13/01/2023
ARRÊT N°14/2023
N° RG 21/02623 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OHDK
AB/AR
Décision déférée du 26 Mai 2021 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( F 19/00334)
MISPOULET M
[X] [J]
C/
Association AVENIR JUDO 31
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le 13 01 23
à Me Renaud FRECHIN
Me Véronique L’HOTE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU TREIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
Madame [X] [J]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Renaud FRECHIN de la SCP CABINET DENJEAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 31555.2021.021572 du 18/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIMEE
Association AVENIR JUDO 31
prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès qualités audit siège sis [Adresse 3]
Représentée par Me Véronique L’HOTE de la SCP CABINET SABATTE ET ASSOCIEES, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant A.Pierre-Blanchard, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. Brisset, présidente
A. Pierre-Blanchard, conseillère
F. Croisille-Cabrol, conseillère
Greffier, lors des débats : A. Ravéane
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. Brisset, présidente, et par A. Ravéane, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [X] [J] a été embauchée suivant contrat à durée déterminée à temps partiel (25 heures hebdomadaires) pour accroissement temporaire d’activité, du 28 août 2017 au 29 novembre 2017 par l’association Avenir Judo 31, en qualité d’employée administrative.
La convention collective nationale des sports est applicable au litige.
Par la suite, Mme [J] a signé une convention de formation pour une durée s’étendant du 15 janvier 2018 au 30 décembre 2018, dans le cadre de la préparation au diplôme ‘BPJEPS 2018 Educateur Sportif Judo Jujitsu » afin de devenir enseignante de judo. Cette formation prévoyait 645 heures en centre de formation et 300 heures de stage pédagogique en alternance au sein de l’association Avenir Judo 31.
Le 2 juin 2018, Mme [J] a été convoquée à un entretien préalable, en vue d’une rupture de stage pour faute grave, fixé au 11 juin 2018.
Par courrier date du 13 juin 2018, l’association Avenir Judo 31 notifiait la rupture du stage pour ‘fautes graves’.
Par requête en date du 6 mars 2019, Mme [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins de voir requalifier son contrat de travail initial en contrat à durée indéterminée ‘dont le stage constitue un prolongement de celui-ci’ et de voir juger que sa rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et vexatoire, ainsi qu’aux fins d’obtenir une indemnité pour travail dissimulé.
Par jugement du 26 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :
– accueilli l’exception d’incompétence matérielle du conseil de prud’hommes de Toulouse,
– déclaré le conseil de prud’hommes de Toulouse matériellement incompétent au profit du tribunal judiciaire de Toulouse pour connaître du litige qui lui est soumis sur la rupture de la convention de stage et dit qu’à défaut de recours, le dossier sera transmis
au tribunal Judiciaire de Toulouse,
– rejeté l’intégralité des demandes de Mme [X] [J],
– dit n’y avoir lieu a application de l’article 700 du code de procédure civile,
– laissé les dépens a charge de Mme [X] [J].
Mme [J] a relevé appel de ce jugement le 14 juin 2021, dans des conditions de forme et de délai non discutées, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 septembre 2021, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [J] demande à la cour de :
– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 26 mai 2021, en ce qu’il a débouté Mme [X] [J] de l’ensemble de ses demandes,
Statuant à nouveau :
– déclarer recevable et justifié l’appel formé par Mme [J],
– juger que le contrat initial de Mme [J] doit être requalifié en CDI,
– juger que la rupture du contrat ainsi requalifié s’analyse en un licenciement, sans cause réelle et sérieuse, et à caractère vexatoire,
– juger que l’Association AJ31 a commis le délit de travail dissimulé par dissimulation
d’emploi salarié prévu à l’article L8224-1 du code du travail ;
En conséquence :
– condamner l’Association AJ31 à verser les indemnités suivantes à Mme [J], avec intérêts de droit à compter du jour de la demande :
* 1 058,42 euros au titre de l’indemnité de préavis,
* 264,60 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
* 105,84 euros au titre de l’indemnité de congés payés,
* 1 058,42 euros au titre de l’indemnité de requalification du CDD en CDI,
* 1 058,42 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire,
* 6 350,52 euros au titre du travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié ;
– condamner l’Association AJ31 à verser au profit de Mme [J] un rappel de salaire du 1er décembre 2017 au 13 juin 2018, dont le montant s’élève à 6 789,73 euros + 687,97 euros,
– condamner l’Association AJ31 à remettre à Mme [J] un certificat de travail régularisé, des bulletins de salaire rectifiés ainsi que l’attestation pôle emploi correspondante, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l’arrêt,
– condamner l’Association AJ31 au paiement de la somme 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,
– condamner l’Association AJ31 aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2022, auxquelles il est expressément fait référence, l’association Avenir Judo 31 demande à la cour de :
– se déclarer non saisie des demandes de Mme [X] [J] relatives au contrat de stage ayant lié les parties, à savoir :
*requalification du contrat de stage en contrat de travail à durée indéterminée,
*264,60 euros d’indemnité de licenciement,
*1 058,42 euros d’indemnité compensatrice de préavis et 105,84 euros de congés payés y afférents,
*1 058,42 euros de dommages et intérêts licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*3 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
*6 350,52 euros de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé,
*rappel de salaire dont le montant s’élève à 6 789,73 euros outre 687,97 euros de congés payés y afférents,
*remise du certificat de travail régularisé, bulletins de salaire rectifiés et attestation pôle emploi correspondante sous astreinte de 200 euros par jour de retard,
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en toutes ses dispositions,
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse en ce qu’il s’est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes de Mme [J] s’agissant du contrat de stage au profit du tribunal judiciaire de Toulouse,
-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 26 mai 2021 en ce qu’il a débouté Mme [J] de sa demande de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée,
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 26 mai 2021 en ce qu’il a rejeté l’intégralité des demandes indemnitaires et salariales de Mme [J],
– débouter Mme [J] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner Mme [J] à verser à l’association Avenir Judo 31 la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
MOTIFS :
Sur le périmètre de saisine de la cour :
A titre liminaire, il est constaté que Mme [J] n’a pas relevé appel du chef du jugement par lequel le conseil de prud’hommes se déclarait incompétent au profit du tribunal judiciaire pour ‘connaître du litige qui lui est soumis sur la rupture de convention de stage’, le conseil de prud’hommes ayant statué sur les autres demandes dont il restait saisi en déboutant Mme [J] de toutes ses demandes, et Mme [J] a relevé appel de ce chef du jugement la déboutant, tandis que l’intimée conclut à la confirmation du jugement ayant retenu l’incompétence matérielle du conseil de prud’hommes sur les demandes relatives à la convention de stage.
Dans ces conditions, Mme [J] n’est pas fondée à présenter devant cette cour des demandes relatives à la rupture de la convention de stage, dont le tribunal judiciaire est désormais saisi, et la cour ne peut que confirmer le jugement entrepris ayant retenu l’incompétence matérielle du conseil de prud’hommes au profit du tribunal judiciaire concernant les demandes afférentes à l’exécution et à la rupture de la convention de stage.
Sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée initial en contrat à durée indéterminée :
En application de l’article L 1242 – 2 du code du travail, un contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour un motif précis qui doit figurer dans le corps du contrat ; à défaut, le contrat est réputé à durée indéterminée ; par application de l’article L 1245 – 2 du code du travail, en cas de requalification, il est accordé au salarié une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.
En l’espèce, le contrat à durée déterminée signé entre les parties le 28 août 2017 pour une durée de trois mois mentionne le motif d’ ‘accroissement temporaire d’activité administrative’ et précise en son article que le contrat est conclu ‘ en préparation de la rentrée et au démarrage de l’activité judo sur les différents sites’.
Mme [J] soutient qu’il s’agit d’un faux motif, car l’accroissement d’activité pour la rentrée ne peut s’étendre jusqu’à fin novembre, et elle affirme qu’elle donnait des cours de judo durant la même période, et accompagnait les adhérents en compétition,
ce n’était pas des tâches administratives.
Au soutient de cette dernière affirmation, elle produit un document dactylographié émanant du président de l’association, M. [Z] [Y], intitulé ‘attestation de validation de projet’ en date du 9 décembre 2017, selon lequel Mme [J] ‘dispense des cours de judo assistée par nos enseignants Monsieur [W] [P], 4ème dan et Monsieur [S] [V] depuis le 1er septembre 2017. De plus j’atteste que [J] [X] accompagne et suit nos judokas sur leurs diverses compétitions’.
Ce document n’est nullement une attestation manuscrite établie pour sa production en justice, elle n’est ni accompagnée des mentions de l’article 202 du code de procédure civile ni d’une copie de la pièce d’identité du prétendu témoin.
Il s’agit d’un document ayant simple valeur d’information ; il en ressort qu’il a été visiblement établi dans l’optique d’une ‘validation de projet’, avant signature de la convention de stage, et qu’il a été permis à Mme [J] de participer à des cours et compétitions du sport qu’elle pratiquait par ailleurs, et ce sous la ‘supervision’ de son compagnon M. [W]. Ce document ne saurait faire preuve d’une prestation de travail rémunérée, dans le cadre du contrat à durée déterminée conclu pour accomplir des tâches administratives, étant observé que le contrat à durée déterminée était à temps partiel et permettait à Mme [J] de s’adonner activement à la pratique sportive au sein du club, en dehors de ses horaires de travail.
Comme le soutient l’association Avenir Judo 31, il n’est pas démontré qu’il ait été demandé à Mme [J] d’être présente durant les cours et compétitions, l’association précisant qu’elle venait aux côtés de son compagnon pour préparer son examen d’entrée à la formation de BPJEPS, et qu’elle n’était jamais seule aux cours.
S’agissant du motif de recours au contrat à durée déterminée visé par l’employeur, à savoir l’accroissement temporaire d’activité, la cour estime que l’association Avenir Judo 31 justifie par les pièces produites de la réalité de ce motif, y compris sur la période postérieure au mois de septembre 2017.
En effet, il est constant qu’en juillet 2017, tout le bureau de l’association était démissionnaire, comme la présidente de l’association Mme [F], ex épouse de M. [W], moniteur du club, de sorte qu’aucun membre du bureau ne gérait plus l’administratif.
Il est également constant qu’en période de rentrée scolaire, l’association doit gérer les inscriptions de nouveaux adhérents et les ré inscriptions, par ailleurs l’association Avenir Judo 31 établit qu’un nouveau Dojo venait en outre de s’ouvrir dans le quartier Amouroux, ces éléments engendrant un surcroît d’activité administrative.
Enfin, l’association Avenir Judo 31 verse aux débats les éléments relatifs à la réalité et la quantité des tâches administratives accomplies par Mme [J] durant toute la période visée par le contrat à durée déterminée.
Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [J] de sa demande de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, et de sa demande d’indemnité de requalification.
Il en va de même de la demande subséquente de Mme [J] tendant à voir juger que la rupture du contrat ainsi requalifié s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur le travail dissimulé :
Il résulte des pièces et de la chronologie des faits que le stage de formation a commencé 6 semaines après la fin du contrat à durée déterminée, dont ce n’est pas le prolongement malgré ce que soutient Mme [J].
Cette dernière n’établit pas l’existence d’une prestation de travail sous la subordination juridique de l’association durant la période séparant la fin du contrat à durée déterminée et le début du stage.
Dans ces conditions, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnité pour travail dissimulé, ainsi qu’en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de salaire pour la période antérieure au 15 janvier 2018.
Sur le surplus des demandes :
Mme [J], échouant en son procès, sera condamnée aux dépens de première instance ainsi qu’aux dépens d’appel, et à payer à l’association Avenir Judo 31 la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
Condamne Mme [J] à payer à Mme [J] la somme de 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,
Condamne Mme [J] aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.
La greffière La présidente
A. Raveane C. Brisset.