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Y compris dans le secteur du spectacle vivant, le CDD d’usage doit être sans écrit, sous peine de requalification en CDI.
L’article L 1242-2 3° dispose que le recours au contrat à durée déterminée d’usage est subordonné au respect de trois conditions cumulatives: l’appartenance de l’entreprise à certains secteurs d’activité, l’existence d’un usage constant et le caractère temporaire de l’emploi pouvant donner lieu à un contrat à durée déterminée apprécié in concreto.
En l’occurrence, la relation contractuelle était soumise à la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles. Les particularismes de la branche du spectacle vivant peuvent justifier le recours à d’autres formes de contrat qu’à durée indéterminée, dits d’usage exclusivement réservés aux artistes du spectacle tels que les techniciens lumière et son.
Il était versé à la procédure, des bulletins de salaires, les attestations employeur AME spécifiques à l’intermittence établies à la fin de chaque contrat à durée déterminée conformément au règlement de l’assurance chômage, un contrat d’engagement du salarié en deux exemplaires non signés pour une représentation théâtrale pour la période de janvier et février 2014.
Néanmoins l’employeur n’a pu produire aucun contrat de travail signé et formalisé conformément aux dispositions du droit du travail, permettant de vérifier la régularité des mentions portées au regard des exigences légales.
Aussi en l’absence d’écrit, le contrat de travail est réputé conclu pour une durée indéterminée en application de l’article L1242-12 du code de travail, comme l’a justement qualifié le juge départiteur. A noter qu’il existe aussi une présomption simple de requalification à temps complet à laquelle l’employeur peut apporter la preuve contraire.
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4e Chambre Section 1
ARRÊT DU 26 MARS 2021
ARRÊT N° 2021/140
N° RG 18/02950 – N° Portalis DBVI-V-B7C-MMRQ
M.[…]
Décision déférée du 07 Juin 2018 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de TOULOUSE ( F15/01194)
[…]
D X
C/
Maître F G ès qualités de Mandataire judiciaire de la COMPAGNIE DU THEATRE VIVANT
L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de Toulouse
APPELANT
Monsieur D X
LE VILLAGE
[…]
Représenté par Me Priscilla HAMOU, avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555.2018.021297 du 22/10/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIMÉS
Maître F G ès qualités de Mandataire judiciaire de la COMPAGNIE DU THEATRE VIVANT
[…]
[…]
Représenté par Me Pascal SAINT GENIEST de l’AARPI QUATORZE, avocat au barreau de TOULOUSE
L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de Toulouse
[…]
[…]
Représentée par Me Pascal SAINT GENIEST de l’AARPI QUATORZE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant , S.BLUMÉ et M. DARIES chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
S. BLUME, présidente
C. KHAZNADAR, conseillère
M. DARIES, conseillère
Greffier, lors des débats : C. DELVER
ARRET :
— CONTRADICTOIRE
— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
— signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE:
La compagnie du Théâtre Vivant est une association gérant le ‘Tara Théâtre’ ayant pour activité de créer, réaliser, développer des activités culturelles et artistiques, essentiellement des pièces de théâtre de marionnettes.
Le 10 octobre 1999, M. D X a été engagé en qualité de technicien son et lumière par l’association Compagnie du Théâtre Vivant.
Les relations contractuelles ont pris fin courant 2014.
Le 3 avril 2015, M. D X a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse de demandes relatives à l’exécution et à la rupture des relations contractuelles.
Par jugement de départition du 7 juin 2018, le conseil de prud’hommes
de Toulouse, a’:
— requalifié la relation de travail unissant les parties en contrat de travail à durée indéterminée,
— condamné l’association Compagnie du Théâtre Vivant à payer au salarié la somme de 1 800 euros à titre d’indemnité de requalification,
— débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire pour la période d’avril 2013 à juin 2014,
— débouté le salarié de toutes ses demandes relatives à la rupture de la relation de travail,
— dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— rappelé qu’en vertu de l’article R. 1245-1 du code du travail, l’exécution provisoire du présent jugement est de droit,
— partagé les dépens par moitié entre les parties.
Par déclaration du 5 juillet 2018 parvenue au greffe de la cour d’appel de Toulouse, M. D X a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié
le 12 juin 2018.
Le 25 septembre 2018, la Compagnie du Théâtre Vivant a fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire.
Par ses dernières conclusions du 27 novembre 2020, M. D X demande à la cour de’:
— confirmer le jugement prud’homal en ce qu’il a requalifié la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée,
— réformer le jugement prud’homal en ce qu’il :
*l’a débouté de sa demande de rappel de salaire pour la période d’avril 2013
à juin 2014,
*l’a débouté de toutes ses demandes relatives à la rupture de la relation de travail,
*a dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
*a partagé les dépens par moitié entre les parties,
— statuant à nouveau, fixer la créance de l’association à 1 806,85 euros nets à titre d’indemnité de requalification,
— requalifier la relation de travail en relation à temps complet,
— fixer la créance de l’association à 18 503,11 euros bruts à titre de rappel de salaire, outre 1 850,32 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés, sur la période d’avril 2013 à juin 2014,
— requalifier la rupture des relations contractuelles en licenciement sans cause réelle et sérieuse,
— fixer la créance de l’association aux sommes suivantes’:
*7 227,40 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, et 722,74 euros bruts au titre des congés payés afférents,
*12 949,09 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
*1 806,85 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière,
*30 000 euros de dommages et intérêts pour rupture abusive.
— y ajoutant, fixer la créance de l’association à la somme de 676 euros bruts à titre de rappel de salaire, et à la somme de 10 800 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
— en tout état de cause, déclarer la décision à intervenir opposable au CGEA,
— condamner l’association aux entiers dépens.
M. X expose qu’aucun contrat de travail à durée déterminée d’usage n’a été conclu entre les parties et qu’en l’absence d’écrit fixant un temps partiel de travail, la relation contractuelle est présumée à durée indéterminée et à temps complet.
Il s’estime fondé à réclamer la requalification de la relation de travail et à solliciter paiement de rappels de salaires sur les périodes interstitielles et une indemnité pour travail dissimulé.
L’appelant affirme en outre qu’il n’a pas démissionné et qu’ainsi la rupture de la relation contractuelle par l’employeur sans respect de procédure s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit à indemnisation.
Par conclusions du 3 janvier 2019, Maître G, en sa qualité de mandataire liquidateur de la compagnie du Théâtre Vivant demande à la cour de’:
— réduire le montant de l’indemnité de requalification fixée par le premier juge,
— confirmer pour le surplus le jugement entrepris,
— débouter le salarié de ses demandes nouvelles de rappel de salaire et d’indemnité pour travail dissimulé,
— condamner le salarié aux dépens.
Le liquidateur expose que M. X, intermittent du spectacle, intervenait dans le cadre de contrats à durée déterminée d’usage pour des représentations théâtrales qu’il n’est pas en mesure de produire et que si la Cour procédait à la requalification en contrat de travail à durée indéterminée, il sollicite que le quantum de l’indemnité de requalification n’excède pas un mois de salaire à savoir 708 euros.
Il s’oppose à la requalification en temps complet et donc au paiement de rappels de salaires pour les périodes intercalaires.
L’intimé relève que la demande de rappel de salaire pour un montant de 676 € bruts non présentée en première instance n’est pas compatible avec la première demande de rappel et ne pourrait se concevoir qu’à titre subsidiaire, pour laquelle il conclut au débouté comme à celle de travail dissimulé.
Il argue également que la rupture des relations contractuelles n’est pas imputable à l’employeur et il s’oppose à toute indemnisation.
Par conclusions du 27 décembre 2018, L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de Toulouse, association déclarée, partie intervenante forcée, demande à la cour de’:
— Réduire le montant de l’indemnité de requalification fixée par le premier juge.
— Confirmer pour le surplus le jugement entrepris.
— Débouter Monsieur X de ses demandes nouvelles de rappel de salaire et d’indemnité pour travail dissimulé.
— Dire et juger que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, étant précisé que le plafond applicable
s’entend pour les salariés toutes sommes et créances avancées confondues et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale ou d’origine conventionnelle imposée par la Loi.
En tout état de cause,
— Dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
— Statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.
L’association conclut aux mêmes fins que le liquidateur.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 23 décembre 2020.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.
MOTIVATION:
Sur la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet:
L’article L 1242-2 3° dispose que le recours au contrat à durée déterminée d’usage est subordonné au respect de trois conditions cumulatives: l’appartenance de l’entreprise à certains secteurs d’activité, l’existence d’un usage constant et le caractère temporaire de l’emploi pouvant donner lieu à un contrat à durée déterminée apprécié in concreto.
Il n’est pas contesté que la relation contractuelle était soumise à la convention collective nationale des entreprises artistiques et culturelles.
Elle mentionne que les particularismes de la branche du spectacle vivant peuvent justifier le recours à d’autres formes de contrat qu’à durée indéterminée, dits d’usage exclusivement réservés aux artistes du spectacle tels que les techniciens lumière et son.
Il est versé à la procédure, des bulletins de salaires, les attestations employeur AME spécifiques à l’intermittence établies à la fin de chaque contrat à durée déterminée conformément au règlement de l’assurance chômage, un contrat d’engagement de M. X en deux exemplaires non signés pour une représentation théâtrale pour la période de janvier et février 2014.
Néanmoins l’employeur ne peut produire aucun contrat de travail signé et formalisé conformément aux dispositions du droit du travail, permettant de vérifier la régularité des mentions portées au regard des exigences légales.
Aussi en l’absence d’écrit, le contrat de travail sera réputé conclu pour une durée indéterminée en application de l’article L1242-12 du code de travail, comme l’a justement qualifié le juge départiteur.
Il existe une présomption simple de requalification à temps complet à laquelle l’employeur peut apporter la preuve contraire.
Pour solliciter l’application d’un temps complet et le paiement de salaires correspondant aux périodes séparant deux contrats à durée déterminée pour la période d’avril 2013 à juin 2014, M. X invoque la fréquence des engagements en qualité de technicien son et lumière par la compagnie de théâtre, l’absence de constance des jours travaillés d’un mois sur l’autre et qu’il était ainsi ,dans l’obligation de se tenir constamment à la disposition de l’employeur.
La compagnie de théâtre réplique que M. X a travaillé depuis 2011 en moyenne 2 à 11 jours par mois durant 7,8 ou 9 mois par an ( tel que le démontre le récapitulatif des salaires et nombre d’heures de travail versé à la procédure) et a exercé d’autres activités professionnelles et perçu des cachets d’autres employeurs.
Il ressort du document récapitulatif que pour la période concernée par la demande de rappel de salaires, l’intéressé a travaillé :
+ de avril à décembre 2013 un nombre de 395 heures sur 51 jours pour une rémunération brute globale de 5475 euros:
— au mois d’avril : 24 heures sur 3 jours du 07 au 09 , 24 heures sur 3 jours
du 11 au 13 avril,
— au mois de mai : 16 heures sur 2 jours du 13 au 14 mai 2013,
— au mois de juillet : 151 heures sur 23 jours du 01 au 31 juillet,
— au mois septembre : 32 heures sur 4 jours du 24 au 27 septembre et 8 heures
le 30 septembre,
— au mois de octobre : 24 heures sur 3 jours du 01 au 03 octobre,
— au mois de novembre : 40 heures sur 5 jours du 19 au 24 novembre,
— au mois de décembre : 20 heures sur 2 jours du 14 au 15 décembre, 10 heures sur 1 jour le 18 décembre et 30 heures sur 3 jours du 21 au 23 décembre,
+ de janvier à juin 2014 un nombre d’heures de 226 heures sur 27 jours pour une rémunération brute globale de 3321 euros:
— au mois de janvier : 16 heures sur 2 jours du 23 au 24, 50 heures sur 5 jours
du 27 au 31,
— au mois de février: 24 heures sur 3 jours du 02 au 04, 24 heures sur 3 jours du 06 au 08, 8 heures sur 1 jour le 10,
— au mois de avril : 24 heures sur 3 jours du 17 au 19,
— au mois de juin : 24 heures sur 3 jours du 11 au 13, 40 heures sur 5 jours du 16 au 20, 16 heures sur 2 jours du 23 au 24.
