CAA de NANTES, 1ère chambre, 01/02/2018, 16NT01165, Inédit au recueil Lebon

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CAA de NANTES, 1ère chambre, 01/02/2018, 16NT01165, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ker Hold a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, enfin, de l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts au titre des années 2008 et 2009.

Par un jugement nos 1400075 et 1403961 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 avril 2016 et 25 avril 2017, MeA…, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société, représenté par Me Lefeuvre, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, enfin, de l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts au titre des années 2008 et 2009.

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros au titre de l’article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

– le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu’il ne répond pas aux arguments soulevés par la société en ce qui concerne le rejet de la comptabilité, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée ainsi que l’abandon de créances consenti à la société LP Immobilier ; les premiers juges n’ont pas indiqué le montant des droits omis en ce qui concerne la majoration pour manquement délibéré, ne précisent pas les deux critères pour caractériser le manquement délibéré de la société Ker Hold s’agissant de la rectification en matière d’impôt sur les sociétés consécutive au contrôle fiscal de la société Ker Ta, ni les éléments démontrant la volonté de la société d’égarer l’administration fiscale s’agissant de la majoration pour manoeuvres frauduleuses appliquée à la rectification en matière d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée consécutives à la vérification de comptabilité de la société Ker Hold ; le tribunal administratif considère que le rejet de la comptabilité permet de considérer que la réponse est équivalente à une absence de réponse et qu’il la met ainsi dans une situation telle que sa réponse sera toujours assimilée à un défaut de réponse ; le tribunal accepte de valoriser un parking en ne tenant compte que d’un seul terme de comparaison ;

– l’administration n’a pas diligenté une vérification de comptabilité à son encontre pour les rectifications résultant du contrôle de la société Ker Ta alors qu’il y avait un tel contrôle en cours et l’a privée des garanties attachées à la procédure de vérification de comptabilité, et notamment celles liées à l’avis de vérification de comptabilité et au débat oral et contradictoire ;

– la comptabilité a été rejetée à tort ;

– l’administration ne pouvait considérer qu’elle a minoré sa taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre des exercices clos en 2008 et 2009 dès lors qu’elle a indiqué que cette taxe avait été régularisée ;

– elle justifie de l’abandon de créances consenti à la société LP Immobilier au titre des exercices clos en 2008 et 2009 pour les montants respectifs de 305 000 euros et 250 000 euros ;

– l’écriture d’opérations diverses constatant le transfert de la dette d’un montant de 774 182,48 euros, inscrite au débit du compte-courant d’associé de M. B…dans les comptes de la société Ker Hold au 31 décembre 2008, à la société Ker Ta ne peut être considérée comme fictive ;

– l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts n’est pas justifiée ; l’avis de mise en recouvrement méconnaît les dispositions de l’article R. 256-1 du livre des procédures fiscales en ce qu’il se limite à mentionner  » amende  » et un montant sans indiquer la nature juridique de l’amende appliquée ;

– les majorations pour manquement délibéré et pour manoeuvres frauduleuses ne sont pas justifiées ;

– l’administration n’apporte pas la preuve d’une libéralité consentie par M. et Mme B…à la société Ker Hold lors de la vente de leurs parts sociales dans la société Ker Ta ; le service a retenu une valorisation hors de proportion avec la valeur réelle des parts sociales.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 11 août 2016 et 24 mai 2017, le ministre chargé des finances conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement accordé en cours d’instance en ce qui concerne l’amende visée à l’article 1759 du code général des impôts et les intérêts de retard, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il fait valoir que :

– la liquidation judiciaire de la SARL Ker Hold ayant été prononcée le 16 mars 2015 par le tribunal de commerce de Rennes, l’amende visée par l’article 1759 du code général des impôts et les intérêts de retard ont fait l’objet d’une remise ;

– les autres moyens soulevés par Me A…ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code civil ;

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Chollet,

– les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

– et les observations de Me Lefeuvre, avocat.

1. Considérant que la société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Ker Hold, dont le capital est détenu en totalité par M. et MmeB…, exerce une activité de holding et détient depuis sa création en 2007 la quasi-totalité du capital des sociétés LP Immobilier, Acvi et ABC voyages ; qu’elle a acquis 98 % des parts sociales de la société civile immobilière (SCI) Ker Ta le 31 décembre 2009, détenues alors par M. et MmeB… ; qu’à la suite des opérations de contrôle de la SCI Ker TA, la société Ker Hold a fait l’objet d’un contrôle sur pièces à l’issue duquel l’administration a estimé que la cession de parts sociales de la SCI Ker TA s’est effectuée à un prix minoré ; que la société Ker Hold a, par ailleurs, fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur la période du 27 décembre 2007 au 31 décembre 2009 ; que MeA…, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ker Hold, relève appel du jugement du 3 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2009, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, enfin, la décharge de l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts au titre des années 2008 et 2009 ;

Sur l’étendue du litige :

2. Considérant que, par une décision du 22 juillet 2016, postérieure à l’introduction de la requête, l’administration a prononcé le dégrèvement des sommes de 18 497 euros au titre des intérêts de retard et de 575 000 euros au titre de l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ; que, dès lors, il n’y a plus lieu d’y statuer ;

Sur les rectifications en matière d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée consécutives à la vérification de comptabilité de la société Ker Hold :

En ce qui concerne le supplément d’impôt sur les sociétés :

3. Considérant qu’aux termes de l’article 1289 du code civil, alors en vigueur :  » Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l’une envers l’autre, il s’opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes, de la manière et dans les cas ci-après exprimés  » ; que selon l’article 1290 du même code, alors en vigueur :  » La compensation s’opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l’insu des débiteurs ; les deux dettes s’éteignent réciproquement, à l’instant où elles se trouvent exister à la fois, jusqu’à concurrence de leurs quotités respectives  » ; qu’aux termes, enfin, de l’article 1291 du même code :  » La compensation n’a lieu qu’entre deux dettes qui ont également pour objet une somme d’argent (…) et qui sont également liquides et exigibles. (…)  » ; qu’il résulte de ces dispositions, selon une jurisprudence établie de la Cour de cassation, que la compensation s’opère de plein droit dès lors qu’elle est invoquée par une personne créancière de son débiteur, lorsque les dettes réciproques sont certaines, liquides et exigibles ;

4. Considérant que, pour remettre en cause le caractère régulier et probant de la comptabilité de la société Ker Hold au titre des exercices clos en 2008 et 2009, l’administration a constaté que la société Ker Hold a procédé à de nombreuses écritures de compensation inscrites dans le compte 455100 LP Immobilier figurant dans les comptes de la société Ker Hold, ces sommes provenant de comptes-courants et de comptes  » débiteurs  » de diverses sociétés du groupe et du compte-courant de M. B…et que, par ces compensations qui sont interdites tant par l’article L. 123-19 du code de commerce que par le plan comptable général, la société Ker Hold a transféré des dettes et créances que ces personnes morales ont contractées antérieurement entre elles, sans que soient produites des conventions de cessions de créances exigées dans un tel cas par l’article 1690 du code civil ; que l’administration a également constaté, s’agissant de l’exercice clos en 2008, que l’abandon de créances consenti à la société LP Immobilier a fait l’objet d’une convention signée entre les parties le 22 décembre 2008 alors que cet abandon n’a été constaté en comptabilité que le 31 décembre 2008, en même temps que les écritures de compensation ci-dessus exposées faisant apparaître une créance de la société Ker Hold sur la société LP Immobilier ; que l’administration en a conclu que la comptabilité présentée ne retrace pas fidèlement les opérations affectant son actif et son passif et concourant au résultat de la société et qu’elle inclut dans ses charges des dépenses non justifiées ; que Me A…soutient que les écritures comptables remises en cause concernent des créances et des dettes réciproques entre la société et des tiers, qui ont été payées par le mécanisme de la compensation légale et ne procèdent que d’un reclassement de créances et de dettes détenues entre les différentes sociétés du groupe, dans le but de neutraliser les créances et les dettes réciproques des sociétés concernées ; que, toutefois, le requérant ne justifie ni qu’existaient des créances et des dettes entre plusieurs sociétés du groupe ni que les conditions de la compensation légale étaient remplies ; qu’ainsi, eu égard au nombre des écritures passées, à l’importance des montants en cause et à l’absence de justification des flux financiers ainsi comptabilisés, l’administration apporte la preuve des graves irrégularités entachant la comptabilité des deux exercices en cause et du caractère non probant de cette dernière ;

S’agissant des abandons de créance consentis à la société LP Immobilier :

5. Considérant qu’en vertu des dispositions combinées des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l’impôt sur les sociétés en vertu de l’article 209 du même code, le bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d’un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d’une gestion commerciale normale, sauf s’il apparaît qu’en consentant de tels avantages, l’entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s’il appartient à l’administration d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu’un abandon de créances ou d’intérêts consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n’est pas en mesure de justifier qu’elle a bénéficié en retour de contreparties ;

6. Considérant qu’aux termes de la proposition de rectification du 19 juillet 2011, le vérificateur a réintégré dans les résultats des exercices clos les 31 décembre 2008 et 31 décembre 2009 des charges exceptionnelles s’élevant respectivement à 242 087 euros et à 169 080 euros, correspondant à des abandons de créances s’établissant respectivement à 305 000 euros et 250 000 euros et consentis, par deux conventions datées des 22 novembre 2008 et 31 décembre 2009, à la société LP Immobilier, au motif que ces abandons de créance constituaient un acte anormal de gestion ; que l’administration précise en outre que les dettes de la société LP Immobilier résultaient d’écritures de compensation transférant à la société Ker Hold les créances et dettes que détenaient M. B…et d’autres sociétés du groupe entre elles sans qu’aucune justification de ces compensations soit apportée par la société Ker Hold et, en outre, sans établir l’existence de flux financiers ;

7. Considérant que, pour justifier les abandons de créances consentis à la société LP Immobilier, Me A…invoque l’existence de deux conventions du 22 novembre 2008 et 31 décembre 2009 qui faisaient état de difficultés financières de la société LP Immobilier, filiale de la société Ker Hold ; que, toutefois, il résulte de l’instruction, d’une part, que les dettes de la société LP Immobilier justifiant ces abandons de créances résultent d’écritures de compensation transférant à la société Ker Hold les créances et dettes que détenaient M. B…et d’autres sociétés du groupe entre elles sans qu’aucune justification de ces compensations ne soit apportée par la société Ker Hold ; que, d’autre part, l’administration fait valoir, sans être sérieusement contestée, que la société Ker Hold, qui connaissait la situation financière de la société LP Immobilier puisque son gérant, M.B…, a accordé un abandon de créance, d’un montant de 305 000 euros, à la société LP Immobilier au titre de l’exercice clos en 2007, a entendu supporter la charge liée aux abandons de créance alors qu’elle était étrangère aux avances financières accordées à cette société par M. B…et d’autres sociétés concernées par les écritures de compensation ; que la société Ker Hold n’établit pas l’impossibilité pour les propres créanciers de la société LP Immobilier de renoncer au recouvrement de leurs créances dans leur propre intérêt ; qu’ainsi, Me A…n’ayant pas établi que les abandons de créances auraient été consentis par la société Ker Hold dans son intérêt, et en l’absence de tout lien commercial allégué entre la société mère et une filiale, l’administration a pu à bon droit les regarder comme relevant d’une gestion anormale et en réintégrer les montants dans les résultats de la société Ker Hold ;

S’agissant de la somme portée au crédit du compte courant détenu par M. B…dans la société Ker Hold :

8. Considérant que l’administration a remis en cause comme fictive l’écriture d’opérations diverses de la société Ker Hold créditant, le 31 décembre 2008, le compte-courant de son gérant et associé M. B…d’une somme de 774 182,48 euros par le débit du compte  » débiteurs divers  » de la SCI Ker Ta, traduisant ainsi un transfert de la dette personnelle de M. B… à l’égard de la société Ker Hold vers la SCI Ker Ta et ayant pour conséquence d’annuler le solde débiteur du compte courant de M. B…qui s’élevait au montant de la somme transférée ;

9. Considérant que MeA…, à qui il appartient de justifier des écritures portant sur les comptes de tiers, soutient qu’en contrepartie de cette écriture, M. B…est devenu débiteur de la société Ker Ta dans des proportions identiques et qu’une partie de cette dette a été remboursée à la clôture de l’exercice 2010, tant s’agissant de la dette de la société Ker Ta envers la société Ker Hold que de celle de M. B…envers la société Ker Ta ; que, toutefois, en dépit du caractère symétrique des écritures comptables, il n’apporte aucun élément probant à l’appui de ses allégations, faute de justifier, en l’absence des formalités prescrites par l’article 1690 du code civil et de tout autre élément probant, que les écritures en cause caractérisent seulement un transfert de dette ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration a réintégré la somme de 774 182,48 euros dans les résultats imposables de la société Ker Hold ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée :

10. Considérant que l’administration a procédé au rapprochement entre les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée collectée de la société Ker Hold et les montants de taxe sur la valeur ajoutée collectée enregistrés en comptabilité et a constaté une insuffisance de déclaration, donnant lieu à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée collectée de 4 649 euros au titre de l’année 2008 et de 13 064 euros au titre de l’année 2009 ; que, ce faisant, elle s’est basée sur les encaissements effectivement réalisés par la société conformément aux dispositions du c de l’article 269-2 du code général des impôts ; que MeA…, qui ne conteste pas l’insuffisance de déclaration, se borne à faire état d’une régularisation spontanée de cette taxe en janvier 2010 ; que, toutefois, la circonstance, à la supposer établie, que la société Ker Hold aurait régularisé ultérieurement cette insuffisance est sans incidence sur ce redressement ;

En ce qui concerne les pénalités :

11. Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts :  » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (…) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (…)  » ;

12. Considérant, d’une part, qu’en faisant valoir que la société Ker Hold avait inscrit dans sa comptabilité, au passif de son bilan, au titre de chacun des exercices vérifiés, une taxe sur la valeur ajoutée à régulariser égale aux rappels en litige et avait ainsi pleinement conscience de la dette constatée à l’égard du Trésor à la clôture de la période vérifiée, l’administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l’existence d’un manquement délibéré justifiant la pénalité au taux de 40 % infligée sur le fondement de l’article 1729 du code général des impôts ; que, dès lors, Me A…n’est pas fondé à demander la décharge de cette pénalité ;

13. Considérant, d’autre part, que la majoration pour manoeuvres frauduleuses n’a pas fait l’objet d’une mise en recouvrement ; que, par suite, les conclusions de Me A…tendant à leur décharge ne peuvent être accueillies ;

Sur la rectification en matière d’impôt sur les sociétés consécutive au contrôle sur pièces de la SCI Ker Ta :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d’imposition :

14. Considérant que Me A…soutient que l’administration n’a pas diligenté une vérification de comptabilité à l’encontre de la société Ker Hold en ce qui concerne la rectification résultant du contrôle de la SCI Ker Ta, alors qu’il y avait parallèlement un tel contrôle en cours, et l’a privée ainsi des garanties attachées à la procédure de vérification de comptabilité et notamment celles liées à l’avis de vérification de comptabilité et au débat oral et contradictoire ; que, toutefois, il résulte de l’instruction que ce sont les éléments recueillis lors du contrôle sur pièces de la SCI Ker Ta et auprès d’établissements financiers qui ont conduit au contrôle sur pièces de la société Ker Hold ; que le supplément d’impôt sur les sociétés notifié dans le cadre de ce contrôle résulte ainsi exclusivement de la remise en cause du prix des parts sociales acquises par la société Ker Hold auprès de la SCI Ker Ta en tant qu’il a été sous-évalué, révélant une libéralité accordée au cessionnaire, et ne procède pas du rehaussement du résultat de la SCI Ker Ta, résultat taxable entre les mains de ses associés au prorata de leurs parts en application des dispositions de l’article 8 du code général des impôts relatif au régime d’imposition des personnes ; que la société Ker Hold a ainsi fait l’objet, au terme de ce contrôle, d’une procédure de rectification contradictoire, en application de l’article L. 55 du livre des procédures fiscales, au cours de laquelle elle a pu contester les rectifications proposées par l’administration par courrier du 9 septembre 2011 et apporter tous les éléments justificatifs qui lui paraissaient nécessaires et n’a été privée d’aucune garantie ; qu’il n’est pas établi ni même allégué que l’administration aurait examiné la comptabilité de la société Ker Hold ; que Me A…n’est donc pas fondé à soutenir que l’administration était tenue d’engager une vérification de comptabilité et de lui notifier un avis de vérification ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l’imposition :

15. Considérant qu’aux termes du 2 de l’article 38 du code général des impôts :  » Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt, diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés (…)  » ; qu’aux termes de l’article 38 quinquies de l’annexe III au même code :  » Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d’origine. / Cette valeur d’origine s’entend : / a. Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l’entreprise, du coût d’acquisition (…) / (…) / b. Pour les immobilisations acquises à titre gratuit, de la valeur vénale / (…)  » ; qu’il résulte de ces dernières dispositions que, dans le cas où le prix de l’acquisition d’une immobilisation a été volontairement minoré par les parties pour dissimuler une libéralité faite par le vendeur à l’acquéreur, l’administration est fondée à corriger la valeur d’origine de l’immobilisation, comptabilisée par l’entreprise acquéreuse pour son prix d’acquisition, pour y substituer sa valeur vénale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l’acquisition faite à titre gratuit ;

16. Considérant que l’administration a rehaussé le résultat de la société Ker Hold à hauteur de la somme de 650 700 euros, qui constitue selon elle un avantage consenti lors de la cession par M. et Mme B…le 31 décembre 2009, à son profit, des quatre vingt dix huit parts de la société Ker Ta au prix de 67 620 euros au lieu de leur valeur vénale de 718 320 euros ; qu’il résulte de l’instruction que pour effectuer son évaluation du montant des parts sociales de la société Ker Ta, l’administration a ajouté à la valeur de son patrimoine immobilier, à savoir un local à St-Brieuc et trois parkings à Rennes, le montant de ses disponibilités et déduit ses dettes ; qu’en se bornant à alléguer qu’il convient de  » s’interroger sur la pertinence de retenir le produit net des ventes intervenues en 2008 et 2009 dans la valeur des parts de la société  » et que  » l’incorporation de ces produits ne répond qu’à la volonté du service de rechercher une valorisation indue, hors de proportion avec la valeur réelle des parts sociales « , Me A…ne justifie pas que le prix ainsi fixé par l’administration serait erroné ; qu’ainsi, compte tenu de l’écart significatif entre la valeur vénale, telle que retenue par l’administration, et le prix d’acquisition de ces titres ainsi que de la communauté d’intérêts manifeste entre les vendeurs, M. et Mme B…et l’acquéreur, la société Ker Hold, dont les actionnaires sont également M. et MmeB…, la cession des parts sociales de la société Ker Ta doit être regardée comme une libéralité volontairement consentie traduisant une augmentation de l’actif net de la société Ker Hold ; que, dès lors, la société Ker Hold est imposable à raison de la somme de 650 700 euros au titre de l’exercice clos en 2009 ;

En ce qui concerne les pénalités :

17. Considérant qu’en faisant valoir l’existence d’une minoration délibérée du prix d’acquisition des parts sociales de la société Ker Ta et les circonstances que M. et Mme B…étaient à la fois cédants des parts et associés dans la société acquéreur et ne pouvaient ignorer l’évaluation retenue pour la détermination du prix de cession, que la valeur déclarée a permis aux parties d’éluder une partie importante de l’impôt dû au titre de cette cession, et que le fait pour M. B…de vendre pour un prix anormalement bas les parts de la société Ker Ta constitue une libéralité consentie par le cédant à l’acquéreur dont l’inscription en comptabilité a été omise, l’administration apporte la preuve, qui lui incombe, de l’existence d’un manquement délibéré justifiant la pénalité au taux de 40 % infligée sur le fondement de l’article 1729 du code général des impôts ; que, dès lors, Me A…n’est pas fondé à demander la décharge de cette pénalité ;

18. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que MeA…, agissant en qualité de liquidateur judiciaire, n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé et dépourvu d’omission à statuer, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de la société Ker Hold ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement des sommes de 18 497 euros au titre des intérêts de retard et de 575 000 euros au titre de l’amende infligée sur le fondement de l’article 1759 du code général des impôts.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Me A…est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A…et au ministre de l’action et des comptes publics.

Délibéré après l’audience du 18 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

– M. Bataille, président de chambre,

– M. Geffray, président-assesseur,

– Mme Chollet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er février 2018.

Le rapporteur,

L. CholletLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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No16NT01165


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