Cession d’actions : 21 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00421

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Cession d’actions : 21 novembre 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/00421
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 35A

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 NOVEMBRE 2023

N° RG 22/00421

N° Portalis DBV3-V-B7G-U6XU

AFFAIRE :

[BA] [Y]

C/

[A] [G]

….

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Janvier 2022 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 202F00185

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Mélina PEDROLETTI

Me Oriane DONTOT

TC PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [BA] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 10]

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 – N° du dossier 25642

Représentant : Me Maxime DE LA MORINERIE de l’AARPI BRUNSWICK LEGAL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANT

****************

Monsieur [A] [G]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Mademoiselle [Z] [G]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Monsieur [C] [G]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Monsieur [F] [G]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Madame [T] [O] épouse [G]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Mademoiselle [AH] [G]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Monsieur [M] [R] Représenté par Monsieur [A] [R], son pére , en sa qualité de représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur [A] [R]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Monsieur [B] [R] Représenté par Monsieur [A] [R] , son pére , en sa qualité de représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 6]

Madame [N] [NJ]

[Adresse 3]

[Localité 6]

S.A.S. BOREAL YACHTS

[Adresse 12]

[Localité 4]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20220078

Représentant : Me Jean-Marie GAZAGNES de l’AARPI AMADIO PARLEANI GAZAGNES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0036

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 Septembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Ronan GUERLOT, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Ronan GUERLOT, Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Marietta CHAUMET, Vice-Présidente placée,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

Le 7 juin 2019, M. [Y] a signé une lettre d’intention en vue du rachat de l’intégralité des parts sociales composant le capital social de la société Boréal Yacht (la société Boréal).

Par un acte du 7 août 2019, M. [Y], d’une part, et M. [A] [G], Mme [T] [O] épouse [G], M. [F] [G], M. [C] [G], Mme [Z] [G], Mme [AH] [G], M. [A] [R], Mme [N] [NJ], M. [B] [R], M. [M] [R] (les consorts [G]-[R]), la SAS Boréal Yachts (la société Boréal), d’autre part, ont conclu un contrat de cession de 95 % des actions composant le capital social de la société Boréal.

Initialement prévue le 11 octobre 2019 entre les parties, la cession a finalement été réalisée en décembre 2020 entre les consorts [G] [R] et des tiers.

Le 10 mars 2020, les consorts [G]-[R] et la société Boréal Yachts ont assigné M. [Y] afin de voir prononcer la caducité du contrat de cession aux tors exclusifs de M. [Y] et de le voir condamner à leur payer certaines sommes au titres de divers chefs de préjudice devant le tribunal de commerce de Pontoise, qui par jugement contradictoire en date du 5 janvier 2022 a :

– rejeté les demandes d’irrecevabilité de M. [Y] ;

– dit les consorts [G]-[R] recevables et partiellement fondés en leurs demandes ;

– condamné M. [Y] à verser aux consorts [G]-[R] :

* la somme de 70 933 euros au titre de la réparation de la privation de la jouissance du gain ;

* la somme de 60 921,12 euros au titre d’indemnisation de frais divers occasionnés au cours de l’opération de cession infructueuse ;

* la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté les demandes reconventionnelles de M. [Y] ;

– rejeté la demande de M. [Y] en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [Y] aux entiers dépens de l’instance.

Le 20 janvier 2022, ce dernier a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.

Par conclusions signifiées par RPVA le 15 juillet 2022, les consorts [G]-[R] ont formé un appel incident.

Par conclusions notifiées par RPVA le 13 octobre 2022, M. [Y] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a :

* débouté les consorts [G]-[R] du surplus de leurs demandes d’indemnisation ;

* débouté la société Boréal Yachts de sa demande d’indemnisation de 50 000 euros ;

* débouté MM [G] et [R] de leurs demandes d’indemnisation de 15 000 suros chacun ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a :

*débouté M. [Y] de ses demandes d’irrecevabilité ;

* jugé les consorts [G]-[R] partiellement fondés en leurs demandes ;

* condamné M. [Y] à payer aux consorts [G]-[R] la somme de 131 854,12 suros à titre de dommages et intérêts ;

* débouté M. [Y] de ses demandes reconventionnelles ;

Et statuant à nouveau,

A titre liminaire,

– juger que :

*les demandes initiales des consorts [G]-[R] fondées à la fois sur la caducité et sur la responsabilité contractuelle sont irrecevables ;

*les demandes additionnelles des consorts [G]-[R] fondées exclusivement sur la responsabilité contractuelles sont irrecevables ;

*l’évolution des demandes des consorts [G]-[R] constitue un cas d’estoppel qui justifie l’irrecevabilité de leurs demandes ;

– rejeter des débats les pièces n°31, 35, 36, 37, 38,39, 40, 42, 46, 47, 50 et 52 des consorts [G]-[R], ainsi que tous les développements de leurs conclusions s’y rapportant en raison de la violation du secret professionnel des avocats ;

A titre principal,

– débouter les consorts [G]-[R], de l’ensemble de leurs demandes ;

Par conséquent,

– condamner les consorts [G]-[R] à restituer à M. [Y] la somme de 131 854,12 suros ;

A titre reconventionnel,

– juger que les consorts [G]-[R] ont engagé leur responsabilité contractuelle au titre de nombreuses inexécutions du contrat de cession ;

Par conséquence,

– condamner solidairement les consorts [G]-[R] au paiement de dommages et intérêts d’un montant à parfaire de 60 918,70 suros correspondant aux frais exposés par M. [Y], et ce en réparation du dol subi par M. [Y] ;

– condamner solidairement les consorts [G]-[R] au paiement de dommages et intérêts d’un montant de 1 319 051,25 suros correspondant à la perte de chance subie par M. [Y] de n’avoir pu réaliser une plus-value à l’issue de son investissement, et ce en réparation des inexécutions contractuelles qu’il a subies par M. [Y] ;

– condamner solidairement les consorts [G]-[R] au paiement de dommages et intérêts d’un montant de 229 500 euros correspondant à la perte de chance subie par M. [Y] de n’avoir pu percevoir une rémunération au titre de son mandat social, et ce en réparation des inexécutions contractuelles subies ;

En tout état de cause :

– condamner solidairement les consorts [G]-[R] et la société Boréal Yachts à payer à M. [Y] la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de la présente instance, dont distraction au profit de l’avocat de M. [Y], conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, dont le montant sera recouvré par Me Pedroletti conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Les consorts [G]-[R] et la société Boréal Yachts, dans leurs conclusions notifiées par RPVA le 15 juillet 2022, demandent à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il déboute M. [Y] de ses demandes d’irrecevabilité et de ses demandes reconventionnelles ;

– confirmer le jugement en ce qu’il a reconnu que M. [Y] était seul fautif de l’opération et que les consorts [G]-[R] étaient fondés à obtenir une indemnisation des préjudices subis ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a limité l’indemnisation due par M. [Y] aux consorts [G]-[R] à un montant de 79 933 euros au titre de la privation de la jouissance du gain et à un montant de 60 921,12 euros à titre d’indemnisation des frais exposés en pure perte ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande formulée par la société Boréal Yachts tendant à voir M. [Y] condamné à lui verser une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande formulée par M. [A] [G] tendant à voir M. [Y] condamné à lui verser une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande formulée par M. [A] [R] tendant à voir M. [Y] condamné à lui verser une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

En conséquence et statuant à nouveau,

– condamner M. [Y] à payer aux consorts [G]-[R] une somme de 280 554,52 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la privation de la jouissance du gain ;

– condamner M. [Y] à payer aux consorts [G]-[R] une somme de 122 958,12 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des pertes qu’ils ont dû supporter à l’occasion de l’opération ;

– condamner M. [Y] à payer à la société Boréal Yachts une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice d’atteinte à la réputation et au non-respect de l’obligation de confidentialité ;

– condamner M. [Y] à payer à M [A] [G] une somme de 15 000 euros au titre de dommages-intérêts en réparation du temps passé en vain à la préparation de la cession d’actions ;

– condamner M. [Y] à payer à M [A] [R] une somme de 15 000 euros au titre de dommages-intérêts en réparation du temps passé en vain à la préparation de la cession d’actions ;

– condamner M. [Y] à payer aux consorts [G]-[R] et à la société Boréal Yachts une somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en complément de la condamnation déjà prononcée sur ce fondement ;

– débouter M. [Y] de l’ensemble de ses demandes ;

– condamner M. [Y] aux dépens, dont distraction au profit de maître Oriane Dontot conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1 décembre 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

1- Sur la recevabilité des demandes des consorts [G] [R]

Pour solliciter l’infirmation du jugement ayant rejeté ses fins de non recevoir, M. [Y] développe plusieurs moyens.

En premier lieu, il soutient que les demandes des intimés fondées tant sur la caducité que sur la responsabilité contractuelle sont irrecevables car incompatibles l’une avec l’autre. A cet égard, il soutient que la caducité est exclusive de la responsabilité contractuelle.

Il ajoute que les demandes indemnitaires sont également irrecevables faute de satisfaire aux conditions des demandes additionnelles. Il fait valoir qu’elles ne se rattachent pas par un lien suffisant à la demande initiale de caducité. Il considère en outre qu’étant irrecevables, compte tenu de leur incompatibilité avec les demandes fondées sur la caducité, les demandes indemnitaires additionnelles sont en conséquence irrecevables.

En deuxième lieu, il prétend que les demandes indemnitaires sont de surcroît irrecevables au regard du principe de l’estoppel. A l’appui de ce moyen, l’appelant soutient que les intimés se sont contredits à son détriment en abandonnant toute référence à la caducité dans le dispositif de leurs conclusions de sorte qu’ils ont reconnu la validité de la cession.

Pour leur part, les consorts [G]-[R] répondent qu’ils n’ont présenté qu’une seule prétention depuis l’assignation, à savoir l’indemnisation de leurs préjudices en raison de la non réalisation de la cession du fait des fautes commises par M. [Y]. Ils font valoir qu’après le changement de position de l’appelant sur l’exécution forcée de la cession, ils n’avaient plus à solliciter la caducité mais seulement l’indemnisation de leurs préjudices. Ils contestent par ailleurs avoir présenté une demande additionnelle et font valoir que si leur moyen indemnitaire était regardé comme une demande additionnelle à la caducité, il devrait être alors considéré comme poursuivant le même but d’indemnisation que la caducité.

