CAA de LYON, 4ème chambre – formation à 3, 07/12/2017, 16LY04163, Inédit au recueil Lebon

·

·

CAA de LYON, 4ème chambre – formation à 3, 07/12/2017, 16LY04163, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Chambéry a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, sur le fondement de l’article R. 541-1 du code de justice administrative,

– à titre principal de condamner solidairement :

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Brière et la société IDEX à lui verser une provision de 613 376,01 euros toutes taxes comprises (TTC) en indemnisation des désordres affectant la ventilation du musée (lot 15) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue, la SARL L’Observatoire 1, la société AMSE SA ou son assureur, la compagnie l’Auxiliaire, à lui verser une provision de 153 585,60 euros TTC en indemnisation des désordres affectant l’éclairage (lot 6) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société Cegelec à lui verser une provision de 7 284,48 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la banque d’accueil (lot 16) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue, le bureau d’études SGI Ingénierie venant au droits et obligations du bureau d’études Cetec, la société SA Botta et Fils ou son assureur, la compagnie l’Auxiliaire et la société SA Grepi, à lui verser une provision de 22 968 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la dalle en béton (lot 1) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société Process sol à lui verser une provision de 96 109, 20 euros TTC en indemnisation des désordres affectant le sol en résine (lot 11) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SAS Devaux Fillard à lui verser une provision de 43 256,70 euros TTC en indemnisation des désordres affectant le dispositif d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite (lot 5) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SA Botta et Fils ou son assureur, la compagnie l’Auxiliaire à lui verser une provision de 38 628 euros TTC en indemnisation des nuisances olfactives provenant des toilettes ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SAS Devaux Fillard à lui verser une provision de 89 244 euros TTC en indemnisation des désordres relatifs aux moisissures affectant les fenêtres ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Brière et la société IDEX à lui verser une provision de 72 000 euros TTC en indemnisation des désordres affectant les humidificateurs ainsi qu’une une provision de 3 000 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la ventilation et la climatisation ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SA Botta et Fils ou son assureur, la compagnie l’Auxiliaire, à lui verser une provision de 6 000 euros TCC en indemnisation du préjudice subi par les agents du musée du fait des nuisances olfactives provenant des toilettes ;

– à titre subsidiaire, de condamner chacune de ces entreprises conformément à la répartition opérée par l’expert ;

– de mettre solidairement à la charge du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Brière, de la société IDEX, du bureau d’études Michel Forgue, de la SARL L’Observatoire 1, de la société AMSE SA, de la société Cegelec, du bureau d’études SGI Ingénierie, de la société SA Botta et fils ou son assureur, la compagnie l’Auxiliaire, de la société SA Grepi, de la société Process Sol et de la SAS Devaux Fillard, les frais et honoraires de l’expertise liquidés à la somme de 60 132, 70 euros TTC.

Par une ordonnance n° 1602754 du 21 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a :

– condamné solidairement :

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la SARL L’Observatoire 1 à verser à la commune de Chambéry une provision de 81 704 euros HT en indemnisation des désordres affectant l’éclairement de la salle d’exposition temporaire ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue, la SARL L’Observatoire 1 et la société AMSE SA à verser à la commune de Chambéry une provision de 46 684 euros HT en indemnisation des désordres affectant l’éclairement de la salle d’exposition permanente ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue, et la société SA Botta et Fils à verser à la commune de Chambéry une provision de 9 500 euros HT en indemnisation des désordres affectant le raccordement des sanitaires du musée à l’évacuation des eaux usées ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société Devaux Fillard à verser à la commune de Chambéry une provision de 74 370 euros HT en indemnisation des désordres affectant les embrasures des fenêtres rénovées du rez-de-chaussée du musée ;

– rejeté le surplus des conclusions de la requête ;

