CDD pour accroissement d’activité : décision du 10 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01586
CDD pour accroissement d’activité : décision du 10 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01586

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

17e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2023

N° RG 21/01586

N° Portalis DBV3-V-B7F-UQ6T

AFFAIRE :

[F] [D]

C/

Syndicat MOBILIANS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

Section : C

N° RG : F 20/00367

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jean-Christophe SABLIERE

Me Nicolas CAPILLON

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [F] [D]

née le 12 janvier 1985 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Jean-Christophe SABLIERE de la SELARL JURISTES CONSEILS SABLIERE, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau d’EURE, vestiaire : 28, substitué à l’audience par Me Arnaud SABLIERE, avocat au barreau d’EURE

APPELANTE

****************

Syndicat MOBILIANS anciennement dénommé Conseil national des professions de l’automobile (CNPA)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Nicolas CAPILLON de la SELARL CAPILLON ASSOCIES, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: E1308

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 3 mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [D] a été mise à disposition du syndicat Conseil national des professions de l’automobile (le CNPA) par la société d’intérim GITEC Human Resources, pour y exercer des fonctions de gestionnaire de ressources humaines, par contrats de mission temporaire, du 28 août au 28 septembre 2018, puis du 29 septembre 2018 au 30 novembre 2018. Les deux contrats de mission temporaire mentionnaient : « motif : accroissement temporaire d’activité » et « justificatif : lié à la réorganisation du service RH ».

Mme [D] a été engagée par contrat à durée déterminée du 1er décembre 2018 au 30 juin 2019 en qualité de « cadre expert niveau IIB » chargée des ressources humaines par le CNPA. Le motif du recours au contrat de travail à durée déterminée était ainsi mentionné dans le contrat : « surcroît d’activité lié à la réorganisation du service Ressources Humaines ».

Ce syndicat a pour objectif de défendre les intérêts des entreprises de la distribution et des services de l’automobile en France. L’effectif du syndicat était, au jour de la rupture, de plus de 50 salariés. Il applique la convention collective nationale des services de l’automobile.

Le 20 mai 2019, le CNPA a recruté Mme [Y] par un contrat à durée indéterminée, en qualité de chargée des ressources humaines juridiques et relations sociales.

Le contrat de travail à durée déterminée de Mme [D] a pris fin le 30 Juin 2019.

Le 20 février 2020, Mme [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, constater que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement irrégulier et injustifié, et en paiement de plusieurs rappels de salaires et d’une prime 13e mois, ainsi que diverses sommes de nature indemnitaire.

Par jugement du 16 avril 2021, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement) a :

– débouté Mme [D] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– laissé à la charge des parties les éventuels dépens.

Par déclaration adressée au greffe le 27 mai 2021, Mme [D] a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 31 janvier 2023.

Le syndicat Mobilians vient désormais aux droits du syndicat Conseil national des professions de l’automobile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 31 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [D] demande à la cour de :

– infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 16 avril 2021 (N° RG F 20/00367),

et statuant à nouveau,

sur l’inégalité de salaire injustifiée,

– constater qu’elle a fait l’objet d’une inégalité de rémunération injustifiée en comparaison de Mme [Y],

– en conséquence, condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) à lui payer les sommes suivantes :

. 4 815,83 euros bruts à titre de rappel de salaires (période intérim),

. 8.497 euros bruts à titre de rappel de salaires (période CDD),

. 426,03 euros bruts à titre de rappel de prime de 13e mois (période intérim),

. 708,09 euros bruts à titre de rappel de prime de 13e mois (période CDD),

. 1 442,12 euros bruts à titre de rappel d’indemnité compensatrice de congés payés,

. 4 675,56 euros bruts à titre de rappel de prime de précarité,

sur la demande de requalification du contrat de travail,

– requalifier le contrat de mission temporaire en contrat à durée indéterminée à l’égard du syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile),

– requalifier le contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à l’égard du syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile),

– dire et juger que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement irrégulier et injustifié,

en conséquence,

à titre principal,

– condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) à lui payer les sommes suivantes :

. 5 000,67 euros à titre d’indemnité de requalification,

. 967,46 euros à titre d’indemnité de licenciement,

. 13 848 euros à titre d’indemnité de préavis,

. 1 384,80 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

. 4 616 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse,

à titre subsidiaire,

– condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) les sommes suivantes :

. 3 688,75 euros à titre d’indemnité de requalification,

. 713,65 euros à titre d’indemnité de licenciement,

. 10 215 euros à titre d’indemnité de préavis,

. 1 021,50 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

. 3 405 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse,

sur les autres demandes,

– ordonner au syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) de lui délivrer des bulletins de salaire pour les mois d’août 2018 à juin 2019 et ses documents de fin de contrat (solde de tout [D], certificat de travail et attestation Pôle emploi) rectifiés sous astreinte définitive de 50 euros par document et par jour de retard à compter du jugement,

– condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure de première instance,

– condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d’appel,

– condamner le syndicat Mobilians (ex-Conseil national des professions de l’automobile) aux entiers dépens (en ce compris, le cas échéant, le droit proportionnel de recouvrement de l’huissier de justice).

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 26 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles le syndicat Mobilians anciennement dénommé Conseil national des professions de l’automobile demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre le 16 avril 2021,

en conséquence,

– juger Mme [D] non fondée en l’intégralité de ses demandes,

– débouter Mme [D] totalement,

– le recevoir en sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [D] au paiement à ce titre de la somme de 3 000 euros,

– condamner Mme [D] aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur l’égalité de traitement

La salariée expose que du 28 août 2018 au 30 juin 2019, elle a occupé les fonctions de gestionnaire de ressources humaines, soit dans le cadre d’un contrat de mission temporaire, soit dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée.

Elle affirme que Mme [Y] a été engagée le 20 mai 2019 par l’employeur par contrat de travail à durée indéterminée pour assurer les mêmes fonctions que les siennes mais avec une rémunération mensuelle de 4 616 euros, outre un treizième mois, c’est-à-dire une rémunération supérieure à la sienne. Elle voit dans cette différence une inégalité de traitement qui n’est pas justifiée par l’employeur par des raisons objectives.

En réplique, l’employeur objecte d’abord que le principe « à travail égal, salaire égal » implique que les salariés en comparaison occupent des fonctions identiques en même temps, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Il affirme ensuite que la salariée n’a pas remplacé Mme [Y] poste pour poste. Il soutient enfin que les profils de la salariée et de Mme [Y] ne sont pas comparables, la seconde disposant de diplômes dont ne disposait pas la première.

***

Le principe de l’égalité de traitement impose à l’employeur d’assurer une égalité de rémunération entre tous les salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale. Il appartient d’abord au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une différence de traitement et il appartient ensuite à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs justifiant cette différence et dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Si l’employeur peut accorder des avantages particuliers à certains salariés, c’est à la condition que tous les salariés de l’entreprise placés dans une situation identique au regard de l’avantage en cause puissent bénéficier de l’avantage ainsi accordé et que les règles déterminant l’octroi de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables.

Si l’application du principe « à travail égal, salaire égal » nécessite une comparaison entre des salariés d’une même entreprise, la comparaison n’est pas limitée à des situations dans lesquelles les salariés effectuent simultanément un travail égal pour un même employeur.

Par ailleurs, une différence de diplômes ne justifie une différence de traitement que s’il est démontré l’utilité particulière des connaissances acquises au regard des fonctions exercées.

En l’espèce, compte tenu de ce que pour l’application du principe d’égalité de traitement il n’est pas nécessaire que les salariés comparés aient effectué simultanément leur travail au service de l’employeur, le premier moyen de ce dernier est inopérant.

La salariée a initialement été mise au service de l’employeur par des contrats de mission en qualité de gestionnaire de ressources humaines du 28 août 2018 au 30 novembre 2018. Elle avait alors une qualification de « gestionnaire ressources humaines / administration du personnel (Non cadre) ». Elle a par la suite été engagée par contrat de travail à durée déterminée du 1er décembre 2018 au 30 juin 2019 en qualité de chargée des ressources humaines, cadre expert niveau IIB moyennant une rémunération de 3 385 euros mensuels outre un treizième mois. Elle était hiérarchiquement rattachée au « responsable des projets de développement des ressources humaines du CNPA ou à toute personne qui lui serait substituée ».

La cour observe que :

. les deux contrats de mission temporaire de la salariée précisaient : « Durée hebdo : 37,00 Hrs » ;

. l’article 5 du contrat de travail à durée déterminée stipulait : « Mme [F] [D] est engagée sur la base de la durée légale du travail soit 151,67 heures. Mme [F] [D] sera soumise à l’horaire collectif en vigueur au CNPA soit actuellement 37 heures de présence hebdomadaire assorties de 13 jours par an de repos au titre de la réduction du temps de travail ».

La salariée se compare à Mme [Y] qui a été engagée par l’employeur à compter du 20 mai 2019 par contrat de travail à durée indéterminée en qualité de « chargée ressources humaines », cadre expert niveau IIB de la convention collective des services de l’automobile. En cette qualité, elle était rattachée hiérarchiquement au « responsable des projets de développement des ressources humaines du CNPA ou à toute personne qui lui serait substituée».

La cour observe que l’article 5 du contrat de travail de Mme [Y] stipulait : « Compte tenu de son niveau de responsabilités, la salariée dispose d’une large autonomie dans l’organisation de son emploi du temps (‘). En conséquence de ce qui précède, la présente convention de forfait annuel en jours est conclue (‘). La salariée sera rémunérée sur la base d’un forfait défini en fonction d’un certain nombre de jours de travail sur l’année s’établissant à 218 jours (‘) »

La rémunération de Mme [Y] était fixée à 4 616 euros mensuels, outre un treizième mois.

Il ressort du contrat de travail de Mme [Y] qu’elle était soumise à une convention de forfait en jours tandis que le contrat de travail de la salariée était ainsi libellé : « [la salariée] est engagée sur la base de la durée légale du travail soit 151,67 heures. [elle] sera soumise à l’horaire collectif en vigueur au CNPA, soit actuellement 37 heures de présence hebdomadaire assorties de 13 jours par an de repos au titre de la réduction du temps de travail ». La question du temps de travail contractuel de ces salariées est dès lors nécessairement dans les débats pour l’examen du caractère identique ou non de leur situation.

Or, force est de constater que Mme [Y] était soumise à une convention de forfait annuel en jours alors que Mme [D] n’y était pas assujettie. Les deux salariées n’étaient donc pas placées dans une situation identique en raison du caractère dérogatoire du régime de la convention de forfait en jours et des sujétions qu’il impose au salarié. Or lors de la première étape probatoire que suppose l’examen de la question de l’égalité de traitement, il appartient au salarié de démontrer qu’il est dans une situation identique ou similaire au regard de l’avantage invoqué à celle du salarié auquel il se compare.

Le fait que la salariée n’établit pas qu’elle était dans une situation identique à celle de Mme [Y] rend inutile l’examen de la question relative aux diplômes des deux salariées, cette question ne devant être examinée que si les deux salariées avaient été placées dans une situation identique.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la salariée de ses demandes de rappels de salaire au titre de l’inégalité de traitement.

Sur la demande de requalification

La salariée conteste le motif du recours tant en ce qui concerne ses contrats de mission temporaire que son contrat de travail à durée déterminée. D’abord en soutenant qu’il n’est pas établi que le service RH ait effectivement connu une réorganisation. Ensuite, à supposer que l’employeur parvienne à établir qu’il y a bien eu une réorganisation de son service RH lorsqu’elle était à son service, en affirmant que l’employeur ne démontre pas la réalité d’un accroissement d’activité qui en serait résulté. Elle conclut en indiquant qu’en réalité, elle a été engagée pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

En réplique, l’employeur soutient que la fonction RH au sein du CNPA s’est transformée en profondeur, que la salariée a été engagée dans ce contexte de réorganisation décidée en novembre 2017, qu’au second semestre 2018, le contour du service RH du CNPA n’était pas totalement arrêté et que dans ce contexte, la salariée n’avait pas vocation à pourvoir un emploi stable et durable.

***

D’abord, aux termes de l’article L. 1251-5 du code du travail, le contrat de mission ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.

Selon l’article L. 1251-6 du même code, il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dénommée « mission » et seulement dans les cas énumérés dans ce texte et notamment dans les cas suivants :

(‘)

2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ;

(…)

Ensuite, les articles L. 1242-1 et L. 1242-2 imposent, pour les contrats à durée déterminée, les mêmes conditions que celles prévues ci-dessus, aux articles L. 1251-5 et L.1251-6. Il ressort par ailleurs de l’article L. 1245-1 du code du travail qu’est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4, L. 1242-6 à L. 1242-8, L. 1242-12, alinéa premier, L. 1243-11, alinéa premier, L. 1243-13, L. 1244-3 et L. 1244-4.

En l’espèce, c’est à juste titre que l’employeur expose que début 2017, ainsi que le montre la note du 27 février 2017 de la secrétaire générale du CNPA, la situation du service des ressources humaines devait évoluer en raison de divers dysfonctionnements :

. se traduisant par des lenteurs et un manque d’anticipation dans le traitement des dossiers, l’absence ou l’insuffisance de réponses apportées auprès des responsables, des erreurs dans les contrats de travail, des fiches de poste non mises à jour, et un manque de communication du service RH avec les salariés,

. et s’expliquant par un manque de compétence technique du personnel des ressources humaines, des méthodes de travail désuètes et de mauvaises relations avec les institutions représentatives du personnel.

Le service des ressources humaines était alors composé d’un responsable, d’un adjoint et d’un gestionnaire de paie, étant précisé que le CNPA comptait cent-soixante salariés.

Il ressort des débats que fin 2017, le responsable des ressources humaines a quitté ses fonctions. Courant novembre 2017, une nouvelle responsable de service (Mme [W]) a pris ses fonctions et s’est vue attribuer, au titre de ses « principales missions », la tâche de « proposer et mettre en ‘uvre une mission de transformation de la gestion des ressources humaines pour les 160 salariés du CNPA (‘) » (cf. fiche de poste du responsable des ressources humaines en pièce 7 de l’employeur).

L’employeur verse aux débats l’attestation de Mme [W]. Comme le fait observer la salariée, Mme [W] y indique, à tort, ne pas avoir de lien de subordination avec les parties alors qu’elle était toujours salariée de l’employeur lorsqu’elle rédigeait son témoignage le 14 janvier 2021. En effet, elle indique en fin de témoignage que « la composition du service RH est aujourd’hui pérenne et, en début 2021, nous fonctionnons encore avec ces trois postes en CDI ». Néanmoins, la mention litigieuse ne résulte que d’une erreur d’inattention puisque Mme [W], en rédigeant son attestation, ne dissimule en rien son lien de subordination. L’attestation de l’intéressée n’est donc pas dépourvue de force probante, laquelle doit au contraire être retenue, en raison de son caractère particulièrement précis et circonstancié.

Or, il ressort de cette attestation que lorsque Mme [W] a pris ses fonctions en novembre 2017, son service ne comptait qu’elle et son adjointe, le gestionnaire de paie ayant démissionné. En outre, la témoin explique que son adjointe, bien qu’expérimentée, manquait de connaissances en droit social.

L’état dans lequel se trouvait le service des ressources humaines à la fin de l’année 2017 et au début de l’année 2018, associé à la mission dévolue à Mme [W] de transformer le service des ressources humaines explique l’accroissement d’activité allégué.

L’attestation de Mme [W] fait aussi ressortir l’accroissement d’activité dès lors qu’elle témoigne de ce que, notamment :

. une collaboratrice recrutée en mars 2018 par contrat de travail à durée déterminée s’est vue diagnostiquer une grave maladie la rendant régulièrement indisponible,

. l’adjointe RH qui la secondait a été licenciée le 31 août 2018,

. le service a dû faire face à la mise en place du prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source à compter du 1er janvier 2019 et à l’intégration d’un service dédié à la réalisation de la paie.

C’est donc à raison que le conseil de prud’hommes a estimé que le motif du recours ‘ tant aux contrats de mission d’intérim qu’au contrat de travail à durée déterminée ‘ était justifié par la forte désorganisation du service des ressources humaines.

Au-delà du motif du recours, la salariée expose que l’employeur a en réalité pourvu durablement un emploi lié à son activité normale et permanente. Elle s’appuie en cela sur le fait que Mme [Y] a été recrutée pour la remplacer poste pour poste.

Néanmoins, dès lors que le service des ressources humaines a fait l’objet d’une nouvelle organisation, modifiant donc le profil des salariés à recruter, l’employeur pouvait, dans l’exercice de son pouvoir de direction, décider de préférer au profil de Mme [D], celui de Mme [Y] qui, au vu de son curriculum vitae, disposait de compétences juridiques dont ne justifiait pas Mme [D].

Dès lors, dans cette période de transition, qui a imposé au service des ressources humaines de repenser sa propre organisation puis de se restructurer, ni les contrats de mission de la salariée ni son contrat de travail à durée déterminée n’ont eu pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté la salariée de ses demandes en lien avec une requalification.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Succombant, la salariée sera condamnée aux dépens de la procédure d’appel.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Il conviendra de dire n’y avoir lieu de condamner la salariée à payer à l’employeur une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais d’appel.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

DIT n’y avoir lieu de condamner Mme [D] à payer au syndicat Mobilians une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais d’appel,

CONDAMNE Mme [D] aux dépens.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, Présidente et par Madame Dorothée Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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