Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 27 août 2019, complétée par un mémoire ampliatif le 27 septembre 2019, la société Zinuru, représentée par Me B…, demande à la Cour :
1°) d’annuler la décision n° 2018-148 du 28 mars 2018 par laquelle le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a lancé un appel à candidatures pour l’exploitation de services radiophoniques par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet dans le ressort du comité territorial de l’audiovisuel (CTA) de Marseille ;
2°) d’annuler la décision du 12 juin 2019 par laquelle le CSA a rejeté ses candidatures et a autorisé l’exploitation de six services de radios dans les zones de Cannes, Marseille, Toulon, Saint-Tropez et Saint-Raphaël ;
3°) d’enjoindre au CSA de faire cesser immédiatement l’exploitation des services de radios autorisés à l’issu de l’appel à candidatures lancé le 28 mars 2018 dans le ressort du CTA de Marseille ;
4°) d’enjoindre au CSA de réexaminer ses candidatures dans un délai de trois mois à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ;
5°) de mettre à la charge du CSA le versement d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la décision du 28 mars 2018 :
– l’appel à candidatures du 28 mars 2018 ne pouvait légalement porter sur les fréquences qui avaient été attribuées à l’association Toulonnaise pour la communication -ATC qui exploitait le service » Radio Vitamine » en catégorie B dès lors que les autorisations d’émettre de cette association avaient fait l’objet d’une procédure de retrait illégale ;
Sur la décision du 12 juin 2019 :
– la décision attaquée a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière, le délai de huit mois prescrit par l’article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986 entre la date de clôture de réception des déclarations de candidatures et la délivrance des autorisations n’ayant pas été respecté par le CSA ;
En ce qui concerne la zone de Cannes :
– le CSA a commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte la diversité de sa programmation qui n’était pas représentée dans la zone et qui répondait largement aux attentes du public ;
– en attribuant les deux fréquences disponibles à deux services de radios appartenant au même groupe, le CSA a méconnu les impératifs prioritaires de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels et de la diversité des opérateurs ;
– il a méconnu l’objectif du juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d’une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d’autre part en autorisant deux radios en catégorie D et en privant ainsi les auditeurs de la zone de Cannes d’un service de radio en catégorie B diffusant des informations locales ;
– il a méconnu les 3° et 5° de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 ;
En ce qui concerne les zones de Marseille, Toulon, Saint-Raphaël et Saint-Tropez :
– le CSA a commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte la diversité de sa programmation qui n’était pas représentée dans ces zones et qui répondait largement aux attentes du public ;
– il a méconnu l’objectif du juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d’une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d’autre part dans trois zones en autorisant des radios en catégorie D et en privant ainsi les auditeurs de ces zones d’un service de radio en catégorie B diffusant des informations locales ; l’équilibre entre les différentes catégories de radios dans le ressort du CTA de Marseille est ainsi significativement modifié ;
– il a méconnu les 3° et 5° de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 décembre 2019, le Conseil supérieur de l’audiovisuel conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
– les conclusions à fin d’annulation de la décision du 28 mars 2018 lançant l’appel à candidatures sont irrecevables dès lors que cette décision présente le caractère d’une mesure préparatoire et ne constitue donc pas une décision susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir ;
– les conclusions à fin d’annulation des décisions du 12 juin 2019 autorisant l’exploitation de six services de radios dans les zones de Toulon, Marseille, Cannes, Saint-Raphaël et Saint-Tropez sont également irrecevables dès lors que ces décisions ne sont pas produites par la requérante et que cette dernière ne soulève aucun moyen au soutien de ses conclusions ;
– le moyen tiré de ce qu’il aurait commis une erreur d’appréciation en ne prenant pas en compte la diversité de la programmation du service de radio exploité par la requérante et en estimant qu’elle était déjà représentée dans les zones de Saint-Raphaël et de Saint-Tropez est inopérant dès lors que la requérante ne sollicite pas l’annulation de la décision du 12 juin 2019 en tant qu’elle a rejeté ses candidatures dans ces zones ;
– pour le même motif que celui énoncé ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance de l’objectif du juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d’une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d’autre part, soulevé à l’encontre de la décision rejetant la candidature de la requérante dans la zone de Saint-Raphaël, est inopérant ;
– les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2019, la société Oüi FM, représentée par la SCP Didier-A…, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Zinuru au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– les conclusions à fin d’annulation de la décision du 28 mars 2018 lançant l’appel à candidatures sont irrecevables dès lors que cette décision a le caractère d’une mesure préparatoire et ne constitue donc pas une décision susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir ; au surplus, aucun moyen de légalité n’a été formulé dans le délai de recours contentieux contre cette décision ;
– les conclusions à fin d’annulation des décisions du 12 juin 2019 autorisant l’exploitation de six services de radios dans les zones de Toulon, Marseille, Cannes, Saint-Raphaël et Saint-Tropez sont irrecevables en application de l’article R. 412-1 du code de justice administrative ; par voie de conséquence, les conclusions accessoires tendant à ce que soit ordonnée la cessation immédiate de l’exploitation des fréquences en cause sont irrecevables ;
– aucun moyen de légalité externe ou interne n’ayant été soulevé à l’encontre de la décision du CSA l’autorisant à émettre dans la zone de Cannes, cette décision ne saurait être annulée ;
– en tout état de cause, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2019, la société Latina France, représentée par la SCP Didier-A…, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Zinuru au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– les conclusions à fin d’annulation de la décision du 28 mars 2018 lançant l’appel à candidatures sont irrecevables dès lors que cette décision a le caractère d’une mesure préparatoire et ne constitue donc pas une décision susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir ; au surplus, aucun moyen de légalité n’a été formulé dans le délai de recours contentieux contre cette décision ;
– les conclusions à fin d’annulation des décisions du 12 juin 2019 autorisant l’exploitation de six services de radios dans les zones de Toulon, Marseille, Cannes, Saint-Raphaël et Saint-Tropez sont irrecevables en application de l’article R. 412-1 du code de justice administrative ; par voie de conséquence, les conclusions accessoires tendant à ce que soit ordonnée la cessation immédiate de l’exploitation des fréquences en cause sont irrecevables ;
– aucun moyen de légalité externe ou interne n’ayant été soulevé à l’encontre de la décision du CSA l’autorisant à émettre dans la zone de Cannes, cette décision ne saurait être annulée ;
– en tout état de cause, les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés ; en outre, la radio Latina ayant été autorisée à Nice sur la fréquence 96,6 MHz, autorisation que la société Zinuru n’a pas contestée, seule cette radio pouvait être autorisée sur la fréquence 96,8 MHz à Cannes qui était en contrainte de programme avec la fréquence 96,6 MHz de la zone de Nice.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
– le code de justice administrative ;
– l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme C…,
– les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
– les observations de Me A… pour les sociétés Latina France et Oüi FM.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision n° 2018-148 du 28 mars 2018, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a lancé un appel à candidatures pour l’exploitation de services radiophoniques par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet dans le ressort du comité territorial de l’audiovisuel (CTA) de Marseille. La société Zinuru a présenté sa candidature pour la diffusion d’un service de radio de catégorie B dénommé » Vita FM » dans les zones de Cannes, Marseille, Toulon, Saint-Tropez et Saint-Raphaël. Par des décisions du 12 juin 2019, le CSA a autorisé les services de radio » Latina » et » Ouï FM » dans la zone de Cannes, les services » Sud Radio » et » Maritima Radio » dans la zone de Marseille, le service de radio dénommé TSF Jazz dans les zones de Toulon et de Saint-Raphaël et le service de radio » Kiss FM » dans la zone de Saint-Tropez. Par une décision du même jour, il a rejeté les candidatures de la société Zinuru présentées dans ces mêmes zones. Par la présente requête, la société Zinuru demande à la Cour d’annuler la décision du 28 mars 2018 ainsi que la décision du 12 juin 2019 rejetant ses candidatures dans les zones de Cannes, Marseille, Toulon, Saint-Raphaël et Saint-Tropez.
Sur la recevabilité des conclusions à fin d’annulation de la décision n° 2018-148 du 28 mars 2018 :
2. La décision n° 2018-148 du 28 mars 2018 par laquelle le CSA a lancé un appel à candidatures pour l’exploitation de services radiophoniques par voie hertzienne terrestre en modulation de fréquence à temps complet dans le ressort du CTA de Marseille présente le caractère d’une mesure préparatoire et ne constitue pas une décision faisant grief. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le CSA et les sociétés Oüi FM et Latina France tirée de l’irrecevabilité des conclusions dirigées contre la décision du 28 mars 2018 doit être accueillie.
Sur les conclusions à fin d’annulation de la décision du 12 juin 2019 rejetant les candidatures de la société Zinuru dans les zones de Cannes, Marseille, Toulon, Saint-Raphaël et Saint-Tropez :
En ce qui concerne la légalité externe :
3. Aux termes du I de l’article 28-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : » La durée des autorisations délivrées en application des articles 29, 29-1, 30, 30-1 et 30-2 ne peut excéder dix ans. Toutefois, pour les services de radio en mode analogique, elle ne peut excéder cinq ans. Ces autorisations sont délivrées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel dans un délai de huit mois à compter de la date de clôture de réception des déclarations de candidatures des éditeurs ou des distributeurs de services. (…) « .
4. Les dispositions précitées de l’article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui prescrivent au CSA de délivrer les autorisations d’émettre dans un délai de huit mois à compter de la date de clôture de l’appel aux candidatures ont été introduites par l’article 42 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 afin de transposer en droit interne l’article 7-4 de la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques, qui a prévu un tel délai afin de favoriser un usage plus efficace de la ressource radioélectrique en évitant que des fréquences attribuables soient gelées pendant des durées excessives. Il ne résulte ni des dispositions de la directive, ni des dispositions législatives qui les ont transposées, que le dépassement du délai de huit mois entraîne la caducité de la procédure de sélection, laquelle aurait pour conséquence de retarder encore plus l’attribution des fréquences. Il en résulte que le moyen tiré de ce que le dépassement du délai de huit mois prévu par les dispositions précitées entacherait d’illégalité la décision en litige doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne :
5. Aux termes de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le CSA » accorde les autorisations en appréciant l’intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d’éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence. Il tient également compte : 1° De l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication ; 2° Du financement et des perspectives d’exploitation du service notamment en fonction des possibilités de partage des ressources publicitaires entre les entreprises de presse écrite et les services de communication audiovisuelle ; 3° Des participations, directes ou indirectes, détenues par le candidat dans le capital d’une ou plusieurs régies publicitaires ou dans le capital d’une ou plusieurs entreprises éditrices de publications de presse ; 4° Pour les services dont les programmes comportent des émissions d’information politique et générale, des dispositions envisagées en vue de garantir le caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion, l’honnêteté de l’information et son indépendance à l’égard des intérêts économiques des actionnaires, en particulier lorsque ceux-ci sont titulaires de marchés publics ou de délégations de service public ; 5° De la contribution à la production de programmes réalisés localement ; 6° Pour les services dont les programmes musicaux constituent une proportion importante de la programmation, des dispositions envisagées en faveur de la diversité musicale au regard, notamment, de la variété des oeuvres, des interprètes, des nouveaux talents programmés et de leurs conditions de programmation ; 7° S’il s’agit de la délivrance d’une nouvelle autorisation après que l’autorisation précédente est arrivée à son terme, du respect des principes mentionnés au troisième alinéa de l’article 3-1. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel veille, sur l’ensemble du territoire, à ce qu’une part suffisante des ressources en fréquences soit attribuée aux services édités par une association et accomplissant une mission de communication sociale de proximité, entendue comme le fait de favoriser les échanges entre les groupes sociaux et culturels, l’expression des différents courants socioculturels, le soutien au développement local, la protection de l’environnement ou la lutte contre l’exclusion. Le conseil veille également au juste équilibre entre les réseaux nationaux de radiodiffusion, d’une part, et les services locaux, régionaux et thématiques indépendants, d’autre part. Il s’assure que le public bénéficie de services dont les programmes contribuent à l’information politique et générale. En zone de montagne, il est tenu compte des contraintes géographiques pour faciliter l’attribution d’iso-fréquences et permettre aux services de radios de surmonter ces difficultés « .
6. Par deux communiqués n° 34 du 29 août 1989 et n° 281 du 10 novembre 1994, le CSA, faisant usage de la compétence qui lui a été ainsi conférée, a déterminé cinq catégories de services en vue de l’appel à candidature pour l’exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre. Ces cinq catégories sont ainsi définies : services associatifs éligibles au fonds de soutien, mentionnés à l’article 80 (catégorie A), services locaux ou régionaux indépendants ne diffusant pas de programme national identifié (catégorie B), services locaux ou régionaux diffusant le programme d’un réseau thématique à vocation nationale (catégorie C), services thématiques à vocation nationale (catégorie D), et services généralistes à vocation nationale (catégorie E).
S’agissant des moyens tirés de la méconnaissance des 3° et 5° de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986, communs aux cinq zones :
7. La société Zinuru n’assortit pas les moyens tirés de ce que la décision attaquée méconnaît les 3° et 5° de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 des précisions suffisantes permettant d’en apprécier leur bien-fondé. Par suite, ces moyens ne peuvent qu’être écartés.
S’agissant de la zone de Cannes :
8. En premier lieu, il est constant que la programmation musicale du service » Vita FM » exploité par la société Zinuru était composée de dance-électro et de groove-rap. Il ressort des pièces du dossier que ces genres musicaux étaient déjà représentés dans la zone de Cannes par » Fun Radio » et en partie par » Skyrock « , » Mouv’ » et » Virgin Radio Côte d’Azur « . Dans ces conditions, le CSA n’a pas commis d’erreur d’appréciation en autorisant les services de radio » Latina » et » Oüi FM » dont les programmations musicales respectivement consacrées aux musiques latines et au rock sous toutes ses formes étaient plus originales et s’avéraient ainsi susceptibles de mieux compléter l’offre musicale de la zone de Cannes et de contribuer davantage à l’objectif de pluralisme des courants d’expression socio-culturels fixé par le législateur que la radio » Vita FM « .
9. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier qu’avant l’appel à candidatures, il existait dans la zone de Cannes neuf services radiophoniques présentant un intérêt local et régional répartis pour deux d’entre eux en catégorie A, trois en catégorie B et quatre en catégorie C et huit services radiophoniques à vocation nationale dont cinq en catégorie D et trois en catégorie E. A la suite de l’appel à candidatures, les deux autorisations accordées aux services » Latina » et » Oüi FM » en catégorie D par le CSA conduisent à ce qu’il y ait dix services radiophoniques à vocation nationale. Par suite, le CSA n’a pas méconnu les dispositions de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986, qui lui prescrivent de veiller à un juste équilibre entre réseaux nationaux et services locaux, régionaux et thématiques indépendants.
10. En troisième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que les radios » Latina » et » Oüi FM » appartiennent au groupe 1981 qui ne disposait d’aucun service dans la zone de Cannes avant l’appel à candidatures. A l’issue de ce dernier, les groupes NRJ et RTL disposaient chacun de trois fréquences dans la zone de Cannes, les groupes Lagardère, NextRadio TV et comme il vient être dit le groupe 1981 de deux fréquences chacun, les groupes Orbus et Nova Press d’une fréquence. Par ailleurs, au niveau du ressort du CTA de Marseille, les groupes NRJ, RTL et Lagardère notamment disposaient respectivement de 114, 93 et 78 fréquences alors que le groupe 1981 n’en disposait que de 4 et que 231 services de radios n’appartenaient à aucun groupe. Dans ces conditions, en retenant les candidatures des services de radio » Latina » et » Oüi FM » qui appartiennent au même groupe, le CSA n’a pas méconnu l’impératif prioritaire de diversification des opérateurs.
S’agissant de la zone de Marseille :
11. Il ressort des pièces du dossier que les genres musicaux proposés par la radio » Vita FM « , la dance-électro et le groove-rap, étaient déjà représentés dans la zone de Marseille par » Fun Radio Provence » et en partie par » Skyrock Sud « , » Mouv’ » et » Radio FG « . Il s’ensuit que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que le CSA a commis une erreur d’appréciation en estimant que la programmation musicale du service » Vita FM » était déjà représentée dans la zone.
S’agissant de la zone de Toulon :
12. Il ressort des pièces du dossier que la programmation musicale du service de radio » Vita FM » était déjà représentée dans la zone de Toulon par » Fun Radio » et en partie par » Skyrock « . Le CSA pouvait ainsi, sans commettre d’erreur d’appréciation, autoriser le service de radio » TSF Jazz » dont la programmation musicale entièrement dédiée au jazz était plus originale et permettait de compléter et diversifier l’offre musicale dans la zone et de répondre ainsi à l’impératif de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socioculturels. Par ailleurs, avant l’appel à candidatures, il existait dans la zone de Toulon sept services radiophoniques présentant un intérêt local et régional répartis pour deux d’entre eux en catégorie A, deux en catégorie B et trois en catégorie C et quatorze services radiophoniques à vocation nationale dont onze en catégorie D et trois en catégorie E. A la suite de l’appel à candidatures, l’autorisation accordée au service » TSF Jazz » en catégorie D par le CSA conduit à ce qu’il y ait quinze services radiophoniques à vocation nationale. Le CSA, alors même qu’il n’a attribué aucune fréquence dans la catégorie B, déjà représentée par deux services, n’a pas fait ainsi une inexacte application de l’ensemble des critères énoncés à l’article 29 qu’il lui appartient de concilier, parmi lesquels figure celui du juste équilibre entre les réseaux nationaux d’une part et les services locaux, régionaux, thématiques et indépendants d’autre part.
S’agissant de la zone de Saint-Raphaël :
13. Il ressort des pièces du dossier que les services de radio » Fun Radio Côte d’Azur » et » Skyrock » présents dans la zone de Saint-Raphaël avant l’appel à candidatures diffusaient pour tout ou partie les genres musicaux proposés par la radio » Vita FM « . Dans ces conditions, le CSA n’a pas commis d’erreur d’appréciation en autorisant le service de radio » TSF Jazz » dont la programmation musicale entièrement dédiée au jazz était plus originale et permettait de compléter et diversifier l’offre musicale dans la zone et de répondre ainsi à l’impératif de sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socioculturels. Par ailleurs, avant l’appel à candidatures, il existait dans la zone de Saint-Raphaël six services radiophoniques présentant un intérêt local et régional répartis pour deux d’entre eux en catégorie A, un en catégorie B et trois en catégorie C et sept services radiophoniques à vocation nationale dont quatre en catégorie D et trois en catégorie E. A la suite de l’appel à candidatures, l’autorisation accordée au service » TSF Jazz » en catégorie D par le CSA conduit à ce qu’il y ait huit services radiophoniques à vocation nationale. Le CSA, alors même qu’il n’a attribué aucune fréquence dans la catégorie B, représentée par un seul service, n’a pas fait ainsi une inexacte application de l’ensemble des critères énoncés à l’article 29 qu’il lui appartient de concilier, parmi lesquels figure celui du juste équilibre entre les réseaux nationaux d’une part et les services locaux, régionaux, thématiques et indépendants d’autre part.
S’agissant de la zone de Saint-Tropez :
14. La société requérante ne peut utilement soutenir que le CSA aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que la programmation musicale du service » Vita FM » était déjà représentée dans la zone de Saint-Tropez dès lors qu’il ressort des termes de la décision attaquée que le CSA ne s’est pas fondé sur ce motif pour rejeter sa candidature. Par suite, ce moyen ne peut qu’être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la société Zinuru n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision du CSA du 12 juin 2019 rejetant ses candidatures à fin d’exploiter le service de radio en catégorie B dénommé » Vita FM » dans les zones de Cannes, Toulon, Marseille, Saint-Raphaël et Saint-Tropez.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
16. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par la société Zinuru, n’appelle aucune mesure d’exécution. Par suite, ses conclusions à fin d’injonction ne peuvent qu’être rejetées.
Sur les frais liés à l’instance :
17. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CSA qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Zinuru demande au titre des frais liés à l’instance. En revanche, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Zinuru le paiement, d’une part, à la société Oüi FM de la somme de 1 500 euros et, d’autre part, à la société Latina France de la somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Zinuru est rejetée.
Article 2 : La société Zinuru versera, d’une part, à la société Oüi FM une somme de 1 500 euros et, d’autre part, à la société Latina France une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Zinuru, à la société Oüi FM, à la société Latina France, à la société KFM, à la société TSF Jazz, à la société Sud Radio, à la SEML Maritima Médias et au Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Délibéré après l’audience du 8 juin 2020, à laquelle siégeaient :
– M. Luben, président,
– Mme Collet, premier conseiller,
– Mme C…, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2020.
Le président de la formation de jugement,
I. LUBEN
La République mande et ordonne au ministre de la culture en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
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N° 19PA02820