CAA de NANCY, 2ème chambre – formation à 3, 08/12/2016, 15NC02470, Inédit au recueil Lebon

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CAA de NANCY, 2ème chambre – formation à 3, 08/12/2016, 15NC02470, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C…a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006, 2007 et 2008 ainsi que des pénalités dont ces droits ont été assortis.

En application du dernier alinéa de l’article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, l’administration a transmis d’office au tribunal administratif de Strasbourg la réclamation présentée le 2 janvier 2012 par M. C…et tendant au dégrèvement des mêmes impositions et pénalités.

Par un jugement n° 1105146-1201780 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 décembre 2015 et

12 juillet 2016, sous le n° 15NC02432, M.C…, représenté par Me Sanchez, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement en tant qu’il porte rejet de sa demande ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 60 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

– le tribunal a statué ultra petita ;

– il justifie de sa domiciliation fiscale au Luxembourg ;

– le vérificateur a manqué d’impartialité ;

– le contrôle n’a pas donné lieu à un débat contradictoire ;

– les propositions de rectification ne sont pas suffisamment motivées ;

– l’administration a commis un abus de droit rampant ;

– l’administration a méconnu le principe de confiance légitime ;

– le vérificateur a fait un exercice irrégulier du droit de communication ;

– les propositions de rectification insuffisamment motivées n’ont pas régulièrement interrompu le délai de reprise ;

– les sommes versées par la SCI du Poirier et la SCI Le Pré correspondent à des jetons de présence dus par la société de droit luxembourgeois Nedafolo et sont déjà imposées au Luxembourg ;

– les sommes figurant au crédit des comptes courants d’associés de M. C…dans les sociétés civiles Interboust, Sorjar et Les Romains, correspondent à des avances de trésorerie non imposables ; c’est à tort que l’administration les a imposées comme des revenus distribués ;

– les sommes de 12 000 et 1 553 euros versées par la Sarl Kues, la Sarl Mines et l’Eurl Primo correspondent à des avances ou des remboursements de frais ;

– la somme de 35 000 euros encaissée au crédit du compte bancaire de

M. C… le 8 octobre 2008 ne correspond pas à un revenu imposable ;

– l’administration ne justifie pas de son intention d’éluder l’impôt et par suite du bien-fondé des majorations de 40 % ;

– elle n’établit pas davantage l’existence de manoeuvres frauduleuses et dès lors le bien-fondé des majorations de 80 % ;

– l’application des majorations de 10 % n’est pas motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Par ordonnance du 25 juillet 2016, la clôture d’instruction a été fixée au 26 août 2016.

Le ministre des finances et des comptes publics a présenté un mémoire, enregistré le

5 septembre 2016, soit postérieurement à la clôture de l’instruction, le 26 août 2016.

II. Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2015, sous le n° 15NC02470,

M.C…, représenté par Me Sanchez, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement en tant qu’il porte rejet de la réclamation qu’il a présentée le 2 janvier 2012 en vue du dégrèvement des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006, 2007 et 2008 ainsi que des pénalités dont ces droits ont été assortis et qui a été transmise d’office par l’administration fiscale au tribunal en application de l’article R. 199-1 du livre des procédures fiscales ;

2°) de prononcer la décharge de ces droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 60 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

– le tribunal a statué ultra petita ;

– il justifie de sa domiciliation fiscale au Luxembourg ;

– le vérificateur a manqué d’impartialité ;

– le contrôle n’a pas donné lieu à un débat contradictoire ;

– les propositions de rectification ne sont pas suffisamment motivées ;

– l’administration a commis un abus de droit rampant ;

– l’administration a méconnu le principe de confiance légitime ;

– le vérificateur a fait un exercice irrégulier du droit de communication ;

– les propositions de rectification insuffisamment motivées n’ont pas régulièrement interrompu le délai de reprise ;

– les sommes versées par la SCI du Poirier et la SCI Le Pré correspondent à des jetons de présence dus par la société de droit luxembourgeois Nedafolo et sont déjà imposées au Luxembourg ;

– les sommes figurant au crédit des comptes courants d’associés de M. C…dans les sociétés civiles Interboust, Sorjar et Les Romains, correspondent à des avances de trésorerie non imposables ; c’est à tort que l’administration les a imposées comme des revenus distribués ;