Ils contestent en outre que l’irrecevabilité de la demande principale entraîne celle de la demande additionnelle. Sur ce point, ils font observer d’une part, que la jurisprudence admet que la caducité d’un contrat puisse donner lieu à l’engagement de la responsabilité contractuelle de l’autre partie. Ils en déduisent d’une part, que leur demande fondée sur la caducité est recevable et d’autre part, que l’irrecevabilité d’une demande additionnelle ne découle pas de l’irrecevabilité d’une demande principale.

S’agissant de l’estoppel, ils font valoir qu’ayant formé depuis l’assignation des demandes indemnitaires, l’appelant n’a pas pu être induit en erreur sur leurs intentions.

Réponse de la cour

L’article 65 du code de procédure civile dispose que constitue une demande additionnelle la demande par laquelle une partie modifie ses prétentions antérieures.

L’article 70 du même code prévoit notamment que les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Pour rejeter les fins de non recevoir soulevées par M. [Y], le tribunal a retenu au visa de l’article 70 précité que ce dernier ne prouvait pas que les prétentions des intimés étaient contradictoires au motif que ce sont les mêmes demandes qui figurent dans leur dispositif et que seul le moyen a changé.

En l’espèce, le dispositif de l’assignation des intimés (pièce 69 des consorts [G] [R]) est conçu de la manière suivante :

‘Prononcer la caducité du contrat de cession aux torts exclusifs de M. [Y] ;

Condamner M. [Y] au paiement des sommes de (…)’

Le dispositif de leurs dernières conclusions devant le tribunal est pour sa part conçu de la manière suivante :

‘Vu les dispositions des articles 1104, 1217; 1231-1, 1231-2 et 1231-6 alinéa 4 du code civil (…), il est demandé au tribunal de condamner M. [Y] au paiement des sommes de (…)’

Il résulte de ce qui précède que, dès lors que les demandes de caducité et de dommages et intérêts figuraient au dispositif de l’assignation des consorts [G]-[R], la circonstance que ces derniers n’aient maintenu ensuite au dispositif de leurs dernières conclusions présentées devant le tribunal que leurs demandes indemnitaires ne peut pas avoir pour conséquence que ces demandes s’analysent en demandes additionnelles.

De surcroît, l’incompatibilité alléguée entre la demande de caducité et la demande indemnitaire, à la supposer fondée, est inopérante puisque les intimés ne forment plus aucune demande au titre de la caducité.

Enfin, il y a lieu de rappeler que le principe de l’estoppel, selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d’autrui, suppose que les prétentions de la partie à laquelle la fin de non-recevoir est opposée, induisent l’adversaire en erreur sur les intentions de leur auteur.

Or M. [Y] ne démontre nullement que l’évolution des demandes des consorts [G] [R] résultant de l’abandon de leur demande de caducité l’ait induit en erreur sur les intentions de ces derniers, dès lors que les intimés ont toujours formé à son encontre, dès l’acte introductif d’instance, des demandes indemnitaires.

Les fins de non recevoir ne sont donc pas fondées. Il convient en conséquence de confirmer le jugement de ce chef.

2- Sur la violation du secret professionnel et le rejet des pièces n° 31, 35 à 40, 42, 46, 47, 50 et 52

M. [Y] affirme que les pièces des intimés numérotées de 31 à 51 doivent être écartées des débats. Il soutient qu’elles violent le secret professionnel car elles contiennent des échanges entre avocats ou entre M. [G] et ses avocats. Il fait valoir que, si le secret ne s’imposait pas à M. [G], il était en revanche opposable à son avocat et qu’en l’espèce ce n’est pas M. [G] qui a transmis les documents litigieux mais son conseil qui le représentait. Il ajoute que constitue également une violation du secret professionnel le fait pour un avocat d’attester des faits dont il a eu connaissance.

Les intimés répondent qu’ils pouvaient produire en justice des correspondances qu’ils ont adressées à leurs conseils sans méconnaître le secret professionnel auquel sont tenus les avocats. Ils ajoutent que n’ayant pas été le conseil de l’appelant, leur ancien conseil pouvait établir une attestation qu’ils pouvaient verser aux débats sans violer le secret professionnel.

Réponse de la cour

L’article 66-5, alinéa 1er, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 dispose qu’en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l’avocat et ses confrères à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention ” officielle “, les notes d’entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel (…)’

Il résulte de cet article que la confidentialité des correspondances adressées par un avocat à son client ne s’impose pas à ce dernier lequel, n’étant pas tenu au secret professionnel, peut les produire en justice (Com., 8 décembre 2015, pourvoi n° 14-20.521). Ainsi, le client de l’avocat, n’étant pas lui-même tenu au secret professionnel, est autorisé à produire en justice les lettres ou des mails dont son avocat est l’auteur et dont il a été destinataire.

En l’espèce, la pièce 31 est un mail du 25 mai 2020 adressé par l’avocat de M. [G], Me Gazagnes, à M. [W]. Il transfère un précédent message de Me Perri-Ancel, également avocate de M. [G], à ce dernier, dont l’objet est de lui résumer ‘un échange confidentiel’, non transmis, intervenu entre Me Perri-Ancel et l’avocat de l’appelant, Me [J], portant sur l’accord donné par Me Perri-Ancel à son confrère pour une signature différée des annexes du contrat de cession et sur la prochaine transmission de celles-ci. Produit en justice avec l’accord de M. [G], cet échange entre ce dernier et son avocate n’est donc pas couvert par le secret professionnel.

Il en va de même pour les pièces numérotées 35 à 40 et 42. Ces pièces contiennent plusieurs courriels du 20 mai 2020 adressés par M. [G] à son avocat. Les pièces 36 à 39 ont pour objet de transférer des messages antérieurs de la société Merill Datasite One, opérateur de la data room, mise en place à l’occasion de la cession litigieuse. Ils portent pour l’essentiel sur le process de la cession, sur l’ouverture de la data room et son accès. La pièce 40 est un mail transférant à l’avocat de M. [G] des échanges du 15 juillet 2019 intervenus avec M. [Y] et portant sur les accès à la data room et son utilisation. La pièce 42 reproduit un courriel adressé le 25 mai 2020 par Me Gazagnes à M. [W] qui transfère un précédent message du même jour envoyé par M. [G] à Me Gazagnes, intitulé ‘statuts SAS’, et ayant pour objet l’envoi à ce dernier du projet de statuts de la société Boréal.

La pièce 46 n’est pas non plus couverte par le secret professionnel pour les mêmes raisons. En effet, elle contient un échange entre MM. [G] et [R], d’une part, et l’avocate de ces derniers, Me Perri-Ancel, d’autre part. Dans ce message, Me Perri-Ancel demande à ces derniers de lui renvoyer signés certains documents joints (nouveaux statuts de la société Boréal, procès-verbal de décisions et pouvoir).

Il en va de même pour la pièce n° 47 qui contient un message du 8 octobre 2019 adressé par M. [G] à son avocate l’informant de l’envoi des documents cités ci-dessus.

La pièce 50 contient plusieurs courriels datés du 19 mai 2020. Le premier nommé ‘TR premiers contacts’ est un message de maître Gazagnes à M. [W]. Il transfère une pièce jointe nommée ‘fiche de cadrage [Y]…’ Le second est un message de M. [G] à ces avocats qui contient plusieurs autres messages et dans lequel on peut lire : ‘ci-dessous les [mails] échangés avec Mme [K] de la CCI de [Localité 11] qui prouvent que c’est [BA][Y] qui à l’origine de l’opération. Nous avions, on le lit ci-dessous, d’abord décliné l’offre.’ Il s’agit donc de correspondances entre M. [G] et son avocate que ce dernier pouvait produire en justice.

Enfin, la pièce n° 52 est un message adressé le 25 mai 2020 par Me Gazagnes à M. [W], transférant une suite de mails. Le premier est un message entre Me Perri-Ancel et MM [G] et [R] concernant un message qu’elle a adressé à son confrère Me [J] à la suite de l’échec d’une réunion de signatures d’un avenant. Ce message répond à un autre adressé par M. [G] à son avocate également contenu dans la pièce 52. Pour les raisons exposées ci-dessus, cette pièce pouvait également être produite en juste sans méconnaître les dispositions de l’article 65-1 précité.

Au regard de ce qui précède, c’est donc à juste titre que le tribunal a décidé de ne pas écarter des débats les pièces numérotées 31, 35 à 40, 42, 46, 47, 50 et 52.

Il convient, ajoutant au jugement, de rejeter cette demande.

3- Sur la responsabilité des parties

Sollicitant l’infirmation du jugement sur ce point, M. [Y] conteste les motifs qui ont exclu la responsabilité des consorts [G] [R], d’une part, et ceux qui ont, à l’inverse, retenu sa responsabilité en le condamnant à leur payer la somme de 131 854,12 euros à titre de dommages et intérêts, d’autre part.

Sur les fautes des consorts [G] [R], M. [Y] avance plusieurs moyens :

– il soutient que les intimés ont commis un dol lors de la conclusion du contrat en ne lui signalant pas spontanément l’anomalie comptable affectant ‘le produit constaté d’avance [I]’ et ‘l’avoir Zaharik’. Il expose que ces erreurs ont eu une incidence conséquente sur le prix de cession en le majorant.

Il souligne par ailleurs que les discussions intervenues entre les parties après la conclusion du contrat sur la redéfinition du prix de cession ont révélé la volonté des intimés de l’augmenter.

En ce qui concerne les erreurs comptables, il ajoute qu’il attachait une importance particulière à la situation comptable de la société Boréal et expose en réponse aux critiques des intimés que, s’agissant d’un dol, il lui était loisible d’engager leur responsabilité délictuelle sans qu’on puisse lui être opposé la règle du non cumul des responsabilités.

