’équité commande d’accorder à la SC Orial une indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [C] sera condamné à payer à la SC Orial la somme de 5.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l’appel

Déclare recevable les demandes de M. [C],

Confirme la décision déférée dans son intégralité,

Y ajoutant

Condamne M. [L] [C] à supporter les entiers dépens de la procédure d’appel,

Condamne M. [L] [C] à payer à la SC Orial venant aux droits de la société Atar la somme de 5.000 euros à titre d’indemnisation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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