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête et un mémoire non communiqué, enregistrés respectivement les 8 décembre 2016 et 31 mars 2017, sous le n° 16LY04163, la SARL L’Observatoire 1, représentée par la SCP Guidetti – Bozzarelli – Le Mat, demande à la cour :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 1602754 du 21 novembre 2016 en tant qu’elle la condamne solidairement à verser à la commune de Chambéry, d’une part, une provision totale de 128 388 euros HT en indemnisation des désordres affectant l’éclairement de la salle d’exposition temporaire et de la salle d’exposition permanente, et d’autre part, une somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

– contrairement à ce qu’a jugé le juge des référés, le groupement de maîtrise d’oeuvre auquel elle appartient n’est pas solidaire mais conjoint ;

– le déficit d’éclairage naturel ne lui est pas imputable dès lors qu’elle n’a participé qu’à la conception de l’éclairage artificiel, exempt de tout désordre ;

– en tout état de cause, le maître d’ouvrage était parfaitement à même d’appréhender dans toute son étendue, les conséquences potentielles des désordres apparents affectant l’éclairement naturel sur les oeuvres exposées dans le musée ; sa responsabilité au titre de la garantie décennale ne peut donc pas être recherchée.

Par deux mémoires, enregistrés les 18 janvier et 21 février 2017, la commune de Chambéry, représentée par la société d’avocats CMS Bureau Francis Lefebvre, conclut au rejet des conclusions de la requête et à ce qu’une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la SARL L’Observatoire 1 sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

– l’acte d’engagement du marché de maîtrise d’oeuvre opère une simple répartition des honoraires par masse financière sans définir précisément la répartition des tâches entre les membres du groupement ;

– en tout état de cause, la SARL L’Observatoire 1 s’exposait à une condamnation in solidum dès lors qu’elle est intervenue sur l’ensemble des missions de maîtrise d’oeuvre en matière d’éclairage tant artificiel que naturel et qu’elle est co-auteur du dommage subi;

– le dommage n’était pas apparent pour le maître d’ouvrage à la date de réception ; en tout état de cause, s’il l’était, la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d’oeuvre pourrait être engagée pour manquement à son devoir de conseil ;

– le désordre lié à l’éclairage est de nature à rendre impropre à sa destination le musée compte tenu de l’intensité lumineuse excessive du soleil et de la lumière artificielle sur les oeuvres d’art qui ne permet pas de respecter les conditions réglementaires minimales de conservation ;

– si la commune a conclu un protocole transactionnel avec la société Blanc Bouvier s’agissant des désordres concernant l’éclairage naturel de la salle d’exposition temporaire, aucune conciliation n’a pu intervenir s’agissant des désordres relatifs à l’éclairage naturel de la salle d’exposition permanente.

Par un mémoire, enregistré le 14 février 2017, le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien et le bureau d’études Michel Forgue, représentés par MeB…, concluent au rejet de la requête, à ce qu’une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SARL L’Observatoire 1 sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et à ce que l’appelante soit condamnée aux entiers dépens.

Ils font valoir que :

– la conception et le suivi des travaux relatifs à l’éclairage, tant naturel qu’artificiel, entraient dans le cadre de la mission confiée à l’appelante ;

– les désordres ne peuvent être qualifiés d’apparents à la date de la réception.

Vu les lettres du 20 février 2017 par lesquelles, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, les défendeurs n’ayant pas produit leur mémoire en défense, ont été mis en demeure de produire, dans un délai de 20 jours, leurs conclusions en réponse à la requête ;

Par ordonnance du 14 mars 2017, la clôture d’instruction a été fixée au 3 avril 2017.

II ) Par une requête, des mémoires enregistrés le 19 décembre 2016, le 18 janvier, le 22 février, le 3 avril 2017 et un mémoire non communiqué enregistré le 21 septembre 2017, sous le n° 16LY04351, la commune de Chambéry, représentée par la société d’avocats CMS Bureau Francis Lefebvre, demande à la cour :

1°) de réformer l’ordonnance n° 1602754 du 21 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble :

– en ce qu’elle n’a pas fait droit à ses demandes de provision portant, d’une part, sur les désordres ou les malfaçons affectant la ventilation, la banque d’accueil, la dalle en béton du rez-de-chaussée, le sol en résine de la salle d’exposition permanente et le dispositif d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite du premier étage de la salle d’exposition permanente, d’autre part, sur le préjudice matériel liés à l’obligation de remplacer les humidificateurs des CTA à une fréquence deux fois plus élevée que celle prévue et celui d’agrément du à l’inconfort des agents du musée, causé par les dysfonctionnements de l’aéroréfrigérant, de la VMC et de la ventilation des locaux et des nuisances olfactives des toilettes, et enfin, sur les frais d’expertise mis à sa charge ;

– en qu’elle a limité la provision de l’indemnisation des désordres et malfaçons concernant les nuisances olfactives des sanitaires ;

– en ce qu’elle a rejeté les demandes de condamnation en valeur  » toutes taxes comprises  » ;

2°) à titre principal, de condamner solidairement :

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Brière et la société IDEX à lui verser une provision de 613 376,01 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la ventilation du musée (lot 15) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société Cegelec à lui verser une provision de 7 284,48 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la banque d’accueil (lot 16) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue, le bureau d’études SGI Ingénierie venant au droits et obligations du bureau d’études Cetec, la société SA Botta et Fils et la société SA Grepi, à lui verser une provision de 22 968 euros TTC en indemnisation des désordres affectant la dalle en béton (lot 1) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société Process sol à lui verser une provision de 96 109,20 euros TTC en indemnisation des désordres affectant le sol en résine (lot 11) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SAS Devaux Fillard à lui verser une provision de 43 256,70 euros TTC en indemnisation des désordres affectant le dispositif d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite (lot 5) ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SA Botta et Fils à lui verser une provision de 25 800 euros TTC en indemnisation des nuisances olfactives provenant des toilettes ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Brière et la société IDEX à lui verser une provision de 72 000 euros TTC en indemnisation des désordres affectant les humidificateurs ainsi qu’une une provision de 3 000 euros TTC en indemnisation des préjudices subis par les agents du musée en raison des désordres affectant la ventilation et la climatisation ;

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, le bureau d’études Michel Forgue et la société SA Botta et Fils à lui verser une provision de 6 000 euros TTC en indemnisation du préjudice subi par les agents du musée du fait des nuisances olfactives provenant des toilettes ;

3°) A titre subsidiaire, de condamner :

. le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien à lui verser une provision de 133 205, 30 euros TTC ;

. le bureau d’études Brière à lui verser une provision de 514 686,30 euros TTC ;

. la société IDEX à lui verser une provision de 104 852 euros TTC ;

. le bureau d’études Michel Forgue à lui verser une provision de 27 343,12 euros TTC ;

. la société Cegelec à lui verser une provision de 3 642,24 euros TTC ;

. le bureau d’études SGI Ingénierie à lui verser une provision de 2 296,80 euros TTC ;

. la société SA Botta et fils à lui verser une provision de 26 235,60 euros TTC ;

. la société SA Grepi à lui verser une provision de 6 890,40 euros TTC ;

. la société Process sol à lui verser une provision de 57 665,52 euros TTC ;

. la SAS Devaux Fillard à lui verser une provision de 12 977,01 euros TTC ;

4°) de mettre solidairement à la charge du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Brière, de la société IDEX, du bureau d’études Michel Forgue, de la société Cegelec, du bureau d’études SGI Ingénierie, de la société Botta et fils, de la société SA Grepi, de la société Process Sol et de la SAS Devaux Fillard les frais et honoraires de l’expertise liquidés à 60 132,70 euros TTC ;

5°) de mettre à la charge des sociétés défenderesses une somme de 7 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

– la condamnation devra être prononcée solidairement quelle que soit la qualification donnée au groupement de maîtrise d’oeuvre ;

– pris ensemble, les désordres affectant la ventilation, l’éclairage du musée, la banque d’accueil, la dalle en béton du rez-de-chaussée, le sol en résine de la salle d’exposition permanente, le dispositif d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite du premier étage de la salle d’exposition permanente, les nuisances olfactives des toilettes et les moisissures sur les bords des fenêtres rendent l’ouvrage impropre à sa destination ;