– il soutient que, s’étant servis des informations obtenues à l’occasion de la cession litigieuse pour structurer la vente qu’ils ont conclue finalement avec un autre acquéreur moyennant un prix de 8 800 000 euros, soit 800 000 euros de plus que la valorisation retenue dans le contrat litigieux, les intimés ont engagé leur responsabilité par leur comportement déloyal.

M. [Y] soutient en outre que les intimés ont commis des fautes à son égard par leurs inexécutions contractuelles. A ce titre, il expose que ces derniers ne lui ont pas communiqué, en méconnaissance de leurs obligations contractuelles, les sept annexes prévues au contrat. Il leur impute également la communication tardive des éléments comptables et financiers de la société Boréal, ce qui l’a contraint à accepter le report d’audits complémentaires. Il souligne qu’en l’absence de remise de la situation intermédiaire comptable au 30 juin 2019, la réalisation de l’audit était impossible et que, sans ce document très important, l’accès à la data room dès juin 2019 n’était pas utile. Il précise qu’il a vainement relancé les cédants sur la communication de cette situation intermédiaire.

Il ajoute au titre des fautes imputées aux intimés qui lui ont refusé la rencontre avec les cinq salariés clefs de l’entreprise pourtant prévue comme condition suspensive du contrat.

Il soutient encore qu’ayant réalisé la transformation de la société en SAS au delà des délais prévus par le contrat, les intimés ont également manqué à ce titre à leurs obligations contractuelles.

Il leur impute aussi le fait d’avoir tenté fautivement de renégocier le contrat de cession. A cet égard, il avance trois moyens portant sur le comblement du prix de cession, la renégociation du bail de la société Boréal et la conclusion d’un contrat d’architecture navale :

– sur le premier point, il souligne que les cédants ont tenté d’inclure dans le prix un complément comprenant la trésorerie générée par la société entre la signature de l’avenant et la date de la réalisation, en violation de l’article 2.3 du contrat ;

– sur le bail commercial de la société Boréal, il fait valoir que l’article 7.2 (g) du contrat prévoit le maintien du bail initial car il fait référence au bail ‘conclu’ et non ‘à conclure’. Il précise que les cédants lui ont transmis le 26 mars 2019 un bail daté du 12 mars 2019 et qu’ensuite ils lui ont adressé le 3 septembre 2019 un nouveau bail très défavorable, en violation de leurs engagements de reconduire le bail en cours. Il ajoute que malgré ce différend, il a tout de même souhaité maintenir l’acquisition de la société alors que le quatrième amendement du contrat de cession du 21 novembre 2019 laissait de côté la question du bail. Il fait observer que les cédants affirment avec mauvaise foi qu’un nouveau bail devait être conclu au motif que l’ancien ne devait régir les relations de la société Boréal avec son bailleur, la société Australe que du temps où la société Boréal et son bailleur avaient les mêmes dirigeants. Il soutient que l’unique bail à prendre en compte est celui conclu le 12 mars 2019 qui a été mis à disposition dans la data room. Il fait valoir qu’au moyen du nouveau bail, les cédants souhaitaient faire supporter à la société Boréal non seulement le coût des travaux de réalisation d’un nouveau bâtiment mais aussi les frais de remise en conformité des locaux existants ;

– s’agissant de la conclusion d’un contrat de construction navale, il fait valoir que tant l’article 7.1 (I) du contrat que la lettre d’intention du 7 juin 2019 y font expressément référence’). Il fait observer que la proposition ultérieure de M. [G] de conclure un contrat d’architecture navale ne concernant qu’un seul navire ne satisfait pas aux stipulations du contrat sur ce point.

Sur les fautes qui lui sont reprochées, M. [Y] soutient d’abord n’avoir commis aucune faute dans l’exécution du contrat. A cet égard, il avance les moyens suivants.

– il affirme d’abord que l’inexécution ne résulte que du comportement fautif des intimés. Il fait valoir que, pour sa part, il a, en application de l’article 5.2 du contrat, accompli ‘les meilleurs efforts’ pour aboutir à la réalisation des conditions suspensives. A cet égard, contestant les affirmations des consorts [G]-[R], il fait observer qu’il n’était tenu qu’à une obligation moyen et souligne que la plupart des conditions suspensives dépendait au demeurant de leur volonté. Il soutient ainsi que la non réalisation des différentes conditions suspensives est due aux fautes commises par les intimés. Il prétend que leur attitude visait à le décourager à poursuivre son acquisition.

Il soutient ensuite qu’ayant retenu que les deux parties étaient de mauvaise foi, le tribunal devait en tirer comme conséquence soit le rejet de toutes les demandes indemnitaires des parties, soit de lui allouer également des dommages et intérêts.

Pour leur part, les intimés soutiennent que l’appelant a renégocié de mauvaise foi les conditions essentielles du contrat. A ce titre, ils font valoir qu’il a tenté de remettre en cause les conditions financières du contrat au prétexte de la mention erronée de ‘l’en cours Steinamn’ dans les comptes clos au 30 septembre 2018 à la place d’un ‘acompte’. Ils soulignent que cette erreur pouvait être couverte par la garantie de passif et qu’elle n’avait aucune incidence sur le résultat 2019 puisque la commande a été confirmée par le client [I] le 25 octobre 2019 et recréditée ensuite en acompte. Ils exposent que M. [Y] s’est saisi de ce prétexte pour formuler des demandes additionnelles (cession de l’actif immobilier, extension de la clause de non concurrence, conservation de la trésorerie, nouvelle condition suspensive relative au financement) dans le but de retarder ou d’empêcher la cession. Ils soulignent en outre que l’appelant a changé plusieurs fois de position en actant la rupture du contrat en 2019 puis en demandant à nouveau, le 4 février 2020, la réalisation de la cession après avoir appris les bons résultats de la société Boréal. Ils en déduisent que M. [Y] a méconnu l’obligation de résultat de l’article 5-2 du contrat l’obligeant de ne rien faire qui pourrait raisonnablement rendre plus difficile l’opération ou retarder la réalisation des conditions suspensives et exposent que, par l’ensemble de ses actes (non signature des annexes au contrat de cession, connexion tardive à la data room, contre proposition transmise le jour du closing, demandes de modification du calendrier de réalisation de l’audit, de transformation de la société en SAS et de la rencontre avec les salariés), l’appelant a retardé l’accomplissement des conditions suspensives, engageant ainsi sa responsabilité à leur égard.

Répondant aux moyens de l’appelant, ils contestent son analyse du jugement s’agissant de la mauvaise foi des parties relevée par le tribunal laquelle ne concerne que leur présentation des faits et non l’exécution de leurs obligations contractuelles. Sur ce point, ils soutiennent avoir exécuté de bonne foi le contrat en s’efforçant de répondre aux demandes de renégociation de l’appelant et ajoutent qu’ en tout état de cause, le comportement déloyal d’une partie ne saurait la priver d’une éventuelle indemnisation qui est un droit substantiel des parties.

Répondant aux allégations de l’appelant sur les fautes qu’ils auraient commises lors de l’exécution du contrat et en particulier celles qui concerneraient le maintien du bail de la société Boréal et la conclusion d’un contrat global d’architecture navale avec le cessionnaire, ils font d’abord valoir que le bail de la société Boréal conclu le 1er janvier 2015 ne devait pas être maintenu après la cession. A cet égard, ils exposent qu’après l’acquisition d’un bâtiment par la société Australe, bailleur de Boréal, une version courte d’un nouveau bail signée le 12 mars 2019, destinée à régir provisoirement les relations des deux sociétés, a été annexée dans la data room en juillet 2019 et que M. [Y] était informé de ce qu’ils entendaient conclure un bail similaire à celui du 12 mars 2019 et que la version ‘courte’ n’était destinée à régir les relations du bailleur et du preneur que pour la période où bailleur et preneur avaient les mêmes dirigeants. Ils ajoutent qu’une version exhaustive était prévue pour la période postérieure à la cession de la société Boréal. Ils précisent en outre que s’ils admettent l’ajout d’un avenant au bail pour prendre en compte la construction d’un nouveau bâtiment, ils contestent néanmoins les allégations de M. [Y] selon lesquelles le loyer du nouveau bail aurait servi à financer la construction du nouveau bâtiment puisque le projet d’achat a été initié dès 2018. Ils contestent également ses allégations sur le caractère moins favorable du nouveau bail, estimant qu’il intègre des clauses habituelles pour ce type de contrat.

S’agissant ensuite du contrat d’architecture navale, ils font valoir que l’appelant ne démontre nullement qu’il était convenu de conclure un tel contrat pour les bateaux non encore conçus. Ils soutiennent qu’il était seulement prévu d’accompagner le cessionnaire pendant une période de six mois pour la finalisation de nouveaux navires en cours de réalisation.

Ils contestent en outre d’avoir voulu renégocier à la hausse le prix de cession et imputent la responsabilité de réouverture des négociations à l’appelant. Ils font valoir que le 1er octobre 2019, ils ont proposé une cession de 100 % de leurs actions moyennant un prix de 7 750 000 euros ajusté, le cas échéant, sur la base de l’excédent brut d’exploitation à la clôture des comptes au 30 septembre 2019 avec un plafond de 8 millions d’euros alors que M. [Y] proposait une cession à 8 millions d’euros. Ils soulignent que les trois propositions successives ont repris le prix planché de 7 750 000 euros avec un ajustement éventuel.

S’agissant de l’accès aux documents nécessaires à l’audit, ils font valoir que l’ensemble de la documentation a été mis en ligne dès qu’elle a été disponible et que tous les membres de l’équipe de l’appelant y ont eu accès dès le 11 juin 2019. Ils font observer que ces derniers ne se sont toutefois connectés qu’entre le 29 juillet et le 29 août 2019 et affirment que la situation comptable intermédiaire au 30 juin 2019 de la société Boréal n’a pas été consultée par les équipes de ce dernier à l’exception de M. [E].

S’agissant de la condition suspensive de rencontre avec les salariés clefs de Boréal, ils admettent qu’elle ne s’est pas réalisée au motif qu’elle était devenue moins prioritaire du fait de la réouverture des négociations par l’appelant.