Selon la convention collective, article V -15 transformation des contrats, lorsqu’un même salarié employé régulièrement sous CDD dit d’usage sur le même emploi aura effectué dans une même entreprise un volume moyen annuel de 75% de la durée annuelle de travail équivalent temps plein de 1575 heures, constaté sur 2 années consécutives, l’employeur devra proposer un contrat de travail à durée indéterminée de droit commun à temps complet.
Si l’on se réfère à cette disposition, M. X n’a pas accompli ce volume moyen annuel permettant un passage conventionnel en temps complet comme le démontrent les déclarations précises AME et les bulletins de salaire.
Par ailleurs, M. X, employé en tant qu’intermittent du spectacle pendant 15 ans ‘ayant participé au fonctionnement et au développement de la compagnie’ (comme il l’écrit), ne pouvait ignorer l’organisation de l’association, l’appelant reconnaissant par courriel du 1er septembre 2014 l’existence de contrats: ‘ je compte bien assurer les contrats en cours’.
Les programmations de spectacles, étant par nature temporaires et différentes, donnent lieu à des interventions d’artistes ou techniciens sur un nombre d’heures et jours variables.
Ces programmations ne peuvent qu’être établies à l’avance pour permettre les engagements de personnel et le salarié ne se trouvait pas dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler tel qu’il s’évince des feuilles de route Tara Théâtre Johnny, communiquées par lui concernant les lieux et dates de programmation, ce d’autant quand des déplacements étaient nécessaires impliquant des réservations et des contacts avec des tiers pour les représentations:
à La Tranclière mise à jour le 28-03-2013 pour la période du 03 au 14 avril, à Gauchy mise à jour le 03 avril 2013 pour la période du 12 mai au 15 mai, à Saint Martin de Crau mise à jour le 14 avril 2014 pour la période du 16 au 20 avril, précisant des réservations de nuitées.
M. X n’était pas à disposition permanente de l’employeur pendant les périodes intermédiaires ainsi qu’il l’exprime dans un courriel du 27 juin 2014:
‘ Je vous fais remarquer que je n’ai jamais limité mes activités au Tara pour renouveler mes droits à l’ARE. En faisant des cachets par ailleurs: régie chez Diagora, musicien, comédien, stage longue durée, je n’ai pas l’impression d’avoir coûté le plus cher en renouvellements tout en restant disponible pour Tara. (…).’
Il y a lieu donc de confirmer la décision du juge départiteur ayant débouté l’appelant de ses demandes de requalification à temps complet et de rappels de salaire pour les périodes interstitielles.
Aussi l’indemnité de requalification ne pouvant être inférieure à un mois de salaire en application de l’article L 1245-2 du code du travail, sera fixée, non sur la base d’un temps complet, mais comme le sollicite le liquidateur en tenant compte du temps partiel réalisé soit un salaire moyen mensuel de 708 €.
Le jugement du conseil de prud’hommes sera infirmé sur le quantum.
Sur la demande de rappel de salaires pour temps de déplacement et d’indemnité pour travail dissimulé:
M. X sollicite 676 euros brut de salaires correspondants :
— Pour les 06 et 14 avril 2013, la somme de 220 € bruts.
— Pour les 12 et 15 mai 2013, la somme de 220 € bruts,
— Pour les 16 et 20 avril 2014, la somme de 236 € bruts.
en application de l’article VII ‘ 1 de la Convention Collective des Entreprises Artistiques et Culturelles
L’appelant réclame une indemnité pour travail dissimulé au motif qu’en ne rémunérant pas et en ne déclarant pas ces jours travaillés, l’association a commis l’infraction de travail dissimulé prévue à l’article L 8221-5 du code du travail.
Le liquidateur et l’AGS s’y opposent au motif que la demande de rappel de salaire non présentée en première instance n’est pas compatible avec celle sur la base d’un temps complet et ne peut se concevoir qu’à titre subsidiaire mais ils en contestent le bien fondé comme celle au titre du travail dissimulé en l’absence d’élément intentionnel.
La demande au titre du temps complet étant rejetée, cette seconde prétention tendant aux mêmes fins d’obtenir condamnation à paiement sur le fondement de la même relation contractuelle est recevable.
La convention collective en son article VIII- I précise que le trajet entre le lieu de travail habituel et le lieu de déplacement constituant un autre lieu d’exécution est considéré comme du temps de travail effectif.
Au regard des pièces de la procédure ( feuilles de route – récapitulatif des heures – bulletins de salaires):
— salaire a été réglé pour la période du 07 au 09 avril et du 11 au 13 avril 2013, la feuille de route du spectacle ayant lieu à La Tranglière à 600 kms mentionne
que ‘Domi’ ( prénom de M. X) prendra le train le 06 avril et reviendra en camion le 14 avril,
— salaire a été versé pour la période du 13 et 14 mai 2013 et celle du 17 au 19 avril 2014 et si les feuilles de route concernant le même spectacle se déroulant à Gauchy à 845 kilomètres et à Saint Martin de Crau à 331 kilomètres ne portent pas les modalités de déplacement, l’employeur ne produit pas de pièce remettant en cause la participation de l’appelant à ces programmations.
Aussi il sera fait droit à la réclamation du rappel de salaire à hauteur de 676 euros mais M. X sera débouté de sa prétention au titre du travail dissimulé en l’absence d’intention de fraude, le montant du rappel de salaire étant limité et propre à interprétation.
Sur la rupture du contrat de travail:
M. X expose que lors d’une réunion en date du 23 juin 2014, Mme Z Y, metteur en scène et fondatrice de la Compagnie a fait part de difficultés de trésorerie liées à l’insuccès de la dernière création « Pars de là » et qu’il a été demandé à l’ensemble des membres dont lui-même d’accepter de ne pas percevoir leurs rémunérations des mois de Juillet et d’août 2014 mais qu’elles seraient déclarées pour permettre de renouveler les droits auprès de l’assurance chômage conformément au statut d’intermittent, tel qu’il ressort du courriel adressé par I J à Mme Y, M. X et Mme A B le 27 juin 2014:
« Je suis perplexe concernant le dernier échange de couriels entre Z et A. Si j’ai bien compris (…) Il est donc nécessaire tout au moins dans l’immédiat de réduire les dépenses faute d’augmenter les recettes. Je pense que là -dessus tout le monde est d’accord.
Il a été proposé (déjà à la précédente réunion) de rembourser pour les mois d’été le net des salaires déclarés au Tara pour renouveler nos droits à l’assurance chômage. Faute de mieux pour l’instant je pense qu’il faut appliquer cette solution exception faite de A qui a besoin d’un accompagnement pour son départ ».
L’appelant soutient qu’ayant refusé de ne pas être rémunéré pour les prestations futures à réaliser, la Compagnie de théâtre a mis fin aux relations contractuelles et ne l’a pas re-sollicité après le 24 juin 2014, date de fin du dernier contrat.
Il s’appuie sur un échange de courriels du 25 juin 2014 entre Mme B, Chargée de diffusion et Mme Y qui écrit:
« Quant aux salaires :
Pour toi, on fait un point précis en septembre pour chiffrer le coût du complément de ton départ.
D’autre part, une réalité Tara posée aux dernières réunions : pour tenir on ne peut plus garantir le statut en payant cachets et charges sociales. I et moi avons accepté de le faire dès Juillet.
A ce jour, Domi refuse le remboursement du net des cachets déclarés pour son renouvellement alors que faire pour ces 18 cachets prévus en juillet et août ‘ 18 cachets à 110 euros, en masse salariale : 3150 à la louche chacun. I et moi remboursons 1600 chacun ‘ coût pour le Tara 1550 à égalité d’enveloppe ça équivaut à 9 cachets déclarés payés pour Domi ».
Les intimés réfutent toute rupture des relations contractuelles fin juin 2014 et toute imputabilité à l’employeur, arguant que l’initiative a été prise par M. X.
Par mail du 27 juin 2014, M. X répondait ne pas pouvoir reverser son net à la compagnie et
+’ A l’issue de la réunion de lundi, je me suis posé la question de mon devenir dans la compagnie. Je me suis toujours considéré comme faisant partie à part entière de Tara. Hors je constate que je ne suis pas le bien venu sur la nouvelle création, ce que je considère comme une éviction.
Je demande donc à partir dans les mêmes conditions que A L à savoir à mon prochain renouvellement de droits ARE, déclarés et payés. Cela est un minimum au regard de 15 ans de participation au fonctionnement et développement de cette compagnie.
En contrepartie, j’assure les dates de PDL en cours et à venir, transmet les régies des spectacles à la personne qui me remplacera et travaille sur la bande son de la version courte de PDL et l’adaptation de la conduite, ce qui pourraît être une bonne période pour passer la main.
J’ai besoin d’une réponse rapide pour pouvoir m’engager avec une autre compagnie et/ou prévoir une formation professionnelle longue, ce qui, vous le comprenez , me rendrait peu ou plus disponible’.
Il était répondu par M. I …..’ il n’a jamais été question d’éviction de qui que ce soit, Domi est toujours le régisseur de Tara. (…) Après Domi, si tu décides de passer à autre chose c’est tout à fait légitime, je regrette juste que cette décision brutale se fasse sur des critères financiers plutôt qu’artistiques’.
Le 1er septembre 2014, le salarié indiquait: ‘pour répondre aux inquiétudes de I, je compte bien assurer les contrats en cours mais n’étant plus membre du Tara, je demande à être payé 200€ net par date y compris les jours de transport et de montage. A ce jour je suis en contact avec le chapeau rouge pour visiter la salle car il me semble qu’il y a un problème de hauteur. Pour les autres contrats j’attends avant de contacter les lieux d’une part par les feuilles de route et d’autre part le contrat de travail spécifique à chaque date’.
Par courrier du 27 octobre 2014, Mme C répondait à un courrier de M. X du 16 octobre ( mais non communiqué aux débats): ‘vos collaborations en qualité de technicien son et lumière au sein de la compagnie étaient encadrées par des contrats à durée déterminée d’usage et je suis au regret de ne pas donner une suite favorable à votre demande.
Je vous rappelle que dans le mail que vous m’avez adressé le 1er septembre 2014, votre condition à la signature de nouveaux contrats avec CTV était de voir votre salaire journalier porté à 258 euros brut ( 200 euros nets) contre 118 bruts ( 90 euros net) dans les précédents contrats.’
En l’espèce, au vu des différents échanges entre le salarié et les membres de l’association, M. X n’avait pas expréssement renoncé à travailler pour la compagnie puisqu’en septembre 2014, il avait pris contact avec un tiers pour une salle de spectacle et il sollicitait une augmentation de son cachet outre les feuilles de route et le contrat de travail se rapportant à sa prestation.
Or l’employeur refusera cette augmentation et ne justifie pas lui avoir adressé les documents précisant le cadre de son intervention dans un prochain spectacle.
La relation a été requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, le salarié n’a pas manifesté une volonté claire de mettre fin à la relation contractuelle et la compagnie n’a pas mis en demeure M. X d’exécuter les contrats en cours.
En l’absence de procédure engagée par la compagnie, la rupture sera considérée comme abusive à son initiative.
Le jugement entrepris sera infirmé.
Sur l’indemnisation:
L’appelant fait valoir qu’il bénéficie d’une ancienneté de 14 ans et 4 mois au poste de « technicien son et lumière » classé TAM, Groupe 7, échelon 7 de la convention collective des Entreprises Artistiques et Culturelles.
Il indique que le salaire minimal conventionnel à temps plein est à compter
du 01 avril 2014 de 1806,85 € bruts et qu’en application de l’article V8 de la Convention Collective,
le préavis est d’une durée de 4 mois si la personne licenciée est âgée de 50 ans à la date de la rupture, à laquelle il avait 56 ans.