– les sommes de 12 000 et 1 553 euros versées par la Sarl Kues, la Sarl Mines et l’Eurl Primo correspondent à des avances ou des remboursements de frais ;

– la somme de 35 000 euros encaissée au crédit du compte bancaire de

M.C… le 8 octobre 2008 ne correspond pas à un revenu imposable ;

– l’administration ne justifie pas de son intention d’éluder l’impôt et par suite du bien-fondé des majorations de 40 % ;

– elle n’établit pas davantage l’existence de manoeuvres frauduleuses et dès lors du bien-fondé des majorations de 80 % ;

– l’application des majorations de 10 % n’est pas motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu

– les autres pièces des dossiers.

Vu :

– la convention entre la France et le Grand-duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune en date du 1er avril 1958 ;

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. Etienvre ;

– les conclusions de Mme Peton-Philippot ;

– et les observations de M.C…, lequel a été autorisé par le président de la formation de jugement à s’exprimer sur certains éléments de fait et de Me Sanchez, avocat représentant celui-ci.

1. Considérant qu’à l’issue d’un examen contradictoire de situation fiscale personnelle, M. C…s’est vu notifier deux propositions de rectification datées du

18 décembre 2009 et du 12 juillet 2010 par lesquelles l’administration fiscale l’a informé des rectifications envisagées respectivement au titre de l’année 2006 et au titre des années 2007 et 2008, en matière de revenus de capitaux mobiliers et de revenus d’origine indéterminée ; que M. C…relève appel du jugement du 20 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes de décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006, 2007 et 2008 ainsi que des pénalités dont ces droits ont été assortis ;

2. Considérant que les requêtes enregistrées sous les n° 15NC02432 et 15NC02470 sont présentées par le même requérant, sont dirigées contre le même jugement et tendent à juger des mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions aux fins de décharge :

En ce qui concerne la domiciliation fiscale :

3. Considérant que si une convention bilatérale conclue en vue d’éviter les doubles impositions peut, en vertu de l’article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l’imposition ; que, par suite, il incombe au juge de l’impôt, lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à une telle convention, de se placer d’abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l’imposition contestée a été valablement établie et, dans l’affirmative, sur le fondement de quelle qualification ; qu’il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer – en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s’agissant de déterminer le champ d’application de la loi, d’office – si cette convention fait ou non obstacle à l’application de la loi fiscale ;

4. Considérant qu’aux termes de l’article 4 A du code général des impôts :  » Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l’impôt sur le revenu en raison de l’ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française.  » ; qu’aux termes de l’article 4 B du même code :  » 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l’article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu’elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire (…)  » ;

5. Considérant que M. C…soutient qu’il doit être considéré comme ayant son domicile fiscal au Luxembourg dès lors qu’il y vit, qu’il occupe des fonctions d’administrateur d’une société de droit luxembourgeois et tire l’essentiel de ses revenus de cet Etat ; qu’il résulte toutefois de l’instruction et n’est pas contesté qu’il a indiqué, lors du dépôt de ses déclarations de revenus des années 2006, 2007 et 2008, demeurer à Thionville ; qu’il ne conteste pas davantage l’administration fiscale lorsque celle-ci fait valoir qu’il y vivait avec sa compagne et les filles de cette dernière ; qu’il ne résulte pas de l’instruction et n’est d’ailleurs pas allégué que ses activités exercées au cours des années en tant que gérant de nombreuses sociétés sises en France, dont il est également associé, n’auraient qu’un caractère accessoire ; que s’il a perçu, au cours des années d’imposition en litige, en sa qualité d’administrateur d’une ou plusieurs sociétés situées au Luxembourg des jetons de présence au titre desquels il a été imposé dans cet Etat, M. C…ne peut toutefois utilement se prévaloir de la décision de la Cour de justice des communautés européennes du 14 février 1995 n° C-279/93 Schumacker qui tend seulement à prohiber les discriminations entre des résidents d’un Etat membre et des non résidents qui tirent dans cet Etat membre des revenus significatifs ; qu’il s’ensuit que M.C…, qui ne peut à cet égard se prévaloir utilement du dégrèvement accordé par l’administration fiscale, le 12 mai 2016 pour des impositions autres que celles en litige, doit être considéré comme ayant eu son domicile fiscal en France au sens des dispositions du a et du b de l’article 4 A du code général des impôts à l’application desquelles ne fait obstacle aucune stipulation de la convention conclue le 1er avril 1958 entre la France et le Grand-duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune ;

