→ Résumé de l’affaireLa SARL Ambroise construction a été chargée par la SAS LMJ Carribean de réaliser le revêtement des sols et murs d’une résidence de tourisme. Suite à des différends, la SARL Ambroise construction a assigné la SAS LMJ Carribean en justice pour obtenir le paiement du solde des travaux réalisés, des dommages et intérêts, ainsi que des frais de procédure. Le tribunal a partiellement donné raison à la SARL Ambroise construction, qui a fait appel pour obtenir une somme plus importante. La SAS LMJ Carribean a également formulé des demandes reconventionnelles. L’affaire est en attente de décision de la cour après une audience en mai 2024. |
→ L’essentielIrregularité du décompte des sommes dues au principalLe tribunal a retenu qu’en application des dispositions de l’article 31.4.2 du cahier des clauses administratives particulières, la proposition de décompte général définitif (DGD) du 25 avril 2019 devait être interprétée comme la preuve que les réserves avaient été levées ou comme une renonciation par le maître d’ouvrage à toute réclamation relative à la levée des réserves. Il en a déduit que la somme de 7 161€ correspondant à la facture établie par la SARL Technics construction le 28 juin 2019 n’avait pas lieu d’être déduite de la créance de la société Ambroise construction, ce d’autant que le DGD faisait mention d’une somme de 6 526,35€ au titre de travaux réalisés par une autre entreprise. Il a fixé la créance de la société Ambroise construction à la somme de 33 984,39€ mentionnée dans son décompte, de laquelle il a déduit la somme de 9 000€ payée par la société intimée et la somme de 9 590,70€ correspondant aux pénalités, réfactions MOU et réfactions entreprises figurant dans le DGD, soit une différence de 15 393,69€. Considérant que l’entreprise n’avait pas été en mesure de réaliser les travaux de reprise du fait de la carence du maître d’ouvrage à honorer le paiement des situations n° 8 et 9 en temps utile, il a jugé que la société Ambroise construction ne pouvait être redevable de pénalités de retard. L’appelante soutient que le tribunal, dans son décompte, a imputé sur sa créance, à deux reprises, le montant des pénalités de retard, réfactions MOU et réfactions entreprises. Elle affirme avoir subi un préjudice économique puisqu’elle ne saurait supporter le coût des travaux réalisés par une autre entreprise ou de pénalités de retard alors qu’elle n’a pas été en mesure d’achever les travaux du fait du non-paiement des situations par le maître d’ouvrage. Elle évalue sa créance à la somme de 24 984,39€, outre intérêts moratoires à compter de l’assignation en référé devant le tribunal de commerce du 03 juin 2020. Elle ajoute à cette somme celle de 17 779,16€ en réparation du préjudice économique subi. L’intimée fait grief au tribunal d’avoir écarté les pénalités de retard motif pris du non-paiement des situations en temps et heure, alors que le défaut de paiement ne justifie pas la suspension du contrat sans avoir préalablement mis en place la procédure de suspension des travaux. Elle fait valoir que la société Ambroise construction ayant été déboutée de ses demandes en référé, elle ne peut faire courir les intérêts moratoires au jour de l’assignation en référé. La cour relève que tant dans le DGD que dans le décompte de la société appelante constituant sa pièce n° 8, les parties s’accordent à fixer à 274 383,95€ la somme à payer ; qu’en revanche la société Ambroise construction fait mention d’un règlement total de 255 897,85€ alors que le DGD porte les règlements intervenus à 263 067,56€ ; que la différence entre ces deux sommes, soit (263 067,56 – 255 897,95) 7 169,71€ explique que la somme de 18 486,10e au titre des travaux hors RG sont l’appelante sollicite le paiement soit ramenée à 11 316,39€ à la lecture du DGD. La société intimée ne rapportant pas la preuve du paiement de cette différence de 7 169,71€, la créance de la société appelante doit être fixée à 18 486,10€ à laquelle doit être ajoutée celle de 15 498,29€ au titre de la retenue de garantie, étant observé que la première prend en compte, en les déduisant, le montant des pénalités et réfactions, qui sont ainsi admises par les deux parties, ainsi que le pourcentage de retenue de garantie correspondant aux travaux qui n’ont pas été achevés. De cette somme doit être soustraite celle de 9 000€ qui a été payée par la société intimée. Le total s’élève donc à 24 984,39€. Le tribunal a, à tort, refusé de déduire de cette somme celle de 7 161€ correspondant à la facture du 27 juin 2019 d’une société qui a réalisé des travaux de reprise après la rédaction du DGD. En effet, le cahier des clauses administratives particulières n’énonce nullement que la présentation de ce DGD vaut renonciation à toute réclamation au titre de la levée des réserves ; seule la proposition de paiement par le maître d’ouvrage, intervenant « à la suite de la levée complète des réserves » (article 31.4.2) peut s’interpréter comme telle. Par ailleurs, il ne pouvait imputer de la somme de 24 984,39€ le montant des pénalités et réfactions, déjà pris en compte dans le calcul de cette somme. Au total, la créance de la société Ambroise construction au titre du solde des travaux est de 24 984,39 – 7 161 = 17 823,39€. Rejet du préjudice économique invoqué par la société appelanteLe tribunal a rejeté la demande d’indemnisation dudit préjudice au motif que l’existence de ce dernier n’était pas démontrée. La société appelante soutient que la société intimée engage sa responsabilité contractuelle en raison du non-paiement des situations mensuelles depuis le 30 avril 2018 ; que cette faute lui a causé des préjudices économiques en ce qu’elle a été contrainte de payer 6 526,35€ au titre des réfactions entreprises et 11 252,81€ de pénalité de retard. La société intimée réplique que l’argument de l’exception d’inexécution doit être écarté en cette matière particulièrement encadrée ; qu’une entreprise qui suspend les travaux sans mise en demeure préalable engage sa responsabilité ; que faute d’avoir mis en place la procédure de suspension de ses travaux, la société appelante ne pouvait le faire de son propre chef sans engager sa responsabilité. La cour retient que le préjudice économique doit être écarté dès lors que ni l’acte d’engagement, ni le cahier des clauses administratives particulières liant les parties n’autorisait l’entrepreneur à cesser ses travaux en cas de non-paiement, dans les délais fixés, des situations successives. La société appelante, qui a fait le choix de cesser d’exécuter le contrat, ne peut imputer à la société intimée les conséquences de ce choix. Elle ne peut prétendre qu’au paiement d’intérêts moratoires « à compter de l’assignation introductive d’instance’au taux Euribor augmenté de quatre points » (article 32 du CCAP). En l’espèce, l’assignation a été délivrée le 07 mai 2021, celle du 03 juin 2020 devant le juge des référés ayant abouti à une ordonnance aux termes de laquelle il a été dit n’y avoir lieu à référé. La capitalisation annuelle des intérêts échus sollicitée par l’appelante sera ordonnée. Rejet de l’appel incident et du préjudice d’exploitation invoqué par la société intiméeLe tribunal a rejeté cette demande dès lors qu’il ne pouvait être exclu que la perte d’exploitation liée à l’inoccupation de la chambre 210 fût en relation avec le confinement imposé lors de la crise sanitaire causée par la Covid 19. La société intimée prétend déduire de son calcul de la perte d’exploitation « les périodes Covid ». Elle souligne que la société Ambroise construction a refusé de finir un chantier pendant la période de parfait achèvement. Cette dernière relève que la chambre 210 ayant été louée comme le démontre la pièce n° 15 de l’intimée, elle n’était pas impropre à la location ; que la chute d’exploitation du mois de mars au mois de juillet 2020 n’est que la conséquence de la crise sanitaire. La cour retient que la société intimée ne pourrait en tout état de cause solliciter qu’une perte de chance d’exploitation ; qu’elle n’explicite pas le pourcentage de taux d’occupation sur lequel elle fonde ses calculs de la perte d’exploitation en pièce n° 15 ; qu’il n’est par ailleurs produit aucun justificatif d’exploitation d’une structure identique à la sienne sur la période considérée qui permettrait de vérifier que ce pourcentage doit être entériné. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande. Dépens et frais irrépétiblesLe jugement sera également confirmé en ce qu’il a condamné la société LMJ Caribbean aux dépens et à payer à la société Ambroise construction la somme de 2500€ au titre des frais irrépétibles. La société intimée supportera la charge des dépens d’appel. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Fort-de-France
RG n°
23/00116
N° RG 23/00116
N��Portalis DBWA-V-B7H-CL42
LA SARL AMBROISE CONSTRUCTION
C/
LA SAS LMJ CARIBBEAN
COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 30 JUILLET 2024
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal mixte de commerce de Fort-de-France, en date du 21 novembre 2022, enregistré sous le n° 2021/2286 ;
APPELANTE :
LA SARL AMBROISE CONSTRUCTION, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège social
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Aurélie BEL, avocat au barreau de MARTINIQUE
INTIMEE :
LA SAS LMJ CARIBBEAN, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Myriam BASSELIER-DUBOIS de la SELAS DUBOIS & ASSOCIES, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Mai 2024, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Nathalie RAMAGE, présidente de chambre, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :
Présidente : Mme Nathalie RAMAGE, présidente de chambre
Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, conseiller
Assesseur : Mme Claire DONNIZAUX, conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Micheline MAGLOIRE,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 30 juillet 2024 ;
ARRÊT : contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Le 21 avril 2017, la SAS LMJ Carribean a confié à la SARL Ambroise construction la réalisation du lot n°9 relatif au revêtement des sols et murs d’une résidence de tourisme de 35 studios et de 05 bungalows dénommée « Hôtel Diamants les Bains », pour la somme globale et forfaire de 288.090,25 euros HT.