S’agissant de la condition suspensive de transformation de la société Boréal en SAS, ils soutiennent qu’au regard du calendrier de la transformation, aucune faute ne peut leur être reprochée.

Enfin, en ce qui concerne les demandes indemnitaires de l’appelant fondées sur dol, ils lui objectent le principe du non cumul des responsabilités. Ils ajoutent en outre que l’appelant soutient à tort que son action en responsabilité fondée sur le dol est délictuelle alors que la jurisprudence retient désormais qu’il s’agit d’une responsabilité contractuelle. Ils font valoir qu’en tout état de cause, les erreurs comptables relevées par M. [Y] ne constituaient pas des manoeuvres dolosives dans la mesure où ne sont démontrés ni le caractère déterminant, ni le caractère intentionnel de ces erreurs. Ils soulignent à cet égard que le rapport d’audit fait état d’une erreur ou d’une omission et non d’une fraude. Ils exposent que l’erreur ‘en cours [I]’ figurant dans les comptes clos au 30 septembre 2018 ne pouvaient avoir pour objectif de tromper l’appelant puisqu’elle est antérieure à leur rencontre de mars 2019. Ils soutiennent enfin que l’erreur ‘[I]’ devait être traitée au titre de la garantie de passif et non par la voie d’une renégociation du prix.

Les intimés répondent que la jurisprudence, qui excluait l’indemnisation de la perte de chance d’obtenir les gains que permettait d’espérer la conclusion d’un contrat, a été confirmée par le nouvel article 1112 du code civil.

A titre surabondant, ils font valoir qu’ils ignoraient que M. [Y] entendait à terme revendre sa participation n’ayant pas été informés que l’opération était un ‘LBO’. Ils en déduisent que le préjudice allégué n’était pas prévisible.

Réponse de la cour

Aux termes de l’article 1103 du code civil, dans sa rédaction issue de celle de l’ordonnance du 10 février 2016, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 1104 du même code prévoit qu’ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1231-1 du même code dispose que ‘le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.’

A- Sur les fautes reprochées aux consorts [G]-[R]

En l’espèce, par une lettre d’intention du 7 juin 2019, M. [Y] a manifesté son intérêt pour l’acquisition de 100 % des titres de la société Boréal (pièce 2 de l’appelant).

Le contrat du 7 août 2019 a ensuite stipulé que ce dernier s’engageait à acquérir 95 % des actions détenues par le ‘groupe [G]’ et le ‘groupe [R]’ dans le capital de la société Boréal moyennant un prix forfaitaire et global de 7 600 000 euros, sous réserve de la réalisation de conditions suspensives définies à l’article 5 (pièce 1 de l’appelant).

L’article 5 précité prévoit en effet que la cession est subordonnée à la réalisation de quatre conditions suspensives portant notamment sur l’obtention d’un financement de 4 650 000 euros pour l’acquisition des actions, sur la réalisation d’un audit comptable, financier, juridique, fiscal, informatique, social et commercial ainsi que des matériels et stock, sur la transformation de la société en SAS et sur la rencontre de cinq salariés clefs.

L’article 5.2 du contrat stipule en outre que ‘l’acquéreur s’engage à faire ses meilleurs efforts, en vue de permettre la réalisation des conditions suspensives (….) et de ne rien faire qui pourrait raisonnablement rendre plus difficile ou retarder la réalisation des conditions suspensives…’

L’article 7.1 stipule que ‘la réalisation [de la cession] interviendra (…) au plus tard le 11 octobre 2019.

* Sur les erreurs ou irrégularités comptables et le dol reprochés aux consorts [G] [R]

L’appelant s’appuie sur les articles 10.3 (e) du contrat litigieux intitulé ‘comptes 2018″ prévoyant notamment que ‘les comptes 2018 donnent une image fidèle et sincère de l’état des affaires, du patrimoine, de la situation financière, des résultats et de l’actif et du passif de la société ‘ et sur l’article 10.3 (f) qui stipule en son paragraphe (ii) ‘qu’il n’y a eu depuis les comptes 2018 aucun événement ayant eu des conséquences significativement défavorables sur la société par rapport à sa situation reflétée dans les comptes 2018, notamment…’

Il n’est pas contesté que l’audit comptable a révélé que, dans les comptes clos au 30 septembre 2018, une somme de 145 179 euros a été mentionnée par erreur comme étant un ‘en cours Steimman’ alors qu’elle aurait dû être comptabilisée comme ‘un acompte’.

M. [V], expert’comptable de M. [Y] (pièce 22 de l’appelant) note à ce sujet dans son mail du 23 septembre 2019 adressé à l’appelant que l’expert-comptable des intimés s’est trompé sur deux points majeurs en oubliant ‘un produit constaté d’avance en N-1 qui a eu un impact assez significatif sur le résultat’ et en oubliant ‘un avoir de 580 K euros dans la situation intermédiaire (…). Il écrivait dans ce message : ‘autant dire que le dirigeant est furax contre lui. Je pense qu’il a compris que cela impliquerait un certain ajustement du prix.’

M. [Y] allègue que cette erreur, non divulguée spontanément, constituerait une déclaration trompeuse des cédants sur le caractère fidèle et sincère des comptes 2018 et qu’elle a été déterminante de son consentement dans la mesure où elle a abouti à un gonflement artificiel du prix de cession.

Pour démontrer le caractère déterminant qu’aurait eu cette erreur, il se fonde sur sa lettre d’intention précitée (pièce 9), sur un courriel qu’il adressé le 13 juin 2019 à M.[G] (pièce 11) et sur un échange de mails du 29 juillet 2019 avec ce dernier relatif à la communication de la situation intermédiaire de la société Boréal établie fin juin 2019 (pièce 14).

Si ces documents concernent l’audit comptable de la société Boréal, il ne peut toutefois en être déduit ni le caractère déterminant de l’erreur dénoncé sur le consentement de M. [Y], ni l’intention des cédants de dissimuler une information importante pour le cessionnaire dont ils auraient eu connaissance.

De surcroît, l’erreur relative à la comptabilité de la somme versée par M. [I] n’a pas eu d’incidence puisqu’il résulte du courriel du 25 octobre 2019 de M. [G] à son avocat ainsi que des messages de M. [I], qui sont transférés avec ce mail, que ce dernier a accepté que son acompte soit conservé par la société Boréal de sorte qu’il a confirmé sa commande sa commande.

Par ailleurs et tout état de cause, si cette erreur avait eu une incidence sur le prix de cession, elle aurait eu vocation à être couverte, comme l’a retenu à juste titre le tribunal, par la garantie d’actif et de passif. En effet, le contrat prévoyait le principe d’une indemnisation à la charge des vendeurs en cas de survenance d’un dommage résultant de l’inexactitude ou de la violation de toute déclaration et garantie formulée aux articles 10.2 ou 10.3, étant rappelé que ce dernier article prévoit à son paragraphe (e) (i) que ‘les comptes 2018 donnent une image fidèle et sincère de l’état des affaires, du patrimoine, de la situation financière, des résultats et de l’actif et du passif de la société.'(voir articles 10.3 et 11 du contrat de cession, pièce 1 de l’appelant et des intimés).

De surcroît, c’est par une allégation dénuée d’offre de preuve que l’appelant affirme dans ses écritures que les cédants auraient négocié à dessein un plafond de garantie ‘spécialement bas, en l’occurrence 400000 euros’, correspondant exactement au montant ‘dont le prix a été indûment gonflé en raison du PCA Steimann.’

Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d’une réticence dolosive commise par les cessionnaires à l’encontre du cédant n’est pas fondé.

* Sur l’absence de communication des annexes par les consorts [G] [R]

L’appelant reproche aux intimés de n’avoir communiqué aucune des sept annexes prévues par le contrat de cession, dont le contrat de bail unissant la société Boréal à la société Australe et soutient que le nouveau bail était destiné à faire supporter par la société Boréal, une fois cédée, le coût de la construction d’une extension de 600 m2.

En page 32 du contrat de cession du 7 août 2019 (pièce 1 des intimés) sont listées les annexes, à savoir la convention de séquestre (annexe E), l’offre de financement (annexe H), le contrat de cession des droits de propriété intellectuelle (annexe J), l’acte de vente des locaux (annexe 6.2), un modèle de lettre de démission (annexe 7.2 d), le bail commercial entre la SCI Australe et la société Boréal (annexe 7.2 g) et les statuts de la société Boréal à jour de l’acte de cession (annexe 10.3 b i).

Si à l’exception du modèle de lettre de démission, les autres annexes sont vierges, il résulte d’un mail du 25 mai 2020 adressé par Me Gazagnes, contenant un autre courriel du même jour relatif à un échange entre Me Perri-Ancel, avocate de M. [G] et ce dernier, que les parties s’étaient accordées pour une signature différée des annexes et ensuite leur envoi (pièce 31 des intimés), ce qui n’est pas discuté par l’appelant.

Ainsi, aux termes de message, il est indiqué : ‘pour répondre à ton mail du 18 mai au sujet de mon échange avec [D] [J], je te joins le mail que je t’adressais alors pour te faire part de l’envoi du contrat de cession pour signature et des annexes à mon confrère. N’ayant pas la possibilité de te transférer l’échange confidentiel du 7 août 2019, mon propos était de lui confirmer mon accord pour une signature différée des annexes, car il m’indiquait n’avoir pas le temps de les revoir. Toutefois, je lui les transmettrais avec le contrat de cession, car elles sont finalisées ; ce, afin de pas retarder le calendrier de la transaction.’

S’il est constant que les parties étaient en désaccord en particulier sur le contrat de bail applicable à la suite de la cession, il n’est toutefois pas établi que les annexes, dont le bail, quel qu’il soit, n’ont pas été transmises à l’appelant.

* Sur les fautes des appelants dans la mise à disposition des document de l’audit

Comme indiqué ci-dessus, le contrat de cession prévoit au titre des conditions suspensives la réalisation de revues complémentaires limitées (…), notamment dans les domaines comptables, financier, juridique et fiscal ‘sur la base des comptes 2018″ (voir article 5.1 du contrat de cession, pièce 1 des intimés).

En application de l’article 5.2 du contrat, ces conditions suspensives devaient être réalisées avant le 23 septembre 2019.

