Bon de visite : 24 novembre 2022 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/01065

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Bon de visite : 24 novembre 2022 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/01065
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COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 24 Novembre 2022

N° RG 22/01065 – N° Portalis DBVY-V-B7G-HARC

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge de l’exécution de BONNEVILLE en date du 02 Juin 2022, RG 21/00372

Appelant

M. [K] [G] [R] [S] [L] dit [L]-[Y] se nommant [Y]

né le [Date naissance 2] 1958 à [Localité 9], demeurant [Adresse 1]

Représenté par la SELURL BOLLONJEON, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et la SARL BALLALOUD & ASSOCIES, avocat plaidant au barreau d’ANNECY

Intimées

S.A. BANQUE CANTONALE DE GENEVE (FRANCE) dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Clarisse DORMEVAL, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me François-Xavier AWATAR, avocat plaidant au barreau de LYON

S.A. BANQUE NEUFLIZE OBC, dont le siège social est sis [Adresse 4] prise en la personne de son représentant légal

Représentée par la SELARL F.D.A, avocat postulant au barreau de BONNEVILLE et l’ASSOCIATION BIARD BOUSCATEL, avocat plaidant au barreau de PARIS

-=-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 04 octobre 2022 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,

Et lors du délibéré, par :

– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

-=-=-=-=-=-=-=-=-=-

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique du 25 février 2014, la Banque cantonale de Genève a consenti à M. [K] [L] dit [L]-[Y], se nommant [Y], un concours financier aux fins de restructuration patrimoniale, d’un montant de 2.200.000 euros, d’une durée de quatre ans, devant être remboursé in fine au plus tard le 21 février 2018.

Ce prêt est garanti, pour un montant de 1.500.000 euros par l’inscription d’une hypothèque conventionnelle de premier rang sur un bien immobilier appartenant à M. [Y], à savoir un chalet d’habitation situé à [Localité 10] (Haute-Savoie), pour un montant de 700.000 euros par délégation d’un contrat d’assurance-vie, et par le nantissement d’un compte à terme de 150.000 euros destiné au paiement des frais financiers.

Le remboursement du prêt in fine devait intervenir grâce à la vente de biens immobiliers appartenant à M. [Y], à savoir une résidence secondaire dans le Var et un appartement à [Localité 12]. Ces ventes n’ont pas été réalisées dans le délai prévu et la banque prêteuse a consenti à M. [Y] une prorogation du crédit jusqu’au 21 février 2019.

Après plusieurs mises en demeure et paiement partiel de la créance de la banque par rachat d’un contrat d’assurance-vie pour 697.635,82 euros en octobre 2019, la Banque cantonale de Genève a adressé à M. [Y] une ultime mise en demeure le 19 novembre 2019, lui demandant de payer une somme de 1.607.069,82 euros, outre intérêts de retard.

Cette mise en demeure étant restée sans effet, par acte du 12 janvier 2021, la Banque cantonale de Genève a fait délivrer à M. [Y] un commandement de payer valant saisie immobilière du chalet sis à [Adresse 11], cadastré section AD n° [Cadastre 6] et [Cadastre 7], publié au service de la publicité foncière de [Localité 8] le 5 mars 2021, volume 2021 S, n° 12, pour avoir paiement de la somme de 1.681.198,08 euros en exécution de l’acte authentique du 25 février 2014.

Ce commandement a été dénoncé au conjoint de M. [Y] par acte du même jour.

C’est dans ces conditions que, par acte délivré le 6 avril 2021, la Banque cantonale de Genève a fait assigner M. [Y] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bonneville pour l’audience d’orientation du 20 mai 2021, en sollicitant la vente forcée du bien précité sur la mise à prix de 500.000 euros, selon cahier des conditions de la vente déposé au greffe le 8 avril 2021.

Cette assignation a été dénoncée le 7 avril 2021 à la Banque Neuflize OBC, créancier inscrit, qui a déclaré sa créance pour 170.395,57 euros.

M. [Y] a essentiellement sollicité un délai d’une année pour vendre amiablement un bien immobilier lui appartenant à [Localité 12], et subsidiairement à être autorisé à vendre amiablement le bien saisi.

Le créancier poursuivant s’est opposé à tout délai supplémentaire et à la proposition de vente amiable qui n’apparaît pas sérieuse.

Par jugement d’orientation contradictoire, rendu le 2 juin 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bonneville a :

fixé la créance de la Banque cantonale de Genève (France) à la somme de 1.681.198,03 euros,

déclaré M. [Y] irrecevable en sa demande de vente amiable de son bien immobilier parisien situé [Adresse 5],

débouté M. [Y] de sa demande de délais de paiement et de sa demande de vente amiable du bien saisi,

constaté que les conditions des articles L. 311-2 à L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies,

ordonné la vente forcée des biens saisis figurant au commandement de payer valant saisie, situés sur la commune de [Adresse 11], appartenant à M. [Y] sur la mise à prix de 500.000 euros,

fixé au jeudi 8 septembre 2022 à 14h00 la date de l’audience à laquelle il sera procédé à la vente forcée,

désigné l’huissier chargé de faire visiter les biens saisis et fixé les conditions de publicité de la vente,

validé les différents diagnostics immobiliers qui ont pu être établis ou qui seront établis avant le jour de la vente du bien saisi,

ordonné d’ores et déjà l’expulsion du saisi et de tous occupants de son chef des biens saisi,

condamné M. [Y] à verser, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3.000 euros à la Banque cantonale de Genève (France), créancier poursuivant, et 1.000 euros à la Banque Neuflize OBC, créancier inscrit,

condamné M. [Y] aux dépens de l’instance, ne comprenant pas les frais taxés.

Par déclaration du 20 juin 2022, M. [Y] a interjeté appel de ce jugement. Après autorisation délivrée par ordonnance de Mme la Première présidente de la cour d’appel de Chambéry le 8 juillet 2022, M. [Y] a fait assigner pour l’audience du 4 octobre 2022, selon la procédure à jour fixe, la Banque cantonale de Genève et la Banque Neuflize OBC.

Par conclusions notifiées le 3 octobre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, M. [Y] demande en dernier lieu à la cour de:

Vu l’article 1343-5 du code civil,

Vu l’article R. 322-15 du code des procédures civiles d’exécution,

A titre principal,

infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

– fixé la créance de la Banque cantonale de Genève (France) à la somme de 1.681.198,03 euros,

– déclaré M. [Y] irrecevable en sa demande de vente amiable de son bien immobilier parisien situé [Adresse 5],

– débouté M. [Y] de sa demande de délais de paiement et de sa demande de vente amiable du bien saisi,

– constaté que les conditions des articles L. 311-2 à L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies,

– ordonné la vente forcée des biens saisis figurant au commandement de payer valant saisie, situés sur la commune de [Adresse 11], appartenant à M. [Y] sur la mise à prix de 500.000 euros,

– fixé au jeudi 8 septembre 2022 à 14h00 la date de l’audience à laquelle il sera procédé à la vente forcée,

– désigné l’huissier chargé de faire visiter les biens saisis et fixé les conditions de publicité de la vente,

– validé les différents diagnostics immobiliers qui ont pu être établis ou qui seront établis avant le jour de la vente du bien saisi,

– ordonné d’ores et déjà l’expulsion du saisi et de tous occupants de son chef des biens saisi,

– condamné M. [Y] à verser, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 3.000 euros à la Banque cantonale de Genève (France), créancier poursuivant, et 1.000 euros à la Banque Neuflize OBC, créancier inscrit,

– condamné M. [Y] aux dépens de l’instance, ne comprenant pas les frais taxés.

Statuant à nouveau,

constater que M. [Y] offre de régler à titre d’acompte à la Banque cantonale de Genève une somme de 1.000.000 euros,

octroyer des délais de grâce à M. [L]-[Y] pour lui permettre de régler le solde de la créance, en application de l’article 1343-5 du code civil,

A titre subsidiaire,

autoriser M. [Y] à vendre amiablement son bien immobilier de [Localité 10] objet de la présente procédure de saisie immobilière au prix plancher de 3.500.000 euros,

infirmer la décision déférée en ce qu’elle a alloué à la Banque cantonale de Genève et à la Banque Neuflize OBC des indemnités au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

les débouter de toutes demandes de ce chef,

condamner la Banque cantonale de Genève à verser à M. [Y] une somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner la Banque cantonale de Genève aux entiers dépens qui seront recouvrés pour ceux d’appel par la selurl Bollonjeon, avocat associé, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées le 22 septembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la Banque cantonale de Genève demande en dernier lieu à la cour de :

Vu les articles R. 322-15 et suivants, L.311-2, L. 311-4 et L. 311-6 et R.322-5 du code des procédures civiles d’exécution,

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

En conséquence,

débouter M. [Y] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

condamner M. [Y] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens avec pour ceux d’appel application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me Clarisse Dormeval, avocat.

Par conclusions notifiées le 29 septembre 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la Banque Neuflize OBC demande en dernier lieu à la cour de :

dire et juger recevable et bien fondée la Banque Neuflize OBC en ses écritures et demandes,

prendre acte du rapport à justice de la Banque Neuflize OBC sur le litige persistant entre M. [Y] et la Banque cantonale de Genève,

débouter M. [Y] de toute demande qui serait dirigée contre la Banque Neuflize OBC,

confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné M. [L]-[Y] au paiement de la somme de 1.000 euros en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

condamner toute partie succombant aux entiers dépens.

La Banque cantonale de Genève a été autorisée à déposer une note en délibéré afin de répondre aux conclusions notifiées par l’appelant la veille de l’audience. Par note déposée le 11 octobre 2022, elle s’oppose aux délais de paiement désormais sollicités.

MOTIFS ET DÉCISION

La régularité de la procédure de saisie et le montant de la créance du poursuivant ne sont l’objet d’aucune contestation de la part du débiteur qui se borne à solliciter à titre principal un délai de grâce de deux ans pour payer la créance de la Banque cantonale de Genève, et, à titre subsidiaire, l’autorisation de vendre amiablement le bien saisi.

1/ Sur la demande de délai de grâce

En application de l’article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront un intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.

M. [Y] demande désormais un délai de deux ans pour s’acquitter de sa dette à l’égard de la Banque cantonale de Genève en faisant valoir que, ensuite de la vente d’un appartement dont il était propriétaire à [Localité 12], il dispose, après paiement intégral des créanciers inscrits sur ce bien (dont la Banque Neuflize), d’une somme de 1.000.000 euros qu’il offre de régler, et indique que pour le solde restant dû il est en négociations avec des établissements bancaires pour obtenir de nouveaux concours.

La Banque cantonale de Genève s’oppose aux délais sollicités en soulignant que M. [Y] n’a jamais payé la moindre somme volontairement, qu’il a déjà bénéficié de très larges délais de paiement, que depuis la vente intervenue le 26 juillet 2022 la seule proposition qu’il a faite à son créancier consiste en une nouvelle demande de prêt.

Si M. [Y] justifie avoir enfin pu vendre son appartement parisien, la cour ne peut que relever que cette vente, intervenue le 26 juillet 2022, n’a été portée officiellement à la connaissance de la banque que le 30 septembre 2022 avec la communication de l’attestation du notaire et le compte de vendeur (pièces n° 11 et 13 de l’appelant).

Il doit encore être souligné que ce n’est que par conclusions de la veille de l’audience que M. [Y] offre de payer la somme de 1.000.000 euros, alors même que le décompte du vendeur révèle un solde lui revenant de 1.414.000 euros (pièce n° 13).

Quant au paiement du solde de 681.198,03 euros, M. [Y] ne produit aucun document permettant de démontrer de quelle manière cette somme pourrait être payée. En effet, il ne justifie pas de ses revenus, et ne fait aucune proposition à l’exception de celle de solliciter de nouveaux prêts. Enfin, s’agissant des prétendues négociations avec des établissements financiers pour l’obtention de nouveaux concours, force est de constater qu’elles ne sont aucunement justifiées, aucune pièce n’étant produite à l’appui.

Ces éléments démontrent la mauvaise foi de M. [Y] qui n’a rien payé à la Banque cantonale de Genève depuis octobre 2019, pas même avant l’audience tenue devant la cour alors qu’il dispose de fonds conséquents.

La demande de délais de grâce ne peut qu’être rejetée.

2/ Sur la demande de vente amiable

En application de l’article R. 322-15 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge de l’exécution s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

M. [Y] sollicite à titre subsidiaire l’autorisation de vendre amiablement l’immeuble saisi au prix plancher de 3.500.000 €.

Toutefois, la cour ne peut que constater que l’appelant ne produit aucun nouveau mandat de vente de ce bien, alors que la Banque cantonale de Genève démontre que ce bien, pas plus que lors de l’audience devant le juge de l’exécution, ne figure sur le site des deux agences immobilières prétendument chargées de cette vente.

Ces deux mandats de vente, datés des 25 et 28 janvier 2022 (pièces n° 7, 8 et 12), ne sont par ailleurs accompagnés d’aucun avis de valeur ou estimation du bien, de sorte qu’il est impossible à la cour de vérifier le caractère raisonnable du prix demandé. Il n’est justifié d’aucun bon de visite, alors que la prétendue mise en vente date de plus de huit mois, ce qui ne peut que faire douter de la réalité de ces mandats, qui semblent de pure complaisance.

En conséquence, c’est à juste titre que le premier juge a rejeté la demande d’autorisation de vente amiable et le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Il convient de rappeler, comme l’a justement fait le premier juge, que le renvoi en vente forcée n’interdit nullement au débiteur saisi de procéder au paiement de sa dette, ou de réaliser la vente de son bien, avant l’audience d’adjudication pour mettre fin aux poursuites avec l’accord du créancier poursuivant.

3/ Sur les autres demandes

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la Banque cantonale de Genève la totalité des frais exposés en appel, et non compris dans les dépens. Il convient en conséquence de lui allouer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [Y] supportera les entiers dépens de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bonneville le 2 juin 2022 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [K] [L] dit [L]-[Y], se nommant [Y], à payer à la Banque cantonale de Genève la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel,

Condamne M. [K] [L] dit [L]-[Y], se nommant [Y], aux entiers dépens de l’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me Clarisse Dormeval.

Ainsi prononcé publiquement le 24 novembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.

La Greffière La Présidente

 


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