Par acte du 07 mai 2021, la SARL Ambroise construction a assigné la SAS LMJ Carribean devant le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France aux fins d’obtenir la condamnation de celle-ci à lui verser les sommes de :
* 24.984,39 euros au titre du solde des travaux réalisés, assortis des intérêts au taux légal, outre les intérêts moratoires au taux Euribor augmenté de quatre points à compter du 03 juin 2020, assortis des intérêts au taux légal,
* 17.779,16 euros en réparation du préjudice économique subi, assortis des intérêts aux taux légal,
* 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire du 21 novembre 2022, le tribunal a :
– condamné la SAS LMJ Caribbean à payer à la SARL Ambroise construction une somme de 15.393,69 euros au titre du solde des travaux réalisés, avec intérêts moratoires au taux Euribor augmenté de quatre points à compter du 03 juin 2020,
– condamné la SAS LMJ Caribbean à payer à SARL Ambroise construction la somme 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté tout autre demande, plus ample ou contraire,
– laissé les dépens de l’instance à la charge de la SAS LMJ Caribbean, en ce compris les frais de greffe d’un montant de 62,92 euros.
Par déclaration reçue le 08 mars 2023, la société Ambroise construction a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses premières conclusions du 05 juin 2023, et dernières du 15 novembre 2023, l’appelante demande d’infirmer le jugement rendu par le tribunal mixte de commerce de Fort-de-France le 21 novembre 2022 en tant qu’il la condamne à lui payer la somme de 15 393,69 euros au titre du solde des travaux et en tant qu’il rejette le surplus des demandes ;
Statuant à nouveau,
– recevoir l’intégralité des moyens et prétentions présentées par la S.A.R.L. Ambroise construction,
– condamner la S.A.S. LMJ Caribbean à verser à la S.A.R.L. Ambroise construction :
* 24 984,39 euros au titre du solde des travaux réalisés, assortis des intérêts au taux légal,
* les intérêts moratoires au taux Euribor augmenté de quatre points à compter du 03 juin 2020, assortis des intérêts au taux légal,
* 17 779,16 euros en réparation du préjudice économique subi, assortis des intérêts au taux légal,
– condamner la S.A.S. LMJ Caribbean au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter la S.A.S. LMJ Caribbean de ses demandes incidentes,
– ordonner l’exécution provisoire,
– ordonner la capitalisation des intérêts,
– condamner la S.A.S. LMJ Caribbean aux entiers dépens.
Par conclusions du 10 juillet 2023, l’intimée demande d’infirmer la décision entreprise en ce qu’elle l’a condamnée au paiement de la somme de 15.393,69 euros et de :
– débouter Ambroise construction de toutes ses demandes,
– condamner Ambroise construction au paiement de la somme de 19.611,69 euros en réparation de ses manquements contractuels,
– condamner Ambroise construction aux entiers dépens toutes taxes comprises et au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du CPC.
La clôture de l’instruction est intervenue le 02 mai 2024.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 24 mai 2024 et la décision a été mise en délibéré au 30 juillet 2024.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées et au jugement déféré.
