Bon de visite : 6 décembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/03772

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Bon de visite : 6 décembre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/03772
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N° RG 20/03772 – N° Portalis DBVM-V-B7E-KUDA

C2

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

la SELARL CABINET ALMODOVAR

Me Florence SERPEGINI

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 6 DECEMBRE 2022

Appel d’un jugement (N° R.G. 18/03160)

rendu par le tribunal judiciaire de Valence

en date du 10 septembre 2020

suivant déclaration d’appel du 30 novembre 2020

APPELANTS :

M. [W]-[G] [O]

né le 9 juillet 1981 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/012531 du 05/01/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)

LA S.C.I. SCI FINCH IMMOBILIER prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE

LA S.C.I. GNC pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Serge ALMODOVAR de la SELARL CABINET ALMODOVAR, avocat au barreau de Valence

INTIMÉS :

M. [S] [B]

né le 01 Juin 1941 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Localité 3]

LA SOCIÉTÉ IMOCONSEIL prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 6]

représentés par Me Florence SERPEGINI, avocat au barreau de Valence

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Catherine CLERC, présidente,

Mme Joëlle BLATRY, conseiller,

M. Laurent DESGOUIS, vice-président placé,

DÉBATS :

A l’audience publique du 24 octobre 2022 Mme Joëlle BLATRY, conseiller chargée du rapport en présence de Mme Catherine CLERC présidente de chambre, assistées de Mme M.C. OLLIEROU, greffière, ont entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Elle en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.

****

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Le 5 janvier 2017, M. [S] [B], agent commercial exerçant sous l’enseigne Agence Imeo Développement a reçu mandat non exclusif de la part de la SCI GNC, représentée par son gérant M. [I] [Z], en vue de la vente d’un immeuble locatif comportant 5 logements, sis sur la commune de Crest (26), moyennant un prix net vendeur de 260.000€ et des honoraires pour le mandataire de 12.000€.

Reprochant la vente du bien à la SCI Finch Immobilier, sans sa participation, alors que M. [O], associé de cette SCI, leur a signé le 20 janvier 2017 un bon de visite pour cet immeuble, M. [B] et la SAS Imoconseil ont, suivant exploit d’huissier des 11 et 22 octobre 2018, fait citer la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] en condamnation à leur payer des dommages-intérêts.

Par jugement du 10 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Valence a :

débouté M. [O] de sa demande de mise hors de cause,

débouté les défendeurs de leur demande d’annulation du mandat de vente,

condamné in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer la somme de 8.100€ à M. [B],

condamné in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer la somme de 900€ à la SAS Imoconseil,

condamné M. [O] à payer la somme de 300€ à M. [B] au titre de son préjudice moral,

débouté M. [B] de sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive,

condamné in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer à M. [B] une indemnité de procédure de 3.000€ et à supporter les dépens.

Suivant déclarations des 30 novembre 2020, 22 décembre 2020 et 26 février 2021, M. [O], puis la SCI GNN et, enfin, la SCI Finch Immobilier ont relevé appel de cette décision.

Les trois procédures ont été jointes le 23 mars 2021.

Au dernier état de ses écritures en date du 16 septembre 2022, la SCI Finch Immobilier demande à la cour d’infirmer le jugement déféré et de :

1) à titre principal, déclarer M. [B] et la société Imoconseil irrecevables en leur demande de paiement,

2) subsidiairement, prononcer la nullité du mandat de vente sans exclusivité,

3) plus subsidiairement, débouter M. [B] et la SAS Imoconseil de l’ensemble de leurs prétentions,

4) encore plus subsidiairement, dire que le montant de la clause pénale ne saurait excéder la somme de 1.200€,

5) en tout état de cause, condamner M. [B] et la société Imoconseil à lui payer une indemnité de procédure de 4.000€.

Elle fait valoir que :

sur l’irrecevabilité des demandes adverses

le mandat de vente a été signé avec la société Imeo Développement ainsi que le bon de visite qui est à son en-tête,

dès lors, que ce soit le vendeur ou les personnes qui ont visité le bien ou que ce soit les acquéreurs, aucun d’entre eux n’est lié contractuellement avec M. [B],

la cession du fonds de commerce de la société Imeo Développement à la société Imoconseil ne fait que confirmer l’irrecevabilité des demandes adverses,

l’acte de cession du fonds de commerce stipule que sont cédés les compromis de vente signés avant le 18 juillet 2018, ce qui ne concerne pas la présente situation,

