Bijouterie : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/01575

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Bijouterie : 5 juillet 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/01575

5 juillet 2023
Cour d’appel de Paris
RG
21/01575

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRÊT DU 5 JUILLET 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01575 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDE7V

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Juillet 2020 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – Section Commerce chambre 5 – RG n° F18/09344

APPELANT

Monsieur [H] [G]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Marie-hélène FOURNIER-GOBERT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

SELAFA MJA prise en la personne de Maître [B] [V] ès-qualités de liquidateur de la SA FRIED FRERES

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0223

Représentée par Me Sophie ETCHEGOYEN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1227

ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Stéphane MEYER, président, et Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Stéphane MEYER, président de chambre

M. Fabrice MORILLO, conseiller

Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère

Greffier : Mme Pauline BOULIN, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour.

– signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre, et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [G] a été engagé par la société FRIED FRERES selon contrat de travail à durée déterminée du 30 mai au 31 août 2005 en qualité de chauffeur livreur manutentionnaire.

A l’issue du terme, le contrat s’est poursuivi. Un contrat à durée indéterminée a finalement été régularisé le 7 janvier 2008.

La convention collective applicable est la convention collective nationale de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie et activités qui s’y rattachent du 5 juin 1970.

La société comportait plus de 11 salariés.

Par courrier du 14 novembre 2017, la société FRIED FRERES a convoqué Monsieur [G] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 28 novembre 2017.

Lors de cet entretien, il a été proposé au salarié d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

Monsieur [G] a adhéré au CSP et en conséquence, le contrat de travail a été rompu au terme du délai de réflexion légal, soit le 19 décembre 2017.

Par courrier daté du 7 décembre 2017 et reçu le 11 décembre 2017, l’employeur a notifié au salarié son licenciement économique à titre conservatoire.

Par jugement du 18 avril 2019, le tribunal de commerce de Paris a prononcé le redressement judiciaire de la société FRIED FRERES.

Par jugement du 6 novembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société et a désigné la SELAFA MJA, prise en la personne de Maître [V], es qualité de mandataire liquidateur.

Le 10 décembre 2018, Monsieur [G] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris et formé des demandes afférentes aux fonctions qu’il exerçait réellement, au non respect par la société du salaire minimum conventionnel pour ces fonctions, à la régularisation des documents de fins de contrat, au rappel de salaires, à l’exécution déloyale du contrat de travail, et enfin à son licenciement.

Par jugement du 15 juillet 2020, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté Monsieur [G] de l’ensemble de ses demandes, a débouté la société FRIED FRERES de sa demande reconventionnelle au titre des frais de procédure, et a condamné Monsieur [G] aux dépens.

A l’encontre de ce jugement notifié le 4 janvier 2021, Monsieur [G] a interjeté appel en visant expressément les dispositions critiquées, par déclaration du 2 février 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 mars 2023, Monsieur [G] demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

– déclarer l’arrêt à intervenir opposable à l’AGS CGEA IDF,

Sur la classification professionnelle et les rappels de salaire :

-Dire et juger qu’il occupe les fonctions d’Opérateur Niveau III échelon 4 et de constater le non-respect par la société du salaire minimum conventionnel pour cette fonction,

En conséquence,

-Ordonner à la SELAFA MJA ès qualité de liquidateur de la société FRIED FRERES, à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, la régularisation des documents de fin de contrat de travail relative à la qualification de son niveau et son échelon correspondant au poste réellement occupé,

-Fixer sa créance à faire valoir sur la liquidation judiciaire de la société comme suit :

– 10.159,60 € bruts à titre de rappels de salaires,

– 1.015,96 € bruts à titre de congés payés y afférent,

– 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Sur le licenciement :

A titre principal :

-Dire et juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

-Fixer sa créance à faire valoir sur la liquidation judiciaire de la société comme suit :

– 22.320 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 4.084,40 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 408,4 euros bruts à titre d’indemnité de congés payés y afférent,

A titre très subsidiaire :

-Constater la violation des critères d’ordre de licenciement,

En conséquence,

-Fixer sa créance à faire valoir sur la liquidation judiciaire de la société comme suit :

-22 320 euros à titre de dommages et intérêts pour inobservation des critères d’ordre de licenciement,

En tout état de cause :

-Constater la violation de l’obligation de réembauche par la société,

En conséquence,

-Fixer sa créance à faire valoir sur la liquidation judiciaire de la société comme suit :

-22 320 euros à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de réembauche, -Ordonner la rectification des bulletins de paie et attestation de chômage et la prise en charge par l’AGS, le cas échéant, des condamnations prononcées à l’encontre de la société,

-Condamner la SELAFA MJA à lui payer la somme de 2.800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues par voie électronique le 25 juin 2021, la SELAFA MJA ès qualité de liquidateur judiciaire de la société FRIED FRERES demande à la cour de :

-Confirmer le jugement entrepris,

-Débouter Monsieur [G] de toutes ses demandes,

-Le condamner aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions reçues par voie électronique le 29 juillet 2021, l’AGS CGEA IDF demande à la cour de :

-Lui donner acte des conditions et limites de l’intervention et de la garantie de l’AGS,

-Dire que la décision à intervenir ne sera opposable à l’AGS que dans les conditions, limites et plafonds de sa garantie,

-Confirmer le jugement entrepris

-Débouter Monsieur [G] de toutes ses demandes.

Subsidiairement, l’AGS demande de rejeter les demandes de fixation de créances et en tout état de cause, de réduire aux seuls montants dûment justifiés les montants des créances susceptibles d’être fixées.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 4 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

Sur la demande au titre des rappels de salaires relatifs à la classification professionnelle

Monsieur [G] soutient que s’il a été embauché à compter de 2005 en qualité de « chauffeur livreur manutentionnaire », il occupe en réalité depuis 2013 des fonctions de « responsable des expéditions et des livraisons », son sérieux et ses compétences ayant conduit son employeur à lui confier des responsabilités élargies, sans qu’un avenant à son contrat de travail ne soit toutefois formalisé, ni aucune évolution salariale réalisée.

Il expose que les fonctions qu’il exerce depuis 2013 sont celle d’Opérateur niveau III échelon 4 au regard de la convention collective, et qu’il convient en conséquence d’appliquer rétroactivement le salaire minimum afférent à ces fonctions, en opérant des rappels de salaires pour les années 2016 et 2017.

Le liquidateur de la société FRIED FRERES s’oppose à cette demande et fait valoir que le salarié ne prouve pas qu’il relevait d’une autre classification professionnelle que celle prévue contractuellement.

****

Il ressort du contrat de travail de Monsieur [G] que celui-ci a été embauché en qualité de chauffeur livreur manutentionnaire, catégorie professionnelle employé, catégorie III, coefficient 155.

L’avenant du 17 décembre 2007 relatif aux classifications professionnelles met en place une grille de classification et une nouvelle grille des salaires minima en relation.

L’avenant décrit des emplois repères choisis comme étant représentatifs. Dans son article 3.2.4., il fait état des positionnements par catégorie professionnelle :

« Les catégories professionnelles ouvriers, collaborateurs et employés relèvent des niveaux 1 à 4 de la classification.

Les catégories professionnelles techniciens et agents de maîtrise relèvent au minimum du niveau 4 de la classification.

La catégorie professionnelle cadres relève des niveaux 5, 6, 7 et hors catégorie de la classification. »

Le salarié revendique un poste au niveau III échelon 4.

Le niveau III est ainsi décrit dans l’avenant :

« Expertise Application : La contribution consiste à réaliser des opérations complexes

-Savoir-faire technique : effectue des opérations complexes nécessitant une réelle expérience dans le métier

-Autonomie intiative : choisit les meilleures solutions pour atteindre un résultat final technique

-Dimensions relationnelle : s’adapte à des solutions diverses dans la mise en oeuvre de son savoir-faire technique ».

L’échelon 4 suppose une maîtrise du poste du niveau considéré dans toutes les situations.