Toutefois, sur ce dernier point, l’appelant fait valoir que l’audit contractuel aurait dû être réalisé au plus tard le 25 juillet 2019, date butoir prévue dans la lettre d’intention, et qu’il a été obligé de le reporter en septembre 2019, parce que la situation intermédiaire comptable de la société au 30 juin 2019, document considéré par M. [Y] comme indispensable à la réalisation de l’audit, ne lui a été communiqué à temps par les intimés.

S’agissant du calendrier de réalisation des ‘revues’, la cour observe que si la lettre d’intention (pièce 2 des intimés) indique effectivement dans son paragraphe 9 intitulé ‘calendrier indicatif’ que les prochaines étapes sont : ‘au plus tard, le 25 juillet 2019 : levée de la condition suspensive liée au caractère satisfaisant des audits’, le contrat de cession du 7 août 2019 ne fait pas état de cette date butoir. Il stipule, comme indiqué ci-dessus, une date de réalisation plus tardive pour toutes les conditions suspensives.

Pour établir le retard des intimés dans la mise à disposition des documents et notamment de l’état intermédiaire comptable dans la data room par rapport au calendrier prévisionnel, M. [Y] verse aux débats deux mails du 22 juillet 2019 contenant des échanges intervenus avec M. [G] et dans lesquels ce dernier indique en réponse à une interrogation de M. [Y] sur la possibilité de lui communiquer la situation intermédiaire finalisée fin juin : ‘nous avons finalisé la situation intermédiaire aujourd’hui avec notre comptable (…) Nous avons avec le comptable alimenté la data room de la majorité des documents demandés. Il nous reste à y mettre un peu d’ordre demain matin avant de publier et ainsi vous donner accès.’

Au demeurant les consorts [G] [R] ne discutent pas que la situation intermédiaire comptable de la société Boréal au 30 juin 2019 n’a été publiée sur la data room que le 29 juillet 2019.

Les documents versés aux débats montrent que la data room a été ouverte à M. [G] dès le 11 juin 2019 (pièce 36 des intimés) et que l’opérateur Merill DatasiteOne a adressé le 12 juin 2019 ‘à tous’ les invitations de connections (pièce 37).

Il est constant que M. [Y] y avait également accès (pièce 40 des intimés). Un mail du 19 juin 2019 de ce dernier adressé à M. [G] précise que ses experts-comptables, soit M. [V] et son équipe, ont eu bien accès à la data room (pièce 39 des intimés).

S’agissant des documents consultables sur la data room dans la perspective de la réalisation de l’audit, le message électronique du 13 juin 2019 de l’opérateur de la data room indique que plusieurs documents ont été publiés dans la data room (pièce 38 des intimés). Ce message liste les documents par catégorie. Contrairement aux affirmations de l’appelant, cette liste apparaît suffisamment précise pour permettre l’identification des documents. Sont ainsi visés des relevés bancaires 2016 à 2019, le grand livre général 2016 à 2018, et la balance 2016 à 2018. Et bien que le mail de l’opérateur n’indique pas qu’il s’agit de documents publiés en vue de l’audit, M. [Y] ne peut toutefois pas sérieusement affirmer qu’ils ne se rapportent pas à l’opération litigieuse, dès lors que l’ensemble des messages de cet opérateur se rapportent à la cession.

S’agissant plus précisément des dates de consultations et du type de documents consultés, la pièce 57 des intimés liste les connexions à la data room ainsi que la catégorie des documents consultés.

Ce document montre que Me [J], avocat de M. [Y], a consulté en septembre 2019, des documents ‘provisions pour garanties purgées’ ; le 29 juillet 2019 des documents intitulés ‘diagnostics, AG, compta 30 09 2018, URSSAF, legal, Hemos, contrats, compta 30 juin 2019, AT, immobilier et balance’.

Ce document fait état également d’autres connexions en juillet 2019 et septembre 2019 de M. [D] [P] ou de Me [J] portant sur des diagnostics, des rapports de gestion, des ‘AG’.

Il fait également état de connexions le 29 juillet 2019 de M [L] (membre de l’équipe d’expert comptable de M. [Y]) portant sur le document nommé ‘compta 30 06 2019 / bilan et compte de résultat’.

A la même date, des documents ‘compta 30 06 2019 / bilan et compte de résultat’ ont été consultés par le conseiller financier de M. [Y], M. [E]. En outre, il ressort de ce document que M. [Y] s’est connecté à la data room le 25 juillet 2019.

Dès lors, si désormais M. [Y] reproche essentiellement aux cédants de ne pas lui avoir communiqué en temps utile dans la data room ouverte à la mi juin 2019 l’état comptable intermédiaire au 30 juin 2019 de la société Boréal, force est de constater que la data room comportait dès son ouverture de nombreux documents notamment comptables, qui ont pu être examinés en juillet ou en septembre 2019 par les membres de l’équipe de M. [Y] et qu’elle a été complétée seulement un mois et demi après son ouverture par la publication de l’état intermédiaire comptable au 30 juin 2019, étant observé que, selon la liste des connexions, MM. [J], [L] et [E] ont consulté dès le 29 juillet 2019 à 9 h 55, un document nommé ‘compta 30 06 2019″.

Si M. [Y] s’est enquis fin juillet 2019 de l’état intermédiaire comptable arrêté au 30 juin 2019 (voir les échanges de mails du 29 juillet 2019 à 9 h 25 – pièce 14 de M. [Y]), il ne ressort pas de ce message rédigé comme suit : ‘[A], est-ce qu’il te serait possible de poster sur la data room ou bien de me communiquer par mail la situation intermédiaire que vous avez finalisée à fin juin 2019″ en réponse au message du 22 juillet 2019 à 18 h 32 de M. [G] rédigé comme suit : ‘ Bonsoir [BA], un petit mot pour te tenir informé de la suite des opérations…Nous avons finalisé la situation intermédiaire aujourd’hui avec notre comptable, un résultat au delà de nos espérances. Nous avons avec le comptable alimenté la data room de la majorité des documents demandés. Il nous reste à y mettre un peu d’ordre demain matin avant de publier et ainsi de vous donner l’accès’, que la communication de l’état intermédiaire ait été publiée avec un retard tel qu’il justifiait un report de l’audit, d’autant que ce document a été consulté par des membres de l’équipe de M. [Y] dès le 29 juillet 2019.

Il n’est donc pas établi de faute des intimés dans l’exécution de leurs obligations contractuelles relativement à la mise à disposition des documents comptables et notamment de l’état intermédiaire en vue de la réalisation de l’audit.

* Sur la renégociation du prix de la cession

M. [Y] soutient que les cédants ont commis une faute en tentant plusieurs renégociations du prix de cession en leur faveur, à la suite de la découverte des erreurs comptables dont la teneur a été exposée ci-dessus.

Comme l’a justement relevé le tribunal, quatre avenants au contrat de cession ont successivement été rédigés par les parties (voir pièces 26, 27, 29, 31 et 32 ou 40 de l’appelant) à la suite non seulement de la révélation par l’audit d’erreurs comptables et leurs éventuelles incidences sur le prix de cession mais également en raison de différends persistants portant sur le contrat de bail entre les sociétés Boréal et Australe ainsi que sur la conclusion d’un contrat global d’architecture navale.

Il est indéniable que les erreurs comptables ont été à l’origine des renégociations, qui ont notamment porté sur le calcul du prix de cession et qui ont donné lieu à l’établissement des avenants susmentionnés.

Ainsi, il peut être lu dans le courriel du 3 octobre 2019 adressé par M. [G] à M. [Y] :

‘cette dynamique de route fait qu’aujourd’hui Boréal a une valeur bien supérieure à celle sur laquelle nous avons fixé notre prix de cession, prix sur lequel ni toi ni moi nous ne souhaitions revenir avant la découverte de cette erreur dans l’historique du compte de Boréal (…) Je te propose deux solutions : la première suivant ta proposition : un prix et un complément de prix (…) La deuxième est de conserver le prix initial à 8 millions d’euros’. (pièce 25 de l’appelant).

Plusieurs propositions de calcul du prix de cession ont été ainsi présentées (voir notamment la pièce 26 de l’appelant ‘contre proposition’ ; acte modificatif et réitératif – pièce 27 de l’appelant, calcul du prix de cession après audit – mail de M. [G] à M. [Y] du 28 octobre 2019, avenant du 30 octobre 2019 – pièce 31 de l’appelant ; échanges de mails du 29 octobre 2019 entre MM [Y] et [G] sur la méthode de calcul du prix et d’un complément de prix – pièce 32 de l’appelant, projet d’avenant du 8 novembre 2019 – pièce 35 de l’appelant)

Si l’appréciation des parties diffère sur l’incidence des avenants sur le montant du prix de cession par rapport au prix initialement prévu par le contrat de cession, il n’est pas toutefois établi que les intimés ont commis une faute dans la conduite de ces négociations, étant rappelé que l’existence de manoeuvres dolosives commises par ces derniers à l’encontre du cessionnaire n’a pas été retenue.

En effet, il résulte des documents versés aux débats et rappelés ci-dessus que les parties se sont conjointement engagées, à la suite de la découverte d’erreurs comptables, dans un processus de renégociation qui n’a pas abouti en raison d’importants différends persistants sur la clause de non-concurrence imposée aux cédants, sur le contrat de bail commercial et enfin sur l’existence d’une obligation de conclure un contrat de prestation globale d’architecture navale alors qu’ils s’étaient accordés à la suite d’avenants sur les modalités de calcul du prix (voir pièce 20 des intimés identique à la pièce 32 de l’appelant relatives à un échange de mails du 29 octobre 2019 entre M. [G] et M. [Y] ayant pour objet ‘complément du prix’ ; voir également le mail du 31 octobre 2019 entre M. [G] et son avocat, pièce 21 des intimés).

Compte tenu de ces divergences de fond, on ne peut conclure que la succession d’avenants ou les reports de la réalisation de la cession soient imputables aux intimés.

