ARRÊT DU
05 JUILLET 2022
NE/CO**
———————–
N° RG 21/00304 –
N° Portalis DBVO-V-B7F-C35A
———————–
[S] [Y]
C/
SAS ASAS SECURITY
———————–
Grosse délivrée
le :
à
ARRÊT n° 86 /2022
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Sociale
Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d’appel d’Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le cinq juillet deux mille vingt deux par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président assistée de Chloé ORRIERE, greffier
La COUR d’APPEL D’AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l’affaire
ENTRE :
[S] [Y]
né le 21 novembre 1967 à [Localité 4]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Claire-Marie CASTELA-COCKENPOT, avocat inscrit au barreau d’AGEN
APPELANT d’un jugement du Conseil de Prud’hommes – formation paritaire d’AGEN en date du 02 février 2021 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 19/00168
d’une part,
ET :
La SAS ASAS SECURITY prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Miloud GHALI, avocat inscrit au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE
d’autre part,
A rendu l’arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 05 avril 2022 sans opposition des parties devant Benjamin FAURE, conseiller rapporteur, assisté de Danièle CAUSSE, greffier, les parties ayant été avisées de ce que l’arrêt serait rendu le 14 juin 2022, lequel délibéré a été prorogé ce jour par mise à disposition. Le magistrat rapporteur en a, dans son délibéré, rendu compte à la cour composée outre lui-même de Nelly EMIN, conseiller et de Jean-Yves SEGONNES, conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés.
* *
*
FAITS ET PROCÉDURE
Selon contrat à durée déterminée à temps partiel en date du 15 avril 2019, [S] [Y] a été embauché par la société ASAS Security en qualité d’agent de surveillance, niveau 2, échelon 2, coefficient 130 de la classification fixée par la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité (IDCC 1351). Ce contrat de travail stipulait qu’il était conclu pour accroissement temporaire d’activité, avec une durée minimale du contrat jusqu’au 31 mai 2019. Il prévoyait en outre une base horaire mensuelle de 60 heures et une rémunération mensuelle brute de 601,81 euros.
Le 3 décembre 2019, [S] [Y] a saisi le conseil des prud’hommes d’Agen pour solliciter, dans le dernier état de ses conclusions, la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et la condamnation de ASAS Security à lui payer des rappels de salaire et de multiples indemnités.
Par jugement en date du 2 février 2021, le conseil des prud’hommes d’Agen a :
– dit que le contrat à durée déterminée à temps partiel a été conclu pour accroissement temporaire d’activité et débouté en conséquence [S] [Y] de sa demande de requalification du contrat ;
– condamné ASAS Security à payer à [S] [Y] les sommes de 600 euros au titre du retard dans la remise du contrat de travail, 150,45 euros au titre d’un rappel de salaire pour le mois de mai 2019, et 15,04 euros au titre des congés payés afférents, 10,01 euros au titre d’une heure de formation du 13 avril 2019 ;
– condamné ASAS Security à payer à [S] [Y] les sommes de 138,98 euros au titre de l’indemnité de fin de contrat à durée déterminée ;
– condamné ASAS Security à remettre à [S] [Y] les documents sociaux rectifiés ;
– débouté les parties du surplus et condamné ASAS Security au dépens et au paiement d’une indemnité de procédure de 1000 euros.
Selon déclaration enregistrée au greffe de la cour le 19 mars 2021, [S] [Y] a relevé appel de toutes les dispositions du jugement l’ayant débouté de ses demandes, précisément énumérées dans la déclaration d’appel.
La procédure de mise en état a été clôturée par ordonnance du 3 février 2022.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
I. Moyens et prétentions de [S] [Y], appelant principal
Selon dernières écritures enregistrées au greffe de la cour le 8 juin 2021, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’appelant, [S] [Y] conclut :
1°) à l’infirmation du jugement en ses dispositions le déboutant de sa demande de requalification et de ses demandes d’indemnité de requalification, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’indemnité de préavis et de congés payés sur préavis, en demandant à la cour de requalifier la relation en contrat de travail à durée indéterminée et de condamner ASAS Security à lui payer la somme de 600 euros au titre de l’indemnité de requalification, celle de 600 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle de 100,30 euros au titre de l’indemnité de préavis et celle de 10 euros au titre des congés payés afférents, en faisant valoir :
– qu’il n’a pas été embauché pour accroissement temporaire d’activité, mais pour remplacer [R] [P] ;
– que les contrats de travail à durée déterminée de remplacement ne peuvent prévoir une durée minimale et que ASAS Security ne démontre pas l’accroissement d’activité allégué, ne produisant notamment pas la prétendue demande d’augmentation du nombre d’heures de surveillance qu’aurait formulé le Magasin LIDL de Villeneuve-sur-Lot ;
– qu’il apparaît d’ailleurs que Monsieur [P], le salarié qu’il devait remplacer, était lui-même embauché pour une durée déterminée au motif d’un accroissement d’activité depuis novembre 2018 ;
– que le contrat de travail doit être requalifié en contrat à durée indéterminée et qu’il doit être considéré, la relation n’ayant pas été poursuivie après le terme fixé dans le contrat, qu’il a été licencié sans avoir été convoqué à un entretien préalable et sans lettre de licenciement, c’est à dire sans cause réelle et sérieuse, ce qui l’autorise à réclamer indemnisation du préjudice que lui cause cette rupture de la relation contractuelle et paiement d’une indemnité de préavis ;
2°) à l’infirmation du jugement ayant rejeté sa demande de rappel de salaire pour le mois d’avril 2019 et à la condamnation de ASAS Security à lui payer la somme de 210,63 euros à titre de rappel de salaire pour avril et mai 2019 en exposant :
– que le conseil des prud’hommes a justement retenu qu’il était fondé à obtenir paiement de rappel de salaire de 15 heures pour le mois de mai 2019 ainsi qu’une heure de formation mais qu’il a rejeté à tort sa demande de rappel pour cinq heures de travail en avril 2019 ;
– qu’en effet il a effectué en avril 2019, non pas 65 heures, mais 70 heures de travail, puisqu’il travaillait du lundi au samedi à raison de 5 heures par jour de 14h30 à 19h30, le planning de mai 2019 montrant que le contrat de ASAS Security avec le LIDL portait sur cinq heures de surveillance par jour du lundi au samedi ;
– qu’en tout état de cause l’employeur est tenu de régler l’ensemble des heures de travail figurant sur le contrat de travail même s’il n’a pas fourni du travail au salarié ;
3°) à la confirmation des dispositions du jugement lui ayant alloué 600 euros au titre du retard de remise du contrat de travail et 10 euros au titre d’une heure de formation du 13 avril 2019 ;
4°) de réformer le jugement et de condamner l’employeur à lui payer la somme de 600 euros pour absence de visite d’information et de prévention, celle de 600 euros pour absence de transmission de la déclaration unique d’embauche et celle de 140,09 euros au titre de l’indemnité de précarité ;
5°) de réformer le jugement et de condamner l’employeur à lui payer la somme de 600 euros pour non déclaration de son accident du travail et celle de 329 euros au titre du préjudice matériel résultant de la perte de son téléphone, cassé lors de l’agression dont il a été victime le 25 mai 2019 sur son lieu de travail ;
6°) de condamner ASAS Security aux dépens et au paiement d’une indemnité de procédure de 2000 euros.
II. Moyens et prétentions de ASAS Security, intimée
Selon dernières écritures enregistrées au greffe de la cour le 12 juillet 2021, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l’intimée, la société ASAS Security demande à la cour :
1°) de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de requalification de la relation de travail en contrat à durée déterminée en soutenant :
– que [S] [Y] a été embauché pour faire face à un surcroît d’activité à la suite d’une demande du magasin LIDL d’augmenter le nombre de surveillances jusqu’en mai 2019, demande formulée par téléphone puisque le client avait l’habitude de travailler avec elle ;
– que c’est sans la moindre preuve que [S] [Y] affirme qu’il aurait été recruté pour remplacer M. [P], dont le contrat de travail n’a jamais été suspendu ;
– que le principe de la procédure civile impose au demandeur de justifier et démontrer ses prétentions, ce que [S] [Y] ne fait pas ;
2°) de débouter [S] [Y] de sa demande en payement de 600 euros à titre d’indemnisation pour retard de transmission du contrat, faute de démonstration que la transmission intervenue 21 jours après son recrutement lui ait causé un quelconque préjudice ;
3°) de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation au titre de l’absence de visite d’information et de prévention en exposant que la loi EL KHOMRI a supprimé le principe de la visite médicale d’embauche systématique pour la remplacer par une visite d’information et de prévention et qu’en l’espèce [S] [Y] était titulaire de la carte professionnelle permettant d’exercer la profession d’agent de sécurité, qui n’est délivrée par la préfecture qu’après justification de son aptitude professionnelle, de sorte que son aptitude est suffisamment établie ;
4° ) de confirmer le jugement ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation pour défaut de transmission de l’accusé de réception de la déclaration préalable à l’embauche, cette déclaration ayant été faite le 4 avril 2019, avant la prise d’effet du contrat de travail ;
5°) de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de salaire pour le mois d’avril 2019, sauf pour l’heure de formation qui est due au salarié, [S] [Y] prétendant sans la moindre preuve avoir effectué en avril 5 heures de travail non rémunéré ;
6°) d’infirmer le jugement et de débouter [S] [Y] de sa demande en payement d’un rappel de salaire pour mai 2019 en exposant que si sur le planning produit par [S] [Y] figurait 14 heures de travail au magasin Lidl de Talence, le salarié a refusé expressément d’exécuter cette mission de sorte qu’il ne peut réclamer rémunération ;
7°) de confirmer le jugement en ce qu’il a alloué à [S] [Y] une indemnité de précarité de 138,98 euros ;
8°) de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande en paiement d’une indemnité pour défaut de déclaration d’accident de travail en exposant que le courrier que lui a adressé tardivement le salarié, le 3 juin 2019, ne précisait ni le jour, ni l’heure de l’agression et ne faisait état d’aucun préjudice, qu’il ne peut donc lui reprocher de ne pas avoir fait une déclaration d’accident du travail et que de surcroît le salarié ne démontre aucun préjudice du fait de ce retard ;
9°) de confirmer le rejet de la demande d’indemnisation du portable en relevant que [S] [Y] se borne à de simples allégations pour battre monnaie et bénéficier d’un maximun d’indemnisation, alors que dans sa déposition devant les services de police, le 27 mai 2009, il n’a pas évoqué ce téléphone portable ;
10°) de dire et juger que chaque partie devra conserver à sa charge ses propres frais et dépens.
MOTIFS DE L’ARRÊT
I. SUR LA REQUALIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL
L’article L.1245-1 du code du travail dispose qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L.1242-1 à L.1242-4, qui énoncent que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise et que le contrat à durée déterminée ne peut intervenir que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire.
L’article L.1242-12 du dit code précise que le contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif. À défaut d’énonciation d’un motif ou si ce motif ne correspond pas à la réalité, le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée.
En cas de litige sur le motif du recours à un contrat à durée déterminée, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat, étant ajouté que la cause du recours au contrat à durée déterminée s’apprécie à la date de la conclusion de celui-ci.
En l’espèce, aux termes du contrat de travail signé par les parties le 15 avril 2019, [S] [Y] a été embauché pour faire face à un acccroissement de travail.
Dès lors que ce motif est contesté par le salarié, il appartient à la société ASAS Security, qui tente maladroitement d’inverser la charge de la preuve, de démontrer la réalité du motif mentionné dans le contrat de travail.
Si elle invoque une demande formulée par le magasin LIDL de [Localité 5] d’augmentation du nombre et de la durée des surveillances jusqu’en mai 2019, force est de constater que la société ASAS Sécurity ne rapporte pas la moindre preuve de ce qui ne constitue toujours en l’état qu’une simple allégation, étant observé qu’elle n’est pas crédible quand elle affirme que la demande a été formulée téléphoniquement par LIDL, le message électronique d’un salarié de LIDL du 9 mai 2010 qu’elle produit ne confirmant nullement une demande d’augmentation des surveillances, mais seulement le fait que celle-ci avait jugé qu’il n’était plus nécessaire d’assurer la surveillance du magasin à compter du 9 novembre 2019.
Dès lors, la réalité du motif invoqué n’étant pas établie, il y a lieu, infirmant le jugement entrepris, de requalifier le contrat liant les parties en contrat de travail à durée indéterminée.
L’article L.1245-2 du code du travail prévoit que lorsqu’il est fait droit à une telle demande de requalification, le salarié a droit à une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. En conséquence il y a lieu de condamner la société ASAS Sécurity à payer à [S] [Y] une indemnité de requalification de 600 euros.
II. SUR LA REMISE TARDIVE DU CONTRAT DE TRAVAIL
Aux termes de l’article L.1242-13 du code du travail ‘ le contrat de travail à durée déterminée doit être transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant son embauche’ .
Il résulte des pièces produites que le contrat de travail a été transmis au salarié par jonction à un message électronique du 7 mai 2019, alors que l’embauche est intervenue le 15 avril 2019, ce qui n’est pas contesté par l’employeur.
Cette remise tardive a causé un préjudice au salarié dans la mesure où elle l’a mis dans l’impossibilité de procéder aussitôt après l’embauche à une vérification de la régularité du contrat et de solliciter sa régularisation par l’employeur. Ce préjudice a été justement évalué à 600 euros par les premiers juges, dont la décision portant condamnation de l’employeur à verser cette indemnité sera confirmée.
III. SUR LA TRANSMISSION DE LA DÉCLARATION D’EMBAUCHE
L’employeur justifie par la production du récépissé de la déclaration préalable d’embauche avoir transmis celle-ci à l’URSSAF le 4 avril 2019. S’il n’établit pas avoir remis au salarié une copie de cette déclaration ou du récépissé délivré par l’URSSAF ainsi que le prévoit l’article R.1221-9 du code du travail, force est de constater que [S] [Y] ne démontre pas que ce manquement lui a causé un quelconque préjudice. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée à ce titre par [S] [Y].
IV. SUR L’ABSENCE DE VISITE D’INFORMATION ET DE PRÉVENTION
Pour confirmer le rejet de la demande d’indemnité pour défaut de visite d’information et de prévention, il suffira de relever :
– qu’aux termes de l’article R.1221-2 du code du travail la déclaration préalable à l’embauche vaut demande de visite d’information et de prévention ;
– que le contrat de travail stipulait en son article 2-1 ‘vous devez vous rendre à toute convocation de la médecine du travail ‘ ;
– qu’il apparaît ainsi que l’employeur a satisfait à ses obligations légales et que le défaut de visite ne peut lui être imputé.
V. SUR LE RAPPEL DE SALAIRE
A titre liminaire il convient de relever que l’employeur ne conteste pas être tenu de rémunérer la formation à l’emploi suivie durant une heure le 13 avril 2019 par [S] [Y], et donc de lui verser la somme de 10,03 euros.
Il résulte des plannings des heures de surveillance du magasin LIDL établi par ASAS Security, que la surveillance était assurée 5 heures par jour du lundi au samedi.
[S] [Y] étaye sa demande en exposant que c’est lui qui a effectué tous les jours la surveillance du magasin entre le 15 et le 30 avril, c’est à dire durant 70 heures, alors qu’il n’a été rémunéré que pour 65 heures de travail.
Force est de constater que l’employeur, à qui incombe le contrôle des heures de travail des salariés, ne combat pas utilement la demande en produisant un récapitulatif sans valeur probante dès lors que ce document n’est pas signé par le salarié, qu’il mentionne que le lundi 22 avril [S] [Y] n’aurait pas assuré la surveillance du magasin, ouvert de 8h30 à 13h 30, mais ne soutient pas quele magasin n’était pas ouvert ce jour là et ne précise pas qui aurait assuré ce jour là la surveillance du magasin et à fortiori n’en justifie pas, que l’employeur n’établit pas davantage que son client ce serait plaint d’une absence de surveillance ce jour là.
Dès lors c’est à bon droit qu’il réclame indemnisation de 5 heures de travail en avril 2019, soit la somme de 50,15 euros bruts.
Par ailleurs l’examen du bulletin de salaire du mois de mai 2019 fait apparaître que [S] [Y] n’a été rémunéré ce mois là que pour 45 heures de travail.
C’est vainement que l’employeur soutient qu’il était en droit d’opérer une déduction de 15 heures en raison du refus de [S] [Y] d’assurer la surveillance de l’établissement LIDL de Talence dès lors :
– que l’une des obligations essentielles de l’employeur est de fournir au salarié le travail pour lequel celui-ci a été embauché ;
– que [S] [Y] avait été embauché, selon les propres explications de la société ASAS Security, pour assurer la surveillance du magasin Lidl de [Localité 5] durant 60 heures par mois et que l’employeur était tenu de lui faire exécuter la prestation pour laquelle il avait été embauché ;
– qu’il n’a pas exécuté loyalement le contrat de travail en proposant tardivement au salarié d’assurer une surveillance dans un établissement situé à près de 200 kms de son domicile ;
– que n’ayant pas mis [S] [Y] en mesure d’exécuter le travail convenu, il ne pouvait imputer la faute de cette inexécution à celui-ci et demeure tenu de le rémunérer à hauteur de la durée convenue.
Par suite la société ASAS Security demeure tenue du payement des heures déduites à tort, soit de la somme de 150,45 euros bruts.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions condamnant l’employeur à verser la somme de 10,01 euros au titre de l’heure de formation du 13 avril 2019 (qui n’ouvre pas droit à congés-payés puisque les parties n’étaient pas encore liées par un contrat de travail) et, réformant pour le surplus le jugement, de le condamner en outre à payer à titre de rappel de salaire la somme de 50,15 euros bruts au titre des heures complémentaires et de 150,45 euros au titre du rappel de salaire pour le mois de mai 2019.
VI. SUR LA RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL
A titre liminaire il convient de rappeler que l’indemnité de précarité a pour objet de compenser le statut précaire des salariés en contrat à durée déterminée. En application de l’article L.1243-8 du code du travail, elle n’est pas due en cas de requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur la poursuite du contrat au delà du terme convenu . Dès lors, compte tenu de la requalification prononcée précédemment, il y a lieu d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné ASAS Security à payer à [S] [Y] la somme de 138,98 euros au titre de l’indemnité de fin de contrat à durée déterminée, et de débouter [S] [Y] de ce chef de demande.
Du fait de la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée, la rupture de la relation contractuelle à compter du 31 mai 2019 s’analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit au profit de [S] [Y] à la réparation du préjudice consécutif à cette rupture.
Compte tenu de son ancienneté limitée de 6 semaines et de sa rémunération mensuelle brute de 601,81 euros, ce préjudice peut être chiffré à 300 euros, montant des dommages et intérêts que ASAS Security sera condamnée à lui verser.
Par ailleurs cette rupture de la relation de travail ouvre également droit pour le salarié au bénéfice, d’une part, d’une indemnité de préavis, dont seul le comportement de l’employeur a empêché l’exécution, le chiffrage (100,30 euros) de cette indemnité par l’appelant n’étant pas contesté, d’autre part, de l’ indemnité compensatrice de congés payés sur préavis de 10 euros réclamée par M. [Y].
Le jugement entrepris sera réformé en ce sens et la société ASAS SECURITY condamné à payer ces sommes à M. [Y].
VII. SUR L’ABSENCE DE DÉCLARATION D’ACCIDENT DU TRAVAIL
[S] [Y] fait grief à son employeur de ne pas avoir déclaré l’accident du travail dont il prétend avoir été victime à la suite d’une agression subie le 25 mai 2019 sur son lieu de travail, ayant entraîné le 24 juin 2019 un arrêt de travail en raison de la réapparition d’angoisses liées à cette agression.
Pour confirmer le rejet de la demande de dommages et intérêts formée à ce titre, il suffira de relever :
– qu’aux termes des articles L.441-1 et R.441-2 du code de la sécurité sociale, il appartient à la victime d’un accident du travail d’en informer dans les 24 heures, sauf force majeure ou motif légitime, l’employeur ou l’un de ses préposés ;
– qu’en l’espèce [S] [Y] ne soutient pas et a fortiori ne justifie pas avoir informé son employeur de l’accident du travail allégué, étant rappelé qu’il a indiqué aux services de police, lors de son audition sur les faits survenus le 25 mai 2019 ‘je n’ai pas été victime, je ne désire pas déposer plainte’ ;
– que s’il fait état d’un lien entre son arrêt de travail du 24 juin 2019 et l’agression, l’avis de travail délivré par son médecin traitant ne vise pas un arrêt pour accident du travail, mais un arrêt pour ‘ des graves difficultés dans un cadre professionnel’ ;
– qu’il apparaît ainsi que [S] [Y] n’a jamais informé son employeur qu’il aurait subi un accident du travail et qu’il est donc particulièrement mal venu de lui reprocher de ne pas avoir fait une déclaration d’accident du travail auprès de la caisse primaire d’assurance maladie ;
– que de surcroît il disposait de la possibilité de faire reconnaître le caractère professionnel de l’accident allégué, dont il ne justifie pas avoir fait usage et n’a donc subi aucun préjudice du fait du manquement qu’il impute à son employeur.
VIII. SUR LE REMBOURSEMENT D’UN TÉLÉPHONE PORTABLE
Exposant que lors de son agression le 25 mai 2019 il a fait tomber son téléphone portable qu’il venait d’acheter et qui s’est cassé, [S] [Y] réclame la somme de 329,90 euros à titre de réparation de son préjudice matériel.
Pour confirmer le rejet de cette demande il suffira de relever, d’une part, que [S] [Y] n’indique même pas le fondement juridique de cette demande et les dispositions légales qui pourrait la justifier, d’autre part que la dégradation du téléphone par l’effet d’une chute n’est pas établie, [S] [Y] ne l’ayant pas évoqué lors du dépôt de sa plainte devant les services de police.
IX. SUR LES DÉPENS ET LES FRAIS NON-RÉPÉTIBLES
[S] [Y], dont la succombance est dominante à hauteur d’appel, ne peut utilement invoquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et devra supporter les entiers dépens d’appel.
L’équité n’impose pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société ASAS Security à hauteur d’appel.
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile seront elles confirmées.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt prononcé par sa mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions :
– disant que le contrat à durée déterminée à temps partiel a été conclu pour accroissement temporaire d’activité et déboutant [S] [Y] de sa demande de requalification du contrat ;
– allouant à [S] [Y] une indemnité de précarité ;
– déboutant [S] [Y] de ses demandes tendant à faire juger que la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à obtenir payement des indemnités de rupture et des dommages et intérêts ;
– déboutant [S] [Y] de sa demande en payement d’un rappel de salaire pour heures complémentaires en avril 2019 et rappel de salaire pour mai 2019 ;
statuant à nouveau de ces chefs,
REQUALIFIE le contrat liant les parties en contrat de travail à durée indéterminée ;
CONDAMNE la société ASAS Security à payer à [S] [Y] une indemnité de requalification de 600 euros ;
DÉBOUTE [S] [Y] de sa demande en payement d’une indemnité de précarité ;
DIT que la rupture de la relation contractuelle s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la société ASAS Security à payer à [S] [Y] les sommes de :
– 100,30 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;
– 10 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
– 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNE la société ASAS Security à payer à [S] [Y] les sommes de 50,15 euros bruts au titre des heures complémentaires d’avril 2019 et de 150,45 euros bruts au titre du rappel de salaire pour le mois de mai 2019 ;
CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris,
y ajoutant,
DIT n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;
DÉBOUTE les parties de leurs prétentions plus amples ;
CONDAMNE la société ASAS Security aux entiers dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président et Chloé ORRIERE, greffier.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT