CDD pour accroissement d’activité : décision du 7 décembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/01067
CDD pour accroissement d’activité : décision du 7 décembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/01067

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 07 DECEMBRE 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 20/01067 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OQZB

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 29 JANVIER 2020

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG F19/00462

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Me [J] [F] – Mandataire liquidateur de S.A.R.L. NESSIMA

SELARL MJSA

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représenté par Me Nelly BESSET de la SELARL LDSCONSEIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

Madame [D] [Y]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Guilhem DEPLAIX, avocat au barreau de MONTPELLIER

Maître [N] [M] es qualité de mandataire ad’hoc de la SARL SFSM

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 2]

non comparant

Ordonnance de clôture du 29 Septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 OCTOBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Jean-Pierre MASIA, Président, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Florence FERRANET, Conseiller

M.Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

– réputé contradictoire;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL SFSM, exploitant sous le régime de la location gérance un magasin à l’enseigne GIFI, a embauché Mme [D] [Y] en qualité d’employée libre service, caissière, suivant contrat de travail à durée déterminée à temps partiel du 6 août 2017 pour accroissement temporaire d’activité. Le terme du contrat était fixé au 31 août 2018 et la durée du travail à 6,25 heures hebdomadaires.

Les relations contractuelles des parties sont régies par les dispositions de la convention collective nationale du commerce de détail non-alimentaire.

À compter du 1er janvier 2018, la CENTRALE GIFI confiait la location gérance du magasin à la SARL NESSIMA.

La salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie le 27 janvier 2018 et elle ne devait plus reprendre son poste dans l’entreprise.

Suivant jugement du 4 juillet 2018, la SARL SFSM a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Narbonne. La procédure devait être convertie en liquidation judiciaire le 12 septembre 2018.

Le 31 août 2018, la SARL NESSIMA a établi les documents de fin de contrat de la salariée.

Sollicitant notamment le bénéfice d’un engagement à durée indéterminée, Mme [D] [Y] a saisi le 19 avril 2019 le conseil de prud’hommes de Montpellier, section commerce.

La liquidation judiciaire de la SARL SFSM a été clôturée pour insuffisance d’actif suivant jugement du tribunal de commerce de Narbonne rendu le 18 septembre 2019 lequel a nommé Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc, afin de poursuivre les instances en cours et de répartir le cas échéant les sommes perçues à l’issue de ces dernières.

Le conseil de prud’homme, par jugement rendu le 29 janvier 2020, a :

dit que la SARL NASSIMA doit être mise hors de cause en l’absence de convention lors du changement de locataire gérant ;

requalifié la relation de travail à temps partiel entre la salariée et la SARL SFSM en relation de travail à temps complet ;

requalifié le contrat de travail à durée déterminée du 6 août 2017 en contrat de travail à durée indéterminée ;

dit que la rupture du contrat de travail s’assimile à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

fixé les créances de la salariée au passif de la SARL SFSM aux sommes suivantes :

‘6 167,15 € bruts à titre de rappels de salaire ;

‘   616,71 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

le tout sous déduction de la somme de 1 283,58 € nets ;

‘1 498,50 € nets à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ;

‘3 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

‘1 498,50 € bruts à titre d’indemnité de préavis ;

‘   149,85 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

‘   600,00 € au titre des frais irrépétibles ;

ordonné au liquidateur judiciaire de la SARL SFSM de procéder à la régularisation de la situation de la salariée auprès des organismes sociaux compétents, et de procéder à la délivrance d’un bulletin de salaire récapitulatif et des documents sociaux conformes, certificat et attestation destinée à Pôle Emploi, sous astreinte de 10 € par jour de retard à compter du 30e jour de la notification de la décision ;

débouter la salariée de l’ensemble de ses autres demandes ;

débouté la SARL NESSIMA de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

mis les éventuels dépens au passif de la SARL SFSM.

Le premier juge a noté que Maître [N] [M], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL SFSM, n’a pas comparu.

Cette décision a été notifiée le 6 février 2020 à l’AGS, CGEA de Toulouse, qui en a interjeté appel suivant déclarations des 20 et 24 février 2020.

Les affaires ont été jointes par ordonnance du 24 juin 2020.

La SARL NESSIMA a fait signifier la déclaration d’appel ainsi que ses conclusions à Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, suivant exploit du 1er septembre 2020.

