Bon de visite : 19 avril 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/15336

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Bon de visite : 19 avril 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/15336
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRÊT DU 19 AVRIL 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/15336 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOP2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Mai 2019 -Tribunal d’Instance de PARIS 17ème – RG n° 11-18-219056

APPELANT

Monsieur [O], [C], [D] [B]

né le 17 Juin 1973 à BRAZZAVILLE (CONGO)

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté et ayant pour avocat plaidant Me Vincent RIBAUT de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

INTIMEE

Société d’Economie Mixte ELOGIE SIEMP

N° SIRET : 552 038 200 00069

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Nicolas GUERRIER de la SCP NICOLAS GUERRIER ET ALAIN DE LANGLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0208

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. François BOUYX, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Michel CHALACHIN, président de chambre

Mme Marie MONGIN, conseillère

M. François BOUYX, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRÊT : contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Michel CHALACHIN, président et par Mme Cynthia GESTY, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 4 juillet 2016, la société Elogie-Siemp a donné à bail à M. [O], [C], [D] [B] un logement situé au [Adresse 1] dans le [Localité 2].

Le 12 février 2018, la société Elogie-Siemp a fait délivrer à M. [B] un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail.

Les causes du commandement n’ayant pas été réglées dans le délai de deux mois, la société Elogie-Siemp a fait assigner en référé M. [B] devant le tribunal d’instance de Paris le 18 mai 2018 afin d’obtenir la constatation de la résiliation du bail par l’effet de la clause résolutoire, l’expulsion de M. [B] et sa condamnation à lui verser le solde de l’arriéré locatif ainsi qu’une indemnité d’occupation.

À raison des contestations de M. [B], l’examen de l’affaire a été renvoyé au fond.

Par jugement du 28 mai 2019, cette juridiction a ainsi statué :

– Déboute M. [B] de ses demandes en paiement,

‘ Constate que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties le 4 juillet 2016, pour les lieux situés [Adresse 1], à [Localité 7] sont réunies à la date du 13 avril 2018,

– Condamne M. [B] à payer 1 848,09 euros à la société Elogie-Siemp, à la date du 3 avril 2019 (mars 2019 inclus), avec intérêts au taux légal à compter du 11 mai 2018,

– Condamne M. [B] à payer 900 euros à la société Elogie-Siemp en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Autorise M. [B] à s’acquitter de cette dette par 23 versements mensuels de 80 euros, en sus des loyers et charges courants, le 24ème versement devant solder la dette,

– Dit que le premier versement interviendra à la même date que le terme courant, à la première date à laquelle le loyer est exigible, qui suit la signification de la présente ordonnance,

– Suspend les effets de la clause résolutoire du bail dans la mesure de ces délais, et dit qu’en cas de respect de ces modalités, la résiliation du bail sera réputée ne jamais avoir été acquise,

– Dit qu’en cas de défaut de paiement d’une seule mensualité au titre du retard comme d’un seul terme courant comme il vient d’être dit :

la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible,

la clause résolutoire du bail sera réputée acquise,

son expulsion et celle de tous occupants de son chef, des lieux situés : [Adresse 1], à [Localité 7], sera poursuivie au besoin avec l’aide de la force publique, sous astreinte, deux mois après la délivrance d’un commandement de quitter les lieux conformément aux dispositions de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution, et que les meubles trouvés dans les lieux seront traités conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et suivants du même code,

les délais octroyés sur les dépens, seront caducs et ces sommes seront immédiatement exigibles,

– Condamne en outre dans ce cas M. [B] à payer à la société Elogie-Siemp une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer majoré des charges et accessoires qui auraient été dus si le bail n’avait pas été résilié (indexation annuelle incluse), jusqu’au départ effectif des lieux de tout bien, de toute personne et la remise des clés,

– Dit que le seul non respect des délais de paiement, pour les sommes dues au titre des dépens n’a pas de répercussion sur la clause résolutoire du bail,

– Condamne M. [B] aux dépens, comprenant le coût du commandement de payer du 12 février 2018.

Le 23 juillet 2019, M. [B] a interjeté appel de cette décision par déclaration reçue au greffe par la voie électronique.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 11 mars 2022, il demande à la cour de:

– Le recevoir en son appel et le dire bien fondé,

– Infirmer la décision entreprise,

Statuant à nouveau,

– Débouter la société Elogie-Siemp de l’ensemble de ses prétentions,

– Condamner la société Elogie-Siemp à payer à M. [B] les sommes suivantes :

– 11 093,68 euros au titre des loyers réglés sans contrepartie entre juillet 2016 et juillet 2017,

– 3 721,64 euros au titre des frais de remise en état du logement,

– 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner la société Elogie-Siemp aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 23 janvier 2020, la société Elogie-Siemp demande à la cour de :

Débouter M. [B] de l’ensemble de ses demandes,

Confirmer le jugement dont appel rendu par le tribunal d’instance de Paris le 28 mai 2019,

– Condamner M. [B] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que :

Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation.