En ce qui concerne la procédure d’imposition :

6. Considérant, en premier lieu, qu’en se bornant à soutenir que l’administration n’ignorait ni l’existence de ses crédits bancaires ni sa domiciliation fiscale au Luxembourg,

M. C…n’établit pas que le vérificateur aurait manqué d’impartialité au cours des opérations de contrôle ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l’examen de la situation fiscale personnelle au regard de l’impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d’adresser la notification de redressement qui, selon l’article L. 48, marquera l’achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu’il envisage de retenir ;

8. Considérant qu’il résulte de l’instruction et, en particulier, des termes des propositions de rectification, que le vérificateur et le contribuable ou ses représentants se sont rencontrés à plusieurs reprises les 2 septembre, 6 octobre, 17 décembre 2009 et le

25 février 2010 avant une réunion de synthèse le 29 juin suivant ; que la proposition de rectification du 12 juillet 2010 précise également quels ont été les points abordés lors de chaque entretien ; que, dès lors, le moyen tiré de l’absence d’un débat contradictoire au cours des opérations de contrôle doit être écarté comme manquant en fait ;

9. Considérant, en troisième lieu, que M. C…soutient que l’administration fiscale a porté atteinte au principe de confiance légitime dès lors que, d’une part, elle ne lui a communiqué le résultat de la demande d’assistance administrative faite auprès des autorités fiscales luxembourgeoises qu’après qu’il a saisi le supérieur hiérarchique du vérificateur, que, d’autre part elle a reconnu qu’elle poursuivait la synthèse de plusieurs contrôles et qu’enfin, elle a mis les impositions litigieuses en recouvrement alors même que les procédures de contrôle des SCI du Poirier, Le Pré et les Romains étaient en cours ;

10. Considérant toutefois, que le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, ne trouve à s’appliquer dans l’ordre juridique national que dans le cas où la situation dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire ; que tel n’est pas le cas en l’espèce ; que le moyen ainsi soulevé doit être dès lors écarté comme inopérant ;

11. Considérant en quatrième lieu, que la consultation, par l’administration fiscale, d’informations publiées sur un site internet accessible à tous, ne saurait caractériser l’exercice irrégulier du droit de communication ;

12. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige :  » L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…)  » ; que selon l’article R. 57-1 du même livre :  » La proposition de rectification prévue par l’article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L’administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification  » ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 76 du livre des procédures fiscales :  » Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d’office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription (…)  » ;

13. Considérant que les propositions de rectification des 18 décembre 2009 et

12 juillet 2010, qui concernent selon les rectifications, la procédure de rectification contradictoire ou la procédure de taxation d’office, indiquent les années d’imposition, les motifs des redressements, le montant des bases d’imposition et celui des droits rappelés ; que contrairement à ce que le requérant soutient, le vérificateur ne s’est pas référé à la motivation des propositions de rectification notifiées à la SCI Le Pré et la SCI du Poirier à l’issue des vérifications de comptabilité dont elles ont fait l’objet ; qu’elles satisfont dès lors aux exigences de motivation de l’article L. 57 et de l’article L. 76 du livre des procédures fiscales quand bien même le contribuable aurait dû faire appel à un homme de loi pour en mieux comprendre la portée ;

14. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu’aux termes de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige :  » Afin d’en restituer le véritable caractère, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité de l’abus de droit fiscal. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité. Si l’administration ne s’est pas conformée à l’avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification. Les avis rendus font l’objet d’un rapport annuel qui est rendu public  » ;

15. Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’administration fiscale ait écarté comme fictives la convention conclue le 14 avril 2004 entre la société Nedafolo et la SCI du Poirier et la convention de délégation de créance conclue le 2 février 2006 entre

M. C…et ces deux sociétés ; qu’elle a seulement estimé que le caractère déductible de la charge comptabilisée au cours de l’exercice clos le 31 décembre 2005 par la SCI du Poirier pour 480 000 euros n’était pas justifié dans son principe et son montant au sens du 1 de l’article 39 du code général des impôts ; que le requérant n’est, en conséquence, pas fondé à soutenir, pour contester le bien-fondé des impositions mises à sa charge en conséquence des rehaussements notifiés à cette société, que l’administration a commis  » un abus de droit rampant  » et à prétendre, dès lors, que lui ou la SCI du Poirier auraient été privés de la garantie prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales liée à la saisine du comité de l’abus de droit fiscal ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l’impôt :

16. Considérant, en premier lieu, que M. C…n’est pas fondé à soutenir qu’en raison de leur caractère insuffisamment motivé, les propositions de rectification n’ont pas régulièrement interrompu le délai de reprise dont disposait l’administration fiscale ;

17. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 6 de la convention conclue le 1er avril 1958 entre la France et le Grand-duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d’assistance administrative réciproque en matière d’impôt sur le revenu et sur la fortune :  » Les tantièmes, jetons de présence et autres rémunérations des membres des conseils d’administration et des conseils de surveillance des sociétés par actions sont imposables dans celui des deux Etats où se trouve le domicile fiscal de la société, sous réserve de l’application des articles 14 et 15 ci-après en ce qui concerne les rémunérations perçues par les intéressés en leurs autres qualités effectives  » ;

18. Considérant qu’à l’appui de ses prétentions selon lesquelles les sommes figurant sur ses comptes bancaires sont uniquement issues de ses activités professionnelles au Luxembourg et ne sont pas imposables en France, M. C…soutient que les sommes versées par la SCI Le Pré et la SCI du Poirier, qui ont été imposées comme des revenus distribués, correspondent à des jetons de présence versés par la société de droit luxembourgeois Nedafolo dont il a été l’administrateur ;

19. Considérant cependant que M. C…n’établit pas, par les seuls documents comptables qu’il produit, que les sommes susmentionnées ont été en réalité payées par la SCI du Poirier et la SCI Le Pré pour le compte de la société Nedafolo, laquelle aurait été créancière de ces deux sociétés ;

20. Considérant, en troisième lieu, que s’agissant des sommes de 30 000 euros et 125 000 euros versées en 2007 et 2008 par la SCI Le Pré, l’administration fiscale les a imposées comme des distributions occultes sur le fondement du c de l’article 111 du code général des impôts ;

21. Considérant que si M. C…soutient que ces sommes ont été en réalité payées pour le compte de la société Nedafolo au titre de jetons de présence, il ne l’établit pas par les seuls documents comptables qu’il produit ; que l’administration fiscale doit en conséquence être regardée comme établissant le caractère occulte de ces distributions ;

22. Considérant, en quatrième lieu, qu’en ce qui concerne l’imposition, dans la catégorie de revenus de capitaux mobiliers, des sommes figurant au crédit des comptes courants d’associés de M. C…chez les sociétés civiles Interboust, Sorjar et Les Romains, M. C…soutient qu’elles correspondent à des avances de trésorerie non imposables ;

23. Considérant que les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé ont, sauf preuve contraire apportée par l’associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

24. Considérant que, comme l’ont jugé les premiers juges, en se bornant à produire l’attestation établie le 31 mai 2010 par le cabinet d’expertise comptable CMB,

M. C…n’établit pas que les sommes en cause n’ont pas le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

25. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article 109-1 du code général des impôts :  » Sont considérés comme revenus distribués … 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices  » ;

26. Considérant que ces dispositions font obligation à l’administration, lorsqu’elle estime devoir imposer un associé qui n’a pas accepté, même tacitement, le redressement de son imposition à l’impôt sur le revenu, d’apporter la preuve que celui-ci a eu la disposition des sommes ou valeurs qu’elle entend imposer au nom de celui-ci ;

27. Considérant qu’en ce qui concerne l’imposition, sur le fondement du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts, des sommes de 12 000 et 1 553 euros,

M. C…se borne à alléguer, sans apporter le moindre élément justificatif probant, qu’elles correspondent à des avances ou des remboursements de frais alors que l’administration fiscale fait valoir que ces sommes ont été versées en 2008, sous la mention  » vir stés Mines-Kues-Primo, sur le compte bancaire du requérant, lequel a la qualité de gérant et d’associé desdites sociétés ; que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme apportant la preuve de ce que la Sarl Kues, la Sarl Mines et l’Eurl Primo ont mis les sommes en cause à la disposition de leur associé ;

28. Considérant, en sixième et dernier lieu, que, si l’administration ne peut régulièrement taxer d’office, en application de l’article L. 69 du livre des procédures fiscales, les sommes dont elle n’ignore pas qu’elles relèvent d’une catégorie précise de revenus, elle peut en revanche procéder à cette taxation d’office si, au vu des renseignements dont elle disposait avant l’envoi de la demande de justifications fondée sur l’article L. 16 du livre des procédures fiscales et des réponses apportées par le contribuable à cette demande, la nature des sommes en cause, et donc la catégorie de revenus à laquelle elles seraient susceptibles de se rattacher, demeure inconnue ; qu’il est toutefois loisible au contribuable régulièrement taxé d’office sur le fondement de l’article L. 69 du livre des procédures fiscales d’apporter devant le juge de l’impôt la preuve que ces sommes, soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ; que, dans cette dernière situation, le contribuable peut obtenir, le cas échéant, une réduction de l’imposition d’office régulièrement établie au titre du revenu global, à raison de la différence entre les bases imposées d’office et les bases résultant de l’application des règles d’assiette propres à la catégorie de revenus à laquelle se rattachent, en définitive, les sommes en cause ;

29. Considérant que M. C…soutient que la somme de 35 000 euros encaissée au crédit du compte bancaire du requérant le 8 octobre 2008 correspond au remboursement d’un prêt, accordé, selon lui, à M.A…, il ne produit toutefois aucun document, autre que le relevé bancaire correspondant, en justifiant ; qu’il n’est, en conséquence, pas fondé à soutenir que cette somme n’est pas imposable ;

En ce qui concerne les pénalités :

30. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts :  » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (…) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (…)  » ;

31. Considérant que s’agissant des rehaussements afférents à des versements effectués par la SCI le Pré sur le compte personnel de M.C…, celui-ci ne conteste pas utilement le bien-fondé de la réponse faite par les premiers juges au moyen tiré de ce que l’administration fiscale n’apportait pas la preuve de son intention d’éluder l’impôt ; qu’il y a lieu, dès lors, d’écarter ce moyen, repris en appel sans autre précision, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

32. Considérant que s’agissant du rehaussement relatif aux virements effectués par la Sarl Kues, la Sarl Mines et l’Eurl Primo pour un montant total de 13 553 euros en 2008, l’administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve de l’intention du contribuable d’éluder l’impôt en se prévalant de la qualité de gérant de ces sociétés de

M. C…et par suite du bien-fondé de la majoration de 40 % infligée au requérant ;

33. Considérant que s’agissant de la majoration de 80 % appliquée aux rehaussements afférents aux sommes versées par la SCI du Poirier, le tribunal, qui a vérifié l’existence de manoeuvres destinées à égarer l’administration fiscale, n’a pas, contrairement à ce que soutient M.C…, entaché son jugement d’une contradiction alors même qu’il a par ailleurs écarté le moyen tiré de la méconnaissance de ce qu’il aurait été privé de la garantie prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ; que, par ailleurs, la circonstance que l’administration fiscale a eu une parfaite connaissance du dossier de la

SCI du Poirier est sans incidence sur l’existence ou non de manoeuvres frauduleuses au sens de l’article 1729 du code général des impôts ;

34. Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 1758 A du code général des impôts :  » I.-Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l’établissement de l’impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l’impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d’une majoration égale à 10 % des droits supplémentaires ou de la créance indue (…)  » ;

35. Considérant qu’il ressort des propositions de rectification que le vérificateur a motivé l’application des majorations infligées au requérant en se référant à l’article 1758 A du code général des impôts et en indiquant précisément que cette pénalité est appliquée aux rehaussements pour lesquels le manquement délibéré et les manoeuvres frauduleuses de l’article 1729 du code général des impôts n’ont pas été retenus ; que le moyen tiré du caractère insuffisamment motivé de ces pénalités doit être dès lors écarté ;

36. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. C…n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg, qui n’a pas statué ultra petita, a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

37. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. C…demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. C…sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B…C…et au ministre de l’économie et des finances.

2

N° 15NC02432, 15NC02470


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