La SELARL MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA, a fait signifier ses dernières conclusions à Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, suivant exploit du 11 août 2022.

Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, n’a pas constitué avocat.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 29 septembre 2022.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 28 septembre 2022 aux termes desquelles l’AGS, CGEA de Toulouse, demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

‘requalifié la relation de travail à temps partiel entre la salariée et la SARL SFSM en relation de travail à temps complet ;

‘requalifié le contrat de travail à durée déterminée du 6 août 2017 en contrat de travail à durée indéterminée alors que le contrat est motivé et régulier ;

‘dit que la rupture du contrat de travail s’assimile à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

‘fixé les créances de la salariée au passif de la SARL SFSM aux sommes suivantes :

‘6 167,15 € bruts à titre de rappels de salaire ;

‘   616,71 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

le tout sous déduction de la somme de 1 283,58 € nets ;

‘1 498,50 € nets à titre d’indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée ;

‘3 000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

‘1 498,50 € bruts à titre d’indemnité de préavis ;

‘   149,85 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

‘   600,00 € au titre des frais irrépétibles ;

‘ordonné au liquidateur judiciaire de la SARL SFSM de procéder à la régularisation de la situation de la salariée auprès des organismes sociaux compétents, et de procéder à la délivrance d’un bulletin de salaire récapitulatif et des documents sociaux conformes, certificat et attestation destinée à Pôle Emploi, sous astreinte de 10 € par jour de retard à compter du 30e jour de la notification de la décision ;

‘mis les éventuels dépens au passif de la SARL SFSM alors que la garantie de l’AGS ne couvre pas les dépens ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande à titre de dommages et intérêts pour défaut de procédure de licenciement tandis que le contrat à durée déterminée a pris fin à son terme ;

débouter la salariée de son appel incident sur ce point ;

lui donner acte de ce qu’elle réclame la stricte application des textes légaux et réglementaires ;

rejeter l’appel incident de la salariée ;

débouter la salariée de l’intégralité de ses demandes ;

condamner la salariée à lui verser la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 27 septembre 2022 aux termes desquelles Mme [D] [Y] demande à la cour de :

sur la relation de travail à temps partiel

à titre principal,

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié la relation de travail à temps partiel en une relation de travail à temps complet,

condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser les sommes suivantes :

‘6 167,15 € bruts à titre de rappel de salaire ;

‘   616,71 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

le tout sous déduction de la somme de 1 283,58 € nets perçue au titre du mois d’octobre 2017 ;

à titre subsidiaire,

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié la relation de travail à temps partiel en une relation de travail à temps complet ;

condamner la SARL SFSM à lui verser les sommes suivantes :

‘5 049,00 € bruts à titre de rappel de salaires du 1er août 2017 au 31 décembre 2017 ;

‘   504,90 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

le tout sous déduction de la somme de 1 283,58 € nets perçue au titre du mois d’octobre 2017 ;

fixer au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESSIMA la somme de 1 118,15 € bruts à titre de rappel de salaires du 1er janvier au 27 janvier 2018, date à laquelle elle était placée en arrêt de travail outre la somme de 111,81 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

à titre plus subsidiaire,

dire que la SARL SFSM et la SARL NESSIMA n’ont nullement respecté la durée de travail hebdomadaire minimale obligatoire ;

condamner la SARL SFSM à lui verser la somme de 2 722 70 € bruts à titre de rappel de salaires du 1er août 2017 au 31 décembre 2017 outre la somme de 272,27 € bruts à titre de congés payés y afférents, le tout sous déduction de la somme de 1 283,58 € nets perçue au titre du mois d’octobre 2017 ;

fixer au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESSIMA la somme de 694,27 € bruts à titre de rappel de salaires du 1er janvier au 27 janvier 20J8, date à laquelle elle était placée en arrêt de travail outre la somme de 69,43 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

sur la requalification de la relation de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée,

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié le contrat de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

dire que l’article 2 de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 s’avère contraire aux normes conventionnelles et plus particulièrement à la charte sociale européenne ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL SFSM à lui verser en fixant au passif de la société la somme de 1 498,50 € nets à titre d’indemnité de requalification visée par l’article L. 1245-2 du code du travail;

à défaut, condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 1 498,50 € nets à titre d’indemnité de requalification visée par l’article L. 1245-2 du code du travail ;

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a limité la fixation au passif de la liquidation de la SARL SFSM la somme de 3 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 8 000 € nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL SFSM à lui verser, en fixant au passif de la société, la somme de 1 498,50 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 149,85 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

à défaut, condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 1 498,50 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 149,85 € bruts à titre de congés payés y afférents ;

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande tendant à ce qu’il lui soit alloué la somme de 1 495,47 € nets à titre de dommages et intérêts pour défaut de procédure de licenciement ;

condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 1 495,47 € nets à titre de dommages et intérêts pour défaut de procédure de licenciement ;

sur la délivrance du bulletin de paie du mois d’octobre 2017,

ordonner à Maître [N] [M], ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, de lui délivrer le bulletin de paie d’octobre 2017 sous astreinte de 150 € par jours de retard à compter de l’arrêt, la cour se réservant expressément le droit de liquider ladite astreinte ;

sur la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux,

ordonner à Maître [N] [M], ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, ainsi qu’à Maître [J] [F], ès qualité de liquidateur de la SARL NESSIMA, de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux compétents sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt, la cour se réservant expressément le droit de liquider ladite astreinte ;

sur la délivrance de bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes,

ordonner à Maître [N] [M], ès qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, ainsi qu’à Maître [J] [F], ès qualité de liquidateur de la SARL NESSIMA, de lui délivrer des bulletins de paie, certificat de travail ainsi qu’une attestation Pôle Emploi conformes sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt, la cour se réservant expressément le droit de liquider ladite astreinte ;

sur les frais irrépétibles et les dépens,

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a limité la fixation au passif de la liquidation de la SARL SFSM à la somme de 600 € au titre des frais irrépétibles ;

condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétible de première instance ;

condamner solidairement la SARL SFSM et la SARL NESSIMA sauf à fixer au passif de cette dernière société en état de liquidation judiciaire, à lui verser la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles d’appel outre aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 10 juin 2022 aux termes desquelles la SELARL MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA, demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris ;

dire que la SARL NESSIMA est hors de cause ;

débouter la salariée de l’ensemble de ses demandes ;

à titre principal,

mettre hors de cause la SARL NESSIMA ;

dire qu’aucune convention n’est intervenue entre la SARL SFSM et la SARL NESSIMA ;

dire qu’en l’absence de convention entre ces deux employeurs successifs, chacun est tenu des dettes contractées à l’égard de la salariée ;

dire que la salariée n’est pas fondée à solliciter la condamnation de la SARL NESSIMA au titre d’une solidarité qui juridiquement n’est pas fondée ;

dire la SARL NESSIMA ne peut être tenue de la demande de requalification à temps complet ;

à titre subsidiaire,

dire que le solde de tout compte signé le 31 août 2018 a un caractère libératoire et que ce dernier n’a pas été dénoncé dans les 6 mois par la salariée s’agissant de sa période d’emploi entre le 1er janvier 2018 et le 31 août 2018 (avec un arrêt maladie du 28 janvier 2018) ;

à titre plus subsidiaire,

dire que la SARL NESSIMA est étrangère à la rédaction du contrat de travail de la salariée ;

dire que jusqu’au 1er janvier 2018, c’est la SARL SFSM qui exploitait le magasin GIFI et avait la qualité d’employeur de Mme [Y] et qu’il lui appartient donc de rapporter la preuve des horaires de travail de la salariée ;

dire que la SARL NESSIMA n’a jamais demandé à la salariée d’effectuer des heures complémentaires ;

dire que la salariée qui s’est placée en arrêt maladie à compter du 28 janvier 2018 n’a effectivement travaillé pour la SARL NESSIMA que moins d’un mois, du 1er janvier 2018 au 27 janvier 2018 ;

dire que la salariée n’est pas fondée à solliciter des rappels de salaire au titre d’une requalification en temps complet sur la période de suspension de son contrat de travail à compter du 28 janvier 2018 ;

dire que la SARL NESSIMA ne peut être tenue à maxima que pour la période postérieure à la reprise du contrat de travail et antérieure à l’arrêt maladie ;

dire que la SARL NESSIMA ne peut être tenu de rappels de salaires éventuels que sur la période du 1er janvier 2018 au 27 janvier 2018 ;

déboutera la salariée de toute autre demande, mal orientée et formulée à l’encontre de la SARL NESSIMA ;

dire que le recours au CDD pour accroissement d’activité est parfaitement motivé et justifié par les tâches précises et temporaires liées au changement de mandataire gérant qui ont généré un surcroît d’activité ;

débouter la salariée de sa demande au titre de la requalification de son CDD en CDI et les demandes afférents, à savoir indemnité de requalification en CDI, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis, dommages-intérêts pour défaut de procédure de licenciement ;

relever que la salariée ne rapporte aucun élément de nature à permettre d’apprécier l’existence et l’étendue du préjudice qu’elle prétend avoir subi ;

dire que la salariée a eu une activité professionnelle auprès d’un autre employeur immédiatement après son arrêt maladie et dès la fin de son contrat de travail du 31 août 2018 au 29 octobre 2018 ;

débouter la salariée sa demande indemnitaire injustifiée et largement surévaluée ;

constater que la SARL NESSIMA et son liquidateur, pour assurer les besoins de leur défense, ont dû exposer des frais irrépétibles sur la base desquels la cour appréciera la somme à allouer au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera tout d’abord relevé que le premier juge n’a pas condamné l’AGS à garantir le paiement des sommes qu’il fixait à titre de créance et que la salariée ne sollicite toujours pas le prononcé judiciaire d’une telle condamnation. Toutefois, l’AGS se trouvant tenue dans les limites légales et réglementaires de sa garantie, elle a bien qualité et intérêt à appeler le jugement entrepris.

1/ Sur la durée du contrat

L’article L. 1242-2 disposait, dans sa version en vigueur du 10 août 2016 au 1er janvier 2018, que :

« Sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :

[‘]

2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ; »

La salariée sollicite la requalification du contrat de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée au motif que l’employeur ne justifierait pas de l’accroissement d’activité visé au contrat.

Le liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA répond qu’il est fort possible que le changement de mandataire-gérant du magasin ait poussé la SARL SFSM à recruter la salariée pour un surcroît d’activité sur la période d’août 2017 à août 2018 dès lors qu’en préparation du changement de mandataire gérant, il est fort possible qu’il ait été nécessaire de procéder à des inventaires et audits spécifiques et distincts des inventaires habituels, ce qui a généré un accroissement d’activité sur la période d’août 2017 à décembre 2017 et que, postérieurement à la reprise du magasin par la SARL NESSIMA, la CENTRALE GIFI a fait procéder à plusieurs audits sur le magasin, en raison notamment des dysfonctionnements et des manquements de la SARL SFSM s’agissant du respect des procédures internes de GIFI et que ces différents audits et visites de contrôle ainsi que la réorganisation opérée et les nouvelles procédures de travail mises en place au sein du magasin, conformément aux procédures internes GIFI, ont généré un accroissement temporaire et exceptionnel de l’activité de la SARL NESSIMA.

L’AGS soutient que le seul motif de l’accroissement d’activité porté au contrat suffit à s’opposer à la requalification du contrat.

La cour retient que l’accroissement d’activité s’apprécie au temps de la conclusion du contrat de travail et qu’il appartient à l’employeur de justifier de la réalité de cet accroissement temporaire d’activité. Ni l’AGS ni le liquidateur de la SARL NESSIMA ne produisent de pièce relative à un accroissement d’activité courant août 2017 justifiant d’un contrat de plus d’un an ni même étayant les conjectures précitées présentées comme « fort possibles ». En conséquence, il convient de requalifier le contrat de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée.

2/ Sur la durée du travail

L’article L. 3123-6 du code du travail dispose que :

« Le contrat de travail du salarié à temps partiel est un contrat écrit.

Il mentionne :

1° La qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile et les salariés relevant d’un accord collectif conclu en application de l’article L. 3121-44, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;

2° Les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification ;

3° Les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. Dans les associations et entreprises d’aide à domicile, les horaires de travail sont communiqués par écrit chaque mois au salarié ;

4° Les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat.