– pris isolément, ils rendent le musée impropre à sa destination et sont couverts par la garantie décennale ; en tout état de cause, ils sont couverts par la garantie de parfait achèvement et/ ou par la responsabilité contractuelle de la maîtrise d’oeuvre qui a manqué à son devoir de conseil lors de la réception des travaux ; la responsabilité de la société Grepi, sous-traitante de la société Botta et fils peut être engagée sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle ;

– s’agissant des désordres concernant les nuisances olfactives des toilettes, c’est à tort que le juge des référés a limité la provision due à la somme de 9 500 euros HT ;

– elle subit un préjudice matériel lié à l’obligation de remplacer les humidificateurs des CTA deux fois plus rapidement que prévu et les personnels du musée subissent un préjudice d’agrément du fait des dysfonctionnement de l’aéroréfrigérant, de la VMC et de la ventilation ainsi que des nuisances olfactives provenant des toilettes ;

– les montants des sommes dues à titre de provision doivent être exprimés  » toutes taxes comprises  » ;

– les demandes provisionnelles ne sont pas contestables tant sur le fond que sur le quantum ;

Par un mémoire, enregistré le 10 janvier 2017, la SARL Process Sol, représentée par la SCP Chapuis, Chantelove, Guillet, Lhomat, conclut au rejet des conclusions de la requête dirigées contre elle et à ce qu’une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune de Chambéry sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

– le désordre affectant le sol en résine de la salle d’exposition permanente n’est pas de nature décennale ;

– l’action en garantie de parfait achèvement est prescrite.

Par deux mémoires enregistrés le 26 janvier et 31 mars 2017, la SARL L’Observatoire 1, représentée par la SCP Guidetti – Bozzarelli – Le Mat, conclut au rejet de la requête en tant que la commune de Chambéry sollicite le versement de provisions  » toutes taxes comprises « , ainsi qu’au rejet des conclusions d’appel en garantie dirigées contre elle, et à ce qu’une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune appelante sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

– la commune de Chambéry reconnaît très explicitement dans ses écritures être assujettie à la TVA pour les marchés publics de travaux immobiliers et donc susceptible de pouvoir déduire cette TVA de ses investissements ;

– le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien n’a pas formé d’appel en garantie dans l’instance n° 16LY04163 ; en tout état de cause, elle n’a pas pris part à la mission relative à l’éclairage naturel.

Par deux mémoires, enregistrés les 13 février et 3 avril 2017, le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien et le bureau d’études Michel Forgue, représentés par Me B…, concluent au rejet des conclusions de la requête dirigées contre eux et demande à la cour :

1°) de condamner :

. le bureau d’études Brière et la société IDEX à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant le système de chauffage et de climatisation ;

. la SARL L’Observatoire 1, la société AMSE, la société Dunoyer et la société Devaux Fillard à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant l’éclairage naturel de la salle d’exposition permanente ;

. la société Process Sol à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant le sol en résine de la salle d’exposition permanente ;

. le bureau d’études SGI Ingénierie, la société Botta et Fils et la société Grépi, à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant la dalle béton du rez-de-chaussée ;

. la société Devaux Fillard à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant l’accessibilité de l’escalier desservant la salle d’exposition permanente ;

. la société Cegelec, le bureau d’études Brière, la société Botta et fils et la société Grepi à les garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant la banque d’accueil et en particulier l’accessibilité du dispositif SSI ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux entiers dépens.

Ils font valoir que :

– ils ne sauraient être tenus à une réparation solidaire des désordres dès lors que le groupement de maîtrise d’oeuvre auquel ils appartiennent était un groupement conjoint et non solidaire ;

– les désordres ne sont pas de nature décennale ou ne peuvent leur être imputés ;

– la commune de Chambéry n’établit pas ne pas pouvoir déduire la TVA de sorte que les provisions doivent être exprimées en montants  » hors taxes « .

Vu les lettres du 20 février 2017 par laquelle, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, les défendeurs n’ayant pas produit leur mémoire en défense, ont été mis en demeure de produire, dans un délai de 20 jours, leurs conclusions en réponse à la requête ;

Par deux mémoires, enregistrés les 27 mars et 3 avril 2017, et un mémoire non communiqué du 21 septembre 2017, la SAS IDEX, représentée par la SCP Guidetti – Bozzarelli – Le Mat, conclut au rejet des conclusions de la requête dirigées contre elle et demande à la cour :

1°) à titre subsidiaire, de condamner le bureau d’études Brière et le cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien à la garantir de toute condamnation prononcée en indemnisation des désordres affectant l’aéroréfrigérant en toiture, la VMC double flux, les centrales de traitement d’air ainsi que les désordres liés au confort thermique de la banque d’accueil ;

2°) à titre très subsidiaire, de limiter le montant des provisions mises à sa charge à 60 885,22 euros HT, soit 73 062,26 euros TTC au titre de la reprise des aéroréfrigérants, 2 714,44 euros HT, soit 3 257,33 euros TTC, au titre de la reprise de la VMC double flux et 8 139,02 euros HT, soit 9 766,82 euros TTC, au titre de la reprise des CTA ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

– les désordres ou malfaçons pour lesquels sa condamnation est recherchée étaient visibles à la réception et n’ont pas fait l’objet de réserves, ce qui les excluent tant de la garantie décennale que de la garantie de parfait achèvement ;

– qu’elle ne saurait être condamnée pour des désordres auxquels elle n’a pas pris part.

Par un mémoire, enregistré le 29 mars 2017 et un mémoire récapitulatif, enregistré le 31 mars 2017, le bureau d’études Brière, représenté par la SELARL Cabinet Laurent Favet, conclut au rejet des conclusions de la requête et des appels en garantie dirigés contre lui et à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Chambéry sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

– les désordres affectant le chauffage, la ventilation et la climatisation ne sont pas de nature décennale ; ces désordres étaient visibles à la réception des travaux et ils ne rendent pas l’ouvrage impropre à sa destination ;

– le groupement de maîtrise d’oeuvre n’a commis aucune faute lors de la réception des travaux, sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée ;

– la garantie de parfait achèvement ne pèse pas sur le maître d’oeuvre mais seulement sur l’entrepreneur concerné ;

– aucune faute ne peut lui être imputée à titre individuel ;

– à supposer que la cour la condamne à verser une provision à la commune de Chambéry, les sommes sollicitées par cette dernière doivent être limitées et exprimées  » hors taxes  » ;

– la cour n’est pas compétente pour statuer sur les appels en garantie du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien et du bureau d’études Michel Forgue à son encontre ; en tout état de cause, ils n’apportent pas la preuve qu’il aurait commis une faute.

Par un mémoire, enregistré le 30 mars 2017, la société Grépi, représentée par la SCP d’avocats Verne – Bordet – Orsi – Tetreau, conclut au rejet des conclusions de la requête dirigées contre elle et à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Chambéry sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

– la commune de Chambéry n’est pas recevable à solliciter sa condamnation dès lors qu’elles n’ont pas directement contracté ensemble ;

– la commune appelante ne détient à son encontre aucune créance non sérieusement contestable qui lui permettrait de solliciter sa condamnation à titre solidaire ou divise, sur un fondement quelconque, à l’indemniser, à titre provisionnel pour les désordres affectant la dalle en béton du rez-de-chaussée du musée.

Par un mémoire, enregistré le 6 avril 2017, la SAS Reffet, représentée par la SELARL CDMF Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la commune de Chambéry sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les conclusions de la commune de Chambéry sont irrecevables à son encontre dès lors qu’elle n’a pas participé aux opérations d’expertise ; elle doit, en tout état de cause, être mise hors de cause.