Au demeurant, on peut lire dans le mail du 9 novembre 2019 de M. [G] à M. [Y] :

‘je pensais avoir compris hier que tu validais les documents envoyés hier par nos conseils et du nous serions en mesure de signer l’avenant aujourd’hui. Je ne cache pas mon irritation face aux reports répétés’.

Ce message répondait à un mail de M. [Y] dans lequel ce dernier indiquait : ‘j’ai bien reçu les documents que vous avez adressés à [D] [J]. Il m’a indiqué qu’ils allaient communiquer avec tes conseils début de semaine prochaine pour avancer sur le contrat cadre de prestation de service d’architecture navale… (voir pièce 36 et également 37 relative à un mail du 14 novembre 2019 de M. [Y] à M. [G] listant les points de désaccord, à savoir le bail commercial, le contrat d’architecture navale et la clause de non concurrence).

Il n’est donc pas établi que les consorts [G] [R] aient commis une faute à l’occasion des diverses renégociations du prix, qui ont abouti à la rédaction de plusieurs avenants et au report de la cession.

* Sur l’absence de maintien du contrat de bail initial conclu entre la société Boréal et la société Australe

Le tribunal a écarté la responsabilité des intimés considérant que M. [Y] s’est acharné à obtenir des documents non prévus au contrat, à savoir le maintien en l’état du contrat de bail ainsi que le contrat d’architecture navale, ce dernier ayant été indubitablement discuté par les parties mais ignoré par l’acte de cession et ses annexes.

Les parties diffèrent sur le contrat de bail devant régir les relations entre la société Boréal et son bailleur, la société Australe, après la cession.

La cour observe comme le tribunal que le contrat de cession n’apporte aucune précision sur ce point. En effet, il se borne à stipuler dans son article 7.2 (g) qu’à la date de la réalisation, les vendeurs remettront ou feront remettre à l’acquéreur ‘un exemplaire du bail entre la SCI Australe et la société qui figure en annexe 7.2 (g) des présentes.’ étant précisé, comme indiqué ci-dessus que l’annexe 7.2 (g) ne contient aucun document (pièce 1 de l’appelante) et que les parties s’étaient accordées pour un envoi différé des annexes (pièce 31, mail du 25 mai 2020, précitée, des intimés).

Il n’est donc nullement fait référence à l’article 7.2 (g) à un engagement des cédants de poursuivre au jour de la réalisation de la cession le bail en vigueur entre la SCI Australe et la société Boréal. Est visé sans précision ‘le contrat de bail’.

On ne peut pas déduire l’existence d’un accord des parties sur le maintien du bail en vigueur au jour de la cession des échanges de mail du 25 mars 2019. En effet dans ce mail, l’appelant demande à M. [G] des ‘éléments complémentaires’ sur le bail commercial et ce dernier, après lui avoir exposé la vente d’un bâtiment à la société Australe par la société Boréal, lui répond que ‘nous avons signé les actes le 12 mars dernier et un nouveau bail sera donc en vigueur à partir de début avril ; il est actuellement à la rédaction chez notre comptable, je vous le fais parvenir dès réception.'(pièce 8 de l’appelant).

Ce nouveau bail de huit pages daté du 12 mars 2019, que les cédants considèrent comme étant un bail abrégé ayant vocation à régir les relations des sociétés Boréal et Australe du temps où ces dernières avaient des dirigeants communs, a été communiqué à M. [Y] par mail du 27 mars 2019 (pièce 64 de l’appelant). Ce message indique, sans plus de précision, qu’il s’agit du ‘nouveau bail, comme convenu.’

Les intimés communiquent également un bail de vingt deux pages daté du 12 mars 2019. Ils ne contestent pas qu’après la construction d’un bâtiment destiné à accueillir la construction d’un nouveau modèle de bateau, ils comptaient appliquer un avenant au contrat de bail dans sa version ‘in extenso’ pour tenir compte de cette nouvelle construction (pièce 56 des intimés).

Sont également versés aux débats deux autres versions de vingt quatre pages du bail. Ces versions ont été adressées par M. [G] à M. [Y] le 30 octobre 2019, par un mail intitulé ‘bail commercial SCI Australe – SAS Boréal.corrigé’ et par mail du 4 novembre 2019 intitulé ‘bail’ et annonçant ‘modifications notables’ sur le montant du loyer et sur l’obligation de garnissement des locaux.

Il résulte de ce qui précède que si le contrat de cession prévoyait la communication au cessionnaire d’un exemplaire du bail figurant en annexe 7.2 (g), force est de constater que les parties ne s’étaient pas entendues sur le maintien du bail en cours liant les sociétés Australe et Boréal et qu’il était au contraire envisagé la conclusion d’un nouveau bail pour tenir compte de la construction d’un bâtiment au sein du chantier naval.

Dès lors, il ne peut pas être reproché aux consorts [G] [R] de ne pas avoir maintenu le bail initial, comme l’a justement retenu le tribunal.

* Sur la conclusion d’un contrat d’architecture navale

Il est précisé au paragraphe 8 ‘phase d’accompagnement’ de la lettre d’intention de M. [Y] du 7 juin 2019 (pièce 3 des intimés) que ce dernier souhaite être accompagné par les cédants jusqu’au 30 juin 2020.

La lettre indique : ‘l’accompagnement au niveau des plans des nouveaux bateaux Boréal 55 OC et Boréal 47 inclus dans le package de la transmission d’entreprise.’

Le contrat de cession et ses annexes ne prévoient pas la conclusion d’un contrat d’architecture navale. Il est seulement fait référence au paragraphe 7.2 (l) à l’obligation pour les vendeurs de remettre à la date de la réalisation de la cession ‘un exemplaire dûment signé du contrat de prestation de services’.

L’article 1 du contrat (définitions) n’apporte pas d’éclairage sur le contenu de ce contrat puisqu’il le définit de la manière suivante : ‘a le sens qui lui est donné à l’article 7.2 (l)’.

Malgré l’absence de référence explicite dans l’acte de cession à un contrat d’architecture navale il résulte des pièces du dossier que les parties ont discuté de la conclusion d’un tel contrat, comme l’a relevé justement le tribunal.

Toutefois, au regard des éléments du dossier, il ne peut être considéré que le contrat de prestations de services incluait la conclusion d’un contrat global d’architecture navale.

En effet, la cour observe que le contrat d’architecture navale versé aux débats, objet des discussions des parties, ne portait manifestement que sur une seul modèle de navire. Ainsi, le projet de ‘contrat de services d’architecture navale pour une construction de série’, soumis aux observations de M. [Y] ne mentionne dans son préambule que le navire nommé Boréal 44.2.

Il est écrit dans ce préambule que ‘le navire objet du présent contrat est nommé Boréal 44.2, à la date de la signature. Ce nom peut être amené à changer (….)’ Le projet de contrat définit ensuite les missions de l’architecte naval (pièce 34 de l’appelant portant sur mail du 6 novembre 2019 de M. [Y] à M. [G] intitulé notamment ‘contrat IFAN architecture navale’ repris en partie par la pièce 53 des intimés).

La cour observe en outre que l’affirmation de l’appelant selon laquelle M. [G] aurait manqué à ses obligations en lui adressant un contrat d’architecture navale ne portant que sur un seul navire n’est pas étayée par la pièce 34 précitée puisque M. [Y] n’a mentionné aucune observation à la rubrique ‘préambule’ où était précisé l’objet du contrat, alors qu’il en avait la possibilité et qu’il a, au demeurant, fait des observations sur d’autres points du projet de contrat.

Dès lors, aucun des éléments versés au dossier ne permet de conclure qu’un contrat d’architecture navale portant sur une gamme complète de navires était prévu, en sorte qu’il ne peut être reproché de faute sur ce point aux consorts [G] [R] dans l’exécution du contrat de cession, comme l’a justement retenu le tribunal.

* Sur la condition suspensive de transformation de la société Boréal en SAS

L’article 5.1 du contrat de cession stipule au titre de la troisième condition suspensive la transformation de la société en SAS. Il est reproché aux cédants d’avoir réalisé cette transformation au delà du délai butoir du 23 septembre 2019.

Il est rappelé que, selon l’article 5.2 du contrat de cession, les conditions suspensives devaient être réalisées avant le 23 septembre 2019. Or, il est constant que la société Boréal n’a été transformée en SAS que le 21 octobre 2019.

La date contractuelle n’a donc pas été respectée ainsi que cela ressort des écritures mêmes des consorts [G] [R]. La pièce 42 des intimés enseigne que les dirigeants de Boréal ont reçu le projet de statuts le 18 septembre 2019. En outre, ce n’est que le 7 octobre 2019 (pièce 46 des intimés) que l’avocate des cédants leur a transmis pour signatures les statuts de la SAS, le procès-verbal des décisions de transformation et un pouvoir. Le dépassement du délai prévu par le contrat est confirmé par un message du 16 octobre 2019 de cette dernière, qui précise qu’elle n’a toujours pas reçu les documents et qui indique que ‘si nous maintenons le closing fin octobre, j’ai peur que le transformation ne soit pas encore effective’ (pièce 49 des intimés).

S’il est indéniable que les cédants ont tardivement organisé les formalités de transformation de la société Boréal en SAS et que la date contractuelle du 23 septembre 2019 n’a pas été respectée, force est de constater que la réalisation de la cession a été repoussée, les intimés rappelant à juste titre que la date du closing avait fait l’objet d’un second report au 15 novembre 2019.

Dès lors que dans ces circonstances, le dépassement de la date initialement prévue pour la transformation n’a pas eu d’incidence sur l’opération de cession, il ne peut être retenu de faute à ce titre à l’encontre des cédants.

* Sur la condition suspensive de rencontre avec cinq salariés clefs de la société Boréal

L’article 5.1 du contrat de cession stipule au titre de la quatrième condition suspensive une rencontre avec les cinq salariés clefs de la société Boréal avant la date de la réalisation. Ces salariés sont nommément désignés par l’article 5.1.

Il n’est pas discuté que cette rencontre n’a pas eu lieu, M. [Y] indiquant dans ses écritures que les cédants ont refusé qu’il rencontre ces salariés, de sorte qu’ils seraient responsable de la non réalisation de cette condition suspensive.

