CAA de LYON, 2ème chambre – formation à 3, 17/11/2015, 14LY02551, Inédit au recueil Lebon

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CAA de LYON, 2ème chambre – formation à 3, 17/11/2015, 14LY02551, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B…A…ont demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2008 et des pénalités y afférentes, la mise à la charge de l’Etat d’une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et le remboursement des dépens pour un montant de 35 euros.

Par un jugement n° 1106747 du 30 mai 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2014, M. et Mme B…A…, représentés par MaîtreC…, demandent à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1106747 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

– la charge de la preuve d’établir le bien-fondé des impositions litigieuses et de l’application de pénalités pour manquement délibéré, incombe à l’administration ;

– le caractère exagéré de l’évaluation de la valeur vénale du bien en cause fixée par l’administration à 180 000 euros est démontré par le fait que ce bien a été acquis par adjudication le 15 septembre 2005, soit deux ans et demi avant sa cession, pour un prix de 100 000 euros ; le prix d’adjudication représente nécessairement la valeur vénale du bien à la date de cette adjudication et la valeur de ce bien ne peut pas avoir été augmentée de 80 % en deux ans ;

– c’est à tort que le tribunal administratif a refusé d’admettre que rien n’indiquait que la société LCG aurait eu l’intention de concéder une libéralité à M. A…;

– les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées car rien n’indique qu’ils aient eu l’intention d’éluder l’impôt alors qu’ils ont pris soin de retenir une valeur vénale supérieure à celle de l’adjudication.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête de M. et MmeA….

Il soutient que :

– l’imposition est bien-fondée ; la cession par l’EURL LCG du bien en cause à son gérant, dix-huit mois avant l’expiration du délai de quatre ans dont elle disposait en application de l’article 1115 du code général des impôts à un prix inférieur à sa valeur vénale et sans contrepartie, constitue un acte anormal de gestion ; dans ces conditions la différence entre la valeur vénale et le prix de cession doit être regardée comme une libéralité injustifiée ; le service justifie selon la méthode par comparaison que la valeur du bien litigieux s’élevait à la date de la cession à 4 324 euros le m², soit une valeur vénale de 180 051 euros au lieu de 125 000 euros ; le service a tenu compte des observations du contribuable relatives à l’état du bien, à la proximité d’un parking et à la nature d’entrepôt de ce bien, en affinant les termes de comparaison retenus, notamment en écartant les quatre termes les plus élevés et réduit ainsi le prix au m² de 5 007 euros à 4 324 euros ; les cinq termes de comparaison finalement retenus correspondent à des ventes intrinsèquement similaires au bien litigieux ; la valeur vénale doit être fixée par comparaison avec des prix de ventes similaires et non par ajustement d’une valeur antérieure d’autant qu’en l’espèce, l’EURL a effectué des travaux sur le bien pour un montant de 23 000 euros hors taxe ;

– l’application de la majoration pour manquement délibéré est fondée compte tenu de l’importance de la minoration du prix de vente, des liens unissant l’EURL LCG et M.A…, son gérant et unique associé, de l’implication personnelle de M.A…, de l’activité de marchand de biens de l’EURL LCG et de la circonstance que cette dernière disposait en application de l’article 1115 du code général des impôts de délais suffisants pour soumettre le local au jeu de l’offre et de la demande.

Vu :

– les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Mear,

– et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que l’EURL LCG, qui exerce une activité de marchand de biens, a acquis le 15 septembre 2005, par voie d’adjudication, sous le régime de l’article 1115 du code général des impôts, un local à usage d’entrepôt de 41,64 m² sis 81/83 rue du Faubourg du Temple à Paris 10ème arrondissement, pour un montant de 100 000 euros ; qu’elle a revendu ce bien, le 11 avril 2008, à M.A…, son gérant et unique associé, pour le prix de 125 000 euros ; que l’administration estimant que cette cession a été faite, sans contrepartie, à un prix inférieur à la valeur vénale de ce bien a considéré que l’EURL LCG a commis un acte anormal de gestion ; qu’elle a évalué la valeur vénale du bien en cause à 180 051 euros TTC et, en conséquence, réintégré, au bénéfice industriel et commercial de l’année 2008 de l’EURL LCG et de M. A…, son unique actionnaire, la somme de 46 029 euros HT (180 051 euros – 125 000 euros = 55 051 euros TTC, soit 46 029 euros HT) au titre de la minoration de cette vente ; que M. et Mme A…ont été, par suite, assujettis à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l’année 2008, lesquelles ont été assorties d’intérêts de retard et de pénalités pour manquement délibéré ; que M. et MmeA…, qui ne contestent que ce rehaussement, relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 mai 2014 qui a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

Sur le bien-fondé de l’imposition :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 8 du code général des impôts :  » (…) les associés des sociétés (…) sont, lorsque ces sociétés n’ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l’impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société (…) : Il en est de même, sous les mêmes conditions : (…) 4° De l’associé unique d’une société à responsabilité limitée lorsque cette société est une personne physique  » ; qu’aux termes de l’article 35 du même code :  » 1. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés.(…)  » ;

3. Considérant que le résultat qui doit être compris dans les bases de l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; que s’il appartient à l’administration d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages octroyés par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n’est pas en mesure de justifier qu’elle a bénéficié en retour de contreparties ; que, dans l’hypothèse où elle s’acquitte de cette obligation, il incombe ensuite à l’administration, si elle s’y croit fondée, d’apporter la preuve de ce que cet avantage est dépourvu de contrepartie, qu’il a une contrepartie dépourvue d’intérêt pour l’entreprise ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, pour évaluer la valeur vénale du bien vendu par l’EURL LCG à 180 051 euros, soit 4 324 euros/m², l’administration fiscale s’est fondée sur cinq termes de comparaison correspondant à des ventes d’entrepôts et d’ateliers sis dans le dixième arrondissement de Paris, construits dans les années 1850-1900 et ne donnant pas, comme le bien en cause, directement sur la rue ; qu’elle soutient avoir écarté les quatre termes de comparaison les plus élevés initialement mentionnés dans la proposition de rectification et réduit de 5 007 euros/m² à 4 324 euros/m² la valeur retenue afin de prendre en compte les observations du contribuable relatives à l’état du bien, aux nuisances occasionnées par la proximité d’un parking et à l’activité d’entrepôt du bien en cause ; que les requérants contestent la valeur vénale retenue en dernier lieu par l’administration fiscale en se bornant à faire valoir que la valeur dudit bien, acquis par voie d’adjudication, pour un montant de 100 000 euros, ne peut avoir augmentée de 80 % en deux ans, ne critiquent pas ainsi sérieusement les termes de comparaison finalement retenus par l’administration ; que, dans ces conditions, l’administration fiscale établit que la cession du bien en cause par l’EURL LCG à M.A…, son gérant et unique associé, à une valeur minorée de 55 051 euros TTC et, sans contrepartie, est constitutive d’un acte anormal de gestion ; que, par ailleurs, à supposer même qu’une intention libérale de l’EURL LCG envers M. A…, son gérant, ne serait pas établie, une telle circonstance serait sans incidence sur la rectification effectuée qui n’est pas fondée sur une distribution occulte au sens de l’article 111 c du code général des impôts mais sur un acte anormal de gestion ; que c’est, dès lors, à bon droit que l’administration fiscale a réintégré au bénéfice industriel et commercial de M.A…, la somme de 46 029 euros ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

5. Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts :  » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (…)  » ;

6. Considérant qu’en faisant valoir l’importance de la minoration du prix de vente du local cédé par l’EURL LCG à M.A…, les liens unissant cette société et M.A…, son gérant et unique associé, l’implication personnelle de M. A…au titre de l’activité de marchand de biens de l’EURL LCG, l’administration apporte la preuve, qui lui incombe, du manquement délibéré de M. A…et justifie, dès lors, l’application de la majoration de 40 % litigieuse ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A…ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. et Mme A…la somme qu’ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A…est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B…A…et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l’audience du 20 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 novembre 2015.

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N° 14LY02551

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