A l’appui de sa demande de classification, Monsieur [G] produit :

-des tableaux de remplacement datés des 28 août 2013, 10 octobre 2014 et 4 février 2016 indiquant que le salarié était en charge des expéditions et livraisons clients, et par qui il pouvait être remplacé en son absence,

-de nombreux échanges de mails de 2016 et 2017 attestant qu’il était l’interlocuteur en charge des expéditions tant pour les salariés de l’entreprise, auxquels il répondait sur les différentes problématiques liées aux expéditions de marchandises tant pour la France que l’international, que pour les différents transporteurs tels que DHL ou TNT,

-l’adresse mail qui lui était dévolue était « [Courriel 7] », ce qui confirme qu’il était en charge des expéditions au sein de la société.

Le liquidateur conteste la valeur probante des tableaux de remplacement produits au motif qu’ils ne comprennent pas l’en-tête de la société. Il ne soutient toutefois pas que Monsieur [G] aurait constitué un faux. Par ailleurs, le contenu de ces tableaux comporte des noms correspondant à l’organigramme de la société comportant lui une en-tête de cette dernière, et les nombreux échanges de mails confirment les fonctions occupées par Monsieur [G].

Au regard de ces éléments, il est établi qu’il n’exerçait plus, à compter de 2013, le poste de «  chauffeur livreur manutentionnaire » mentionné dans ses contrats de travail de 2005 et 2008, mais celui, ainsi qu’il le revendique, de salarié en charge des expéditions et réception de marchandises au sein de l’entreprise.

Il peut donc être retenu que Monsieur [G] avait un poste relevant du niveau 3 au sens de l’avenant du 17 décembre 2007 relatif aux classifications professionnelles. Par ailleurs, compte tenu de son niveau de maîtrise, puisqu’il est avéré qu’il gérait les problématiques tant en lien avec les salariés que les transporteurs, il sera retenu qu’il relevait de l’échelon 4, ainsi qu’il le revendique.

En conséquence, il convient d’infirmer la décision déféré en ce qu’elle a débouté Monsieur [G] de sa demande au titre au titre des rappels de salaires relatifs à la classification professionnelle, et statuant à nouveau, de fixer sa créance à faire valoir sur la liquidation judiciaire de la société comme suit :

– 10.159,60 € bruts à titre de rappels de salaires,

– 1.015,96 € bruts à titre de congés payés y afférent.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Monsieur [G] considère avoir subi un préjudice du fait de l’exécution déloyale du contrat de travail par son employeur, car malgré l’évolution de ses fonctions, la société FRIED FRERES n’a jamais modifié ni son contrat de travail ni sa rémunération. Il indique qu’outre le préjudice financier, cela lui a causé un préjudice moral dû à l’absence de reconnaissance.

Il ajoute que l’employeur s’est volontairement soustrait à son obligation de prévoir des entretiens d’évaluation, ce qui lui aurait permis de définir des objectifs et de reconnaître son évolution professionnelle.

****

En vertu de l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

S’agissant du grief de non prise en compte de l’évolution de ses fonctions, le salarié invoque un préjudice financier qui est déjà réparé par l’attribution de sommes relatives aux rappels de salaires relatifs à la classification professionnelle. Il n’établit pas de préjudice distinct, et notamment ne démontre pas avoir subi un préjudice moral du fait de l’absence de prise en considération de l’évolution de ses fonctions, dans la mesure où il ressort des mails produits qu’il était parfaitement reconnu dans son travail.

S’agissant du grief relatif au défaut de tenue des entretiens professionnel, la cour rappelle que l’employeur devait faire bénéficier le salarié d’entretiens professionnels tous les deux ans, tant en application de l’article L.6315-1 du code du travail qu’en vertu de l »article 7 de l’avenant du 7 décembre 2007 de la convention collective applicable. Ces entretiens devaient permettre de définir les objectifs quantitatifs et/ou qualitatifs à atteindre, d’examiner les perspectives d’évolution notamment en termes de qualifications et d’emploi, et de donner des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience, l’activation du CPF, les abondements de l’employeur à ce compte et le conseil en évolution professionnelle. En application de ces textes, chaque entretien donne lieu à un compte-rendu écrit avec copie remise au salarié.

En l’espèce, l’employeur ne justifie de la tenue que d’un seul entretien, de sorte qu’il sera retenu qu’il n’a pas respecté ses obligations au titre des entretiens. Toutefois, le salarié ne justifie d’aucun préjudice en lien. Il a en effet pu évoluer professionnellement au sein de l’entreprise, ainsi que vu plus haut, jusqu’à être en charge des expéditions de celle-ci, et a pu bénéficier, à sa demande lors de l’entretien qu’il a pu avoir, d’une formation en anglais.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il convient de confirmer la décision du conseil de prud’hommes en ce qu’elle a débouté Monsieur [G] de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le licenciement

Le salarié sollicite que son licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse aux motifs :

-à titre principal, qu’il a accepté le contrat de sécurisation professionnelle sans avoir été informé du motif économique pour lequel il était licencié au préalable,

-à titre subsidiaire, que l’employeur ne justifie pas du motif économique du licenciement, de la suppression de son poste, ni d’avoir respecté son obligation de reclassement.

– Sur le moyen tiré du défaut d’information du motif économique du licenciement avant acceptation du contrat de sécurisation professionnelle

Le salarié doit avoir reçu un document écrit mentionnant le motif économique avant d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle.

En l’espèce, Monsieur [G] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui s’est déroulé le 28 novembre 2017. Lors de cet entretien, il s’est vu remettre en main propre un lettre d’information relative au CSP, laquelle indiquait : « ce projet de licenciement repose sur les motifs suivants : réorganisation de l’entreprise aux fins de sauvegarde de la compétitivité de la société FRIED FRERES qui doit faire face en plus à de sérieuses difficultés économiques », sans autre précision.

Il a adhéré au CSP par courrier recommandé avec accusé de réception du 8 décembre 2017.

C’est uniquement dans la lettre lui notifiant son licenciement économique reçue par le salariée le 11 décembre 2017, soit postérieurement à l’acceptation du CSP, que l’employeur a exposé les motifs économiques du licenciement de façon détaillée, citant les chiffres d’affaires de la société, développant la crise que connaissait son secteur d’activité et exposant les efforts déjà faits par l’entreprise pour se redresser, sans succès.

Au regard du contenu de la lettre remise le 28 novembre 2017, qui ne comprend que des motifs économiques abstraits sans aucun développement circonstancié spécifique à la situation de l’entreprise, il ne peut être considéré que le salarié avait eu connaissance des motifs économiques de son licenciement avant d’adhérer au CSP .

En conséquence, il doit être retenu que le licenciement de Monsieur [G] est sans cause réelle et sérieuse, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les moyens invoqués à titre subsidiaire, de sorte que le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur les conséquences du licenciement

-Indemnité de préavis et congés payés afférents

A la date de la rupture, Monsieur [G] avait plus de deux années d’ancienneté et est donc fondé à percevoir une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire sur le fondement des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, soit la somme de 4.084 € sur la base du salaire correspondant à la classification adéquate du salariée, ainsi que l’indemnité de congés payés afférente, soit 408,40 €.

-Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Monsieur [G] justifie de 12 années d’ancienneté et l’entreprise emploie habituellement plus de 11 salariés.

En dernier lieu, il percevait un salaire mensuel brut de 2.042 €.

En application des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail, il est fondé à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 3 et 11 mois de salaire, soit entre 6.126 € et 22.462 €.

Au moment de la rupture, Monsieur [G] était âgé de 45 ans. Il ne produit pas d’élément relatif à sa situation professionnel à la suite de la rupture du contrat de travail.

Au vu de cette situation, et de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle il convient d’évaluer son préjudice à 22.000 €.

Le jugement du conseil de prud’hommes sera en conséquence infirmé et ces sommes seront fixées au passif de la société FRIED FRERES.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la violation des critères d’ordre

S’agissant d’une demande subsidiaire, elle ne sera pas examinée.

Sur la demande au titre de la violation de la priorité de réembauche

En vertu de l’article L1233-45 du code du travail, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat s’il en fait la demande au cours de ce même délai.

Dans ce cas, l’employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. En outre, l’employeur informe les représentants du personnel des postes disponibles.

Le salarié ayant acquis une nouvelle qualification bénéficie également de la priorité de réembauche au titre de celle-ci, s’il en informe l’employeur.

Le fait que le licenciement, prononcé pour motif économique, soit jugé sans cause réelle et sérieuse, ne rend pas inapplicable la priorité de réembauche.

En l’espèce, Monsieur [G] justifie avoir fait valoir sa priorité de réembauche par courrier du 29 décembre 2018.

L’employeur indique qu’il n’a proposé aucun poste car il n’a cessé de réduire son effectif et n’a effectué aucune embauche sur un poste que le salarié aurait pu occuper. Il produit la liste des entrées et sortie des salariés pour les années 2017 et 2018. Il en ressort que depuis le licenciement du salarié en décembre 2017, une salariée a été embauchée, Madame [R], le 9 avril 2018, soit dans le délai d’un an prévu par le texte susvisé. Or, l’employeur n’indique pas quel est le poste offert à Madame [R], ni pour quelle raison ce poste n’a pas été proposé à Monsieur [G].

Il est donc établi qu’il n’a pas respecté son obligation de réembauche, et que le salarié doit être indemnisé à ce titre.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé sur ce point et statuant de nouveau, il sera fixé au passif de la société FRIED FRERES la somme de 2.000 € de dommages et intérêts au titre du non respect de la priorité de réembauche.

Sur la demande de rectification des bulletins de paie et attestation de chômage

Il convient d’ordonner la remise d’un bulletin de salaire rectificatif, ainsi que d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt.

Sur la prise en charge par l’AGS

Il convient de déclarer le présent arrêt opposable à l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

L’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST devra faire l’avance de la somme représentant les créances garanties, à l’exception de l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera infirmé sur ces points.

En application de l’article L622-17 du code de commerce, les créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation, ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance.

La créance de dépens et de frais irrépétibles prend naissance dans le jugement qui la fixe. Si le jugement est postérieur à l’ouverture de la procédure collective. Pour être payée à échéance, elle doit répondre aux conditions posées par l’article L622-17 du code de commerce.

En l’absence de caractérisation des conditions requises, la créance de dépens et de frais irrépétibles ne peut faire l’objet que d’une fixation au passif.

En l’espèce, la liquidation de la société FRIED FRERES succombe, ce qui justifie qu’elle supporte la charge des dépens et une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ces créances de dépens et frais de procédure ne répondant pas aux conditions de l’article L.622-17 du code de commerce, elles seront fixées au passif de la liquidation.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire statuant publiquement par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Paris, sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [G] de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail,

Statuant à nouveau,

Dit que Monsieur [G] exerce depuis 2013 des fonctions d’Opérateur niveau III échelon 4 au sens de la convention collective applicable,

Dit le licenciement de Monsieur [G] sans cause réelle et sérieuse,

Fixe au passif de la liquidation de la société FRIED FRERES les sommes suivantes au bénéfice de Monsieur [G] :

-10.159,60 € bruts à titre de rappels de salaires et 1.015,96 € bruts à titre de congés payés y afférent,

-4.084 € d’indemnité de préavis et 408,40 € de congés payés afférents,

-22.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-2.000 € de dommages et intérêts au titre du non respect de la priorité de réembauche,

-2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne au liquidateur de la société FRIED FRERES la remise d’un bulletin de salaire rectificatif, ainsi que d’un certificat de travail et d’une attestation destinée à Pôle Emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt,

Fixe au passif de la liquidation de la société FRIED FRERES les dépens de l’instance,

Déclare le présent arrêt opposable à l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST,

Dit que l’UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST devra faire l’avance de la somme représentant les créances garanties, à l’exception de l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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