Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;
– le code général des impôts ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Mahmouti,
– et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Divali, qui exerce une activité de marchand de biens, a procédé à la cession de deux parcelles situées sur le territoire de la commune de Villeneuve-lès-Avignon (Gard) issues de la division d’une parcelle unique sur laquelle était édifiée, à la date de l’acquisition, un immeuble d’habitation qu’elle a vendu séparément. Elle a, dans les déclarations qu’elle a souscrites au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, estimé pouvoir faire application à ces opérations du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge. La société a fait l’objet d’un contrôle sur pièces à l’issue duquel des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge au titre du mois d’avril 2015, à raison de la remise en cause du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge dont elle avait fait application. Par un jugement du 5 octobre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités correspondantes. Par un arrêt n° 18MA04481 du 7 novembre 2019, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel formé par le ministre de l’action et des comptes publics contre ce jugement. Par une décision n° 437076 du 5 mai 2021, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux a, saisi d’un pourvoi du ministre de l’action et des comptes publics, annulé l’arrêt de la cour et renvoyé l’affaire devant la même cour, où elle a été de nouveau enregistrée le 6 mai 2021 sous le n° 21MA01771.
2. Le I de l’article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable, issue de l’article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b de l’article 266 du même code, l’assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.
3. L’article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : » Les États membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition, la base d’imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d’achat « . L’article 268 du code général des impôts, pris pour la transposition de ces dispositions, prévoit, dans sa rédaction également issue de l’article 16 de la loi du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, que : » S’agissant de la livraison d’un terrain à bâtir (…), si l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d’imposition est constituée par la différence entre : / 1° D’une part, le prix exprimé et les charges qui s’y ajoutent ; / 2° D’autre part, selon le cas : / – soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l’acquisition du terrain(…); / – soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu’il a effectués. « .
4. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l’objet d’une division parcellaire en vue d’en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d’assiette du bâtiment.
5. Il résulte de l’instruction que les terrains à bâtir cédés par la SARL Divali faisaient partie, au moment de leur acquisition, d’une seule et même unité foncière supportant une maison d’habitation. Ces terrains avaient donc, au moment de leur acquisition, la qualité d’immeuble bâti et non de terrain à bâtir. Les biens cédés par cette société n’ayant pas, au moment de leur acquisition, le caractère de terrain à bâtir mais celle d’un terrain bâti, la société ne pouvait se placer, pour vendre ces terrains, sous le régime de la taxation sur la marge prévue par l’article 268 du code général des impôts. Par suite, c’est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a estimé que les cessions des parcelles pouvaient être placées, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée dont la société était redevable, sous le régime de la marge.
6. Il appartient à la cour, saisie par l’effet dévolutif de l’appel d’examiner les autres moyens éventuels soulevés devant le tribunal administratif et elle.
7. Dès lors que l’administration s’est bornée à faire une exacte application des dispositions de l’article 268 du code général des impôts, la circonstance qu’elle a fondé l’imposition en litige sur la doctrine exprimée dans l’instruction du 29 décembre 2010 n° 3 A-9-10 est en tout état de cause sans influence sur le bienfondé de cette imposition.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’action et des comptes publics est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d’un montant de 15 833 euros au titre de l’année 2015, ainsi que des pénalités correspondantes, et à demander, d’une part, l’annulation de ce jugement et, d’autre part, le rejet de la demande présentée par cette société devant le tribunal.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 5 octobre 2018 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SARL Divali devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’économie, des finances et de la relance et à la société à responsabilité limitée Divali.
Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l’audience du 17 mars 2022 où siégeaient :
– M. Alfonsi, président de chambre,
– M. Mahmouti, premier conseiller,
– M. Sanson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 mars 2022.
Le rapporteur,
Signé
J. MAHMOUTILe président,
Signé
J.-F. ALFONSI
La greffière,
Signé
C. MONTENERO
La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 21MA01771
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