La cour observe toutefois que c’est à juste titre que les consorts [G] [R] justifient la non tenue de cette rencontre en raison de la réouverture des négociations sur le prix de cession.

En effet, les divergences qui ont conduit à l’établissement des avenants des 21 octobre, 8 et 21 novembre 2019, repoussant, comme l’a justement souligné le tribunal, la date de réalisation au 16 décembre 2019

puis au 31 janvier 2020, rendait délicate l’organisation d’une telle rencontre avec le futur dirigeant dès lors que les parties n’étaient pas encore parvenus, à un accord sur un élément essentiel du contrat. Si cette condition n’a pas été réalisée du fait des intimés, il ne leur peut être reproché de faute compte tenu des circonstances et notamment de la renégociation d’éléments essentiels du contrat.

En conclusion, il résulte de ce qui précède que les consorts [G] [R] n’ont pas commis de faute dans l’exécution de leurs obligations contractuelles. Il en découle qu’il ne peut pas leur être reproché d’avoir agi avec mauvaise foi. A cet égard, il ressort au contraire des éléments versés aux débats, que malgré les désaccords évoqués ci-dessus, ils ont recherché avec l’appelant des solutions pour faire aboutir le projet, comme le montre les diverses discussions ayant abouti à quatre projets d’avenants.

B- Sur les fautes reprochées à M. [Y]

Les parties se reprochent mutuellement d’avoir exécuté de mauvaise foi le contrat de cession et le tribunal a retenu que M. [Y] est principalement responsable de l’inexécution du contrat de cession.

Toutefois, et comme indiqué ci-dessus, c’est à la suite des différends exposés ci-dessus que les consorts [G] [R] ont proposé plusieurs projet d’avenants (projets des 21 octobre, 29 octobre 2019, du 8 novembre 2019). Et comme le souligne justement le tribunal, ces avenants n’ont pas reçu l’assentiment de M. [Y].

Il résulte des pièces versées aux débats que M. [Y] faisait part le 14 novembre 2019 à M. [G] de ses désaccords sur plusieurs points [le bail (question de la caution bancaire), le contrat d’architecture navale (nécessité d’établir un contrat cadre), l’augmentation de la durée de la clause de non concurrence de trois à cinq ans et sur les modalités de calcul du prix (pièces 11 identique à la pièce 54 des intimés)] et qu’il formulait des propositions le 19 décembre 2019 de modification du contrat de cession concernant notamment le périmètre de la cession (de 95 à 100 % des actions) ainsi que sur la conclusion d’un autre contrat de prestation d’architecture navale pour un nouveau bateau (pièce 12 des intimés), ce qui a été refusé par les cédants (pièce 15 des intimés, lettre de mise en demeure de l’avocat des cédants)

Face à ces difficultés et estimant que les intimés n’avaient pas répondu à ses propositions, M. [Y] a acté la rupture des négociations, demandant aux cédants de l’indemniser de ses préjudices (pièce 16 des intimés – lettre du 21 janvier 2020 de M. [Y] aux consorts [G] [R]).

Revenant ensuite sur cette décision, l’appelant a fait parvenir par l’intermédiaire de son nouvel avocat une demande d’exécution du contrat de cession, dans laquelle il était notamment précisé que le contrat d’architecture navale devra être conclu ultérieurement, sans que cela soit un obstacle à la régularisation du contrat de cession (pièce 17, courrier officiel de Me [U]).

Au regard de ces éléments et de ceux développés au paragraphe 1, nonobstant la prorogation des offres de prêts en faveur de l’appelant (pièce 49 de l’appelant, lettre de la société Crédit agricole du 28 février 2020), il peut être conclu que l’échec des négociations est imputable à M. [Y] qui a retardé l’avancée du projet en remettant en question plusieurs éléments non prévus par le contrat telle que le maintien du bail initial et la conclusion d’un contrat d’architecture navale globale ou en s’attachant à une erreur comptable relative à l’encours ‘[I]’ alors que cette erreur a été ensuite régularisée et aurait pu relever, comme l’a justement retenu le tribunal, de la garantie de passif.

Il convient dans ces conditions de retenir que M. [Y] a commis des fautes dans l’exécution du contrat de cession de nature à engager sa responsabilité à l’égard des consorts [G] [R], étant observé que ces derniers ne demandent plus la caducité du contrat, comme cela a été indiqué ci-dessus.

4. Sur les demandes indemnitaires des consorts [G]-[R]

Revenant sur son moyen d’incompatibilité entre la caducité et les dommages et intérêts, l’appelant considère que cette incompatibilité doit conduire au rejet des demandes indemnitaires des intimés sur la privation de jouissance et de gain et sur la réparation de pertes subies.

Toutefois, il est rappelé que les intimés n’ont maintenu que leurs seules demandes indemnitaires de sorte que le moyen selon lequel la caducité de la cession et la responsabilité sont incompatibles est inopérant.

A- Sur la réparation du préjudice de privation de la jouissance d’un gain

Sur ce chef de préjudicie, l’appelant fait observer que le tribunal a statué ultra petita en modifiant le mode de calcul proposé par les cédants et ajoute que le nouveau montant de dommages et intérêts sollicité en appel par les intimés est calculé au moyen d’un taux d’intérêts erroné. Au surplus, objectant que les intimés ont finalement revendu plus cher leurs actions, il en déduit que leur demande indemnitaire de privation de jouissance n’est pas fondée.

Les consorts [G]-[R] sollicitent la condamnation de M. [Y] à lui payer la somme de 280554,52 euros. Ils allèguent avoir subi un préjudice résultant de l’impossibilité de monétiser la société à la suite de la non réalisation de la cession.Ils font ainsi valoir qu’ils ont été empêchés de mener d’autres projets entre la date de la cession initialement prévue et celle de sa réalisation effective, soit pendant quatorze mois, avec les fonds qu’ils auraient pu obtenir de l’opération, soit la somme de 7 600 000 euros.

Enfin, s’agissant du préjudice subi par les dirigeants de la société Boréal, ils soutiennent qu’il est justifié au regard du temps excessif qu’ils ont dû consacrer à l’opération litigieuse et contestent les motifs du jugement qui ont rejeté ce chef de préjudice au motif que la cession litigieuse a été utile pour celle qui s’est réalisée ultérieurement.

Réponse de la cour

Le tribunal a considéré que la méthode de calcul des intimés était doublement fausse quant à la période et quant au taux d’intérêt et leur a alloué la somme de 70 933 euros. Le tribunal a calculé leur préjudice sur quatorze mois au lieu des douze demandés et en utilisant le taux de crédit de la Banque de France, soit 0,8 %.

Il convient de rappeler que, selon le contrat du 7 août 2019, la cession, qui devait être réalisée entre les parties au plus tard le 11 octobre 2019 (voir l’article 7, pièce 1 des intimés), a été finalement réalisée le 11 décembre 2020 entre les consorts [G]-[R] et un tiers, ce qu’ils ne discutent pas.

La cour observe en outre que ces derniers avaient accepté de rouvrir les négociations, ce que démontre la rédaction des avenants successifs entre fin octobre et fin novembre 2019, et de repousser la date de cession au 31 janvier 2020, ce dont il résulte que leur préjudice ne saurait être évalué à compter de la date prévue initialement pour la réalisation de la cession.

Par ailleurs, s’il est indéniable que la cession a été repoussée de plusieurs mois en raison des agissements de M. [Y], force est de constater que les consorts [G]-[R] ont cédé à des tiers l’intégralité des actions qu’ils détenaient dans le capital social de la société Boréal moyennant un prix de 8 800 000 euros, soit à un prix plus élevé de 10 % que celui qui était prévu par le contrat du 7 août 2019 ou les avenants ultérieurs, ce qu’ils ne discutent pas.

Dès lors, les consorts [G] [R] ne démontrent pas l’existence d’un préjudice certain, étant observé qu’ils n’apportent aucun élément concret sur les projets qu’ils auraient pu mener entre janvier 2020 et la cession effective de leurs actions.

En conséquence, il convient, par voie d’infirmation, de rejeter leurs demandes de dommages et intérêts au titre de la réparation de la privation de la jouissance du gain.

B- Sur les pertes subies à l’occasion de l’opération de cession

L’appelant conteste le préjudice allégué par les intimés relatif à des frais d’avocat et d’audit estimant qu’ils ne sont pas établis et soutient qu’en tout état de cause, la caducité implique de laisser à chacune des parties la charge de ses frais. Il relève qu’en tout état de cause de tels frais ne peuvent être des préjudices puisqu’ils ont été utilisés pour la réalisation ultérieure de la cession au profit d’un tiers.

Pour leur part, les intimés évaluent ce préjudice à 122 958,12 euros. Ils soutiennent qu’ils ont dû exposer notamment des frais d’ouverture et de maintien de la data room pendant plusieurs mois, de rédaction du contrat et d’avenants, de renégociation et de transformation de la société Boréal en SAS.

Ils soutiennent que certains frais écartés par le tribunal étaient pourtant en lien avec la cession.

Réponse de la cour

Pour justifier de cette prétention, ils versent aux débats les documents suivants (pièce 28 A à J des intimés) :

– une facture n° 2019 / 12 /01 de leur avocat d’un montant de 22 800 euros correspondant à des prestations de ‘conseil et d’assistance sur les différentes formes de sociétés par actions simplifiées’ sur la période du 9 avril au 3 décembre 2019 ;

– une facture n° 2019 / 12 /02 de leur avocat d’un montant de 58 742,12 euros correspondant des prestations de ‘conseil et d’assistance sur la cession de 95 % des parts de Boréal’ sur la période du 9 avril au 3 décembre 2019 ;

– une lettre de mission de conseils ‘Expert et finance’ datée du 18 juillet 2019. Cette lettre, qui fait état d’honoraires de 6 000 euros TTC (pièce 28 C) ;

– une facture n°42118001475 du cabinet Cosquer-Tanguy du 5 juillet 2018 d’un montant de 900 euros TTC ayant pour échéance le 5 août 2018 relative aux ‘formalités juridiques de constitution d’une société civile’ (pièce 28 D);

– cinq factures de la société Merril Corporation Ltd respectivement d’un montant de 690 euros, 1 350,40 euros, 2 179 euros, 2 179 euros et 2 242,94 euros ;

– une seconde lettre de mission de conseils ‘Expert et finance’ datée du 18 juillet 2019. Cette lettre, qui fait état d’honoraires de 6 000 euros TTC (pièce 28 F) ;

– une facture acquittée du 17 décembre 2018 de la société Expert et finance d’un montant de 1 800 euros et ayant pour objet une étude patrimoniale ;

– une facture de la société Cabinet Cosquer-Tanguy du 5 juillet 2018 n° 4211800474 ayant pour date d’échéance le 5 août 2018 d’un montant de 750 euros et ayant pour objet ‘formalités juridiques de constitution d’une société civile (pièce 28 H) ;

– une facture de la société Merrill Corporation Ldt n° 2462360 d’un montant de 2 242,94 euros

– un décompte établi par l’étude de notaire Le Monier et Landouar se rapportant à une donation partage de parts sociales mentionnant ‘un solde à recevoir’ d’un montant de 159,43 euros.

