N° RG 21/00169 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IU5F
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 23 FEVRIER 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 17 Décembre 2020
APPELANT :
Monsieur [W] [K] [D]
[Adresse 4]
[Localité 1]
représenté par Me Agnès PANNIER, avocat au barreau de ROUEN
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/000853 du 15/02/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Rouen)
INTIMEE :
Société F1RST SECURITE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Linda MECHANTEL de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 04 Janvier 2023 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente
Madame BACHELET, Conseillère
Madame BERGERE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. GUYOT, Greffier
DEBATS :
A l’audience publique du 04 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 Février 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 23 Février 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE
Le conseil de prud’hommes M. [W] [K] [D] a été engagé par la société F1rst sécurité en qualité d’agent de sécurité par contrat de travail à durée indéterminée le 1er novembre 2013.
Les relations contractuelles des parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.
Revendiquant le paiement d’un certain nombre de primes mais aussi celui des astreintes réalisées, M. [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Rouen le 25 mai 2018.
Il a été licencié pour faute grave le 31 juillet 2018, lequel licenciement a fait l’objet d’une contestation parallèle.
Par jugement du 17 décembre 2020,le conseil de prud’hommes a condamné la société F1rst sécurité à payer à M. [D] les sommes suivantes :
prime d’étalement des vacances : 69,10 euros
heures supplémentaires effectuées de mai 2015 à avril 2018 : 1 210,63 euros
congés payés afférents : 124,06 euros
dommages et intérêts pour défaut d’information du droit à repos compensateurs sur la période de mai 2015 à juillet 2018 : 100 euros
compensation pour les heures d’astreinte effectuées de janvier à septembre 2017 : 2 774,58 euros
congés payés afférents : 277,45 euros
– débouté M. [D] du surplus de ses demandes et la société F1rst sécurité de ses demandes reconventionnelles,
– condamné la société F1rst sécurité à payer à M. [D] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
M. [D] a interjeté appel de cette décision le 12 janvier 2021.
Par conclusions remises le 29 juin 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [D] demande à la cour d’infirmer le jugement sur les montants alloués au titre de la prime d’étalement des vacances, de la compensation des heures d’astreintes, des dommages et intérêts pour défaut d’information du droit au repos compensateur, mais aussi en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre de la prime d’habillage et de celle relative à la remise des documents, et statuant à nouveau, de :
– condamner la société F1rst sécurité à lui verser les sommes suivantes :
prime d’étalement des vacances : 145,88 euros,
dommages et intérêts pour défaut d’information du droit à repos compensateur sur la période de mai 2015 à juillet 2018 : 204,03 euros,
prime d’habillage sur la période de mai 2015 à avril 2018 : 786,76 euros,
compensation pour les heures d’astreinte effectuées de janvier 2016 à septembre 2017 : 27 745,86 euros,
congés payés afférents : 2774,59 euros,
indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile : 3 600 euros,
– condamner la société F1rst sécurité à lui remettre un bulletin de salaire récapitulant les sommes dues suite au jugement rendu et à l’arrêt, ainsi qu’une attestation Pôle emploi conforme au jugement rendu et à l’arrêt,
– confirmer le jugement en ses autres dispositions non contraires, débouter la société F1rst Sécurité de ses demandes en cause d’appel et la condamner aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 19 mai 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des moyens, la société F1rst sécurité demande à la cour d’infirmer le jugement, de débouter M. [D] de l’ensemble de ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 586,24 euros à titre de rappel de salaire perçu indûment et 258,24 euros au titre des congés payés afférents, outre 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 15 décembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la prime d’étalement des vacances
Il résulte de l’article 7.04 de la convention collective applicable que pour répondre à l’incitation relative à l’étalement des congés, la période de prise effective des congés payés légaux est étendue à 12 mois et qu’afin de favoriser la réalisation de cet étalement, les salariés qui prendront 2 des 4 semaines de leur congé principal en dehors de la période du 1er juin au 30 septembre et des périodes de pointe définies dans le cadre de chaque entreprise bénéficieront d’une prime d’étalement des vacances, d’un montant de 4 % de l’indemnité de congés payés perçue pour cette période, étant rappelé que la 5e semaine de congés payés ne fait pas partie du congé principal et n’ouvre donc pas droit au bénéfice de cette prime d’étalement des vacances.
Faisant valoir qu’il a été en congés du 8 novembre au 20 décembre 2016, du 1er au 23 novembre 2017 et du 1er au 17 décembre 2017, M.[D] réclame le paiement de la prime d’étalement, sans qu’il puisse lui être opposé le fait d’avoir été à l’initiative de cette demande, ni qu’il s’agirait de périodes de pointe dès lors que celles-ci n’ont jamais été précisées au sein de l’entreprise.
Si la société F1rst sécurité soutient ne pas avoir à verser cette prime dès lors qu’étant spécialisée dans la surveillance et le gardiennage, elle connaît un accroissement d’activité pendant la période hivernale courant novembre à janvier, eu égard à la période des achats de Noël et des soldes d’hiver, cette simple allégation, sans qu’une période de pointe n’ait été formellement définie au sein de l’entreprise, ne permet pas d’écarter l’application de cette prime d’étalement, pas plus que le fait que M. [D] ait été à l’origine de cette demande comme l’a retenu le conseil de prud’hommes dès lors que le mécanisme conventionnel mis en place tend précisément à inciter à ce type d’initiative.
Néanmoins, et alors que la 5ème semaine de congés payés n’ouvre pas droit au bénéfice de la prime d’étalement des vacances, il convient, pour les années 2016 et 2017, de n’y faire droit que dans la limite de quatre semaines de congés, soit à raison de 48 jours ouvrables sur deux ans représentant un montant de 3 501,12 euros, soit 140,04 euros dus au titre des 4 % de prime d’étalement.
Il convient donc d’infirmer le jugement et de condamner la société F1rst sécurité à payer à M. [D] la somme de 140,04 euros à titre de rappel de prime d’étalement.
2. Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut d’information quant au droit à repos compensateur
Rappelant que la convention collective prévoit un repos compensateur d’une durée d’1 % par heure de travail de nuit, en plus de la majoration de 10 %, M. [D] qui conteste en avoir été informé, réclame des dommages et intérêts à hauteur de 204,03 euros correspondant à 1 % des 1 780,05 heures de nuit effectuées de mai 2015 à juillet 2018, soit 17,80 heures au taux horaire de 10,42 euros augmenté des congés payés.
En réponse, relevant qu’il s’agit d’une demande de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à une de ses obligations soumise à la prescription biennale, la société F1rst sécurité soutient qu’une partie de la demande est prescrite et qu’en tout état de cause, il n’est justifié d’aucun préjudice et qu’il ne peut être accordé de congés payés.
Selon l’article L. 1471-1 du code du travail, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
En l’espèce, dès lors qu’il n’est pas sollicité un rappel de salaire mais des dommages et intérêts pour manquement à l’obligation d’information relative au repos compensateur, il convient de faire application de cet article, rendant ainsi irrecevable une partie de la demande de M. [D] pour porter sur des heures de nuit effectuées antérieurement à mai 2016.
Pour le surplus, il résulte de l’article 1 de l’avenant du 25 septembre 2001 rattaché à la convention collective applicable que les heures de travail comprises entre 21 heures et 6 heures font l’objet d’une majoration de 10 % du taux horaire minimum conventionnel du salarié concerné, que les parties conviennent de ne pas fixer de durée minimale hebdomadaire de travail de nuit pour accéder au droit au repos compensateur et en conséquence de l’attribuer dès la première heure de nuit et enfin, que ce repos compensateur est d’une durée égale à 1 % par heure de travail comprise entre 21 heures et 6 heures.
Il ressort par ailleurs de ce même avenant que l’information des droits acquis fait l’objet d’une mention sur la fiche de paie ou en annexe à la fiche de paie, sous la rubrique « Repos compensateur sur travail de nuit » qui doit être distincte du suivi et de la rubrique « Repos compensateur sur heures supplémentaires ».
Aussi, et alors que la société F1rst sécurité ne justifie pas avoir apporté cette information à M. [D], il convient de retenir l’existence d’un manquement, lequel a entraîné un préjudice certain pour ce dernier dès lors qu’il n’a pas bénéficié de ce repos compensateur.
Or, le salarié qui n’a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l’indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l’indemnité de repos compensateur et le montant de l’indemnité de congés payés afférents.
Aussi, ayant effectué entre mai 2016 et juillet 2018 1 212,5 heures de nuit, il convient de lui accorder des dommages et intérêts à hauteur de 138,97 euros correspondant aux repos compensateurs dus à hauteur de 126,34 euros, soit 1 % de 1 212,5 heures au taux de 10,42 euros, augmentés de la somme de 12,63 euros due au titre des congés payés afférents et de condamner la société F1rst sécurité à payer cette somme à M. [D].
3. Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires
M. [D] explique qu’il résulte de ses bulletins de salaire qu’un certain nombre d’heures lui ont été payées en tant qu’heures complémentaires majorées à 10 % alors qu’il était à temps complet, que des heures supplémentaires lui ont été payées à 10% et d’autres à 25 %, et ce, en totale contravention avec les majorations prévues par le code du travail. Ainsi, il précise que sa demande n’est établie que sur la base des heures indiquées sur ses bulletins de salaire, et non pas sur la base de ses relevés d’heures, sachant qu’il ne sollicite que les majorations réellement applicables.
En réponse, la société F1rst sécurité fait valoir que M. [D] n’a effectué aucune heure supplémentaire notamment sur les mois de janvier, mars, juillet et octobre 2016, juillet et septembre 2017 et enfin janvier et mars 2018.
Il doit être relevé que le décompte produit par M. [D] ne reprend que les heures complémentaires ou supplémentaires dont il a été payé entre mai 2015 et avril 2018, si ce n’est qu’il a appliqué les majorations telles que prévues par le code du travail, en soustrayant les sommes déjà perçues.
Aussi, il appartient à la société F1rst sécurité qui a mentionné l’ensemble de ces heures sur les bulletins de salaire de M. [D] de justifier qu’elles n’étaient pas dues.
Or, il doit être relevé qu’il n’est produit aucune pièce au titre de l’année 2015, aussi, la demande de M. [D] doit donc être accueillie sur cette période, de même que pour l’année 2018.
Par ailleurs, il ne sollicite pas d’heures supplémentaires pour les mois de janvier et juillet 2016, aussi importe t-il peu que la société F1rst sécurité justifie qu’il n’aurait pas fait d’heures supplémentaires. Enfin, pour le mois de février 2016, celui-ci ne produit pas ses plannings et les seuls éléments produits par la société F1rst sécurité consistant en des tableaux d’heures réalisés par elle-même, sont insuffisants à caractériser l’absence d’heures supplémentaires.
Restent donc les mois de mars à juin 2016 inclus, d’août à octobre 2016 inclus, de janvier à avril 2017 inclus et juillet et septembre 2017 pour lesquels M. [D] produit les décomptes qu’il remettait à la société F1rst sécurité avec la précision des heures effectuées.
Il résulte de la comparaison des bulletins de salaire, des heures de travail effectif accomplies durant les astreintes dont la société Firts sécurité justifie et de ces décomptes que M. [D] a accompli un nombre d’heures supplémentaires moindre que celui apparaissant sur ses bulletins de salaire et que, même en appliquant les majorations prévues par le code du travail, il a perçu davantage que les sommes qui lui étaient dues.
Il convient en conséquence d’infirmer le jugement et de débouter M. [D] de cette demande de rappel de salaire au titre des majorations.
4. Sur la demande de rappel de salaire au titre des astreintes
Rappelant que la mise en place d’astreintes doit être prévue par accord collectif, et qu’à défaut, l’employeur doit préalablement consulter le comité social et économique et informer l’inspecteur du travail conformément à l’article L. 3121-12 du code du travail, M. [D], constatant que la société F1rst sécurité ne justifie ni de l’existence d’un accord collectif, ni de l’accomplissement de ces diligences, réclame le paiement au taux horaire qui lui était applicable des 2 662,75 heures d’astreinte réalisées, et non contestées, dès lors qu’en ce cas, il appartient alors au juge d’en fixer les modalités, lesquelles peuvent correspondre à la fixation d’une compensation financière correspondant au plein salaire horaire augmenté des congés payés, sachant qu’il conteste le moindre paiement par la société F1rst sécurité.
En réponse, la société F1rst sécurité conteste que M. [D] ait effectué 2 662,75 heures d’astreintes sans aucune compensation à ce titre et constate qu’il en a été indemnisé puisqu’il était rémunéré pour un temps de travail effectif de 151,67 heures, voire davantage, alors que son temps de travail effectif était moindre, sachant qu’il a par ailleurs perçu des primes.
En l’absence de dispositions conventionnelles ou contractuelles quant à la rémunération des heures d’astreinte, la cour apprécie souverainement le montant de la rémunération revenant au salarié.
A titre liminaire, il doit être relevé que s’il existe un différend sur la rémunération des heures d’astreinte, les parties s’accordent sur le nombre d’heures, lequel ressort des plannings versés aux débats par la société F1rst sécurité.
S’il est exact qu’il résulte des plannings produits que M. [D] pouvait être rémunéré pour un temps de travail effectif supérieur à celui effectivement réalisé, en ce compris les temps d’intervention durant les astreintes, en tout état de cause, les astreintes doivent donner lieu à une compensation spécifique pour ne pas être du temps de travail effectif et ne peuvent donc en aucun cas être rémunérées comme tel, étant au surplus noté, comme justement soulevé par M. [D], l’absence totale de cohérence entre les heures ainsi payées par rapport au nombre d’heures d’astreinte réalisées sur les différents mois.
Par ailleurs, s’il est fait état certains mois d’une prime exceptionnelle, aucun élément ne permet d’en rattacher le versement à l’accomplissement d’astreintes et il ne peut donc en être tenu compte.
Dès lors, et alors que les heures d’astreinte effectuées par M. [D] étaient particulièrement importantes, ainsi, pour exemple 199 heures en janvier 2016, 233,5 heures en février 2016, 142 heures en août 2016 pour atteindre un total de 2 662,75 heures entre janvier 2016 et septembre 2017, il convient d’accorder à M. [D] une compensation à hauteur de 50 % de son taux horaire de base et en conséquence, d’infirmer le jugement et de condamner la société F1rst sécurité à lui payer la somme de 13 872,93 euros, outre 1 387,29 euros au titre des congés payés afférents.
5. Sur la demande au titre de la prime d’habillage
Invoquant la convention collective qui prévoit le versement d’une prime d’habillage forfaitaire de 0,13 euros par heure travaillée, M. [D] soutient qu’il pouvait y prétendre dès lors qu’il avait l’obligation de porter une tenue de service et qu’il n’a jamais été prévu dans la convention collective qu’il ait l’obligation de la revêtir et de l’enlever sur le lieu de travail.
En réponse, la société F1rst sécurité fait valoir, qu’en assemblée plénière, la Cour de cassation a rappelé que pour bénéficier de la prime d’habillage et de déshabillage prévu par l’article L. 3121-3 du code du travail, il fallait que le port d’une tenue de service soit obligatoire et que le salarié ait l’obligation de la revêtir et de l’enlever sur le lieu de travail, deux conditions dont M. [D] ne rapporte pas la preuve.
Si, comme justement relevé par la société F1rst sécurité, l’invocation de l’article L. 3121-3 du code du travail impose au salarié de justifier du caractère obligatoire de la tenue de service et de ce qu’elle doit être revêtue et enlevée sur le lieu de travail, force est de constater que M. [D] n’invoque cependant pas cet article mais une disposition spécifique rattachée à la convention collective qui lui est applicable.
Or, il résulte de l’article 5 de l’accord du 30 octobre 2000 relatif aux salaires et dispositions diverses rattaché à la convention collective applicable que l’activité de prévention et de sécurité étant soumise à un encadrement réglementaire spécifique prévoyant l’obligation pour le personnel de porter dans l’exercice de ses fonctions un uniforme, il a été décidé en application des dispositions résultant de la loi du 19 janvier 2000 d’octroyer une prime dont la valeur est fixée forfaitairement à 130 F par mois sur la base d’un horaire mensuel de 151 h 67, cette prime étant proratisée en fonction du nombre d’heures prestées par le salarié, son montant en valeur – 0,86 F par heure de prestation effectivement réalisée – demeurant identique quels que soient le salaire et/ou le coefficient du salarié.
En l’espèce, quand bien même le contrat de travail de M. [D] ne mentionne pas son obligation de porter une tenue de service, celle-ci résulte de la réglementation et, sauf à ajouter une condition à la convention collective qu’elle ne comporte pas, M. [D] n’avait aucune obligation de revêtir ou d’enlever cette tenue sur son lieu de travail pour percevoir la prime ainsi prévue.
Il convient en conséquence d’infirmer le jugement et de condamner la société F1rst sécurité à payer à M. [D] la somme réclamée dont le montant n’est pas en lui-même contesté.
6. Sur la demande reconventionnelle de la société F1rst sécurité
La société F1rst sécurité soutient que M. [D] a été payé de 248,20 heures de manière totalement indue entre janvier et juin 2018 comme en témoignent les feuilles de pointage qu’elle a réclamées auprès de son prestataire, aussi, en réclame-t-elle le remboursement.
M. [D] conteste la demande de la société F1rst sécurité en expliquant que les heures d’arrivée et de fin de service étaient notées sur la main courante mise à disposition à cette fin par la société et que les heures de pointage indiquées sur le rondier, constitué de 16 pointaux, n’avaient pour seul objet que de s’assurer que le salarié effectuait intégralement sa ronde, ce qui explique le décalage entre l’heure d’arrivée et le début de la ronde.
A l’appui de sa demande, la société F1rst sécurité produit les pointages réalisés au sein de la société Cerema, lesquels permettent de constater que le salarié affecté sur le site réalise au cours de son service plusieurs rondes durant lesquelles il pointe sur seize lieux différents débutant par le ‘départ PC’ et finissant par le ‘retour PC’.
Or, face à ces documents, M. [D] produit l’attestation de deux agents de sécurité, MM. [X] et [O], expliquant avoir travaillé au sein de cette société Cerema, lesquels indiquent tous deux qu’il existait une main-courante de la société F1rst sécurité sur laquelle les heures de prise et de fin de service étaient écrites, document distinct des appareils de pointage dédiés au pointage des seize pointaux situés sur différents lieux du site.
Si la société F1rst sécurité produit une attestation postérieure de M. [X], datée de juillet 2019, aux termes de laquelle il explique ne pas avoir compris ce que lui demandait M. [D] lorsqu’il a rédigé l’attestation en septembre 2018, qu’il n’a fait que deux prestations pour Cerema en mars 2018 et que lors de ces deux vacations, à chaque prise et fin de service, il devait, suivant les nouvelles consignes, pointer sur le pointeau se situant à droite du PC sécurité, force est de constater qu’il n’est pas remis en cause l’existence d’une main-courante sur laquelle étaient écrites les prises et fins de service et surtout, il est fait état de nouvelles consignes sans que celles-ci ne soient datées précisément, sachant qu’il n’est plus produit aucun pointage postérieurement à mars 2018 alors qu’il résulte des plannings que M. [D] a continué d’être affecté sur ce site et que la société F1rst sécurité précise avoir réclamé l’ensemble des pointages jusqu’à juin 2018.
Bien plus, les explications apportées par M. [D] sont confortées par une pièce 33 produite par la société F1rst sécurité elle-même, à savoir un mail du 16 janvier 2018 aux termes duquel le coordinateur M. [V] fait savoir que M. [D] ne s’est présenté qu’à 18h10 alors que lui-même terminait son service à 18h.
Or, les feuilles de pointage produites par la société F1rst sécurité montrent pour cette journée que le premier pointage au PC départ n’a été effectué qu’à 20h01, ce qui permet de s’assurer que ce pointage était en lien avec la ronde, et non avec la prise de service.
Aussi, ces éléments sont insuffisants à caractériser une absence de travail de M. [D] telle qu’invoquée par la société F1rst sécurité et il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande reconventionnelle.
7. Sur la remise de documents
Il convient d’ordonner à la société F1rst sécurité de remettre à M. [D] une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés.
8. Sur les dépens et frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la société F1rst sécurité aux entiers dépens, y compris ceux de première instance et de la débouter de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile. Alors que M. [D] est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale, il n’y a pas lieu de condamner la société F1rst sécurité à lui payer une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile, infirmant sur ce point le jugement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant contradictoirement et publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement sauf en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu’il a débouté la SARL F1rst sécurité de ses demandes reconventionnelles ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne la SARL F1rst sécurité à payer à M. [W] [K] [D] les sommes suivantes :
prime d’étalement des vacances : 140,04 euros
dommages et intérêts pour défaut d’information du droit au repos compensateur : 138,97 euros
compensation pour les heures d’astreinte effectuées de janvier 2016 à septembre 2017 : 13 872,93 euros
congés payés afférents : 1 387,29 euros
rappel de prime d’habillage : 786,76 euros
Déboute M. [W] [K] [D] de sa demande formulée au titre d’un rappel de majoration sur heures supplémentaires ;
Ordonne à la SARL F1rst sécurité de remettre à M. [W] [K] [D] une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire récapitulatif dûment rectifiés conformément à la présente décision ;
Condamne la SARL F1rst sécurité aux entiers dépens ;
Déboute les parties de leur demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente