CAA de MARSEILLE, 4ème chambre – formation à 3, 12/04/2019, 18MA01055 – 18MA01056, Inédit au recueil Lebon

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CAA de MARSEILLE, 4ème chambre – formation à 3, 12/04/2019, 18MA01055 – 18MA01056, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… A…et Mme D… E… ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2013, et des pénalités correspondantes.

Le tribunal administratif de Toulon, par l’article 1er du jugement n° 1503475 et 1503477 du 8 janvier 2018, a décidé que la base imposable des contributions sociales de M. A… et Mme E… serait fixée à 35 050 euros au titre de l’année 2013, a prononcé par l’article 2 de son jugement la décharge des cotisations de contributions sociales résultant de la réduction de base prononcée à l’article 1er, et par son article 3 a rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 2 mars 2018 sous le n° 18MA01055, M. A… et Mme E…, représentés par Me F…, demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 janvier 2018 en tant qu’il a rejeté les conclusions de leur demande à fin de décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu au titre de l’année 2013, et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de l’imposition et des pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

– la proposition de rectification du 10 décembre 2014 est insuffisamment motivée au regard des exigences de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

– elle est insuffisamment motivée au regard des énonciations de la doctrine administrative référencée 13 L-1513, et BOI-CF-IOR-10-40 ;

– ils sont en droit de bénéficier du mécanisme dit de la cascade complète, prévu par l’article L. 77 du livre des procédures fiscales ;

– l’administration ne pouvait regarder comme des revenus distribués les sommes portées au crédit du compte courant d’associé ouvert au nom de M. A… dans les écritures de la société à responsabilité limitée (SARL) Revers Auto.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2018, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A… et Mme E… ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 2 mars 2018 sous le n° 18MA01056, M. A… et Mme E…, représentés par Me F…, demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 janvier 2018 en tant qu’il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande à fin de décharge de la cotisation supplémentaire de contributions sociales au titre de l’année 2013, et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de l’imposition et des pénalités demeurant… ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

– la proposition de rectification du 10 décembre 2014 est insuffisamment motivée au regard des exigences de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

– elle est insuffisamment motivée au regard des énonciations de la doctrine administrative référencée 13 L-1513, et BOI-CF-IOR-10-40 ;

– ils sont en droit de bénéficier du mécanisme dit de la cascade complète, prévu par l’article L. 77 du livre des procédures fiscales ;

– l’administration ne pouvait regarder comme des revenus distribués les sommes portées au crédit du compte courant d’associé ouvert au nom de M. A… dans les écritures de la SARL Revers Auto.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2018, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A… et Mme E… ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Mastrantuono,

– les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

– et les observations de Me C…, représentant M. A… et Mme E.en litige

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de M. A… et Mme E… sont dirigées contre le même jugement et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. A… et Mme E… ont fait l’objet d’un contrôle sur pièces au titre de l’année 2013, à l’issue duquel l’administration les a assujettis à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales, résultant de rehaussements correspondant à des revenus regardés comme distribués à M. A… par la SARL Revers Auto. M. A… et Mme E… font appel du jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 janvier 2018 en tant qu’il a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et le surplus de leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont ainsi été assujettis au titre de l’année 2013.

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

3. En premier lieu, l’article L. 57 dispose que :  » L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…) « . Aux termes de l’article R. 57-1 du même livre :  » La proposition de rectification prévue par l’article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (…) « .

4. Il résulte de l’instruction que la proposition de rectification du 10 décembre 2014, adressée à titre personnel à M. A… et Mme E… au titre de l’année 2013, les informait des rectifications qui étaient envisagées à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Revers Auto, en précisant la nature, le montant et les motifs de ces rectifications. Elle indiquait notamment de façon explicite le mode de détermination des recettes omises par la société et les raisons qui avaient conduit le vérificateur à regarder M. A… comme ayant bénéficié des revenus distribués correspondants. Ainsi, et alors même que la proposition de rectification adressée le 10 décembre 2014 à la SARL Revers Auto n’était pas jointe à celle qui a été adressée aux requérants, et qu’aucun extrait n’en était reproduit, M. A… et Mme E…, qui ont été informés des éléments de droit et de fait sur lesquels l’administration a entendu fonder les rectifications en litige, ont été mis en mesure d’engager utilement un dialogue avec le service. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

5. En second lieu, l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige, dispose que :  » Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l’administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l’impôt et aux pénalités fiscales « .

6. M. A… et Mme E… ne sauraient se prévaloir des doctrines référencées DB 13 L-1513 et BOI-CF-IOR-10-40 dès lors que, relatives à la procédure d’imposition, elles n’entrent pas dans le champ d’application de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la somme portée au crédit du compte courant :

7. L’article 109 du code général des impôts dispose que :  » 1. Sont considérés comme revenus distribués : / (en litige) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (…) « . Les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé ont, sauf preuve contraire apportée par l’associé titulaire du compte, le caractère de revenus et sont alors imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

8. L’administration, dans le cadre de la vérification de la SARL Revers Auto, a constaté l’existence d’une écriture comptabilisée le 28 février 2013, portant sur une somme de 34 000 euros inscrite au crédit du compte courant ouvert au nom de M. A… avec le libellé  » Complément Ford « . En l’absence de justification de cette écriture au-delà d’une somme de 3 000 euros, le surplus, soit 31 000 euros, a été imposé entre les mains de M. A… sur le fondement des dispositions précitées de l’article 109-1-2° du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Les requérants n’apportent pas la preuve de ce que cette somme ne constituerait pas un revenu distribué en se bornant à faire état du résultat déficitaire de la société et de sa  » situation préoccupante « , sans apporter aucun élément relatif à sa trésorerie, ni justifier d’un obstacle juridique au prélèvement de ces sommes. C’est donc à bon droit que l’administration a imposé la somme de 31 000 euros entre les mains de M. A.en litige

En ce qui concerne le bénéfice de l’article L. 77 du livre des procédures fiscales :

9. L’article L. 77 du livre des procédures fiscales dispose que :  » En cas de vérification simultanée des taxes sur le chiffre d’affaires et (…) de l’impôt sur les sociétés, le supplément de taxes sur le chiffre d’affaires et taxes assimilées afférent à un exercice donné est déduit, pour l’assiette de (…) l’impôt sur les sociétés, des résultats du même exercice (…). / Toutefois, lorsque la taxe sur la valeur ajoutée rappelée est afférente à une opération au titre de laquelle la taxe due peut être totalement ou partiellement déduite par le redevable lui-même, les dispositions prévues au premier alinéa ne s’appliquent pas au montant de la taxe déductible. / Les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés peuvent, dans la mesure où le bénéfice correspondant aux rectifications effectuées est considéré comme distribué, par application des articles 109 et suivants du code général des impôts, à des associés ou actionnaires dont le domicile ou le siège est situé en France, demander que l’impôt sur le revenu supplémentaire dû par les bénéficiaires en raison de cette distribution soit établi sur le montant du rehaussement soumis à l’impôt sur les sociétés diminué du montant de ce dernier impôt. / (…) Les demandes que les contribuables peuvent présenter au titre des troisième et quatrième alinéas doivent être faites au plus tard dans le délai de trente jours consécutif à la réception de la réponse aux observations prévue à l’article L. 57 ou, à défaut, d’un document spécifique les invitant à formuler lesdites demandes. / L’imputation prévue aux troisième et quatrième alinéas est soumise à la condition que les associés ou actionnaires reversent dans la caisse sociale les sommes nécessaires au paiement des taxes sur le chiffre d’affaires et des taxes assimilées, de l’impôt sur les sociétés et de la retenue à la source sur les revenus de capitaux mobiliers se rapportant aux sommes qui leur ont été distribuées. « .

10. Il est constant que la SARL Revers Auto n’a pas sollicité le bénéfice du mécanisme dit de la  » cascade complète  » que prévoit le troisième alinéa de l’article L. 77 du livre des procédures fiscales. Contrairement à ce que soutiennent M. A… et Mme E…, l’administration n’était pas tenue d’informer la société de la faculté que lui ouvraient les dispositions de l’article L. 77 du livre des procédures fiscales par l’envoi d’un document spécifique. Dans ces conditions, et alors qu’en tout état de cause, le reversement dans la caisse sociale des sommes nécessaires au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée n’est pas établi par la seule production d’une  » convention d’abandon de créance avec clause de retour à meilleure fortune  » qui aurait été conclue entre M. A… et la société le 31 décembre 2012, les requérants ne sont pas fondés à obtenir le bénéfice de la cascade complète.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A… et Mme E… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement du 8 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et le surplus de leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2013.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. A… et Mme E… au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. A… et Mme E… sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B… A…et Mme D…E…, et au ministre de l’action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l’audience du 2 avril 2019 où siégeaient :

– M. Antonetti, président,

– M. Barthez, président assesseur,

– Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2019.

2

N° 18MA01055, 18MA01056

mtr


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