L’avenant au contrat de travail prévu à l’article L. 3123-22 mentionne les modalités selon lesquelles des compléments d’heures peuvent être accomplis au-delà de la durée fixée par le contrat. »

La salariée sollicite la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet. Elle fait valoir que le contrat prévoyait 6,25 heures par semaine sans plus de précision sur la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou entre les semaines du mois et qu’ainsi elle se devait donc d’être disponible en permanence pour l’employeur.

Elle explique qu’elle travaillait régulièrement au-delà des 6,25 heures par mois prévues au contrat comme le démontre ses bulletins de paie, qu’ainsi au mois d’août 2017, elle réalisait 27,08 heures et 14 heures complémentaires soit au total 41,08 heures ; au mois de septembre 2017, elle réalisait 27,08 heures et 37,5 heures complémentaires soit au total 64,58 heures. Elle indique encore qu’au mois d’octobre 2017, elle réalisait un temps complet et percevait en contrepartie la somme de 1 283,58 € nets, comme le démontre son relevé bancaire laissant apparaître un virement du 7 novembre 2017 de 1 283,58 € de Mme [L] [B] gérante de la SARL SFSM. La salariée ajoute qu’au mois de novembre 2017, elle réalisait 27,08 heures et 10 heures complémentaires, soit au total 37,08 heures et au mois de décembre 2017 27,08 heures et 47,25 heures complémentaires soit au total 74,33 heures.

Le liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA répond que le virement du 7 novembre 2017 ne permet pas d’établir que la salariée aurait travaillé à temps complet en octobre 2017.

L’AGS fait valoir qu’il appartient à la salariée de rapporter la preuve qu’elle s’est tenue à la disposition permanente de l’employeur pour obtenir la requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet.

La cour retient que le contrat de travail ne mentionne pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois et que, dès lors, en application du texte précité, elle se trouve tenue de requalifier la relation de travail à temps partiel en un contrat à temps complet.

3/ Sur la demande de rappel de salaire

L’article L. 1224-2 du code du travail dispose que :

« Le nouvel employeur est tenu, à l’égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, aux obligations qui incombaient à l’ancien employeur à la date de la modification, sauf dans les cas suivants :

1° Procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ;

2° Substitution d’employeurs intervenue sans qu’il y ait eu de convention entre ceux-ci.

Le premier employeur rembourse les sommes acquittées par le nouvel employeur, dues à la date de la modification, sauf s’il a été tenu compte de la charge résultant de ces obligations dans la convention intervenue entre eux. »

En application de ce texte, la solidarité entre employeurs successifs ne se trouve écartée qu’à la condition que la cession soit décidée dans le cadre d’une procédure collective et non quand l’ouverture de la procédure est postérieure à la cession. Lorsqu’il est mis fin au contrat de location-gérance et que le fonds de commerce est donné en location à un nouveau gérant, la modification dans la situation juridique de l’employeur intervient en vertu de conventions successives et le dernier exploitant est tenu, à l’égard des salariés dont les contrats de travail subsistent, des obligations nées au service du premier.

Sur la base d’un salaire mensuel à temps complet de 1 480,30 € la cour retient que la salariée possède une créance solidaire sur les liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA de :

‘ concernant le mois d’août 2017 de (24/30 × 1 480,30 €) ‘ 264,30 € ‘ 150,30  € = 1 184,24 € ;

‘ concernant le mois de septembre 2017 de 762,11 € ;

‘ concernant le mois de novembre 2017 de 1 097,78 € ;

‘ concernant le mois de décembre 2017 de 643,11 € ;

soit une somme totale de 3 687,24 € à titre de rappel de salaire outre celle de 368,72 € au titre des congés payés y afférents.

La salariée possède une créance sur la seule liquidation judiciaire de la SARL NESSIMA de (27/30 × 1 480,30 €) ‘ 230,50 € = 1 101,77 € concernant le mois de janvier 2018 outre celle de 110,18 € au titre des congés payés y afférents.

3/ Sur l’indemnité de requalification

Il convient de fixer la créance de la salariée au titre de l’indemnité de requalification à la somme de 1 480,30 € en application des dispositions de l’article L. 1245-2 du code du travail.

La salariée ne sollicite pas la fixation de cette somme au passif de la SARL NESSIMA à titre principal, elle ne sera donc fixée qu’au passif de la SARL SFSM.

4/ Sur le licenciement

Le contrat de travail à durée déterminée ayant été requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, sa rupture à l’échéance, sans lettre de rupture énonçant des motifs réels et sérieux, s’analyse en un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

5/ Sur l’indemnité compensatrice de préavis

Il convient de fixer la créance solidaire de la salariée sur les liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA au titre de l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1 480,30 € bruts outre celle de 148,03 € bruts au titre des congés payés y afférents.

6/ Sur les dommages et intérêts pour licenciement irrégulier

La créance de la salariée sur les liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA, au titre des dommages et intérêts pour licenciement irrégulier sera fixée à la somme de 1 480,30 €.

7/ Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La salariée était âgée de 26 ans au temps de la rupture du contrat de travail, elle disposait d’une ancienneté d’un an révolu et elle justifie avoir perçu 136 allocations journalières au titre du chômage à l’issue de la rupture du contrat de travail. L’entreprise employait 13 salariés. La cour retient au vu de l’ensemble de ces éléments que l’entier préjudice de la salariée sera réparé par l’allocation d’une somme équivalente à deux mois de salaire, soit la somme de 2 960,60 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, laquelle sera inscrite solidairement aux passifs des SARL SFSM et NESSIMA.

La somme allouée à la salariée n’excédant pas celle autorisée par les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, il n’y a pas lieu de s’interroger sur la conformité de ce texte aux dispositions de l’article 24 de la charte sociale européenne, dès lors que le préjudice de la salariée a été entière réparé et que la somme allouée à cette dernière ne peut avoir aucun effet dissuasif au regard des employeurs, tous deux en liquidation judiciaire.

8/ Sur les autres demandes

Le mandataire ad hoc de la SARL SFSM délivra à la salariée des bulletins de paie rectifiées d’août à décembre 2017 sans qu’il y ait lieu de prononcer une mesure d’astreinte.

Le liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA délivra à la salariée des bulletins de paie de janvier à août 2018, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés sans qu’il soit besoin de prononcer une mesure d’astreinte.

Le mandataire ad hoc de la SARL SFSM et le liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA déclareront aux organismes sociaux la situation rectifiée de la salariée.

Il convient de fixer aux passifs des SARL SFSM et NESSIMA la créance in solidum de la salariée au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel à la somme unique de 1 500 €, conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’AGS ainsi que le liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA seront déboutés de leurs demandes relatives aux frais irrépétibles.

Les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge in solidum des liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :

requalifié la relation de travail à temps partiel entre Mme [D] [Y] et la SARL SFSM en relation de travail à temps complet ;

requalifié le contrat de travail à durée déterminée du 6 août 2017 en contrat de travail à durée indéterminée ;

dit que la rupture du contrat de travail s’assimile à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

débouté la SARL NESSIMA de sa demande au titre des frais irrépétibles.

L’infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau,

Fixe la créances de Mme [D] [Y] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL SFSM à la somme de 1 480,30 € bruts à titre d’indemnité de requalification.

Fixe les créances de Mme [D] [Y] au passif de la liquidation judiciaire de la SARL NESSIMA aux sommes suivantes :

1 101,77 € bruts à titre de rappel de salaire concernant le mois de janvier 2018 ;

110,18 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

Fixe les créances solidaires de Mme [D] [Y] aux passifs des liquidations judiciaire des SARL SFSM et NESSIMA aux sommes suivantes :

3 687,24 € bruts à titre de rappel de salaire concernant l’année 2017 ;

368,72 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

1 480,30 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

148,03 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

1 480,30 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier ;

2 960,60 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dit que Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, délivra à Mme [D] [Y] des bulletins de paie rectifiées d’août à décembre 2017.

Dit que la SELARL MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA, délivra à Mme [D] [Y] des bulletins de paie de janvier à août 2018, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés.

Dit que Maître [N] [M], en qualité de mandataire ad hoc de la SARL SFSM, et la SELARL MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA, déclareront aux organismes sociaux la situation rectifiée de la salariée.

Fixe aux passifs des liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA la créance in solidum de Mme [D] [Y] à la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Déboute l’AGS, CGEA de Toulouse, ainsi que la SELARL MJSA, en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL NESSIMA, de leurs demandes concernant les frais irrépétibles.

Dit que les dépens de première instance et d’appel sont à la charge in solidum des liquidations judiciaires des SARL SFSM et NESSIMA.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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