Sur la base de ces éléments, les intimés justifient par des factures avoir exposé en lien avec la cession litigieuse des frais d’avocat (soit 22 800 + 58 742,12 euros soit 81 542,12 euros),, des frais liés à l’ouverture et au maintien de la data room (690 + 1 359 + 2 179 + 2 179 + 2 242,94 + 2242,94 soit 10 892,88 euros) et des frais de conseils (2 X 6 000).

Par ailleurs, c’est à tort que le tribunal a écarté tous les frais en dehors des frais de conseil et des frais d’ouverture de la data room au motif qu’ils avaient pu servir à la cession finale à des tiers. En effet, hormis les frais de gestion de patrimoine, qui sont indépendants de l’opération financée, et ceux de transformation de la société en SAS, qui ont été nécessairement utiles pour la réalisation effective de l’opération avec le tiers, les frais retenus ci-dessus sont en lien direct avec la cession et ont donc été payés dans cet objectif.

Dès lors, il est justifié au titre des frais liés à la cession d’un préjudice d’un montant de 104 434.88 euros qui est en lien de causalité avec les fautes retenues ci-dessus à l’encontre de M. [Y].

Il convient, par voie d’infirmation, de condamner M. [Y] à payer aux consorts [G] [R] la somme de 104 434.88 euros au titre du préjudice résultant des pertes subies à l’occasion de la cession litigieuse.

C- Sur les préjudices subis par la société Boréal d’atteinte à la réputation et résultant de la méconnaissance de l’obligation de confidentialité

L’appelant sollicite la confirmation du jugement qui a écarté ces chefs de préjudice. Il fait valoir que les consorts [G]-[R] ne démontrent pas en quoi il est a l’origine des divulgations. Il ajoute que, de surcroît, ils n’établissent pas le préjudice en faisant observer qu’ils ont tiré profitt des ‘fuites’ puisqu’ils ont pu finalement vendre la société à des conditions plus avantageuses à un repreneur qui avait connaissance du projet de vente.

Les intimés soutiennent que M. [Y] a violé l’obligation de confidentialité prévue à l’article 13 du contrat en révélant à l’occasion d’un salon nautique des informations relatives à la cession et ils affirment que l’échec de l’opération portée à la connaissance des professionnels du secteur a porté préjudice à la société.

Réponse de la cour

Cet article impose une obligation de confidentialité sur l’existence, l’objet et le contenu du contrat ainsi que ‘des informations communiquées’. Cette obligation est imposée aux parties à l’égard des tiers. L’article 13-2 prévoit plusieurs exceptions à cette obligation dans certaines situations précises qui ne sont pas discutées dans la présente instance.

En l’espèce, la société Boréal et les consorts [G]-[R] soutiennent que l’appelant aurait méconnu l’obligation de confidentialité précitée en divulguant le projet de cession lors d’un salon nautique.

Pour étayer cette thèse, ils fournissent plusieurs témoignages dont il ressort que l’information sur la vente de la société Boréal était connue de ces personnes. Ainsi, M. [X], salarié pour un sous-traitant des chantiers navals Boréal affirme avoir eu connaissance de la vente litigieuse en septembre 2019 par l’intermédiaire d’une personne extérieure aux chantiers navals (pièce 30 des intimés).

M. [WT], repreneur ‘final’ de la société Boréal, affirme pour sa part, qu’il a appris à la fin octobre 2019 par l’intermédiaire du réseau ‘entreprendre Bretagne’ qu’une personne appartenant à ce réseau avait sollicité un prêt sur l’honneur pour acquérir la société Boréal.

Enfin, un mail du conseil de l’appelant, commentant un message des conseils des intimés précise, à propos de ‘fuites’ à l’occasion du salon nautique sur le projet de cession Boréal, que ‘ces fuites’ seraient parties du réseau entreprendre ‘auquel mon client pouvait parfaitement faire part de son projet de reprise puisqu’il s’agit d’un organisme de financement…Il ajoute : ‘comment mon client pouvait-il envisager de telles fuites, alors que les membres du réseau entreprendre sont eux-mêmes soumis à une obligation de confidentialité”(voir pièce 14 des intimés, mail de M. [D] [J] du 7 janvier 2020 adressé à Artlaw et M. [H] [S]).

S’il résulte en particulier de ce dernier message qu’une information sur la cession de la société Boréal a été transmise par M. [Y] au réseau Entreprendre, en méconnaissance de l’article 13.1 précité, il n’est pas pour autant démontré par les intimés de l’existence d’un préjudice d’image auprès des professionnels du secteur nautique.

La cour observe de manière surabondante que la divulgation de cette information au cours de l’année 2019 n’a pas empêché la vente de la société Boréal quelques mois après l’échec de la cession avec M. [Y].

Dès lors, ajoutant au jugement, il convient de rejeter cette demande.

D- Sur le préjudice subi par les dirigeants de la société Boréal résultant du temps passé en vain à la préparation de la cession

L’appelant conteste ce chef de préjudice, estimant que la durée de l’opération litigieuse n’était pas inhabituelle.

Sollicitant à ce titre 15 000 euros de dommages et intérêts, les consorts [G] [R] soutiennent qu’ils ont consacré un temps excessif à l’opération litigieuse et qu’en tout état de cause, les longues négociations n’ont pas été utiles pour la cession ultérieure.

Toutefois, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte, que le tribunal a rejeté cette demande. Dès lors, il convient de rejeter cette demande.

5- Sur les demandes indemnitaires reconventionnelles de M. [Y]

M. [Y] sollicite la somme de 60 918,70 euros à titre d’indemnisation de plusieurs frais liés à l’opération de cession (carburant, étude de marché, timbres, hôtel, matériel de bureau, parking, péage, repas, structuration et recherche de financement, transports, avocats). Pour justifier des frais qu’il a engagés, il fournit diverses tickets et factures (pièce 63 de l’appelant).

Il allègue également un préjudice de ne pas avoir pu céder sa participation à l’issue de son investissement. Sur ce point, les parties divergent sur la nature de l’investissement de M. [Y], ce dernier affirmant qu’ayant eu recours à un ‘LBO’, il était prévisible qu’il cède sa participation au bout de sept ans, soit à l’issue de la période de son investissement, alors que les cédants estiment au contraire que l’opération litigieuse correspondait à un investissement à long terme.

Toutefois, la cour ayant considéré que M. [Y] a exécuté de manière fautive le contrat de cession, ce dernier ne saurait prétendre à l’indemnisation d’un préjudice, à le supposer établi, de perte de chance de revendre son investissement, dès lors qu’il a été la cause de l’échec de l’opération.

Il convient de confirmer le jugement et de rejeter cette demande.

L’appelant demande que soit ordonnée la restitution la somme de 131 854,12 euros qu’il a versée en vertu du jugement assorti de l’exécution provisoire.

Cependant le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement, et les sommes devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la signification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution.

Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande de restitution de M. [Y].

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné M. [BA] [Y] à payer à M. [A] [G], Mme [T] [O] épouse [G], M. [G], M. [C] [G], Mme [Z] [G], Mme [AH] [G], M [A] [R], Madame [N] [NJ], MM [B] [R] et [M] [R], représentés par leur père, en qualité de représentant légal :

– la somme de 70 933 euros au titre de la réparation de la privation de la

jouissance du gain.

– la somme de 60 921,12 euros au titre d’indemnisation de frais divers

occasionnés au cours de l’opération de cession infructueuse.

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;

Dit que M. [BA] [Y] est responsable de l’échec de l’opération de cession des parts sociales de la société Boréal ;

Rejette la demande de M. [A] [G], Mme [T] [O] épouse [G], M. [G], M. [C] [G], Mme [Z] [G], Mme [AH] [G], M [A] [R], Madame [N] [NJ], MM [B] [R] et [M] [R], représentés par leur père, en qualité de représentant légal, d’indemnisation au titre de la privation de la jouissance du gain ;

Condamne M. [BA] [Y] à payer à M. [A] [G], Mme [T] [O] épouse [G], M. [G], M. [C] [G], Mme [Z] [G], Mme [AH] [G], M [A] [R], Madame [N] [NJ], MM [B] [R] et [M] [R], représentés par leur père, en qualité de représentant légal la somme de 104 434.88 euros au titre d’indemnisation des pertes qu’ils ont dû supporter à l’occasion de la cession du 7 août 2019 ;

Rejette la demande de la société Boréal au titre du préjudice d’atteinte à la réputation et au non respect de l’obligation de confidentialité ;

Rejette la demande de M. [A] [G] au titre du préjudice de temps passé en vain à la préparation de l’opération de cession d’actions ;

Dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l’exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour ;

Condamne M. [Y] aux dépens de la procédure d’appel dont distraction au profit de maître Oriane Dontot conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne M. [Y] à payer à M. [A] [G], Mme [T] [O] épouse [G], M. [G], M. [C] [G], Mme [Z] [G], Mme [AH] [G], M [A] [R], Madame [N] [NJ], MM [B] [R] et [M] [R], représentés par leur père, en qualité de représentant légal et à la société Boréal la somme totale de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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