CAA de NANCY, 2ème chambre – formation à 3, 23/07/2015, 14NC01205, Inédit au recueil Lebon

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CAA de NANCY, 2ème chambre – formation à 3, 23/07/2015, 14NC01205, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Guidi, premier conseiller,

– et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public.

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant que, contrairement à ce qu’elle soutient, il ne ressort pas de ses écritures de première instance que Mme D…ait soulevé devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le moyen tiré de ce que l’administration n’a pas fait droit à une demande de communication de documents en provenance de tiers qu’elle aurait formulée en son nom propre sur le fondement de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales ; que, par suite, Mme D…n’est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait omis de répondre à un moyen qui n’était pas inopérant ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales :  » L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…)  » et qu’aux termes de l’article R. 57-1 du même livre :  » La proposition de rectification prévue par l’article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L’administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition  » ; qu’il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l’impôt concerné, de l’année et de la base d’imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l’administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations ; qu’en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ; qu’en outre, lorsque l’administration informe un contribuable qu’elle envisage de réintégrer dans son revenu imposable une somme correspondant à des loyers regardés comme excessifs, au motif qu’ils excédent la valeur locative réelle des biens loués, il lui appartient de préciser, outre l’adresse et le taux de rentabilité moyen des immeubles retenus comme termes de comparaison, la date du contrat de bail, les activités exercées, ainsi que les principales caractéristiques physiques de ces bâtiments ;

3. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la proposition de rectification du 9 décembre 2008 adressée à MmeD…, mentionne les impôts concernés, les années d’imposition, les bases retenues, les catégories d’imposition et énonce avec précision les motifs de droit et de fait sur lesquels l’administration entendait se fonder pour apprécier le caractère excessif du loyer mis à la charge de la Sarl SIBA par la SCI Rissuer et ainsi justifier les rectifications envisagées en ce qui concerne l’impôt sur le revenu de la contribuable ; que l’administration indique la méthode qu’elle a mise en oeuvre pour procéder à l’évaluation de la valeur locative des locaux détenus par la SCI Rissuer, apporte des précisions sur les deux mutations de bâtiments industriels situés dans la commune de Bogny intervenues en 2006 ayant servi de terme de comparaison et mentionne la référence de ces actes au bureau de la conservation des hypothèques ; qu’en se bornant à faire valoir que le service ne lui a pas adressé de copie des actes notariés ou des baux, qu’elle n’a pu deviner la situation géographique de certains des lots de comparaison et que les locaux utilisés par l’administration ne sont pas pertinents, Mme D…n’établit pas l’insuffisante motivation de la proposition de rectification s’agissant de l’évaluation de la valeur locative des immeubles en litige ; que, par suite, Mme D…disposait de tous les éléments nécessaires pour faire valoir utilement ses observations et n’est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;

4. Considérant que le moyen tiré par Mme D…de ce que la procédure d’établissement des suppléments d’impôt sur les sociétés assignés à la société SIBA, qui est une procédure concernant un autre contribuable distincte de celle mise en oeuvre à son encontre, aurait été irrégulière est inopérant au regard des suppléments d’impôt sur le revenu qui lui ont été assignés ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales :  » L’administration est tenue d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition faisant l’objet de la proposition prévue au premier alinéa de l’article L. 57 ou de la notification prévue à l’ article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande  » ; qu’il incombe à l’administration, quelle que soit la procédure d’imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d’informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d’arrêter d’office les bases d’imposition, de l’origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu’elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l’intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable en fait la demande à l’administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés ;

6. Considérant que si Mme D…soutient que l’administration n’a pas répondu à sa demande de communication de documents obtenus de tiers utilisés par le service pour fonder les redressements dont elle a fait l’objet, elle n’établit toutefois pas avoir personnellement adressé une telle demande au service ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

7. Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts :  » 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (…)  » ; qu’aux termes de l’article 1498 du même code :  » La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l’article 1496 et que les établissements industriels visés à l’article 1499 est déterminée au moyen de l’une des méthodes indiquées ci-après : (…) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l’évaluation des immeubles d’un caractère particulier ou exceptionnel ; b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l’immeuble type était loué normalement à cette date, Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l’objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d’appréciation directe  » ;

8. Considérant que Mme Mme D…est associée de la SCI Rissuer à hauteur de 25 % du capital et détient 15% du capital de la Sarl SIBA ; qu’après une vérification de comptabilité de la Sarl SIBA, l’administration a estimé que les loyers versés par la Sarl SIBA à la SCI Rissuer entre 2005 et 2007 étaient excessifs pour la location de bâtiments industriels situés à Bogny et a procédé à un rappel de cotisations d’impôt sur les sociétés dues par la société SIBA au titre de ces années en réintégrant dans les résultats imposables le montant des loyers excédant, selon l’administration, celui de la valeur locative réelle des immeubles ; que l’administration a par ailleurs adressé une proposition de rectification à Mme D…imposant à son nom, au prorata de sa participation dans la SCI Rissuer, propriétaire des biens bénéficiaire des versements litigieux, les sommes correspondant à la fraction non déductible des loyers requalifiés par le service en revenus distribués imposables non dans la catégorie des revenus fonciers mais dans celle des revenus de capitaux mobiliers ; qu’il résulte de l’instruction que, contrairement à ce que soutient MmeD…, le service, à qui incombe la charge de la preuve de la majoration des loyers, ne s’est pas seulement référé au prix de l’indemnité d’occupation pratiqué par la chambre de commerce et d’industrie, précédent propriétaire des locaux, pour évaluer le prix du loyer mis à la charge de la société SIBA par la SCI Rissuer à un montant mensuel moyen hors taxe de 4 000 euros pour l’année 2005, 4 290 euros pour l’année 2006 et 4 360 euros pour l’année 2007 ; que l’administration a également procédé à une comparaison entre la valeur de ces bâtiments et le prix de la cession en 2006 de deux ensembles de bâtiments industriels situés dans la même commune ayant une ancienneté, une superficie et une valeur d’utilité comparables aux locaux occupés par la Sarl SIBA ; qu’elle a également comparé le montant du loyer acquitté par la Sarl Siba et les loyers prévus par les baux conclus lors de la mise en location de ces deux immeubles en 2006 ; que le service a ainsi relevé que ces baux permettent de retenir une valeur locative moyenne de 48 000 euros annuels, ce qui correspond à un ratio moyen de 8,28 % de rentabilité brute qui est habituellement observé sur le marché local pour des immeubles comparables ; que les loyers annuels mis à la charge de la société SIBA par la SCI Rissuer étaient durant les trois années en litige respectivement de 129 600, 156 000 et 180 000 euros alors que le prix d’acquisition de l’immeuble en 2003 était de 107 655 euros, ce qui correspond à un ratio de rentabilité supérieur à 100 %, alors même qu’aucun bail écrit n’avait été conclu entre les deux sociétés ; que si les deux expertises produites par Mme D…pour critiquer les termes de comparaison retenus par l’administration évaluent la valeur locative des bâtiments à 168 000 euros annuels en 2009 et à 160 000 euros pour l’année 2005, 170 000 euros pour l’année 2006 et 175 000 euros pour l’année 2007, ces deux expertises se sont fondées sur la situation de l’immeuble en 2009, alors que d’importants travaux de réhabilitation avaient été engagés par la société SIBA postérieurement aux années d’imposition en litige ; qu’en outre l’expertise réalisée par M. B…est fondée sur l’analysé des prix du marché locatif résultant de données départementales fournies par la chambre de commerce et d’industrie et ne fait pas de distinction selon les fonctions des locaux loués ; que, dans ces conditions, Mme D…n’est pas fondée à soutenir que l’évaluation de la valeur locative des locaux occupés par la Sarl SIBA est erronée en raison de l’inadaptation de la méthode mise en oeuvre par l’administration ;

9. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise, Mme D…n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titres des années 2005, 2006 et 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que l’État qui n’est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D…est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre chargé du budget et à Mme C…D….

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N° 14NC01205


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