RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/00915 – N° Portalis DBVS-V-B7F-FPDS
Minute n° 22/00133
S.A. YOUNITED
C/
[R]
Jugement Au fond, origine Tribunal de proximité de SARREBOURG / FRANCE, décision attaquée en date du 08 Mars 2021, enregistrée sous le n° 11.20.191
COUR D’APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE – TI
ARRÊT DU 28 AVRIL 2022
APPELANTE :
S.A. YOUNITED
représentée par son représentant légal
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ
INTIMÉ :
Monsieur [P] [R]
[Adresse 1]
[Localité 3] / FRANCE
Non représenté
DATE DES DÉBATS : A l’audience publique du 24 février 2022 tenue par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 24 mars 2022.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame BASTIDE, Conseiller
Monsieur MICHEL, Conseiller
EXPOSE DU LITIGE’:
Suivant offre préalable en date du 10 août 2018, M. [P] [R] a contracté auprès de la SA Younited un prêt personnel d’un montant de 10.000 euros remboursable en 48 mensualités au taux d’intérêt de 4,67 % l’an.
Par acte d’huissier du 11 décembre 2020, la SA Younited a fait assigner M. [R] devant le juge des contentieux de la protection de Sarrebourg aux fins de le voir condamner à lui payer les sommes de 10.211,63 euros au titre du solde du prêt avec intérêts au taux contractuel de 4,67 % à compter du 27 juin 2019 ou à titre subsidiaire de l’assignation, avec capitalisation des intérêts et 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. A titre subsidiaire, elle a demandé au tribunal de prononcer la résolution judiciaire du contrat avec les mêmes conséquences à l’exception du point de départ des intérêts moratoires.
Par jugement réputé contradictoire du 8 mars 2021, le premier juge a débouté la SA Younited de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens.
Par déclaration d’appel déposée au greffe de la cour en date du 14 avril 2021, la SA Younited a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux entiers dépens.
Elle demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et condamner M. [R] à lui payer la somme de 10.211,63 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,67 % l’an à compter de la mise en demeure du 27 juin 2019, ordonner la capitalisation annuelle des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil et condamner M. [R] à lui verser 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
L’appelante soutient qu’elle a produit l’offre de prêt signée électroniquement mais également le fichier de preuve électronique, créé par la société Keynectis sous la marque Inversign, prestataire de service de certification électronique, qu’il est démontré que le contrat a bien été signé de façon électronique via un code transmis par SMS sur le numéro de M. [R] qui, pour signer électroniquement, a reproduit ce code sur son ordinateur, réalisant une signature électronique par un mode sécurisé attesté par une société de services de certification électronique, que l’emprunteur a bénéficié des fonds débloqués le 23 août 2018 et lui a remis ses documents d’identité et de solvabilité (carte d’identité, avis d’imposition, bulletin de salaire, relevé de compte et RIB).
La SA Younited a fait signifier sa déclaration d’appel à M. [R] par acte du 11 juin 2021 remis à étude et l’intimé n’a pas constitué avocat.
Par arrêt avant dire droit du 27 janvier 2022, la cour a demandé à la SA Younited de produire le fichier de preuve émis par la société Universign, prestataire de service de certification électronique, et correspondant au prêt souscrit par M. [R] le 10 août 2018.
MOTIFS DE LA DECISION
Vu les écritures déposées le 11 juin 2021 par la SA Younited, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens ;
Vu l’ordonnance de clôture en date du 14 octobre 2021 ;
Sur la demande en paiement
En application de l’article L.312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, ces sommes produisant elles-mêmes des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt jusqu’à la date du règlement effectif. En outre le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité égale au plus à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.
Sur la régularité de la signature du contrat de prêt, il ressort de l’article 1366 du code civil que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité. Selon l’article 1367, lorsqu’elle est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
Le décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017 dispose en son article 1 que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée et est une signature électronique qualifiée une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement européen n° 910/2014 du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché, et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.
En l’espèce, la SA Younited verse aux débats le fichier de preuve du contrat de prêt souscrit par M. [R] le 10 août 2018 créé par la société Universign, prestataire de service de certification électronique, ce document attestant de la signature électronique le 10 août 2018 à 09:15:34 du contrat annexé en PDF par le signataire dénommé [P] [R]. Il est précisé que le signataire identifié comme [P] [R] avec indication de son adresse mail et de son numéro de téléphone, a procédé le 10 août 2018 à 09:15:34 CET à la signature électronique des documents présentés et que le signataire s’est identifiée sur la page de consentement en saisissant le code qui lui a été transmis automatiquement par le service par sms au numéro de téléphone indiqué.
Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que le contrat a bien été signé de façon électronique via un code transmis par sms sur le numéro de portable de M. [R] qui, pour signer électroniquement, a reproduit ce code sur son ordinateur, réalisant ainsi une signature électronique par un mode sécurisé attesté par une société de services de certification électronique. Il est en outre relevé que les fonds ont été versés sur le compte correspondant au RIB fourni par l’emprunteur qui a réglé les échéances mensuelles par prélèvement durant plusieurs mois.
Il convient en conséquence de dire que, contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, la SA Younited rapporte la preuve de la signature du contrat de prêt par M. [R] le 10 août 2018 par voie électronique selon un mode sécurisé.
Sur la réalité et le montant de sa créance, l’appelante verse aux débats le contrat de prêt et l’ensemble des documents relatifs à l’information précontractuelle, l’historique du compte avec mention des échéances impayées, les courriers de relance, la lettre recommandée de mise en demeure adressée le 8 février 2019, le courrier prononçant la déchéance du terme au 27 juin 2019 et un décompte arrêté au 4 décembre 2020, ces éléments étant suffisamment précis et complets pour justifier de sa créance. Sur les sommes dues, il ressort du décompte que la dette s’établit comme suit :
– capital restant dû : 8.279,15 euros
– mensualités impayées : 1.270,15 euros
– indemnité conventionnelle 8% : 662,33 euros
soit un total de 10.211,63 euros.
Il convient en conséquence d’infirmer le jugement et de condamner M. [R] à verser à la SA Younited la somme de 8.279,15 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,67% à compter du 11 décembre 2020, date de l’assignation en l’absence de réception des courriers de mise en demeure et déchéance du terme, et la somme de 662,33 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt.
Sur la demande de capitalisation des intérêts, la règle édictée par l’article L.313-49 du code de la consommation selon laquelle aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 313-47 et L. 313-48 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation prévus par ces articles, fait obstacle à l’application de la capitalisation des intérêts prévue par l’article précité. En conséquence, si la demande de capitalisation des intérêts au taux légal peut prospérer, celle au titre des intérêts contractuels est rejetée.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
M. [R], partie perdante, devra supporter les entiers dépens et il est équitable qu’il soit condamné à verser à la SA Younited la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt par défaut, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement déféré et statuant à nouveau,
CONDAMNE M. [P] [R] à verser à la SA Younited la somme de 8.279,15 euros avec intérêts au taux contractuel de 4,67% à compter du 11 décembre 2020 et la somme de 662,33 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt ;
DEBOUTE la SA Younited de sa demande de capitalisation des intérêts contractuels ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts au taux légal dus pour une année entière ;
CONDAMNE M. [P] [R] à verser à la SA Younited la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [P] [R] aux dépens de première instance et d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, présidente de chambre à la cour d’appel de Metz et par Madame GUIMARAES, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT