CDD pour accroissement d’activité : décision du 24 janvier 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/01211
CDD pour accroissement d’activité : décision du 24 janvier 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/01211

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 24 JANVIER 2024

PRUD’HOMMES

N° RG 21/01211 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-L63U

Monsieur [F] [D]

c/

S.A.S. ETUDE ET CONCEPTION POLYESTER (ECP)

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 février 2021 (R.G. n°F 18/01879) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Industrie, suivant déclaration d’appel du 26 février 2021,

APPELANT :

Monsieur [F] [D]

né le 27 Août 1983 à [Localité 2] de nationalité française demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Pierre BURUCOA, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SAS Étude et Conception Polyester (ECP), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 3]

N° SIRET : 488 533 845

représentée et assistée de Me Jean-baptiste ROBERT-DESPOUY de la SELARL ORACLE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 décembre 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie HYLAIRE, présidente chargée d’instruire l’affaire, et Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Etude et Conception Polyester (ci après dénommée société ECP) a pour activité la conception et la fabrication de piscines en polyester, réalisées dans son usine de [Localité 4].

Par contrat de travail à durée indéterminée conclu le 22 février 2016, Monsieur [F] [D], né en 1983, a été engagé au sein de l’entreprise en qualité de mouliste stratifieur coefficient 730 de la convention collective nationale de la plasturgie.

La période d’essai de ce contrat a été rompue par l’employeur le 22 mars 2016.

Le 4 avril 2016, M. [D] a de nouveau été embauché par la société en qualité de préparateur stratifieur, niveau 1, coefficient 720 dans le cadre d’un contrat à durée déterminée dont le terme était fixé au 3 juillet 2016, contrat motivé par un accroissement temporaire d’activité lié à la ‘période de pointe de l’entreprise en raison de la saison estivale’.

Un second contrat à durée déterminée a été conclu entre les parties pour la période allant du 4 juillet au 3 octobre 2016 pour les mêmes motifs, fonctions et coefficient et pour 39 heures hebdomadaires de travail.

Le 4 octobre 2016, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée, M. [D] étant engagé en qualité de mouliste stratifieur, niveau 2, coefficient 740 et pour un horaire de travail de 39 heures par semaine.

***

Par courrier du 28 février 2018, la société ECP a informé M. [D] de son intention de ne plus accepter aucune journée de congés et récupérations d’heures pour convenances personnelles en raison d’un planning surchargé à la fabrication, relevant que les absences répétées du salarié gênaient la préparation.

Par lettre du 1er juin 2018, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, fixé au 6 juin suivant.

Par courrier du 7 juin 2018, l’employeur a demandé à M. [D] d’exprimer ses excuses écrites avant le lendemain quant à son comportement et aux propos qu’il avait tenus durant l’entretien.

M. [D] a répondu par un courriel du même jour, confirmant ses propos, à savoir ‘me tenir aux 39 heures hebdomadaires de travail pour les attributions strictes de ma fiche de poste’ et faisant état de paroles injurieuses de l’employeur à son égard ainsi qu’envers la collègue qui l’avait accompagné, Mme [C], qui est aussi sa compagne.

Par lettre du 9 juin 2018, l’appelant a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 19 juin suivant, avec mise à pied à titre conservatoire.

M. [D] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre datée du 22 juin 2018.

Par courrier du 4 juillet 2018, le salarié a contesté son licenciement et demandé des précisions sur les motifs à la société.

Par courrier du 3 septembre 2018, M. [D] a demandé à la société ECP d’effectuer les démarches nécessaires à la portabilité de ses garanties santé et prévoyance. Celle-ci lui a répondu les avoir déjà entreprises par courrier du 11 septembre 2018.

Le conseil du salarié a adressé un courrier daté du 11 octobre 2018 pour proposer un règlement amiable du litige à la société ECP, ce courrier faisant notamment état du caractère non fondé du licenciement.

En novembre 2018, la société intimée a réglé à M. [D] la somme de 4.058,44 euros nets correspondant à un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires (2.939,25 euros bruts) et de contrepartie obligatoire en repos (1.687 euros pour 2016 et 574,24 euros pour 2018, soit 2.261,34 euros bruts).

***

Le 5 décembre 2018, contestant la légitimité de son licenciement et réclamant le paiement de l’indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, du salaire retenu durant la mise à pied conservatoire, des congés payés sur le rappel d’heures supplémentaires régularisé outre des dommages et intérêts pour défaut de contrepartie obligatoire en repos et pour défaut de portabilité des garanties de prévoyance, M. [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux.

Par jugement rendu le 3 février 2021, le conseil a :

– débouté M. [D] de l’ensemble de ses demandes,

– constaté qu’il a perçu en novembre 2018 la somme de 2.939,25 euros au titre de la majoration du taux horaire sur les heures supplémentaires,

– constaté qu’il a perçu en novembre 2018 la somme de 2.261,34 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos de 2016 et 2018,

– donné acte à la société ECP de la régularisation de la somme de 826,32 euros au titre du solde de l’indemnisation des contreparties en repos de 2016 à 2018,

– débouté la société ECP de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– laissé à chaque partie la charge de ses dépens,

– rejeté les autres demandes.

Par déclaration du 26 février 2021, M. [D] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 21 septembre 2023, M. [D] demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, de déclarer la société ECP recevable mais mal fondée en ses demandes reconventionnelles et de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société ECP de sa demande reconventionnelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– l’infirmer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

– dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– dire la faute grave non caractérisée,

– fixer le salaire mensuel de référence à hauteur de 2.934,52 euros,

– condamner la société ECP à lui verser les sommes suivantes :

* à titre d’indemnité de requalification, 2.934,52 euros,

* à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur le rappel d’heures

supplémentaires régularisé, 239,25 euros bruts,

* à titre de dommages et intérêts pour défaut de contrepartie obligatoire en repos, 12.400 euros,

* à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

10.270,82 euros,

* à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 5.869,04 euros ainsi que 586,90 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

* à titre de rappel de salaire sur mise à pied, 957,55 euros ainsi que 95,76 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférente,

* à titre d’indemnité légale de licenciement, 1.628,66 euros,

* à titre de dommages-intérêts pour défaut de portabilité des garanties de prévoyance et frais de santé, 1.000 euros,

– ordonner à la société ECP de lui communiquer les bulletins de salaire afférents ainsi que le reçu pour solde de tout compte et l’attestation Pôle Emploi corrigés,

– la condamner à rembourser à Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine les allocations d’aide au retour à l’emploi versées dans la limite de six mois d’indemnités sur le fondement de l’article L. 1235-4 du code du travail,

– assortir l’intégralité des condamnations d’une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

– dire que ces condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud’hommes,

– condamner la société ECP à lui verser la somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– la débouter de l’intégralité de ses demandes reconventionnelles,

– la condamner aux dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 3 août 2021, la société ECP demande à la cour de :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– condamner M. [D] à lui verser la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– le condamner aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 11 décembre 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes au titre de la requalification des contrats de travail à durée déterminée

M. [D] sollicite la requalification des contrats de travail à durée déterminée conclus les 4 avril et 4 juillet 2016, exposant avoir occupé le même poste dès le mois de février 2016, soit hors de la période estivale invoquée comme la cause d’accroissement d’activité, et avoir en réalité été affecté à un emploi permanent de l’entreprise.

En réponse à la prescription de son action à ce titre opposée par la société, il soutient que le point de départ du délai de deux ans prévu par l’article L. 1471-1 du code du travail doit être fixé au terme de son contrat de travail à durée indéterminée, soit au 22 juin 2018.

*

La société conclut à la confirmation de la décision déférée.

Elle invoque la tardiveté de la saisine de la juridiction prud’homale au regard de la date de fin des contrats de travail à durée déterminée litigieux.

Sur le fond, elle soutient que ces contrats étaient justement motivés par un accroissement de son activité plus importante en période estivale.

***

Aux termes de l’article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Lorsque la demande de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée repose sur le motif du recours à ce contrat, le délai de prescription de l’action court à compter du terme de ce contrat et, en cas de succession de contrats, du terme du dernier contrat de travail à durée déterminée conclu entre les parties.

En l’espèce, le dernier contrat de travail à durée déterminée conclu entre M. [D] et la société ECP a pris fin le 3 octobre 2016.

M. [D] disposait donc d’un délai pour agir expirant le 3 octobre 2018.

Ayant saisi la juridiction prud’homale le 5 décembre 2018, M. [D] est irrecevable en ses demandes de requalification des contrats de travail à durée déterminée conclus avec la société.

Le jugement déféré, en ce qu’il n’a pas statué sur la fin de non-recevoir qu’invoquait la société, sera infirmé.

Sur les demandes présentées au titre de la durée du travail

Sur la demande au titre des congés payés afférents aux heures supplémentaires

En novembre 2018, la société a réglé à M. [D] la somme de 2.939,25 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées non rémunérées, correspondant selon son propre décompte à :

– 1.256,33 euros pour 2016,

– 829,94 euros pour 2017,

– 852,98 euros pour 2018.

Le paiement n’a pas inclus les congés payés afférents soit la somme de 293,92 euros bruts.

La société sera en conséquence condamnée à payer à M. [D] la somme de 239,25 euros bruts, dans la limite de la demande à ce titre de celui-ci.

Sur la demande au titre de la contrepartie obligatoire en repos

M. [D] sollicite le paiement de la somme de 12.400 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de contrepartie obligatoire en repos en produisant un tableau chiffrant les sommes dues à ce titre à 12.753,19 euros en principal outre 1.275,32 euros pour les congés payés afférents soit un total de 14.028,51 euros, tableau établi sur la base d’un solde dû au titre des heures supplémentaires non réglées de 1.878,05 euros. La somme figurant dans ce tableau tient compte du règlement effectué par l’employeur en décembre 2017 (2.360,16 euros) mais non de celui intervenu en novembre 2018 (2.261,34 euros).

Tenant compte des calculs effectués par la société, M. [D] fait observer que celle-ci ne justifie toujours pas en cause d’appel de son effectif, inférieur ou supérieur à 20 et a établi dans ses écritures un autre décompte où il estime que lui sont dûs :

– soit 9.635,85 euros (effectif supérieur à 20),

– soit 3.566,99 euros (effectif inférieur à 20).

Il fait enfin valoir que malgré le nombre très élevé des heures supplémentaires effectuées, l’employeur ne l’a pas informé de son droit au repos ni en 2016 ni en 2018 et, pour 2017, de manière tardive, ce qui l’a empêché de se consacrer pleinement à sa vie personnelle et était de nature à porter atteinte à sa santé.

En cause d’appel, la société reconnaît comme en première instance être redevable à ce titre de la somme de 826,32 euros, selon un tableau figurant dans ses écritures, erreur qu’elle impute aux errements du cabinet comptable auquel elle avait alors recours ; le jugement déféré a donné acte à la société de ‘la régularisation’ à ce titre, mais, à l’audience, sur la question de la cour, celle-ci a indiqué que cette somme n’était toujours pas payée.

Elle conteste par ailleurs le préjudice moral invoqué par le salarié au soutien de sa demande indemnitaire au-delà des sommes dues au titre de la contrepartie obligatoire en repos.

***

En vertu des dispositions de l’article L. 212-5-1 du code du travail, devenu l’article L3121-20, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d’un contingent annuel. Les heures effectuées au delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d’heures supplémentaires sont celles accomplies au delà de la durée légale.

Ce contingent est défini par accord d’entreprise, à défaut par la convention collective applicable ou, par la loi.

En l’espèce, l’annexe VI à la convention collective dont relevaient les relations contractuelles, fixe le contingent annuel, hors modulation du temps de travail, à 130 heures, nombre pouvant être porté à un montant supérieur, sous condition de la consultation des organisations, syndicales.

Les parties s’accordent sur un contingent annuel de 130 heures ainsi que sur le fait que les dispositions légales prévoient qu’à défaut d’accord, la contrepartie obligatoire sous forme de repos est fixée à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.

L’attestation Pôle Emploi mentionne un effectif de 12 salariés, qui n’est pas utilement contredit par l’appelant.

Contrairement à ce que semble soutenir la société, le dépassement du contingent doit être calculé à compter de la première heure effectuée au-delà de la durée légale, soit 35 heures.

En revanche, dans le calcul des sommes dues au titre de la contrepartie obligatoire en repos, n’ont pas à être prises en compte les accessoires de salaire correspondant à des sujétions que le salarié ne subit pas lorsqu’il est en repos, telle la prime de déplacement invoquée par M. [D].

Sous le bénéfice de ces observations, la créance de M. [D] au titre de la contrepartie obligatoire en repos doit être fixée en considération des éléments suivants en prenant en considération le nombre d’heures supplémentaires figurant sur les bulletins de paie et le taux horaire brut de 11,5445 euros :

– année 2016 : 373,63 heures de dépassement du contingent annuel,

– année 2017 :409,03 heures,

– année 2018 (janvier à juin) : 122,47 heures,

soit un total dû de 5.224,63 euros.

Compte tenu des paiements intervenus qui ne sont pas contestés, soit 2.360,16 euros (bulletin de paie de décembre 2017) et 2.261,34 euros (bulletin de paie de novembre 2018), la créance de M. [D] sera fixée à la somme de 826,32 euros que la société reconnaît lui devoir outre celle de 82,63 euros pour les congés payés afférents soit un total de 908,68 euros.

Pour le surplus, la société ne justifie avoir informé le salarié de son droit effectif à prendre des repos compensateurs acquis en 2017 que par un courrier du 22 décembre 2017 remis en mains propres, malgré le nombre non négligeable des heures supplémentaires réalisées représentant plus de 500 heures en 2016 et 2017 et plus de 250 heures de janvier à juin 2018.

En violation de l’obligation lui incombant, l’employeur n’a donné au salarié aucune information pour les exercices 2016 et 2018, la contrepartie obligatoire pour les périodes travaillées n’ayant été payée que pour partie en novembre 2018, soit quatre mois après la rupture du contrat.

M. [D] a donc été privé de son droit au repos.

En conséquence, il sera alloué à M. [D] la somme de1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des règles relatives à la contrepartie obligatoire en repos.

Sur la rupture du contrat de travail

La lettre de licenciement adressée à M. [D] le 22 juin 2018 est ainsi rédigée :

« (…)

Vous avez été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s’est tenu le mardi 19 juin 2018.

Etaient présents : Vous-même assisté de Monsieur le Conseiller du salarié, Monsieur [W] [S]. Madame [G] [P] (présidente de la holding [P] qui détient la société ECP POLYESTER) qui était par ailleurs mandatée par mes soins, et assistée de Monsieur [B] [H] salarié de l’entreprise.

Nous vous avons exposé les griefs que nous vous reprochons. Vous n’avez apporté aucune explication ou présenté un quelconque regret quant aux faits reprochés.

Ces faits sont les suivants :

Depuis le 06 juin 2018, vous nous avez indiqué que vous refuseriez d’effectuer des heures de travail au-delà de 39 heures (refus d’exécuter des heures supplémentaires au-delà de 39 heures).

Le vendredi 08 juin 2018 vous avez même quitté l’entreprise à 12h00 sans autorisation ni retour après 37h50 de travail alors qu’il restait du travail à effectuer.

Nous sommes en pleine saison et nous avons beaucoup de commandes urgentes à réaliser.

Le refus d’exécuter des heures supplémentaires constitue d’une part, un acte d’insubordination, et d’autre part, le fait de quitter l’entreprise alors qu’il y avait encore du travail et des heures à effectuer constituent un abandon de poste.

Vous ne nous avez présenté, ni adressé aucun motif pouvant légitimer de près ou de loin votre attitude prise dès le 06 juin 2018 (lors d’un entretien préalable à sanction), et qui s’est matérialisé le 08 juin 2018 par votre départ inopiné et non autorisé. Vous n’avez à aucun moment manifesté un quelconque regret.

L’exécution du contrat de travail suppose que le salarié mette à la disposition de l’employeur sa force de travail et que l’employeur rémunère celui-ci. Le tout devant obéir à une obligation de loyauté réciproque et de bonne foi.

Concernant le 2ème grief, vous avez commandé de votre propre chef, alors que vous n’êtes ni habilité, ni autorisé à le faire, une prestation payante à la STE C2V dirigée par Mme [E].

Vous avez adressé un SMS le 1er juin 2018 de bonne heure [à] Mme [E] pour lui demander de venir de suite, afin de prendre des photos dans les locaux techniques en lui faisant croire que c’était une demande de la direction ; sachant que vous lui aviez déjà demandé de venir le lundi 4/6ou le mardi 5/6, pour la même raison, et avez changé d’avis au dernier moment, le tout sans autorisation, ni accord de la direction, mais de votre propre chef.

D’une part vous avez outrepassé vos fonctions, en trompant un prestataire extérieur et en le faisant venir sans notre autorisation de la direction au sein de l’entreprise, et d’autre part, pendant le temps où Mme [E] prenait les photos, vous avez refusé d’exécuter les demandes du chef d’atelier qui vous demandait de l’aide pour le travail.

Votre comportement ne nous permet d’envisager la poursuite du contrat de travail y compris pendant ta période de préavis.