ainsi, seule la société Imeo Développement était recevable à réclamer des dommages-intérêts sur la base du mandat de vente et certainement pas son agent commercial,

si la cession de fonds de commerce a transféré au cessionnaire la propriété des éléments du fonds cédé, elle n’a pas de plein droit substitué ce dernier au cédant dans les relations contractuelles et commerciales que celui-ci entretenait avec ses clients,

la cession de fonds de commerce ne transfère pas au cessionnaire le pouvoir d’agir en justice en substitution de la société Imeo Développement,

l’accord signé entre M. [B] et la société Imoconseil ne lui est pas opposable puisqu’elle n’est pas intervenue ni M. [O] à cet accord,

sur la nullité du mandat de vente

le mandat de vente litigieux ne comporte pas de numéro, ce que le tribunal n’a pas manqué de relever,

toutefois le tribunal n’en a pas tiré les conséquences,

au regard du non-respect des formalités substantielles, le mandat de vente est nul d’une nullité absolue,

le fait que le registre des mandats mentionne le numéro litigieux ne régularise pas le défaut de mention de numéro sur l’exemplaire du mandat en possession du mandant,

si la cour venait à suivre le raisonnement adverse, cela équivaudrait à renverser la charge de la preuve et à méconnaitre l’article 6 de la loi Hoguet,

le mandat de vente étant entaché de nullité, aucune somme ne saurait être réclamée en vertu de celui-ci,

contrairement à ce que les intimés prétendent, la nullité peut être invoquée par toute partie y ayant intérêt et pas seulement par le signataire du mandat, la SCI GNC,

en outre, le mandat litigieux ne comporte pas davantage le numéro et le lieu de délivrance de la carte professionnelle ainsi que le nom et l’adresse du garant financier,

sur le caractère mal fondé des demandes

le bon de visite concerne un bien situé au [Adresse 4] alors que le bien vendu est situé au [Adresse 5],

il n’est donc pas démontré que M. [O] ait visité le bien litigieux,

en revanche, M. [O] a visité avec le vendeur le bien situé au numéro 37, de sorte que la vente ne porte pas sur le bien visité par l’entremise de M. [B] suite à laquelle l’opération a été conclue.

Par dernières écritures du 169 septembre 2022, M. [O] demande à la cour d’infirmer le jugement déféré, de :

1) à titre principal, déclarer M. [B] et la société Imoconseil irrecevables en leur demande de paiement,

2) subsidiairement, prononcer la nullité du mandat de vente sans exclusivité,

3) plus subsidiairement, débouter M. [B] et la SAS Imoconseil de l’ensemble de leurs prétentions,

4) encore plus subsidiairement, dire que le montant de la clause pénale ne saurait excéder la somme de 1.200€,

5) en tout état de cause, condamner M. [B] et la société Imoconseil à lui payer des dommages-intérêts de 2.000€ pour procédure abusive, outre une indemnité de procédure de 4.000€.

Il développe la même argumentation que la SCI Finch Immobilier.

En dernier lieu, la SCI GNC demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté les demandes en indemnité de procédure et en dommages-intérêts pour procédure abusive formées à son encontre, de l’infirmer pour le surplus et de:

1) à titre principal, prononcer la nullité du mandat de vente sans exclusivité et débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes dirigées à son encontre,

2) subsidiairement, au regard du caractère non exclusif du mandat de vente, débouter les intimés de l’ensemble de leurs prétentions dirigées à son encontre,

3) plus subsidiairement, dire que le montant de la clause pénale ne saurait excéder la somme de 1.200€,

5) tout état de cause, condamner M. [B] et la société Imoconseil à lui payer une indemnité de procédure de 3.000€.

Elle explique que :

aucun bon de visite n’a été signé avec la SCI Finch Immobilier,

elle n’avait pas connaissance de ce que les époux [O], qui avaient précédemment visité le bien, étaient associés de la SCI Finch Immobilier.

Par conclusions récapitulatives du 12 septembre 2022, la SAS Imoconseil et M. [B] demandent à la cour de confirmer le jugement déféré sauf sur le quantum des sommes allouées et de :

1) à titre principal, condamner in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer la somme de 12.000€ répartie à 90% pour M. [B] et à 10% pour la société Imoconseil,

2) subsidiairement, condamner in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer à la société Imoconseil la somme de 12.000€,

3) en tout état de cause, condamner in solidum la SCI GNC, la SCI Finch Immobilier et M. [O] à payer à M. [B] :

1.000€ en réparation de son préjudice moral,

2.000€ de dommages-intérêts pour résistance abusive,

5.000€ d’indemnité de procédure en première instance et 3.000€ en cause d’appel.

