Bon de visite : 6 décembre 2022 Cour d’appel d’Angers RG n° 19/00859

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Bon de visite : 6 décembre 2022 Cour d’appel d’Angers RG n° 19/00859
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COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

LE/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 19/00859 – N° Portalis DBVP-V-B7D-EP2P

Jugement du 19 Février 2019

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d’inscription au RG de première instance 17/04196

ARRET DU 06 DECEMBRE 2022

APPELANTS :

Madame [V] [J] divorcée [A]

née le 23 Mai 1978 à [Localité 9] (61)

[Adresse 1]

[Localité 7]

Monsieur [O] [A]

né le 18 Décembre 1976 à [Localité 10] (14)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentés par Me Inès RUBINEL, avocat au barreau d’ANGERS, en qualité d’administratrice provisoire de Me Benoît GEORGE, associé de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau d’ANGERS

INTIMEE :

SARL ABI agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, exerçant sous l’enseigne TENDANCE IMMO

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Philippe LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 71190162, et Me Irène GABRIELIAN, avocat plaidant au barreau de NANTERRE

INTIMES SUR APPEL PROVOQUE :

Monsieur [B] [R]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Madame [E] [M] épouse [R]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentés par Me Christian NOTTE-FORZY, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 00070150, et Me Bertrand DENIAU, avocat plaidant au barreau d’ALENCON

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 12 Septembre 2022 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme MULLER, conseiller faisant fonction de présidente