En effet, et pour rappel, nous vous avions initialement reçu à un entretien préalable à une éventuelle sanction te 06 juin 2018.

Lors de cet entretien, nous vous avions exposé les griefs que nous vous reprochions à cette date (appel de votre part et sans aucune autorisation le 01er juin 2018 à Mme [L] [E], notre prestataire communication, pour lui demander de venir dans l’entreprise pour des prises de photos, refus d’exécuter le travail le même jour pendant les prises de photo de Mme [E]).

Vous n’aviez déjà pas souhaité apporter une justification aux griefs reprochés, et vous n’aviez manifesté aucun regret, ou remord comme aujourd’hui.

Vous nous avez indiqué que si cela ne nous plaisait pas, nous n’avions qu’à vous licencier.

Vous avez également ajouté que dorénavant, vous refuseriez d’effectuer des heures de travail au-delà de 39 heures.

Afin d’éclairer notre appréciation de la situation et pour preuve de notre bonne foi en vous laissant une chance de revenir sur votre comportement, nous vous avions demandé au sein d’un courrier en date du 07 juin 2018 de bien vouloir, dans un délai expirant le vendredi 08 juin 2018 à 18h00, nous indiquer par écrit que vous regrettiez totalement vos propos et votre attitude manifestée fors de cet entretien du 06 juin 2018.

Vous nous aviez répondu par courriel dans les termes suivants :

‘ Madame [P],

Par le présent courriel, j’accuse réception de votre « Lettre remise en mains propres contre décharge » du 07 juin 2018.

Vous m’avez reçu à un entretien préalable à une ÉVENTUELLE sanction le 06 juin 2018. J’étais assisté lors de cet entretien par une salariée Madame [A] [C]

Lors de cet entretien, vous m’avez exposé les griefs que vous me reprochez !

Je vous confirme n’avoir apporté aucune justification à vos divers griefs.

Je vous reprécise alors, me tenir aux 39 heures hebdomadaires de travail pour les attributions strictes de ma fiche de poste.

Afin d’éclairer votre appréciation je vous confirme mon attitude ainsi que mes propos.

Et me permets en retour, de vous demander d’éclairer mon appréciation dans les mêmes délais » 48 heures » concernant votre attitude et votre comportement lorsque vous avez osé prononcé les propos suivants :

– « voilà la fine équipe… »

– « quand on a des couilles on démissionne… »

Copie courriers + dossier complet à :

– Cabinet d’Avocat

– DIRECCTE

En tout état de cause, le contenu de votre courriel a démontré un comportement délibéré sur les griefs qui vous étaient reprochés, et sans l’apport d’aucune justification valable, ni regret ou remord.

Cela nous a amené à réévaluer notre appréciation de la situation et à vous convoquer à un entretien préalable à un licenciement avec mise à pied conservatoire.

Durant le laps de temps de temps, séparant la réception par vos soins du courrier et jusqu’à l’entretien préalable, vous n’avez manifesté aucune volonté de changer votre comportement.

Votre contrat est en conséquence rompu, à la date d’envoi du présent courrier.

Compte tenu de la gravité des griefs (totalement démontrables) qui vous sont reprochés, vous ne bénéficierez pas l’indemnité de licenciement, ni de l’indemnité de préavis.(…) ».

Pour voir confirmer le jugement déféré, la société fait valoir que lors de l’entretien du 6 juin 2018, le salarié a annoncé qu’il n’entendait plus effectuer d’heures supplémentaires et a mis à exécution cette intention en quittant son poste le 8 juin à 11h45 (pièce 35 : relevé manuscrit de la journée de travail du 8 juin 2018) et ce, sans autorisation, en violation de l’article 13 de la convention collective et de l’article 16 du règlement intérieur de l’entreprise [en réalité, article 2.7 de ce document produit en pièce 26 de la société].

Elle soutient par ailleurs que le refus d’effectuer des heures supplémentaires au-delà de la durée contractuelle de 39 heures par semaine était contraire au contrat de travail qui en prévoit la possibilité dans son article VI.

Elle souligne que durant la même semaine du 6 juin, M. [D] avait pris quelques libertés quant à son temps de travail, démarrant son activité à 7h30 jusqu’à 13 h puis de 14h jusqu’à 16h30 du mardi au jeudi.

La société fait par ailleurs valoir que le 1er juin 2018, M. [D] a de lui-même contacté Mme [E], prestataire en communication de l’entreprise, ce dont témoigne celle-ci, pour lui demander de venir prendre des photographies, alors que cela n’entrait pas dans ses attributions et qu’il aurait dû solliciter la validation du process aux personnes habilitées (M. [J] et M. [P]), s’agissant d’une prestation payante, ce qui a été la raison du déclenchement de la procédure disciplinaire, le règlement intérieur interdisant au surplus l’entrée de tiers sans avertissement préalable de la direction.

En outre, durant l’intervention de celle-ci, M. [D] aurait refusé d’exécuter des tâches à la demande de son chef d’atelier.

Sont produites les attestations de :

– Mme [E], prestataire en communication de l’entreprise qui fait état d’une réunion avec M. [P] et M. [J] au cours de laquelle il avait été prévu que M. [D] devait préparer un cahier des charges afin d’organiser le reportage sur les locaux techniques ; elle évoque un second rendez-vous au cour duquel le directeur l’a informé q’un local technique et un SPA étaient prévus sur le planning de la semaine suivante [soit à partir du 4 juin] ; elle a alors demandé à M. [D] de lui communiquer une date d’intervention ; c’est ainsi que sur l’information donnée par M. [D] de ce que le local allait être fabriqué le 1er juin, elle s’est rendue dans l’entreprise pour prendre les photos, ignorant que le cahier des charges n’avait pas été validé par les supérieurs du salarié et témoigne à la fois de ‘la surprise’ de M. [J], supérieur hiérarchique de M. [D], lorsqu’elle s’est présentée, mais aussi du refus opposé par celui-ci à la demande faite par M. [J] de démouler un bassin ;

– M. [J] qui témoigne en ces termes : ‘Le travail préparé, il devait nous être présenté à moi et à Mr [P]. Une foi validé nous aurions lancé avec Mme [E], le montage photos et mise en page du process. Comme à son habitude, Mr [D] a pris des libertés. Il contacte directement Mde [E] pour effectuer le travail final sans validations aucunes. Depuis que Mr [D] est partie l’ensemble de nos collaborateurs qui l’ont connu travail plus sereinement. C’est dire !’;

– M. [N] [O], directeur de production, qui, comme d’autres des témoignages produits, fait état des ‘excès de colère’ de M. [D] et de sa ‘vie autarcique au sein du groupe’ et ajoute sans plus de précision : ‘A tel point qu’au fil du temps, il ne consultait plus personne pour prendre les décisions et refusait de faire des heures supplémentaires mentionnées dans son travail’ ;

– ce témoin évoque comme d’autres salariés, outre le tempérament difficile de M. [D], le fait que celui-ci aurait essayé, avec Mme [C], de monter les équipes contre la direction car il ne voulait pas faire d’heures supplémentaires.

M. [D] conclut à l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement expliquant que la véritable raison de celui-ci reposait sur la relation qu’il entretenait avec Mme [C], employée au sein du service administratif, car l’employeur avait peur qu’elle ne lui révèle des sujets sensibles et que la société a ainsi fait état de prétextes fallacieux pour le licencier, le salarié contestant le caractère fautif de l’incident du 1er juin 2018.

S’agissant de son refus d’exécuter des heures supplémentaires, il explique que lorsqu’il est parti le vendredi en fin de matinée, il avait en réalité déjà fait 39 heures et indique qu’il n’a jamais refusé de faire les heures supplémentaires réellement demandées par l’employeur, soulignant qu’en dehors de son départ le vendredi 8.

***

L’employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d’un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise.

Sur l’incident du 1er juin 2018

Nonobstant les dénégations de M. [D], le témoignage de Mme [E] démontre qu’il a pris l’initiative de la faire intervenir le 1er juin sans en avoir informé son supérieur, M. [J], ce dont témoigne celui-ci, qui atteste également que le cahier des charges dont la préparation avait été confiée à M. [D] n’avait pas encore été validé.

Il n’est en revanche pas établi que les échanges téléphoniques antérieurs entre M. [D] et Mme [E], même effectués avec son propre téléphone, ne correspondaient pas à des instructions de son supérieur et notamment l’envoi de photographies d’un palonnier, dont Mme [E] atteste qu’elles lui avaient été remises en format papier en présence de M. [N], la veille, et que c’est à sa demande que M. [D] les lui a envoyées par sms (attestation de Mme [E] et échanges de sms produits par le salarié), étant observé qu’il n’est ni justifié ni même prétendu que M. [D] pouvait accéder à un téléphone professionnel.

Sur le refus d’exécuter des heures supplémentaires

D’une part, ainsi que le souligne M. [D], le relevé manuscrit produit par la société fait apparaître écrit de sa main un départ à 12h le vendredi 8 juin, la mention’11h45″ ayant été ajoutée d’une autre main.

D’autre part, il n’est pas justifié ni même prétendu qu’il était prévu que le salarié accomplisse des heures supplémentaires le vendredi après-midi.

Or, au vu de la pièce 27 de la société, M. [D] avait déjà effectué 39 heures lorsqu’il a terminé sa journée de travail le vendredi à midi.

Il ne peut donc lui être fait valablement grief d’un abandon de poste.

Il n’est justifié ni même fait état d’un refus opposé antérieurement par le salarié à l’accomplissement d’heures supplémentaires.

L’attestation de M. [N] [O], directeur de production, est rédigée dans des termes généraux et non circonstanciés et est au demeurant démentie par le fait qu’à la date de sa mise à pied, soit le 9 juin 2018, M. [D] avait déjà accompli depuis le début de l’année plus de 250 heures au-delà de la durée légale de travail.

En outre, la relation de travail du salarié s’inscrivait dans un contexte de nombreux dépassements des durées quotidienne et hebdomadaire maximales de travail ou des durées continues de travail au-delà de six heures ainsi qu’en témoigne le tableau établi pour la période de janvier au 8 juin 2018, figurant en page 50 des écritures du salarié, non contesté par la société.

Ce non-respect des obligations pesant sur l’employeur doit aussi être examiné à l’aune du témoignage de M. [V] (pièce 29 de l’appelant), ancien commercial de l’entreprise, qui déclare qu’à plusieurs reprises, Mme [P], épouse du dirigeant de la société, lui avait indiqué que l’embauche de M. [D] en CDI avait été un accident, qu’elle voulait le licencier, que M. [P] ‘chargeait le planning de Monsieur [D] afin de le pousser à bout, il le faisait travailler sur des postes différents : un jour il était stratifieur, le lendemain il était préparateur, le surlendemain il faisait l’expertise des piscines, un autre jour il était au chargement et déchargement des camions’ ; le témoin ajoute : ‘M. [D] avait donc des plages horaires larges et venait même le samedi pour travailler (…)’ et indique aussi : ‘ Quand M. [P] [Y] voyait arrivé Mlle [C] accompagnant M. [D] à l’usine à 7H00, M. [P] [Y] ne se gênait pas pour donner son opinion négatif, voire humilié ce couple, et que ce n’était pas bon pour l’équipe et pour eux qu’un couple se forme dans l’usine’.

Cette attestation, en ce qu’elle établit que l’employeur voyait d’un mauvais oeil la relation entretenue entre deux de ses salariés est confortée par l’appréciation prononcée par l’employeur au cours de l’entretien du 6 juin 2018, qui a reconnu avoir décrit le couple arrivant à l’entretien en ces termes : ‘Voici la fine équipe’, propos à tout le moins déplacés et attentatoires à la vie privée de ces derniers.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, seul le grief reposant sur l’initiative du salarié quant à la demande d’intervention de Mme [E] le 1er juin est établi outre le refus durant l’intervention de celle-ci d’exécuter une tâche demandée par son supérieur.

Ce seul grief, alors qu’il est établi qu’en tout état de cause, l’intervention de Mme [E] était programmée la semaine suivante et qu’il ne peut être considéré comme illégitime le souhait du salarié, chargé de définir les modalités du reportage, de pouvoir suivre son déroulement, ne peut caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement et a fortiori une faute grave, cette mesure étant disproportionnée à l’égard d’un salarié qui, depuis son embauche, n’avait fait l’objet d’aucune sanction disciplinaire.

Il sera observé au surplus que les attestations versées aux débats par la société, quant au caractère difficile du salarié et son comportement au sein de l’entreprise, sont sans emport, ces griefs n’étant pas évoqués dans la lettre de licenciement.

Il sera en conséquence considéré que le licenciement de M. [D] ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes pécuniaires au titre de la rupture

M. [D], dont le licenciement est jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse, est en droit de prétendre au paiement du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire et des congés payés afférents, de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ainsi que de l’indemnité légale de licenciement.

La société ne conclut pas sur les demandes de M. [D] à ce titre autrement qu’en soutenant que le licenciement de celui-ci est fondé.

*

Au vu des bulletins de paie de M. [D], d’une part, il lui sera alloué la somme de 957,55 euros bruts au titre du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire outre celle de 95,76 euros bruts pour les congés payés afférents.

D’autre part, la moyenne des trois derniers mois de salaire étant fixée à la somme de 2.864,56 euros bruts, il lui sera alloué la somme de 5.729,12 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 572,91 euros bruts pour les congés payés afférents.

Enfin, sur la base d’une moyenne de salaire des 12 derniers mois de 2.934,52 euros et de l’ancienneté du salarié, soit 2 ans et 4 mois à la date de l’expiration du préavis (du 4 avril 2016 au 23 août 2018), sa créance au titre de l’indemnité légale de licenciement sera fixée à la somme de 1.628,66 euros, dans la limite de la demande.

M. [D] sollicite la somme de 10.270,82 euros, soit 3,5 mois de salaire, à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse exposant notamment ne pas avoir retrouvé d’emploi et avoir des charges importantes à assumer.

La société soutient à titre principal que le licenciement est justifié mais fait aussi observer que M. [D] a quitté son domicile conjugal pour s’installer avec Mme [C] et qu’il ne justifie pas ne pas avoir retrouvé d’emploi.

*

En application des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, eu égard à son ancienneté supérieure à deux ans et à l’effectif de l’entreprise, supérieur à 10 salariés, l’indemnisation de M. [D] est comprise entre 3 et 3,5 mois de salaire brut.

M. [D] justifie avoir été pris en charge par Pôle Emploi au titre de l’allocation de retour à l’emploi d’un montant brut de 1.474 euros jusqu’en avril 2019 puis avoir perçu un revenu annuel de l’ordre de 1.345 euros par mois en qualité d’auto-entrepreneur, déclaré comme tel à compter du 2 mai 2019.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [D], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour est en mesure de lui allouer la somme de 10.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l’article L.1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

En application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par l’employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié depuis son licenciement dans la limite de 6 mois d’indemnités.

Sur la demande indemnitaire pour défaut de portabilité des garanties de prévoyance et frais de santé

M. [D] sollicite le paiement de la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts au motif qu’ayant tenté à l’issue de son licenciement de faire valoir ses droits à la portabilité de ses garanties santé et prévoyance, il s’est vu opposer un refus de l’organisme de prise en charge de lunettes de vue au motif que l’employeur n’avait pas effectué les démarches nécessaires.

La société conclut au rejet de cette demande, soutenant ne pas avoir eu de démarches à accomplir à ce sujet, celles-ci incombant au salarié qui ne justifie pas du préjudice invoqué.

***

Il résulte des pièces versées aux débats par M. [D] que ce n’est que le 13 octobre 2018 que la société intimée a rempli le formulaire nécessaire à la prise en charge de ses dépenses de santé au titre de la portabilité des garanties dues à ce titre.

Il sera en conséquence alloué à M. [D] la somme de 100 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du retard dans le paiement des prestations auxquelles il était en droit de prétendre.

Sur les autres demandes

La société intimée devra délivrer à M. [D] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiés en considération des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, la mesure d’astreinte sollicitée n’étant pas en l’état justifiée.

Il n’y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil en application desquelles les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

La société intimée, partie perdante à l’instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu’à payer à M. [D] la somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevables comme étant prescrites les demandes de M. [D] au titre de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée des contrats de travail à durée déterminée conclus avec la société Etude et Conception Polyester,

Condamne la société Etude et Conception Polyester à payer à M. [D] les sommes suivantes :

– 239,25 euros bruts au titre de l’indemnité de congés payés afférents au rappel de salaire pour les heures supplémentaires effectuées payé en novembre 2018,

– 1.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du non-respect des règles applicables à la contrepartie obligatoire en repos,

– 957,55 euros bruts au titre du salaire retenu durant la mise à pied à titre conservatoire outre 95,76 euros bruts pour les congés payés afférents,

– 5.729,12 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre 572,91 euros bruts pour les congés payés afférents,

– 1.628,66 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement,

– 10.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 100 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du retard dans le paiement des prestations liées à la portabilité des garanties prévoyance et santé,

– 3.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés,

Ordonne à la société Etude et Conception le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [D] depuis son licenciement dans la limite de 6 mois d’indemnités,

Rappelle que les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,

Condamne la société Etude et Conception aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

 


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