Le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l’application de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000, dans sa rédaction applicable à l’espèce, précise en son article 2 que :

Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires :

3. La nature et l’état de conservation et d’entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ;

M. [B] reproche au tribunal d’avoir jugé que la bailleresse n’était pas responsable de la pathologie respiratoire sévère d’origine allergique, notamment aux produits contenus dans la plupart des peintures, dont il est affecté, alors qu’il avait informé la société Elogie-Siemp de cette situation particulière lors de la visite des lieux avant la signature du bail et qu’il avait insisté pour que les peintures ne soient pas refaites avant son entrée dans l’appartement.

Contrairement à ce que soutient la bailleresse, ces faits et leur chronologie sont établis tant par l’attestation de Mme [K], qui a assisté à la conversation téléphonique entre M. [B] et la gestionnaire du dossier, Mme [L], cette dernière ayant assuré au futur locataire qu’aucun travaux de peinture ne serait réalisé, que par la mention apposée par M. [B] sur le bon de visite selon laquelle la peinture de l’appartement ne devait pas être refaite, suivie de celle de la chargée de visites, Mme [V], indiquant : transmis à Mme [L] par mail + téléphone le 18 mai 2016.

Le bail a été signé mais les travaux de peinture ont tout de même été effectués et M. [B] a immédiatement développé une importante réaction allergique constatée tant par son médecin traitant et par le service de pneumologie de l’hôpital [6] qui le suit au long cours que par ses proches qui rapportent, dans les multiples témoignages précis et concordants versés aux débats : difficultés respiratoires et vertiges, démangeaisons, apparition de plaques rouges sur le visage, etc…

La société Elogie-Siemp a donc manqué à son obligation de délivrer un logement décent en faisant refaire la peinture des revêtements de l’appartement alors qu’elle s’était engagée à ne pas y procéder après avoir été informée en temps utile de la pathologie du futur locataire.

S’agissant du préjudice éprouvé par M. [B], ce dernier justifie avoir été dans l’obligation de quitter les lieux compte tenu de la sévérité de la réaction allergique pour séjourner en colocation à partir du mois de juillet 2016.

L’intimée indique avoir proposé de reloger son locataire sans toutefois produire aucune offre en ce sens, alors que rien ne démontre que l’appartement qui aurait pu lui être attribué n’était pas affecté du même défaut.

M. [B] est donc fondé à solliciter la suspension du paiement du loyer à compter du mois de juillet 2016 jusqu’au mois de juillet 2017, période à laquelle il a fait réaliser des travaux de peinture anallergique à ses frais dans une partie de l’appartement afin de pouvoir y vivre de façon toutefois précaire puisqu’il a été contraint d’installer son lit dans le séjour, ne pouvant financer la réfection totale des revêtements.

Le loyer étant de 853,36 euros et la période de suspension de treize mois, c’est la somme de 11 093,68 euros qui doit être versée au locataire au titre des loyers réglés sans contrepartie.

De ce fait, la clause résolutoire n’a pu produire ses effets, la somme de 3 721,04 euros visée dans le commandement de payer n’étant pas due.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, suspendu ses effets et, en cas de non respect des délais de paiement octroyés, ordonné l’expulsion du locataires et les autres mesures subséquentes.

Ainsi que le fait justement observer la société Elogie-Siemp, les travaux de peinture décrits dans le devis T.R. Déco pour un montant de 3 721,04 euros n’ont pas été réalisés, de sorte que seule la facture CGTP pour un montant de 2 388 euros peut-être retenue et mise à la charge de la bailleresse.

La bailleresse devra donc également verser à M. [B] la somme de 2 388 euros en remboursement des travaux de peinture réglés par lui.

Il lui sera également alloué la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, ayant été contraint de vivre de façon précaire en colocation puis dans son propre appartement et de subir les tracas générés par le déménagement de ses affaires personnelles à plusieurs reprises.

Il est enfin équitable de lui allouer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et la société Elogie-Siemp, qui succombe à l’instance en appel, sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau ;

Dit que la société Elogie-Siemp a manqué à son obligation de délivrer au locataire un logement décent,

Condamne en conséquence la société Elogie-Siemp à verser à M. [B] les sommes suivantes :

– 11 093,68 euros au titre des loyers versés sans contrepartie,

– 2 388 euros en remboursement des travaux de peinture,

– 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

Condamne la société Elogie-Siemp à verser à M. [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ou contraires,

Condamne la société Elogie-Siemp aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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