Par ordonnance du 1er septembre 2017, la clôture d’instruction a été fixée au 21 septembre 2017 ;

Par une lettre du 6 octobre 2017, les parties concernées ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d’office un moyen tiré de ce que la commune de Chambéry n’est pas recevable à invoquer, pour la première fois en appel, le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle de la société Grépi, sous-traitant de la société Botta et fils, au titre des désordres affectant la dalle béton du rez-de-chaussée du musée.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

– le code civil ;

– le code des marchés publics ;

– le code général des impôts ;

– le décret n° 93-1238 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’oeuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

– Vu l’arrêté du 1er août 2006 fixant les dispositions prises pour l’application des articles R. 111-19 à R. 111-19-3 et R. 111-19-6 du code de la construction et de l’habitation relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public lors de leur construction ou de leur création, et notamment son article 7 ;

– le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Lesieux,

– les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

– et les observations de MeC…, représentant la SARL l’Observatoire1 et la société Idex, MeA…, représentant la commune de Chambéry, MeB…, représentant le cabinet d’architecture Frenak et Jullien et le bureau Michel Forgue, MeI…, représentant le bureau d’études Brière, MeD…, substituant MeE…, représentant la société Reffet et Me G…, représentant la société Process Sol ;

1. Considérant que les requêtes enregistrées sous les nos 16LY04163 et 16LY04351, présentées par la SARL L’Observatoire 1 et la commune de Chambéry, ainsi que les conclusions du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien présentent à juger des questions identiques et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

2. Considérant que, pour rénover son musée des beaux-arts, la commune de Chambéry a, après appel d’offres, conclu en 2007 un marché de maîtrise d’oeuvre et, en 2008 des marchés de travaux, modifiés en 2010 ; que les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 9 mars 2012 et que le musée a été inauguré le 17 mars suivant ; que des dysfonctionnements sont rapidement apparus, en particulier concernant l’hygrométrie, la régulation de la température et l’éclairement ainsi que la diffusion d’odeurs nauséabondes dans l’établissement ; que, sur saisine de la commune de Chambéry, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a, par ordonnance du 15 juillet 2013, désigné un expert judiciaire qui a remis son rapport le 25 novembre 2015 ; que la commune de Chambéry a alors saisi le juge des référés de ce même tribunal sur le fondement de l’article R. 541-1 du code de justice administrative ; que par une ordonnance du 21 novembre 2016, le juge des référés a fait droit, en partie, aux conclusions de la commune de Chambéry et, sur le fondement de la garantie décennale, a mis à la charge solidaire du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Michel Forgue et de la SARL L’Observatoire 1 une provision de 81 704 euros hors taxe (HT) au titre des désordres affectant l’éclairement de la salle d’exposition temporaire, du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Michel Forgue, de la SARL L’Observatoire 1 et de la société AMSE SA, une provision de 46 684 euros HT au titre des désordres affectant l’éclairement de la salle d’exposition permanente, du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Michel Forgue et de la SA Botta et fils une provision de 9 500 euros HT au titre des désordres affectant le dispositif de raccordement des toilettes du musée à l’évacuation des eaux usées, du cabinet d’architecture Catherine Frenak et Béatrice Jullien, du bureau d’études Michel Forgue et de la société Devaux Fillard une provision de 74 370 euros HT au titre des désordres affectant les embrasures des fenêtres rénovées du rez-de-chaussée du musée ; que par une requête, enregistrée sous le n° 16LY04163, la SARL L’Observatoire 1 demande à la cour d’annuler l’ordonnance du 21 novembre 2016 en tant qu’elle la condamne solidairement à verser à la commune de Chambéry une provision en indemnisation des désordres affectant l’éclairement des salles d’exposition temporaire et permanente ; que par une requête, enregistrée sous le n° 16LY04351, la commune de Chambéry demande à la cour de réformer l’ordonnance du 21 novembre 2016 et de faire droit à ses conclusions rejetées par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 555-1 du code de justice administrative :  » Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais.  » ; qu’aux termes de l’article R. 541-1 du même code :  » Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie.  » ; qu’il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s’assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l’existence avec un degré suffisant de certitude ; que, dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n’a d’autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l’obligation dont les parties font état ;

4. Considérant qu’il résulte des principes qui régissent la responsabilité décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d’épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l’ouvrage ou à


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x