1/ Sur le décompte des sommes dues au principal :
Le tribunal a retenu qu’en application des dispositions de l’article 31.4.2 du cahier des clauses administratives particulières, la proposition de décompte général définitif (DGD) du 25 avril 2019 devait être interprétée comme la preuve que les réserves avaient été levées ou comme une renonciation par le maître d’ouvrage à toute réclamation relative à la levée des réserves.
Il en a déduit que la somme de 7 161€ correspondant à la facture établie par la SARL Technics construction le 28 juin 2019 n’avait pas lieu d’être déduite de la créance de la société Ambroise construction, ce d’autant que le DGD faisait mention d’une somme de 6 526,35€ au titre de travaux réalisés par une autre entreprise.
Il a fixé la créance de la société Ambroise construction à la somme de 33 984,39€ mentionnée dans son décompte, de laquelle il a déduit la somme de 9 000€ payée par la société intimée et la somme de 9 590,70€ correspondant aux pénalités, réfactions MOU et réfactions entreprises figurant dans le DGD, soit une différence de 15 393,69€.
Considérant que l’entreprise n’avait pas été en mesure de réaliser les travaux de reprise du fait de la carence du maître d’ouvrage à honorer le paiement des situations n° 8 et 9 en temps utile, il a jugé que la société Ambroise construction ne pouvait être redevable de pénalités de retard.
L’appelante soutient que le tribunal, dans son décompte, a imputé sur sa créance, à deux reprises, le montant des pénalités de retard, réfactions MOU et réfactions entreprises.
Elle affirme avoir subi un préjudice économique puisqu’elle ne saurait supporter le coût des travaux réalisés par une autre entreprise ou de pénalités de retard alors qu’elle n’a pas été en mesure d’achever les travaux du fait du non-paiement des situations par le maître d’ouvrage.
Elle évalue sa créance à la somme de 24 984,39€, outre intérêts moratoires à compter de l’assignation en référé devant le tribunal de commerce du 03 juin 2020.
Elle ajoute à cette somme celle de 17 779,16€ en réparation du préjudice économique subi.
L’intimée fait grief au tribunal d’avoir écarté les pénalités de retard motif pris du non-paiement des situations en temps et heure, alors que le défaut de paiement ne justifie pas la suspension du contrat sans avoir préalablement mis en place la procédure de suspension des travaux.
Elle fait valoir que la société Ambroise construction ayant été déboutée de ses demandes en référé, elle ne peut faire courir les intérêts moratoires au jour de l’assignation en référé.
La cour relève que tant dans le DGD que dans le décompte de la société appelante constituant sa pièce n° 8, les parties s’accordent à fixer à 274 383,95€ la somme à payer ; qu’en revanche la société Ambroise construction fait mention d’un règlement total de 255 897,85€ alors que le DGD porte les règlements intervenus à 263 067,56€ ; que la différence entre ces deux sommes, soit (263 067,56 ‘ 255 897,95) 7 169,71€ explique que la somme de 18 486,10e au titre des travaux hors RG sont l’appelante sollicite le paiement soit ramenée à 11 316,39€ à la lecture du DGD.
La société intimée ne rapportant pas la preuve du paiement de cette différence de 7 169,71€, la créance de la société appelante doit être fixée à 18 486,10€ à laquelle doit être ajoutée celle de 15 498,29€ au titre de la retenue de garantie, étant observé que la première prend en compte, en les déduisant, le montant des pénalités et réfactions, qui sont ainsi admises par les deux parties, ainsi que le pourcentage de retenue de garantie correspondant aux travaux qui n’ont pas été achevés.
De cette somme doit être soustraite celle de 9 000€ qui a été payée par la société intimée.
Le total s’élève donc à 24 984,39€.
Le tribunal a, à tort, refusé de déduire de cette somme celle de 7 161€ correspondant à la facture du 27 juin 2019 d’une société qui a réalisé des travaux de reprise après la rédaction du DGD.
En effet, le cahier des clauses administratives particulières n’énonce nullement que la présentation de ce DGD vaut renonciation à toute réclamation au titre de la levée des réserves ; seule la proposition de paiement par le maître d’ouvrage, intervenant « à la suite de la levée complète des réserves » (article 31.4.2) peut s’interpréter comme telle.
Par ailleurs, il ne pouvait imputer de la somme de 24 984,39€ le montant des pénalités et réfactions, déjà pris en compte dans le calcul de cette somme.