M. WOLFF, conseiller

Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée

Greffière lors des débats : Mme LEVEUF

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 06 décembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MULLER, conseiller faisant fonction de présidente et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

~~~~

FAITS ET PROCÉDURE

M. [A] et Mme [J], propriétaires d’une maison d’habitation située lieudit [Adresse 12] (Sarthe) ont, fin février 2016, décidé de mettre en vente leur bien et signé avec plusieurs agences immobilières des mandats de vente sans exclusivité, dont la SARL ABI et la société MEG Agence.

Le 30 septembre 2017, les époux [R]-[M] ont signé, par l’intermédiaire de l’agence immobilière MEG, une offre d’achat dudit bien au prix de 190.000 euros net vendeurs.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 octobre 2017, les époux [A]-[J] ont informé la SARL ABI que leur bien avait été vendu.

Suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 4 octobre 2017, Mme [T], gérante de la SARL ABI, leur a demandé de préciser le nom et l’adresse de l’acquéreur, le nom du notaire chargé de régulariser l’acte authentique, le nom de l’agence éventuellement intervenue ainsi que le prix de vente final. Elle leur indiquait qu’à défaut de lui faire part de ces éléments, elle leur facturerait 7.000 euros d’indemnité compensatrice forfaitaire.

Elle leur rappelait en outre qu’en cas de vente intervenue sans son concours mais avec des acheteurs ayant eu connaissance du bien par l’intermédiaire de son agence, elle serait en droit de solliciter une indemnité de 14.000 euros.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 octobre 2017, la SARL ABI a adressé aux époux [A]-[J] une relance, ainsi qu’une facture de 7.000 euros au titre de l’indemnité compensatrice forfaitaire.

Par lettre du 20 octobre 2017, M. et Mme [A] ont transmis à la SARL ABI les informations sollicitées.

Suivant exploits des 8 décembre 2017, la SARL ABI a fait assigner M. [A] et Mme [J] épouse [A], ainsi que M. [R] et Mme [M] épouse [R], devant le tribunal de grande instance du Mans aux fins d’obtenir la condamnation des époux [A]-[J] au paiement de diverses sommes au titre de clauses pénales prévues au mandat de vente, pour avoir régularisé la vente par un autre intermédiaire, et s’agissant des époux [R] leur condamnation au paiement d’une somme à titre de dommages et intérêts pour les mêmes motifs. Cette instance a été enrôlée sous le n°17/4196.

Par actes d’huissier des 12 avril 2018, la SARL ABI a fait délivrer une assignation à M. [A] et Mme [J] épouse [A], ainsi qu’à M. [R] et à Mme [M] épouse [R] aux mêmes fins. Cette instance a été enrôlée sous le n°18/1293.

Les deux instances ont été jointes, par mention au dossier, pour se poursuivre sous le seul n° 17/4196.

Suivant jugement du 19 février 2019, le tribunal de grande instance du Mans a :

– déclaré irrecevable la demande tendant à voir annuler l’assignation,

– condamné M. et Mme [A] à régler à la SARL ABI la somme de 14.000 euros à titre de clause pénale,

– débouté la SARL ABI de sa demande tendant à voir condamner M. et Mme [A] à lui régler, en sus, une somme de 7.000 euros,

– débouté la SARL ABI de l’ensemble de ses demandes à l’encontre des époux [R],

– débouté M. et Mme [A] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– débouté M. et Mme [R] de leur demande de dommages et intérêts,

– débouté l’ensemble des parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné M. et Mme [A] aux dépens, dont distraction au profit de Me Guibert.

Par déclaration déposée au greffe de la cour le 30 avril 2019, Mme [J] et M. [A] ont interjeté appel de cette décision en ce qu’elle :

– a déclaré irrecevable la demande tendant à voir annuler l’assignation,

– les a condamnés à régler à la SARL ABI la somme de 14.000 euros à titre de clause pénale,

– les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– a débouté l’ensemble des parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– les a condamnés aux dépens, dont distraction au profit de Me Guibert ;

intimant dans ce cadre la SARL ABI (Tendance Immo).

Suivant conclusions déposées le 30 septembre 2019 et assignation délivrée le 10 octobre suivant, la SARL ABI a formé appels incident ainsi que provoqué à l’encontre des époux [R]-[M].

Ces derniers ont constitué avocat le 16 janvier 2020 et déposé des conclusions le 30 avril de la même année. Or suivant ordonnance du 25 novembre 2020, le conseiller en charge de la mise en état saisi d’un incident a déclaré ces écritures irrecevables.

L’ordonnance de clôture a été prononcée, en suite d’une demande de report, le 7 septembre 2022 et l’audience de plaidoiries fixée au 12 de ce même mois.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 5 juillet 2022, M. [A] et Mme [J] demandent à la présente juridiction de :

– les recevoir en leur appel et en leurs contestations et demandes, les y déclarant fondés et y faisant droit,

– débouter l’agence Tendance Immo en son appel incident et en l’ensemble de ses demandes dirigées à leur encontre,

– infirmer le jugement déféré en ses dispositions leur portant grief, en ce qu’il :

– les a condamnés à verser à l’agence Tendance Immo la somme de 14.000 euros à titre de clause pénale,

– les a déboutés de leur demande de condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– les a condamnés aux dépens de l’instance,

– confirmer le jugement déféré pour le surplus,

– dire et juger que les conditions de réalisation de la clause pénale, prévue par le mandat de vente simple du 8 septembre 2017, ne sont pas réunies,

– débouter, en conséquence, l’agence Tendance Immo de sa demande de condamnation au titre de la clause pénale,

A titre subsidiaire :

– dire et juger que l’indemnité prévue au titre de la clause pénale par l’article IX du mandat de vente du 8 septembre 2017 est manifestement excessive,

– réduire en les plus considérables proportions la somme qui pourrait être allouée au titre de la clause pénale, celle-ci ne pouvant excéder le tiers de celle contractuellement fixée par le mandat du 8 septembre 2017,

En toute hypothèse :

– condamner l’agence Tendance Immo à leur verser, par application de l’article 700 du Code de procédure civile, les sommes de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

– condamner l’agence Tendance Immo aux entiers dépens de première instance et d’appel, recouvrés dans les conditions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières écritures déposées le 7 septembre 2022, la SARL ABI exerçant sous l’enseigne Tendance Immo demande à la présente juridiction de :

Statuant sur l’appel interjeté par M. [A] et Mme [J] à l’encontre du jugement rendu le 19 février 2019 par le tribunal de grande instance du Mans :

– faisant droit à son appel incident

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– condamné M. [A] et Mme [J] à lui régler la somme de 14.000 euros au titre de la clause pénale figurant à l’article IX du mandat de vente signé entre les parties, du fait de la vente par un autre intermédiaire à un acquéreur ayant eu connaissance du bien par son intermédiaire,

– débouté M. [A] et Mme [J] de toutes leurs demandes fins et conclusions,

– infirmant pour le surplus

– condamner M. [A] et Mme [J] à lui régler au titre des clauses pénales prévues à l’article XI du mandat de vente les sommes de :

‘ 7.000 euros au titre de la violation de ladite clause (non prévenance dans les délais impartis)

‘ 2.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Statuant sur les demandes formées à l’encontre des époux [B] [R] dans le cadre de l’appel provoqué :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les époux [B] [R] de toutes leurs prétentions, fins et conclusions et notamment de leurs demandes de dommages et intérêts et d’indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– infirmer ledit jugement en ce qu’il a écarté ses demandes formées à l’encontre des époux [B] [R]

– dire et juger que les époux [B] [R] lui ont, par leur comportement duplice, causé un préjudice,

– condamner les époux [B] [R] à lui régler les sommes de :

– 5.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil,

– 2.500 euros au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamner in solidum M. [A] et Mme [J], ainsi que les époux [R] en tous les dépens dont distraction au profit de Maître Philippe Langlois (SCP ACR Avocats), avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du Code de procédure civile, aux dernières écritures, ci-dessus mentionnées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes en annulation de l’assignation et en réparation :

M. [A] et Mme [J] ont notamment interjeté appel de la décision en ce qu’elle a déclaré irrecevable la demande tendant à voir annuler l’assignation et rejeté leur demande en réparation. Aux termes de leurs dernières écritures, ils n’ont pas soutenu ces critiques de sorte que ces dispositions doivent être confirmées sans examen au fond.

Sur les demandes au titre de la clause pénale :

En droit, l’article 1231-5 du Code civil dispose que : ‘Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure’.

Par ailleurs l’article 78 du décret n°72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d’application de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d’exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et fonds de commerce, prévoit notamment que : ‘Lorsqu’un mandat est assorti d’une clause d’exclusivité ou d’une clause pénale, ou lorsqu’il comporte une clause aux termes de laquelle des honoraires seront dus par le mandant même si l’opération est conclue sans les soins de l’intermédiaire, cette clause ne peut recevoir application que si elle résulte d’une stipulation expresse d’un mandat dont un exemplaire a été remis au mandant. Cette clause, mentionnée en caractères très apparents, ne peut prévoir le paiement d’une somme supérieure au montant des honoraires stipulés dans le mandat pour l’opération à réaliser’.

Le premier juge a rappelé que les parties avaient régularisé un mandat non exclusif de vente le 8 septembre 2017, qui prévoyait notamment le versement d’une indemnité si le mandant concluait une vente sans l’intermédiation du mandataire mais avec un acquéreur qui lui avait été présenté par ce dernier. Or les échanges de messages entre l’agence ABI et les propriétaires établissaient que l’immeuble avait été visité par les époux [R] en présence des mandants, ces derniers étant postérieurement avisées de l’identité des personnes ayant procédé à cette visite. Par ailleurs, il a été constaté que si la contre-visite programmée le 28 septembre avec l’agence ABI a été annulée, le jour-même une visite était organisée pour les époux [R] par l’intermédiaire de l’agence MEG. Il en a donc été déduit que les mandants n’ont pas respecté leurs obligations contractuelles (non régularisation de la vente par une autre agence lorsque leur cocontractant leur a présenté les potentiels acquéreurs) de sorte qu’ils ont été condamnés au paiement de la somme de 14.000 euros au titre de la clause pénale. S’agissant de l’information du mandataire de l’intervention d’une vente, le premier juge a observé que, dès le 2 octobre 2017, les mandants avaient avisé leur cocontractante de la vente du bien de sorte que l’agence immobilière n’a pas poursuivi d’inutiles démarches en vue de la cession. Par la suite et le 20 octobre, les propriétaires ont délivré les informations quant à l’identité des acquéreurs etc…, de sorte que le mandant était avisé de l’ensemble de ces éléments dans le mois de la signature de la promesse d’achat. Dans ces conditions, il a été considéré qu’il n’était pas établi que les vendeurs avaient manqué à leurs obligations à ce titre, de sorte que la demande en paiement d’une somme de 7.000 euros a été rejetée.

Aux termes de leurs dernières écritures, les appelants indiquent, s’agissant de la somme de 7.000 euros, qu’ils ont adressé aux huit autres agences mandatés le même courrier les avisant de la cession du bien (le 2 octobre 2017). Ils précisent que seule l’agence intimée a sollicité des éléments complémentaires qu’ils ont communiqué dès le 20 octobre. Au cours de cette période, ils observent que l’intimée ne justifie de la réalisation d’aucune diligence aux fins de vente de leur bien. Ils indiquent, par ailleurs, avoir attendu le 20 octobre, correspondant au terme du délai de rétractation (L271-1 du Code de la construction et de l’habitation), pour adresser les éléments sollicités. Ils concluent donc à la confirmation de la décision de première instance, soutenant ne pas avoir manqué à leurs obligations contractuelles à ce titre. Concernant la clause pénale, les appelants rappellent que leur bien était en vente depuis le mois de février 2016 ; qu’ils avaient mandaté de nombreux agents immobiliers avant l’intimée, dont MEG Agence, aux fins de vendre le plus rapidement possible ; qu’au regard du nombre d’agences mandatées, les acquéreurs avaient pu constater que ce bien était proposé par plusieurs intermédiaires ; que ce sont les intimés qui ont choisi l’intermédiaire auprès duquel ils régulariseraient la vente de sorte qu’il n’ont pas à assumer la responsabilité de ce choix. Ils soulignent que si une visite par les époux [R] avait eu lieu en présence de l’appelante le 23 septembre 2017, il n’est pas démontré qu’elle avait connaissance de leur identité et cela alors même qu’aucun bon de visite n’a été signé. L’identité ne leur a été révélée que le 28 de ce même mois lorsqu’ils ont été informés de l’intervention d’une contre-visite. Cependant, les appelants soutiennent qu’à cette date, il ne pouvait être considéré que les époux [R] étaient des ‘acquéreurs’ au sens de la clause pénale. A ce titre, ils indiquent que cette clause ‘est particulièrement mal rédigée et ne permet pas une compréhension claire de l’obligation du mandant consommateur à l’égard du mandataire professionnel’. Ils soulignent en tout état de cause que parallèlement une visite avait été organisée par une autre agence, sans qu’ils ne soient informés de l’identité des personnes l’ayant sollicitée. Ils contestent les liens d’amitié qui les lieraient à un personnel de l’agence MEG, invoqués par leur contradictrice et précisent qu’au jour de la ratification de l’offre d’achat, ils n’avaient pas prêté attention aux noms, étant particulièrement éprouvés par le décès d’un proche. De plus, ils soulignent que l’essentiel de l’argumentaire développé par l’intimée repose sur le témoignage de l’une de ses salariées dont l’impartialité est très incertaine. Enfin, ils rappellent que la vente n’ayant pas abouti grâce à l’intermédiation de l’intimée, elle ne peut prétendre à commission, ce qui correspond cependant à ses prétentions.

Aux termes de ses dernières écritures l’intimée rappelle avoir été avisée par courrier du 20 octobre 2017 de l’intervention de la cession entre les appelants et les époux [R]. Ainsi, elle indique qu’est ‘démontrée en l’espèce une opération classique de ‘contournement’ mise en oeuvre en pleine collusion entre les vendeurs et les acquéreurs pour faire conclure la vente par une autre agence que celle qui avait fait procéder à la première visite’. Par ailleurs elle souligne que si l’agence MEG disposait d’un mandat depuis octobre 2016, ce n’est que 5 jours après avoir visité par son intermédiaire le logement, soit près d’un an après avoir reçu mandat, que l’autre mandataire a fait visiter le bien litigieux aux époux [R]. En tout état de cause, elle en déduit que l’antériorité de son intervention n’est pas contestée. Par ailleurs, elle souligne que lors de l’organisation de la contre-visite Mme [R] l’a avisée qu’elle avait constaté que ce bien était proposé par d’autres agences. Dans ces conditions, l’intimée indique s’être rapprochée de la venderesse qui l’avait assurée qu’elle régulariserait la vente par son intermédiaire. De plus, elle souligne que le 28 septembre, M. [R] l’a avisée, sans plus amples précisions, qu’ils n’étaient plus intéressés par cet immeuble. Enfin, sur la clause elle-même, elle indique qu’elle n’a pas été considérée comme imprécise par les premiers juges ; que son montant n’est pas disproportionné comme correspondant à la commission qui lui était due. Concernant son appel incident, elle précise que le délai de rétractation ne dispensait pas les appelants de leurs obligations d’information à son égard.

Sur ce :

En l’espèce, la convention litigieuse stipule notamment : ‘nous propriétaires nous interdisons de vendre sans votre concours, y compris par un autre intermédiaire, à un acquéreur qui nous aurait été présenté par vous, pendant la durée du mandat et deux ans après son expiration. En toute conformité avec le Code civil et les prescriptions d’ordre public de l’article 78 du décret n°72-678 du 20/07/1972, votre rémunération ou ‘commission’ sera dûe en cas de vente à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par votre intermédiaire, même si l’opération est conclue sans vos soins. (…)

XI Vente sans votre concours

Dans le cas de vente sans votre concours, nous nous engageons à vous informer immédiatement par [LRAR], en vous précisant les noms et adresses de l’acquéreur, du notaire chargé de l’acte authentique et de l’agence éventuellement intervenue, ainsi que le prix de vente final, ce, pendant la durée du présent mandat et deux ans après son expiration.

Clauses pénales : en cas de non respect de la clause ci-dessus, nous vous verserons une indemnité compensatrice forfaitaire correspondant à la moitié des honoraires convenus.

Par ailleurs, en cas de vente sans votre concours à un acquéreur ayant eu connaissance de la vente du bien par votre intermédiaire, ou de refus de vendre à un acquéreur qui nous aurait été présenté par vous, nous vous verserons une indemnité compensatrice forfaitaire égale aux honoraires prévus au présent mandat’.

En outre il n’est pas contesté que les intimés sont désormais les propriétaires de l’immeuble objet de ce mandat.

Il en résulte donc qu’ils en sont devenus les ‘acquéreurs’.

Par ailleurs, il est tout aussi constant que les intimés ont visité l’immeuble litigieux, par l’intermédiaire de l’agence partie à la présente procédure le 23 septembre 2017.

S’agissant du fait de savoir si l’appelante avait été avisée de l’identité de ces ‘visiteurs’, il doit d’une part être souligné que l’agent immobilier ne disposait pas des clefs de l’immeuble, de sorte que Mme [J] était présente lors de cette première visite.

De plus, si elle conteste avoir eu connaissance de l’identité des intimés lors de cette première rencontre, il n’en demeure pas moins qu’au-delà de l’attestation de son employée, l’intimée communique aux débats copie de messages (SMS) échangés entre sa subordonnée et l’appelante. Or la lecture de cette pièce laisse apparaître que le mardi 26 septembre à 18h09, l’appelante a été rendue destinataire de la missive suivante : ‘Bonsoir Mme [A] suite à ma visite de samedi 23 septembre après midi avec M. et Mme [R] de [Localité 11] je reviens vers vous, pouvons nous revisiter jeudi à 18 heures”.

Ainsi et peu important le caractère éventuellement partial de l’attestation dressée par Mme [H], salariée de l’intimée, il n’en demeure pas moins que le 26 septembre 2017, les appelants étaient non seulement avisés de la visite qui était intervenue mais également de l’identité des personnes étant venues, outre que l’appelante les avait rencontrés.

Il en résulte donc qu’en poursuivant la vente avec les intimés, qui n’avaient visité ce bien avec l’agence MEG que le 28 septembre 2017 (conformément au bon de visite produit), les appelants ont, en connaissance de cause, manqué aux obligations qu’ils avaient souscrites auprès de l’intimée, peu important à ce titre que seuls les acquéreurs en aient tiré un avantage en termes de ‘frais d’agence’.

Ainsi, les conditions de la clause pénale, qui ne contreviennent pas aux dispositions de la loi dite Hoguet s’agissant du droit à rémunération de l’agent immobilier, apparaissent réunies, en effet, alors même que les intimés ont eu connaissance du bien litigieux par l’intermédiaire de l’agence immobilière partie à la présente procédure, la vente a été conclue ‘via’ une seconde agence.

Il en résulte donc que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a condamné les appelants au paiement de la somme de 14.000 euros au titre de la clause pénale, ce montant n’apparaissant pas manifestement excessif, dès lors qu’il correspond au montant, contractuellement fixé, de la rémunération de l’agent immobilier.

S’agissant de la somme de 7.000 euros, il n’est pas contesté que, par courrier du 2 octobre, les appelants ont avisé l’intimée de la ‘vente’ de leur bien, sans plus amples précisions.

En suite de réclamations de l’agent immobilier, les vendeurs ont, suivant courrier du 20 octobre, précisé l’identité tant des acquéreurs et notaire instrumentaire que de l’agence ayant fait office d’intermédiaire à cette cession, ainsi que le prix de cette dernière.

Si effectivement, les appelants s’étaient engagés à ‘immédiatement’ aviser leur mandataire de l’intervention d’une ‘vente’ en précisant certains éléments, il doit être observé que les copies du mandat présentement communiquées, ne comprenant qu’une seule page des conditions générales, ne permettent pas d’identifier à quel stade est caractérisée une ‘vente’ : intervention de l’accord entre les parties, régularisation du compromis voire signature de l’acte authentique qui seule ouvre le droit à rémunération de l’agent immobilier.

Ainsi, au regard des éléments communiqués, il n’est pas démontré qu’en présentant l’ensemble des éléments visés au mandat par courrier du 20 octobre 2017, les mandants aient manqué à leur obligation de les transmettre ‘immédiatement’, de sorte que la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté cette demande.

Sur l’appel provoqué :

Le premier juge a rappelé que l’acquéreur n’a aucune obligation d’acheter le bien par l’intermédiaire de l’agent immobilier l’ayant fait visiter le premier. Par ailleurs, il a été considéré que ‘le seul fait de contracter avec un autre intermédiaire est l’expression du jeu normal de la concurrence et ne peut caractériser une fraude des acquéreurs cherchant à évincer l’agence immobilière initiale, avec laquelle ils n’étaient en rien engagés, de la commission due’.

Aux termes de ses dernières écritures l’agent immobilier indique que les écritures des appelants établissent tant l’existence d’une première visite réalisée par ses soins que la volonté des acquéreurs de ne pas contracter par son intermédiaire en raison d’un coût moindre auprès de l’agence MEG. Dans ces conditions, elle sollicite l’infirmation de la décision de première instance à ce titre et la condamnation des intimés au paiement d’une somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur ce :

Il est constant que toute demande en réparation suppose la démonstration d’un fait générateur de responsabilité pouvant être une faute, d’un préjudice ainsi que d’un lien de causalité entre les deux précédents éléments.

Or en l’espèce, l’agent immobilier se borne à solliciter l’allocation d’une somme de 5.000 euros sans même préciser la nature du préjudice qu’il affirme subir et qui ne serait pas déjà compensé par la clause pénale mise à la charge des vendeurs.

Dans ces conditions, la décision de première instance doit être confirmée en ce qu’elle a rejeté cette demande.

Sur les demandes accessoires :

Les appelants principaux ainsi qu’incident qui succombent en leurs prétentions doivent être condamnés aux dépens par moitié.

Dans ces conditions les demandes formées au titre des frais irrépétibles d’appel doivent être rejetées.

Enfin au regard de l’issue du présent litige les dispositions de la décision de première instance à ce titre doivent être confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal de grande instance du Mans du 19 février 2019 ;

Y ajoutant :

REJETTE l’ensemble des demandes formées en appel et fondées sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [O] [A] et Mme [V] [J] d’une part et la SARL ABI d’autre part aux dépens, chaque partie par moitié.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

C. LEVEUF C. MULLER

 


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