Il expose qu’à compter du mois de mars 2015, il a été bénéficiaire du revenu de solidarité active à hauteur de 148,23 € par mois, qu’en date du 22 juin 2015, il a retrouvé un emploi pour une durée déterminée de 6 mois et à temps partiel en qualité d’agent d’entretien des espaces naturels et a perçu une rémunération brute mensuelle de 1082,76 € jusqu’au 16 novembre 2016, puis il a occupé le poste de formateur à l’école de conduite, ECF d’Ariège de manière temporaire avant d’assurer un emploi familial, via CESU, en mai et juin 2018, tel qu’il résulte des pièces fournies.
Il réclame:
— 7227,40 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 722,74 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
— 12949,09 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ( prenant en compte un 1/2 mois par année de présence aux termes de l’article V11 de la convention collective),
— 1806,85 € à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière en application des articles L 1235-1 et 1235-2 du code du travail se cumulant avec celle pour rupture sans cause réelle et sérieuse la compagnie embauchant moins de 11 salariés en équivalent temps plein),
— 30000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.
Les intimés opposent dans le cas de rupture reconnue abusive que les indemnités doivent être calculées par référence au salaire moyen des 12 derniers mois soit 708 € bruts et considèrent que les dommages et intérêts doivent être réduits, M. X ayant continué ses autres activités après la fin de ses relations avec la compagnie.
La relation de travail n’ayant pas été requalifiée à temps plein, l’indemnisation sera calculée sur la base précédemment retenue de 708 euros de salaire moyen mensuel.
L’article L 1235-5 du code du travail ( dans sa rédaction applicable à la date du litige) dispose que ne sont pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés les dispositions relatives aux irrégularités de procédure de l’article L 1235-2, à l’absence de cause réelle et sérieuse prévues à l’article L 1235-3 et au remboursement des indemnités de chômage prévues à l’article L 1235-4. Le salarié peut prétendre en cas de licenciement abusif à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Il sera donc alloué :
— 2832,00 euros d’indemnité de préavis outre 283,20 euros de congés payés afférents,
— 5072,00 euros d’indemnité de licenciement,
— 300,00 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière,
— 10000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement déféré sera infirmé sur ces chefs.
Sur les demandes annexes:
Partie succombante, Maître G, en sa qualité de liquidateur de l’association Compagnie du Théâtre Vivant sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS:
La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe:
Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 07 juin 2018, en sa formation de départition, concernant le quantum de l’indemnité de requalification en contrat de travail à durée indéterminée et les demandes relatives à la rupture de la relation contractuelle,
Le confirme pour le surplus,
Statuant sur les chefs infirmés et y ajoutant :
Dit que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
Déboute Monsieur X de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé,
Fixe les créances de Monsieur D X à inscrire au passif de la compagnie du Théâtre Vivant représentée par Maître G en sa qualité de liquidateur aux sommes de :
— 708,00 euros au titre de l’indemnité de requalification en contrat de travail à durée indéterminée,
— 676 euros de rappel de salaires pour les périodes des 06 et 14 avril 2013, les 12 et 15 mai 2013, les 16 et 20 avril 2014,
— 2832,00 euros d’indemnité de préavis outre 283,20 euros de congés payés afférents,
— 5072,00 euros d’indemnité de licenciement,
— 300,00 euros de dommages et intérêts pour procédure irrégulière,
— 10000,00 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dit que la garantie de l’AGS-CGEA de Toulouse doit être mise en oeuvre pour les créances sus-visées et ce dans les limites légales et réglementaires,
Rappelle que la garantie du CGEA s’applique dans les conditions, limites et plafonds légaux et réglementaires de la garantie prévue aux articles L 3253-6, L 3253-8, L 1253-17 et D 3253-5 du Code du Travail,
Rappelle qu’en application des dispositions des articles L 3253-6, L 3253-1 et L 3253-5 du Code du Travail, l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L 3253-19 du même code,
Rappelle que le jugement d’ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l’article L 622-28 du code de commerce,
Condamne Maître G en sa qualité de liquidateur de l’association Compagnie du Théâtre Vivant aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE