Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 février et 15 octobre 2015, M. C… D…, a demandé au tribunal administratif de Lyon :
1°) de prononcer la décharge, avec les pénalités y afférentes, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Par un jugement n° 151250 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 11 décembre 2017 et un mémoire enregistré le 25 mai 2018, M. C… D…, représenté par la société d’avocats Fidal, demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du 10 octobre 2017 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de prononcer la décharge, avec les pénalités y afférentes, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011 soit la somme globale de 108 128 euros;
3°) de mettre à la charge de l’État une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
– la circonstance que Monsieur D… puisse être regardé comme contrôlant la société DITEL LLC ne saurait suffire à justifier l’application des dispositions de l’article 155 A du code général des impôts ; c’est à tort que les premiers juges ont fait droit à l’analyse de l’administration selon laquelle la société DITELL LLC aurait perçu au titre des années 2010 et 2011 des rémunérations versées en contrepartie de l’exécution de prestations de services rendus par Monsieur D… au profit de la société IIESS et ont estimé qu’en application de l’article 155 A du code général des impôts ces sommes seraient directement imposables au nom de Monsieur D… : la société IIHESS, en tant que commissionnaire opaque à la vente, est le seul prestataire de services impliqués dans la distribution en France des logiciels DITEL dont les droits sont détenus par la société DITELL LLC ;
– la société DITELL LLC de droit américain a développé son activité aux États-Unis dans les secteurs de l’immobilier et de l’informatique et possède une gamme de programmes informatiques de communication dits » logiciels DITEL » ; elle a pour objet la détention des codes sources et des droits afférents aux logiciels DITEL depuis 1997 ; une telle activité de détention de droits incorporels est pleinement et uniquement exercée sur le territoire américain et ne nécessite pas la mise en oeuvre de moyens humains et matériels particuliers et ce d’autant moins lorsque la distribution de logiciels est confiée à un tiers ; les revenus de la société DITEL LLC proviennent exclusivement de la commercialisation des logiciels qu’elle détient ; la distribution de la promotion de ses produits sont systématiquement confiés à des tiers et ce selon des zones géographiques de distribution ; ces commissionnaires sont rémunérés par l’attribution d’une marge prélevée sur le prix de vente des logiciels ;
– la société DITEL LLC a conclu un contrat avec la société IIESS pour commercialiser et promouvoir les logiciels Ditel dans une zone géographique spécifique ; la société DITEL LLC ne dispose pas de carnet d’adresse en France ou dans les autres pays dans lesquels ses logiciels sont distribués ; l’article 7 de leur contrat prévoit que DITEL LLC agit en tant que simple fournisseur et intermédiaire de IIEESS et ne peut pas se prévaloir d’un quelconque mandat de IIEESS ; DITEL LLC reçoit de la société française IIEESS des sommes correspondant au produit des ventes de logiciels réalisés en France par l’intermédiaire d’IIEESS sous déduction d’une commission correspondant à la rémunération d’IIEESS pour sa prestation d’intermédiation ; la rémunération perçue par DITEL LLC est égal à 90 % puis 80 % du prix total acquitté par le client ; celle-ci correspond au prix de vente des produits dont les propriétaires sous déduction de la commission revenant au commissionnaire IIEESS ;
– la SARL IIEESS est indépendante au plan capitalistique de la société DITEL LLC et n’agit pas de manière exclusive pour cette dernière dès lors qu’elle assure également pour elle-même ou d’autres clients la commercialisation de produits informatiques et logiciels ; la SARL IIEESS assure, par le biais d’un site internet et de son propre réseau commercial de distributeurs revendeurs, la promotion et la commercialisation en France des logiciels conçus par la société DITEL LLC; le site marchand » ditel.fr » a été créé et est exploité par la SARL IIEESS, qui en est propriétaire, et qui encaisse les paiements en ligne pour l’achat de logiciels de la gamme Ditel ; la SARL IIESS est propriétaire du contenu du site ; la SARL exerce en droit et en fait une activité d’intermédiation ; pour assurer la commercialisation des logiciels, la société IIEESSS a engagé des dépenses de publicité Internet et à supporter des coûts de location d’espace de réunion ainsi que des coûts de maintenance du site DITEL.fr ; la SARL assure également la maintenance et le suivi après-vente des logiciels DITEL ; M. D… se borne au sein de la société IIEESS à facturer les ventes de logiciels de la gamme DITEL distribués par IIEESS ;
– les premiers juges se sont trompés sur le rôle respectif des parties dans la relation commerciale qui les unit ;
– la société DITEL LLC n’a pas perçu de commissions sur la vente en ligne par IIEESS de logiciels DITEL au titre des années en litige ; elle a perçu le prix de vente des logiciels sous déduction de la commission versée à IIEESS ; la société DITEL LLC ne recherche pas de clients potentiels pour le compte de la SARL IIEESS et l’administration n’apporte à ce titre aucun élément concret sur cette soi-disant prestation ; la société DITEL LLC n’effectue pas de vente sur le site Internet ditel.fr ; la SARL IIEESS ne règle pas trimestriellement de prestations à la société DITEL LLC sur la base de factures de commission éditée par M. D… ; chaque trimestre, la société IIEESSS reversait à la société DITEL LLC le prix de vente des logiciels sous déduction de sa rémunération d’intermédiation ; M. D… n’est pas salarié de la société DITEL LLC, les sommes ainsi perçues sont la contrepartie des ventes de biens meubles incorporels ; les virements effectués à son profit par DITEL LLC correspondent au paiement de dividendes régulièrement déclarés en France par M. D… ;
– ni M. D…, ni DITEL LLC ne rendent de prestations de services en France ; la seule prestation de services rendus en France est réalisée par la société IIEESS ; l’administration ne définit à aucun moment les prestations de services prétendument rendus par M. D… ; cette absence de précision s’oppose à l’application de l’article 155 A du code général des impôts pour établir une rectification des revenus personnels de M. D… ;
– la cession de biens meuble incorporels effectués par la société DITEL LLC en France via l’intermédiation de la société IIEESS, en sa qualité de commissionnaire, ne saurait entrer dans le champ d’application de l’article 155 A du code général des impôts ; cet article n’est applicable qu’aux seules prestations de services rendues en France ; l’administration fiscale ne pouvait pas imposer la société DITEL LLC en contrepartie de la cession des logiciels directement au nom de M. D… ;
– c’est à tort que les premiers juges ont fait droit à l’analyse de l’administration fiscale selon laquelle la réalité des liens économiques et juridiques de la société DITEL LLC et la SARL IIEESS est sans rapport avec l’économie du contrat ; ils ont à tort écarté ses moyens de défense sur le fondement du contrat en jugeant que le contrat n’a qu’une faible valeur probante ; l’administration fiscale estime à tort que le contrat unissant la société DITEL LLC à la SARL IIEESS est entachée de fictivité ; si l’administration entendait caractériser l’existence d’un abus de droit par simulation, elle n’avait d’autre choix que de recourir la procédure prévue à l’article L 64 du livre des procédures fiscales ; la procédure de l’abus de droit fiscal offre des garanties spécifiques au nombre desquelles figure la possibilité de saisir le comité de l’abus de droit fiscal ; en écartant le contrat sans l’affirmer expressément l’administration a privé M. D… du droit au recours au comité de l’abus de droit fiscal et a entaché la procédure de vérification d’une irrégularité substantielle ;
– les stipulations de l’article 7 de la convention fiscale franco-américaine font obstacle à l’application de l’article 155 A du code général des impôts, dès lors qu’en l’absence d’établissement stable en France, les bénéfices réalisés par la société Ditel LLC, société de droit américain, ne peuvent être imposés qu’aux Etats-Unis ; les sommes perçues par la société DITEL LLC quand bien même seraient-elles considérées comme représentant la rémunération de prestations de services entre dans le champ d’application des dispositions de l’article 7 de la convention américaine et doivent être imposées aux États-Unis en l’absence d’établissement stable en France de cette société ; une cour administrative d’appel a jugé inapplicable l’article 155 A du code général des impôts dans le cadre de rémunération de prestations versées à une société néerlandaise pour des prestations réalisées en France ; cette cour a ainsi fait prévaloir le principe de supériorité des conventions fiscales internationales sur le dispositif de l’article 155 A du code général des impôts ; contrairement à ce que soutient l’administration, le Conseil d’État considère que c’est uniquement lorsque la société, facturant les prestations de services, est établie hors de France mais dispose d’un établissement stable en France, que l’administration a le choix d’imposer l’établissement stable où la personne qui a pour l’essentiel rendu service ; DITEL LLC ne dispose pas d’établissement stable sur le territoire français ;
– les stipulations de l’article 17 de la convention fiscale franco-américaine ne peuvent pas lui être appliquées dès lors qu’il n’est ni un artiste ni un sportif ; il convient donc de revenir aux stipulations de l’article 7 de cette convention, qui font obstacle aux dispositions de l’article 155 A du code général des impôts ;
– si M. D… devait être imposé sur le fondement de l’article 155 A du code général des impôts, au titre des revenus perçus par la société Ditel LLC, il subirait une double imposition, dès lors qu’il déclare régulièrement en France les revenus qui lui sont versés par la société Ditel LLC ; les revenus distribués par la société Ditel LLC subissent une retenue à la source à hauteur de 15 % de leur montant , les revenus versés par la société DITEL LLC à M. D… ferait l’objet d’une double imposition, du fait même de l’application de l’article 155 A du code général des impôts, ce qui est contraire à l’objectif poursuivi par la convention signée entre la France et les États-Unis ; il existerait en outre une double imposition économique, puisque la société Ditel LLC est imposée aux Etats-Unis sur les revenus tirés de la commercialisation de ses logiciels ; c’est à tort que l’administration considère qu’aucune situation de double imposition n’a été démontrée que ce soit pour la société DITEL LLC ou par M. D… ; or ce dernier déclare régulièrement en France les sommes lui ayant été versées par la société DITEL LLC à savoir la somme de 29 732 en 2010 et de 25 473 en 2011 ; la réserve d’interprétation incluse dans la décision du conseil constitutionnel du 26 novembre 2010, 70 QPC s’incorpore à la loi ; l’article 155 A du code général des impôts ne peut donc pas être appliqué au cas d’espèce sans créer de rupture d’égalité devant les charges publiques pour M. D….
Par des mémoires, enregistrés les 24 avril 2018 et 2 octobre 2018, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
– M. D… domicilié dans la Loire a déclaré aussi des années 2010 et 2011 des pensions de retraite ainsi que des dividendes encaissés à l’étranger d’une société américaine DITEL LLC laquelle est domiciliée dans l’état du Delaware aux États-Unis domiciliée … ; il lui a été indiqué dans le cadre d’une demande d’assistance administrative internationale que M. Ddans l’état du Delaware aux États-Unis était le dirigeant de cette société, en est l’actionnaire majoritaire et détient seul la signature sur le compte bancaire ouvert au nom de la société DITEL LLC auprès de la Barclays Bank ; les règlements de la société IIEESS dans le cadre du contrat avec DITEL LLC sont encaissés sur ce compte bancaire ; l’adresse au Delaware est une simple adresse de domiciliation ; des prestations de services de domiciliation sont facturées annuellement à M. D… à son adresse en France ; M. D… doit être considéré comme possédant le contrôle de la société DITEL LLC ; ce dernier ne conteste pas contrôler cette société et se présente ouvertement comme dirigeant de celle-ci ; DITEL LLC se présente expressément comme poursuivant l’activité d’une précédente société de M. D…, la SARL informatique 42 ayant cessé son activité en 2008 ; l’existence même de droits incorporels qui seraient la propriété de la société DITEL LLC et seraient détenus aux États-Unis n’est pas démontrée ;
– compte tenu des éléments figurant au procès-verbal d’audition de M. B… gérant de la SARL IIEESS, l’administration fiscale a tiré la conclusion qu’alors même que Monsieur D… est domicilié … il a réalisé seul, en France, l’intégralité des prestations facturées par la société DITEL LLC, domiciliée en France ;
– faisant application des dispositions de l’article 155A du code général des impôts, l’administration fiscale a imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux au nom de M. Dau Delaware, à la société française IIEESS, véritable prestataire toutes les sommes versées à la société DITEL LLC ;
– le contrat mentionne que la société DITEL LLC possède un carnet d’adresse de contact et s’oblige à accomplir toutes diligences nécessaires pour promouvoir l’activité de commercialisation des logiciels DITEL pour IIEES ; dans les faits la SARL IIEESS n’acquiert aucun logiciel ni droits incorporels auprès de la société DITEL LLC, laquelle au demeurant ne démontre pas sa qualité de propriétaire des logiciels ;
– contrairement à ce que soutient le requérant le prestataire de services n’est pas la société IIEESSS mais M. D… qui réalise les prestations de promotion et de commercialisation de ses logiciels en France ; la SARL IIEESS se borne à encaisser les paiements en ligne et assurer une partie de la maintenance des logiciels, l’assistance concernant les problèmes logiciels importants étant assurés par M. D… ; ce dernier est à l’origine de la création du site DITEL.fr et du dépôt du nom de domaine auprès de l’AFNIC ; ce dernier exploite le site via une macro lui permettant de réimporter toutes les données, imprime les factures à l’en-tête d’IIEESS, s’occupe de toute la facturation des logiciels DITEL pour IIEESSS et ne perçoit aucune rémunération de la société IIEESS ; il est le seul interlocuteur de M. B… auprès de la société DTEL LLC et éditait la facturation des commissions de DITEL LLC à la SARL IIEESS ; M. D… a rendu seul les prestations au profit de la SARL IIEESS ; il n’est pas établi que la facturation par DITEL LLC à la SARL IIEESS aurait trouvé une contrepartie réelle dans une intervention qui lui aurait été propre et de regarder l’administration fiscale ainsi rendu comme ayant été pour son compte ; l’administration apporte ainsi la preuve que les sommes versées par la société IIEESS à la société DITEL entre dans les prévisions de l’article 155 du code général des impôts ;
– l’administration fiscale n’a jamais entendu écarter le contrat passé en 2007 ; le moyen tiré de l’absence de prise en compte de ce contrat manque donc en fait ;
– l’existence ou non d’un établissement stable en France et indifférente quant à l’applicabilité de l’article 155A du code général des impôts disposait du choix d’imposer les rémunérations soit en démontrant l’existence d’un établissement stable soit ainsi qu’elle a procédé au nom de M. D… ôté d’une activité personnelle ; dans ce second cas la jurisprudence considère que les stipulations conventionnelles ne sont pas échec à l’application de l’article 155 A du code général des impôts lorsque la personne est domiciliée … et que les sommes imposées sur le fondement de cet article concernent des prestations réalisées personnellement par ce contribuable ; en l’espèce M. D… est domiciliée fiscalement en France et les sommes imposées sur le fondement de l’article 155 A du code général des impôts visent des prestations réalisées en France, lesquelles ainsi qu’elles l’ont démontré, sont les résultats d’une activité personnelle exercée par ce dernier ; l’article 155 A du code général des impôts ne vise en aucun cas les seules prestations artistiques ou sportives ; l’article 17 de la convention franco-américaine relatif aux revenus des artistes ou des sportifs n’a pas vocation à s’appliquer ; contrairement à ce que soutient le requérant, il n’existe pas en l’espèce de supériorité de la norme internationale faisant obstacle aux dispositions du droit interne ; les stipulations de l’article 7 de la convention franco-américaine ne pouvant être applicable qu’à la société DITEL LLC et non à M. D… ; l’administration a démontré la réalisation de prestations par ce dernier sur le territoire français et les imposer entre ses mains ;
– il n’existe pas de double imposition pour M. D… ou pour la société DITEL LLC ; il a été tenu compte des observations formulées par le requérant, les sommes initialement déclarées par ce dernier en tant que dividendes encaissés aux États-Unis ont été extournées des bases imposables à l’impôt sur les revenus et aux prélèvements sociaux ; le requérant n’apporte aucune preuve de l’existence d’une double imposition ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la convention signée le 31 août 1994 entre les Etats-Unis d’Amérique et la République française, destinée à éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune ;
– la décision n° 2010-70 QPC du Conseil constitutionnel du 26 novembre 2010 ;
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Bourrachot, président ;
– les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. L’administration fiscale a estimé que les commissions versées en 2009 et en 2010 par la SARL IIEESS, localisée dans la Loire, à la société DITEL LLC, domiciliée …. M. D… fait appel du jugement du 10 octobre 2017, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de décharge de ce dernier pour les années 2009 et 2010 des cotisations supplémentaires d’impôt sur les revenus, de contributions sociales ainsi que des pénalités prises en application des articles 1728 et 1758 du code général des impôts dont il a fait l’objet.
Sur la procédure d’imposition :
2. Il résulte de l’instruction que l’administration fiscale a fait état aussi bien dans la proposition de rectification notamment page 4 et que dans sa lettre de réponse aux observations de M. D… (page 3) du contrat de fourniture de logiciels et d’apporteur d’affaire signé en 2007 et modifié par avenant le 31 décembre 2008 quant au pourcentage de commission devant être accordée par la SARL IIEESS à la société DITEL LLC, celui-ci passant de 90% à 80% à compter du 1er janvier 2009. Contrairement à ce que soutient le requérant, l’administration a pris en compte dans son raisonnement les éléments figurant dans ce contrat et son avenant et n’a pas entendu écarter ces actes et s’est bornée à constater, comme elle était en droit de le faire, que les prestations réalisées en 2009 et en 2010 étaient dans les faits fournies en France par M. D…. Ce faisant, l’administration, qui n’a écarté aucun acte lui étant opposable et notamment pas les contrats de 2007 et 2008 et notamment pas l’acte de cession du 5 juin 2008, s’est placée exclusivement sur le fondement des dispositions de l’article 155 A du code général des impôts, lesquelles sont destinées à faire échec à certaines pratiques visant à soustraire à l’impôt sur le revenu français des rémunérations imposables en France. Elle pouvait mettre en oeuvre ces dispositions sans rechercher si pouvaient également être appliquées les dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales réprimant les abus de droit et n’avait pas, contrairement à ce que soutient le requérant, d’obligation de recourir à la procédure prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l’administration aurait, même de manière implicite, mis en oeuvre la procédure d’abus de droit sans respecter les garanties prévues par l’article L. 64 du livre des procédures fiscales ne peut qu’être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
3. Si une convention bilatérale conclue en vue d’éviter les doubles impositions peut, en vertu de l’article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision fondant l’imposition. Par suite, il incombe au juge de l’impôt, lorsqu’il est saisi d’une contestation relative à une telle convention, de se placer d’abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l’imposition contestée a été valablement établie et, dans l’affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s’agissant de déterminer le champ d’application de la loi d’office, si cette convention fait ou non obstacle à l’application de la loi fiscale.
S’agissant de l’application de la loi fiscale :
4. Aux termes du I de l’article 155 A du code général des impôts : » Les sommes perçues par une personne domiciliée … en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières : – Soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ; – Soit, lorsqu’elles n’établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ; – Soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée … où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l’article 238 A. » Les prestations dont la rémunération est ainsi susceptible d’être imposée entre les mains de la personne qui les a effectuées correspondent à un service rendu pour l’essentiel par elle et pour lequel la facturation par une personne domiciliée … ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte.
5. L’administration fait état des réponses lui ayant été apportées à sa demande d’assistance administrative concernant les personnes dirigeant la société américaine DITEL LLC, les comptes bancaires de cette société et les personnes disposant de la signature sur de tels comptes et des présentations faites par M. D… sur son rôle de dirigeant et de propriétaire de cette société. De tels éléments convergent sur un contrôle de M. D… de cette société, situation au demeurant admise dans ses écritures par le requérant lui-même.
6. M. D… soutient néanmoins que cette seule qualité de » contrôle » de la société DITEL LLC ne saurait permettre à l’administration d’imposer à son nom les sommes ayant été versées par la SARL IIEESS à la société DITEL LCC. Il conteste avoir réalisé des prestations de services susceptibles d’entrer dans le champ d’application de l’article 155 A du code général des impôts en alléguant premièrement que l’administration fiscale n’aurait pas indiqué le contenu des prestations de services qu’il aurait réalisées, deuxièmement que l’administration a méconnu ses droits en ne prenant pas en compte le contrat liant la société DITEL LLC et la SARL IIEESS et en le privant du bénéfice de la procédure de l’article 64 du livre des procédures fiscales portant sur » les abus de droits rampants » consistant en la possibilité de solliciter l’avis du comité de l’abus de droit fiscal, troisièmement que la SARL IIEESS a réalisé les prestations de vente et de commercialisation et doit être regardée comme » un commissionnaire opaque de vente » et quatrièmement que l’administration ne peut pas imposer au titre de l’article 155 A du code général des impôts la » cession » des logiciels DITEL laquelle a été réalisée aux Etats-Unis et non pas en France.
7. En premier lieu, Il résulte de l’instruction et notamment des éléments figurant pages 4 et 6 de la proposition de rectification que l’administration fiscale a estimé que les prestations qui ont été facturées par la société DITEL LLC à la SARL IIEESS à savoir la fourniture de logiciels téléchargeables, le démarchage de clients potentiels, la gestion de l’ensemble des clients DITEL pour la France, la gestion de façon autonome de la commercialisation des logiciels DITEL via le site en ligne internet ditel.fr ont été réalisées en France par M. D…. Dans sa réponse aux observations du requérant, l’administration fiscale, qui fait notamment état du contrat » de fourniture de logiciel et d’apporteur d’affaire » conclu en 2008 entre les deux sociétés et des articles faisant état de la possession de DITEL LLC d’un carnet d’adresse ainsi que des modalités de commission liées à la commercialisation des logiciels DITEL facturées aux clients et réalisées par IEESSS grâce à l’entremise de DITEL LLC, mentionne que la mise à disposition des logiciels par DITEL LLC, en l’absence de support matériel, doit être regardé comme une prestation de service et que les sommes perçues par la société DITEL LLC en rémunération de » la mise à disposition » et de la promotion des logiciels DITEL sont imposables au nom de M. D…. Dans cette même réponse, si l’administration fiscale admet que certaines opérations de maintenance simple quant aux logiciels sont réalisées par la SARL IIEESS, elle mentionne les propos du gérant de cette SARL concernant les maintenances complexes qui sont effectuées par M. D…. Par suite, au regard de tels éléments M. D… n’est pas fondé à soutenir que l’administration fiscale n’aurait pas apporté suffisamment de précisions sur les prestations dont la réalisation était imputée à ce dernier par l’administration fiscale.
8. En deuxième lieu, il résulte de l’instruction que si sont produites par le requérant deux factures établies au nom de la SARL IIEESS les 14 et 15 janvier 2010 concernant la maintenance du site internet ditel.fr par un prestataire extérieur, il ressort des autres pièces que M. D… a déposé comme responsable administratif le nom de domaine ditel.fr auprès de l’association française pour le nommage internet en coopération (AFNIC), que M. D… a créé ce site et est désigné comme étant le directeur de publication de ce même site. Les propos du gérant de la SARL IIEESS tenus lors de son audition par les services fiscaux selon lesquels M. D… dispose d’une » macro » lui permettant de réimporter les données du site marchand ditel.fr lui ayant permis d’éditer des factures clients au nom de la SARL IIEESS ainsi que de procéder à la facturations de ces logiciels DITEL mais également des éléments concernant le commissionnement devant être versé par la SARL IIEESS à la société DITTEL LLC ne sont pas utilement remis en cause par l’allégation, au demeurant non étayée par d’éléments probants, du requérant tenant à l’absence de règlement trimestriel par la SARL IIESSS des factures de commissionnement. Il ressort des mêmes éléments d’audition que le gérant de la SARL indique qu’il n’a pas de fonctions commerciales et qu’il n’assure que la maintenance simple de certains logiciels alors que M. D… assure la maintenance des » problèmes logiciels importants « . Il ressort aussi des éléments non contestés de cette audition et des autres pièces du dossier et notamment du contrat que M. D… est le seul interlocuteur entre la SARL IIEESS et la société DITEL LLC, que bien que présenté comme directeur commercial d’IIEESS, il n’est pas placé sous l’autorité hiérarchique du gérant de la SARL et ne perçoit pas de rémunération d’IIEESS. La production d’une facture concernant la location par la SARL IIEESS d’un espace de réunion au sein des bâtiments du Golf de Saint Etienne ne saurait en tant que tel justifier de la réalisation d’une opération de vente ou de commercialisation des logiciels DITEL menée directement par le gérant de la SARL IIEESS. Il n’est pas allégué que d’autres personnes travaillant pour la SARL IIEESS aient mené des opérations de commercialisation des logiciels DITEL. Dès lors, compte tenu de tels éléments, l’administration fiscale doit être regardée comme établissant que contrairement à ce qui est allégué par le requérant la SARL IIEESS ne peut pas être regardée comme ayant effectué effectivement en France la prestation de service de vente et de commercialisation des logiciels DITEL.
9. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l’article 155 A du code général des impôts que la possibilité qu’elles prévoient d’imposer entre les mains d’une personne qui rend des services les sommes correspondant à la rémunération de ces services lorsqu’elles sont perçues par une personne domiciliée … n’est pas subordonnée, dans l’hypothèse, mentionnée au I de cet article, où la personne qui rend les services est domiciliée …, à la condition que ces services aient été rendus en France. Par suite, et alors qu’il est constant que l’administration fiscale s’est fondée sur le I de l’article 155 A du code général des impôts pour imposer les sommes perçues par DITEL LLC dans les mains de M. D…, la seule argumentation du requérant selon laquelle la prestation de service de » cession des logiciels » aux clients français aurait été rendue aux Etats-Unis, circonstance qui au demeurant n’est établie par aucune pièce du dossier, et non en France, aurait pour effet d’exclure cette prestation du champ des dispositions de l’article 155 A du code général des impôts ne peut qu’être rejetée. Suite aux mesures d’instruction menées par la cour, le requérant n’a produit aucun élément de nature à étayer son allégation sur des droits de propriété détenus par DITELL LLC sur les logiciels en litige et la part des logiciels revendus
10. Il résulte de ce qui précède que l’administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve que les sommes qui ont été facturées par la société DITEL LLC à la SARL IIEESS ne trouve aucune contrepartie réelle dans une intervention propre de cette dernière, permettant de regarder ce service comme ayant été rendu pour son compte et correspondent à des prestations de service qui ont été réalisées essentiellement en France par M. D…. Dès lors, l’administration fiscale a pu à bon droit considérer que de telles sommes pouvaient être regardées comme entrant dans les prévisions de l’article 155 A du code général des impôts et être imposées entre les mains de M. D….
S’agissant de l’application de la convention franco-américaine :
11. En premier lieu, aux termes de l’article 7 de la convention franco-américaine du 31 août 1994 dans sa rédaction applicable : « 1. Les bénéfices d’une entreprise d’un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l’entreprise n’exerce son activité dans l’autre Etat contractant par l’intermédiaire d’un établissement stable qui y e.st situé. Si l’entreprise exerce son activité d’une telle façon, les bénéfices de l