Ils précisent que :

l’irrecevabilité de leurs demandes est soulevée pour la première fois à quelques jours de la clôture alors qu’ils justifient de la cession du fonds de commerce y compris la cession de la clientèle dont celle représentée par le contrat de mandataire immobilier de M. [B],

M. [O], qui a en réalité agi pour le compte de la SCI Finch Immobilier, a commis une faute délictuelle leur occasionnant un préjudice tenant à la perte de la rémunération qui leur revenait,

il est bien indiqué que le mandat de vente a été établi et signé en deux exemplaires,

en revenant à son bureau, M. [B] a enregistré le mandat en apposant le numéro 2170,

il en a remis un exemplaire régulier à la SCI GNC, de sorte que celui que celle-ci a produit est la copie initiale,

ils communiquent le registre des mandats sur lequel figure bien par ordre chronologique le mandat signé le 5 janvier 2017 et portant le numéro 2170,

seule la SCI GNC peut se prévaloir d’une nullité du mandat de vente,

M. [O], au regard de la teneur de ses SMS, est de parfaite mauvaise foi,

leurs préjudices ont été insuffisamment indemnisés.

La clôture de la procédure est intervenue le 4 octobre 2022.

MOTIFS

1/ sur la recevabilité des demandes de M. [B] et de la société Imoconseil

La fin de non-recevoir tendant à l’irrecevabilité des demandes de M. [B] et de la société Imoconseil pour défaut d’intérêt à agir est soulevée pour la première fois en cause d’appel.

Par application de l’article 789 alinéa 6 du code de procédure civile, le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir et les parties ne sont plus recevables à les soulever au cours de la même instance, à moins qu’elles ne surviennent ou ne soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état.

En l’état, il est constant que si le mandat de vente a été consenti à la société Imeo Développement, la présente action en paiement a été introduite par M. [B] et la société Imoconseil, de sorte que dès l’assignation, ces circonstances étaient connues des parties.

Par voie de conséquence, les appelantes sont irrecevables à soulever tardivement cette fin de non-recevoir.

2/ sur la nullité du mandat de vente

Par application de l’article 6 de la loi Hoguet du 2 janvier 1970, texte d’ordre public, ainsi que des articles 65 et 72 du décret d’application du 20 juillet 1972, l’agent immobilier doit, à peine de nullité, mentionner tous les mandats par ordre chronologique sur un registre des mandats, à l’avance côté sans discontinuité et relié, et reporter le numéro d’inscription sur l’exemplaire du mandat qui reste en possession du mandant.

La SCI GNC produit un mandat de vente sans exclusivité dépourvu de numéro d’enregistrement.

Le défaut de numéro porté sur le mandat constitue une irrégularité affectant la validité de celui-ci.

Dès lors, le préjudice invoqué par l’agent immobilier ne peut être réparé s’il trouve sa cause dans l’irrégularité du mandat qui lui est imputable.

Contrairement à ce que les intimés prétendent, la nullité peut être invoquée par toute partie y ayant intérêt et pas seulement par le signataire du mandat, la SCI GNC.

Ainsi, c’est à tort que le tribunal n’a pas retenu la nullité du mandat de vente du 5 janvier 2017 et a condamné sur la base de ce mandat irrégulier, les appelants à indemniser M. [B] et la société Imoconseil du préjudice qu’ils invoquent.

Le jugement sera infirmé et les intimés déboutés de l’ensemble de leurs prétentions.

3/ sur la demande de M. [O] en dommages-intérêts

En l’absence de démonstration par M. [O] de l’abus allégué à l’encontre des intimés et du préjudice qu’il subirait, il convient de rejeter cette demande en dommages-intérêts pour procédure abusive.

4/ sur les mesures accessoires

Aucune considération d’équité ne justifie de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin, M. [B] et la société Imoconseil supporteront les entiers dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Déclare M. [W] [O] et la SCI Finch Immobilier irrecevables en leur fin de non-recevoir pour défaut d’intérêt à agir élevée à l’encontre de M. [S] [B] et de la société Imoconseil,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Prononce la nullité du mandat de vente du 5 janvier 2017,

Déboute M. [S] [B] et la société Imoconseil de l’ensemble de leurs demandes,

Rejette la demande en dommages-intérêts pour procédure abusive de M. [W] [O],

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [S] [B] et la société Imoconseil aux dépens de la procédure tant de première instance qu’en cause d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame CLERC, président, et par Madame BUREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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