Au total, la créance de la société Ambroise construction au titre du solde des travaux est de 24 984,39 -7 161= 17 823,39€.
2/ Sur le préjudice économique invoqué par la société appelante :
Le tribunal a rejeté la demande d’indemnisation dudit préjudice au motif que l’existence de ce dernier n’était pas démontrée.
La société appelante soutient que la société intimée engage sa responsabilité contractuelle en raison du non-paiement des situations mensuelles depuis le 30 avril 2018 ; que cette faute lui a causé des préjudices économiques en ce qu’elle a été contrainte de payer 6 526,35€ au titre des réfactions entreprises et 11 252,81€ de pénalité de retard.
La société intimée réplique que l’argument de l’exception d’inexécution doit être écarté en cette matière particulièrement encadrée ; qu’une entreprise qui suspend les travaux sans mise en demeure préalable engage sa responsabilité ; que faute d’avoir mis en place la procédure de suspension de ses travaux, la société appelante ne pouvait le faire de son propre chef sans engager sa responsabilité.
La cour retient que le préjudice économique doit être écarté dès lors que ni l’acte d’engagement, ni le cahier des clauses administratives particulières liant les parties n’autorisait l’entrepreneur à cesser ses travaux en cas de non-paiement, dans les délais fixés, des situations successives.
La société appelante, qui a fait le choix de cesser d’exécuter le contrat, ne peut imputer à la société intimée les conséquences de ce choix.
Elle ne peut prétendre qu’au paiement d’intérêts moratoires « à compter de l’assignation introductive d’instance’au taux Euribor augmenté de quatre points » (article 32 du CCAP).
En l’espèce, l’assignation a été délivrée le 07 mai 2021, celle du 03 juin 2020 devant le juge des référés ayant abouti à une ordonnance aux termes de laquelle il a été dit n’y avoir lieu à référé.
La capitalisation annuelle des intérêts échus sollicitée par l’appelante sera ordonnée.
3/ Sur l’appel incident et le préjudice d’exploitation invoqué par la société intimée :
Le tribunal a rejeté cette demande dès lors qu’il ne pouvait être exclu que la perte d’exploitation liée à l’inoccupation de la chambre 210 fût en relation avec le confinement imposé lors de la crise sanitaire causée par la Covid 19.
La société intimée prétend déduire de son calcul de la perte d’exploitation « les périodes Covid ». Elle souligne que la société Ambroise construction a refusé de finir un chantier pendant la période de parfait achèvement.
Cette dernière relève que la chambre 210 ayant été louée comme le démontre la pièce n° 15 de l’intimée, elle n’était pas impropre à la location ; que la chute d’exploitation du mois de mars au mois de juillet 2020 n’est que la conséquence de la crise sanitaire.
La cour retient que la société intimée ne pourrait en tout état de cause solliciter qu’une perte de chance d’exploitation ; qu’elle n’explicite pas le pourcentage de taux d’occupation sur lequel elle fonde ses calculs de la perte d’exploitation en pièce n° 15 ; qu’il n’est par ailleurs produit aucun justificatif d’exploitation d’une structure identique à la sienne sur la période considérée qui permettrait de vérifier que ce pourcentage doit être entériné.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
4/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a condamné la société LMJ Caribbean aux dépens et à payer à la société Ambroise construction la somme de 2500€ au titre des frais irrépétibles.
La société intimée supportera la charge des dépens d’appel.
La cour,
Par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,
INFIRME le jugement du tribunal mixte de commerce de Fort de France du 21 novembre 2022 en ce qu’il a condamné la société LMJ Caribbean à payer à la société Ambroise construction la somme de 15 393,69€ au titre du solde des travaux réalisés, avec intérêts moratoires au taux Euribor augmenté de quatre points à compter du 03 juin 2020 et en ce qu’il a rejeté la demande de capitalisation annuelle des intérêts échus ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
CONDAMNE la société LMJ Caribbean à payer à la société Ambroise construction la somme de 17 823,39€ (dix-sept mille huit cent vingt-trois euros et trente-neuf centimes) au titre du solde des travaux réalisés, avec intérêts moratoires au taux Euribor augmenté de quatre points à compter du 07 mai 2021 ;
ORDONNE la capitalisation annuelle des intérêts échus ;
Et y ajoutant,
CONDAMNE la société LMJ Caribbean aux dépens d’appel.
Signé par Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre et Mme Micheline Magloire, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,