Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D… B… et Mme G… E… ont demandé au tribunal administratif de Nice d’annuler, d’une part, l’arrêté du maire de Beausoleil du 7 février 2014 portant non-opposition à la déclaration préalable déposée le 15 novembre 2013 par la SNC Beausoleil Bella Vista pour des aménagements sur un terrain situé 16 rue Victor Hugo sur le territoire communal et, d’autre part, la décision du 16 juin 2014 portant rejet de leur recours gracieux.
Par un jugement n° 1403537 du 22 mars 2018, le tribunal administratif de Nice a annulé l’arrêté du maire de Beausoleil du 7 février 2014 et la décision du 16 juin 2014 en tant, seulement, qu’ils autorisaient la création d’un bac de rétention prenant appui sur le mur mitoyen de la propriété de Mmes B… et E….
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 mars 2018, le 25 janvier 2019 et le 18 juillet 2019, la société par actions simplifiée (SAS) Kaufman et Broad Rénovation, représentée par Me F…, demande à la Cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nice du 22 mars 2018 en tant qu’il annule les décisions en cause en ce qu’elles autorisent la création d’un bac de rétention prenant appui sur le mur mitoyen de la propriété de Mmes B… et E… ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mmes B… et E… devant le tribunal administratif ;
3°) d’écarter le mémoire d’intimée enregistré le 26 novembre 2018 ;
4°) de rejeter l’appel incident ;
5°) de mettre à la charge de Mmes B… et E… la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– sa requête est recevable ;
– à titre principal, la requête de première instance est irrecevable pour tardiveté ; le courrier du 26 février 2014 constitue un recours gracieux ; celui-ci et la réponse du 28 février 2014 manifestent la connaissance acquise de la non-opposition à déclaration préalable ; le courrier du 3 mars 2014 constitue un recours gracieux ;
– à titre subsidiaire, le bac de rétention qui prend appui sur une construction nouvelle et non sur un mur mitoyen en mauvais état est conforme aux dispositions de l’article UC 7 du règlement du plan local d’urbanisme ;
– l’appel incident est irrecevable ;
– l’administration justifie de la compétence de l’auteur de l’acte ;
– la procédure n’est pas viciée.
Par des mémoires, enregistrés le 17 mai 2018, le 26 novembre 2018, le 29 janvier 2019, le 4 février 2019, le 5 mars 2019 et le 11 mars 2019, Mme D… B…, agissant pour elle-même et venant aux droits de Mme G… E…, représentée par Me A…, demandent :
1°) à titre principal, le rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l’appel incident, l’annulation du jugement en tant qu’il n’annule que partiellement les décisions en cause ;
3°) par voie de conséquence, l’annulation de la décision du maire de Beausoleil du 7 février 2014 portant non-opposition à déclaration préalable et celle du 16 juin 2014 portant rejet de leur recours gracieux ;
4°) la mise à la charge de la société Kaufman et Broad Rénovation de la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
– les moyens soulevés par la requête de la société ne sont pas fondés ;
– le mémoire du 26 novembre 2018 est recevable ;
– à titre subsidiaire, l’appel incident est recevable ;
– l’administration ne justifie pas de la compétence de l’auteur de l’acte ;
– la procédure est viciée ;
– les décisions méconnaissent les articles UC 6, UC 7, UC 9 et UC 12 du règlement du plan local d’urbanisme de la commune ;
– l’arrêté est entaché de fraude ;
– l’absence de retrait est illégale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. C…,
– les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
– et les observations de Me H… substituant Me F…, représentant la société Kaufman et Broad Rénovation, et celles de Me A…, représentant Mme B… et Mme E….
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 15 mars 2004, le maire de Beausoleil a accordé un permis de construire un immeuble d’habitation sur la parcelle cadastrée section AI n° 103 sise 16 rue Victor Hugo de la commune. Mme D… B… et sa mère, Mme G… E…, propriétaires de la parcelle cadastrée section AI n° 102 sise 14 rue Victor Hugo, jouxtant le terrain d’assiette du projet, ont contesté ce permis devant le tribunal administratif de Nice, avant de se désister dans le cadre d’un protocole transactionnel prévoyant la création d’un ascenseur sur leur propriété, dont l’accès se ferait par le parking de l’immeuble projeté. Par arrêté du 14 décembre 2004, le maire a délivré au pétitionnaire un permis modificatif. Par deux arrêtés du 12 juillet 2005, le maire a transféré le permis initial et le permis modificatif au profit de la Sarl Bella Vista 2004. Par arrêté du 16 février 2006, le maire a prorogé le permis initial modifié. A la suite de la transformation de la Sarl Bella Vista 2004 en SNC Beausoleil Bella Vista, le maire a, par arrêté du 13 septembre 2007, accordé à celle-ci, » représentée » par la société Kaufman et Broad, un nouveau permis de construire modificatif. Celui-ci a néanmoins été annulé par jugement du tribunal administratif de Nice du 17 février 2011, confirmé par un arrêt de la cour administrative de Marseille du 2 mai 2013. Par arrêté du 17 juin 2008, le maire de Beausoleil a accordé un nouveau permis de construire modificatif à la SNC. Par arrêté du 7 février 2014, le maire ne s’est pas opposé à la déclaration préalable de travaux sur la même construction déposée par la SNC le 5 novembre 2013, et portant sur la modification des accès de la toiture terrasse et de ses aménagements, la modification des emplacements de parkings véhicules légers et deux roues, la création d’une cave supplémentaire et d’un bac de rétention des eaux pluviales ainsi que sur l’aménagement des accès vers l’ascenseur de la propriété de Mmes E… et B…. Par la présente requête, la société Kaufman et Broad Rénovation, venant aux droits de la SNC Beausoleil Bella Vista, fait partiellement appel du jugement du tribunal administratif de Nice qui a fait droit à la demande d’annulation de Mmes B… et E… à l’encontre de l’arrêté du 7 février 2014 et de la décision de rejet de leur recours gracieux du 16 juin 2014 en tant que ces décisions autorisent la création d’un bac de rétention prenant appui sur le mur mitoyen de leur propriété.
Sur les conclusions à titre principal :
2. La société Kaufman et Broad Rénovation maintient que la requête de première instance enregistrée le 12 août 2014 serait irrecevable pour tardiveté. Toutefois, il ressort du dossier que les courriers de Mme B… du 26 février et du 3 mars 2014 adressés à la commune ne constituent que des demandes de renseignements ou d’éclaircissements et non des recours gracieux comme soutenu. Si la société fait aussi valoir que le courrier du 28 février 2014 adressé en réponse à la première demande de Mme B… manifesterait sa connaissance acquise, l’information de fait d’une décision de non-opposition à déclaration préalable révélée par lettre simple, qui rend inopposable le délai de recours contentieux, ne saurait lui être assimilée. Par ailleurs, la commune précise dans sa décision de rejet du 16 juin 2014 qu’elle répond au » courrier en date du 22 avril dernier portant recours gracieux « . En raison d’un recours administratif qui n’a pu être exercé avant cette date, la fin de non-recevoir doit être écartée.
Sur les conclusions à titre subsidiaire :
3. Aux termes de l’article UC 7 du règlement du plan local d’urbanisme de la commune de Beausoleil relatif à l’implantation par rapport aux limites séparatives : » Les constructions doivent s’implanter à une distance au moins égale à 4 mètres de ces limites séparatives, exceptés les sous-sols à usage de stationnement qui pourront s’implanter jusqu’aux limites séparatives. / Lorsque sur le terrain voisin existe un bâtiment en bon état, situé sur la limite séparative, la nouvelle construction devra s’implanter sur la limite séparative. L’implantation en limite séparative est également admise si deux constructions nouvelles s’édifient simultanément sur les limites séparatives « . La limite séparative est définie, au sens du glossaire du règlement du plan local d’urbanisme comme la » limite entre l’unité foncière du projet et une propriété privée qui lui est contiguë » et un bâtiment comme le » volume construit au-dessus du sol, avec ou sans fondation, aménageable pour l’habitation ou pour des activités à caractère professionnel, artisanal, industriel, touristique, sportives ou de loisirs, commercial ou agricole, etc. « .
4. La société persiste à soutenir que le bac litigieux est excavé et prend appui sur un mur qui n’est ni mitoyen ni en en mauvais état et constitue une construction nouvelle. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, y compris du plan de masse fourni au soutien de la requête d’appel, que ce bac de rétention d’eau, qui est sans lien avec le stationnement, est situé en rez-de-chaussée et n’est pas enterré. Il ne peut ainsi être implanté jusqu’aux limites séparatives. Par ailleurs, il ne ressort pas du dossier qu’il existe sur le terrain voisin du projet un bâtiment, qui plus est en bon état, situé sur la limite séparative, auquel ne peut être assimilé le mur existant. Aucune construction nouvelle ne doit dès lors prendre place sur cette limite. Sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur son caractère mitoyen, ou même sur l’interposition d’un mur de soutènement, la circonstance évoquée par les parties que le mur existant sur cette limite ait été récemment rénové est sans incidence. Le moyen de l’appelante tiré de la conformité de la construction aux alinéas, respectivement, 1 et 2 de la disposition en cause n’est donc pas fondé. Il s’ensuit que le bac de rétention du projet, dont la paroi est constituée d’un nouveau mur qui prend appui sur le mur délimitant les propriétés, est implanté en limite séparative de la propriété de Mme B… en violation de l’article UC7 du règlement cité.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du mémoire d’intimée enregistré le 26 novembre 2018 en présence de mémoires ultérieurs qui en reprennent la teneur, que la requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Nice a annulé les décisions en cause en ce qu’elles autorisaient la création d’un bac de rétention prenant appui sur le mur mitoyen de la propriété de Mmes B… et E….
6. Par voie de conséquence, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, les conclusions formées par la voie de l’appel incident par Mme B…, qui tendent à l’annulation du jugement en tant qu’il n’annule que partiellement les décisions en cause mais qui sont présentées à titre uniquement subsidiaire, ne peuvent qu’être rejetées. Il en est de même des conclusions en annulation dans leur totalité de la décision du maire de Beausoleil du 7 février 2014 portant non-opposition à déclaration préalable et de celle du 16 juin 2014 portant rejet d’un recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B…, qui ne peut être regardée comme la partie perdante dans la présente instance, la somme que lui demande l’appelante au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En application de ces mêmes dispositions, en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société Kaufman et Broad Rénovation la somme de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Mme B….
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Kaufman et Broad Rénovation est rejetée.
Article 2 : La société Kaufman et Broad Rénovation versera à Mme B… la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme B… est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Kaufman et Broad Rénovation, à Mme D… B….
Délibéré après l’audience du 13 février 2020, où siégeaient :
– M. Poujade, président,
– M. Portail, président assesseur,
– M. C…, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 mars 2020.
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N° 18MA01419
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